L’argument souvent avancé dans les débats contemporains pour justifier la colonisation israélienne de la Palestine repose sur un parallèle avec les crimes coloniaux commis par les États-Unis à l’encontre des populations autochtones. Laila Al-Marayati, par exemple, note que si aujourd’hui, la majorité des Américains ne justifient pas la destruction et l’expulsion de tribus indiennes en réponse aux attaques dites "terroristes" contre les convois de chariots, un appelant à une émission de radio syndiquée a néanmoins suggéré que si les Américains ne sont pas prêts à rendre quoi que ce soit aux Indiens, pourquoi les Israéliens devraient-ils restituer la terre volée aux Palestiniens ? Cette argumentation reconnaît certes le déni des droits des Indiens dans le passé, mais écarte l’idée d’un retour à la terre. Pourtant, tout comme l’argument des Juifs comparés aux Indiens, son objectif est de justifier les péchés originels du sionisme et la colonisation actuelle de la Cisjordanie.

Dans ce raisonnement, les Palestiniens sont relégués au rôle des Indiens, victimes d'une époque révolue, dépassée par le progrès d’une histoire linéaire, une autre démonstration puissante de la manière dont une mentalité coloniale permet à un peuple de s’approprier l’histoire sans en assumer la responsabilité. Cette logique trouve sa source dans un ethos de colonisation justifié par une vision divine de la possession et d’un droit démocratique à la terre. Cette vision met en évidence une hégémonie culturelle et idéologique, où la conquête est perçue comme un trait permanent de la conscience américaine moderne. Le sionisme a intégré cette conscience dans son désir de rendre normal, voire légitime, l’établissement de colonies et l’occupation militaire.

Les colons sionistes, tout comme les colons américains avant eux, se considèrent comme porteurs d’une culture distincte, accompagnée d’une économie néolibérale et d’une infrastructure militarisée. Le processus de colonisation est ainsi perçu non seulement comme inéluctable mais comme un phénomène déjà inscrit dans l’histoire. La restitution des terres aux Indiens est vue comme une absurdité, tout comme l’idée de permettre aux Palestiniens de conserver leurs terres. Dans une interview de 2013 avec le journaliste David Remnick, le chroniqueur du Ha’aretz, Ari Shavit, évoque l'importance de ne pas condamner les Israéliens ayant participé aux massacres de Palestiniens en 1948, affirmant que les crimes des États-Unis étaient bien plus graves. Il suggère que, tout comme l’histoire des États-Unis a fini par minimiser les crimes coloniaux, le nettoyage ethnique israélien, avec le temps, sera également relativisé.

Shavit semble ignorer ou minimiser la multiplicité des conflits sur le continent américain, qui continuent d’alimenter des luttes pour la décolonisation. En outre, les massacres sionistes ne se limitaient pas à Lydda et Ramle, mais s’inscrivent dans une série de violences systématiques qui continuent de marquer l’histoire de la Palestine. Son propos révèle une conception du passé où le temps efface la mémoire des victimes, effaçant ainsi la douleur actuelle des Palestiniens, tout comme l’histoire des crimes américains envers les peuples indigènes semble avoir été en grande partie oubliée.

Cette logique temporelle soulève des questions cruciales sur la manière dont l’histoire est écrite et comprise. Le temps n’efface pas les souffrances, et seule une reconnaissance des torts passés, accompagnée de mesures réparatrices, peut permettre de guérir les blessures du colonialisme. La tentative de Shavit de réduire les massacres israéliens à une simple question de temporalité montre la difficulté de certains à reconnaître que les injustices actuelles sont liées à une histoire qui n’a pas été réglée.

Ce phénomène dépasse les simples questions de culpabilité coloniale. Comme l'expliquent Stephen P. Gasteyer et Cornelia Butler Flora dans leur analyse comparative de la Palestine, de l’Iowa et de la Patagonie, la colonisation de ces territoires implique un processus de découverte, d’évaluation, de colonisation et de conquête. Ce processus de conquête repose sur un principe de domination, où la "sauvagerie" des peuples autochtones est perçue comme un obstacle à "civiliser", à "domestiquer" pour les adapter à la "progrès" d’une civilisation imposée. Ce récit colonial, qui décrit les autochtones comme des entités à conquérir, à expulser ou à éradiquer, n’est pas uniquement un produit du passé mais un héritage vivant dans les structures sociales et politiques des sociétés contemporaines.

La question qui se pose alors est celle de savoir comment confronter un État dont l’existence, par nature, assure la domination juridique et territoriale de ses communautés indigènes, et qui se légitime en tant qu’arbitre permanent du destin de ses sujets. Dans les récits interconnectés de la permanence coloniale aux États-Unis et en Israël, nous sommes confrontés à un ensemble de circonstances qui mettent en lumière ce problème. La possibilité d’imaginer un avenir en dehors de cette vision permanente de la dépossession, de l’expulsion et de l’aliénation des peuples originaux semble de plus en plus cruciale.

Il est essentiel de souligner que, malgré l’abondance des interactions entre les États-Unis et Israël, à travers la diplomatie, la culture et les échanges militaires, leur relation est avant tout de nature discursive et idéologique. En effet, un ethos de "Terre promise", profondément ancré dans la société américaine, joue un rôle énorme dans la façon dont les États-Unis se sont construits tant physiquement que philosophiquement. Tim Giago le souligne en notant que les premiers colons américains croyaient que c’était la volonté de Dieu (Destinée manifeste) de chasser les "païens" de la terre, une idée qui sous-tendait les politiques d’extermination et de déplacement des populations autochtones. Cet ethos, bien qu’antérieur à la création de l’État d’Israël, présuppose également la légitimité de cette création. Le vieux récit biblique d’Israël trouve une résonance dans le processus même de colonisation de l’Amérique du Nord, une notion qu’explore Steven Newcomb dans son ouvrage Pagans in the Promised Land. Il démontre que les formes de raisonnement dominantes utilisées pour justifier la conquête des terres autochtones sont souvent empruntées à des interprétations littérales des récits bibliques.

Les similarités entre les processus de colonisation en Palestine et en Amérique ne doivent pas être sous-estimées. Elles révèlent un modèle récurrent où la violence et l'injustice se justifient par des récits religieux et historiques qui continuent d’imprégner les sociétés contemporaines, justifiant l’expulsion des populations autochtones sous prétexte de "destinées supérieures".

L’Innocence Perdue et la Résistance: Une Exploration des Dynamiques de Pouvoir et de Souffrance à travers la Palestine et les Peuples Autochtones

Dans une analyse de la condition géopolitique actuelle, se maintenir dans la position d'un sous-développé géopolitique permet une forme d'innocence, dépourvue des impératifs brutaux du pouvoir. Les victimes d’hier, telles que celles de l’Holocauste, risquent de devenir les oppresseurs de demain, cherchant à étendre leur territoire sur des terres étrangères comme le Liban ou la Cisjordanie. Aujourd’hui, les Palestiniens se trouvent pris dans des camps de concentration modernes, victimes de cette dynamique historique. N'est-il pas possible de sortir de cette spirale de domination sans se retrouver à écraser autrui sous nos pieds ?

Cette réflexion trouve un cadre riche dans la question centrale soulevée par le poème, un cadre que l’écrivain Edward Said a magnifiquement illustré en qualifiant les Palestiniens de « victimes des victimes ». Une notion qui, comme l’indique Mahmood Mamdani dans When Victims Become Killers, soulève des interrogations profondes sur la transformation des oppressés en oppresseurs. La poésie de Revard, quant à elle, prend racine dans cette dynamique complexe, où la montée en puissance d’un groupe se réalise souvent au détriment d’un autre. Ce phénomène est universel dans les sociétés coloniales, où presque chaque colonisateur se définit, ou se définit par, sa fuite d’une forme quelconque de persécution.

La question du terrorisme est centrale dans le discours de Revard, qui remet en cause son application unidirectionnelle. Si, dans son usage commun, le terme désigne une violence destructrice qui cherche à supplanter les acquis des démocraties modernes, Revard le considère comme intrinsèque à la création de ces mêmes démocraties. Il semble suggérer que le terrorisme, loin d’être l’apanage de l’Autre, fait partie intégrante du processus historique de domination et de progrès. Le poème interroge ainsi ceux qui, au nom de la démocratie et du progrès, emploient la violence pour éradiquer ceux qu’ils désignent comme des terroristes.

L’ambiguïté du terme, et la manière dont il floute les contours entre oppresseurs et opprimés, force le lecteur à s’interroger sur sa propre position dans ce cadre global. Revard, par son usage de termes polysémiques, invite à une réflexion sur l’asymétrie du pouvoir. Il n’attaque pas directement les Palestiniens, mais semble interroger la logique de ceux qui se tiennent à l’écart de cette dynamique tout en la reproduisant. La transformation rapide des Juifs, de survivants des camps de concentration à leurs détracteurs et détenteurs du pouvoir, incarne parfaitement cette ambivalence tragique et paradoxale.

Cette tension entre persécution et domination se retrouve également dans le travail poétique de Lee Maracle, une militante engagée pour la libération de la Palestine, dont la poésie résonne avec les luttes des peuples autochtones. Dans son poème Song to a Palestinian Child, Maracle puise dans une symbolique de résistance et de solidarité. Elle évoque une enfant palestinienne, symbole de la résistance face à l’oppression, une figure qui, par son action, incarne l’esprit de rébellion. La voix de l’enfant qui appelle au loin fait écho à la connexion profonde entre les peuples colonisés, entre les terres où l’histoire de l’oppression se perpétue.

L’ambiguïté poétique de Maracle est frappante. Bien que la fille décrite semble indéniablement être palestinienne, la narratrice, tout en parlant de cette enfant, ne situe jamais explicitement son lieu d’origine. L’enfant pourrait tout aussi bien être une figure représentant tous les peuples opprimés, ou même une version jeune et lointaine de l'auteure elle-même, ou un être spirituel symbolisant la résistance universelle. L’absence de localisation géographique précise permet une déterritorialisation de la Palestine, la transformant en un symbole global de résistance contre l’injustice. Ce flou géographique enrichit le poème, en donnant une portée universelle à la lutte des Palestiniens, tout en soulignant la profondeur de la solidarité inter/nationale.

Le poème de Maracle repose sur une puissante dualité entre ce qui est vu et entendu, soulignant une connexion non seulement géographique mais aussi spirituelle entre les peuples. La narration évolue d’un sens auditif à un sens visuel, et enfin, à une interaction plus intime, marquée par des gestes symboliques comme le lever du poing et l’offrande d’une branche d’olivier. Dans cette vision, l’enfant, loin d’être un simple objet de compassion, devient un acteur actif, un symbole de résistance qui force l’auteure à prendre position.

À travers cette métaphore de la branche d'olivier et de l'arme, Maracle pose la question du choix: résister passivement avec dignité ou répondre à la violence par la violence? Mais au-delà de la simple opposition, elle invite le lecteur à repenser les rapports de pouvoir et la manière dont les peuples colonisés réagissent face à l’histoire de la domination et de l’exploitation. Il s’agit ici d’un appel à la prise de conscience collective et à la solidarité entre les différentes luttes pour la liberté.

La poésie de Maracle, comme celle de Revard, s’ancre dans une réalité où les dynamiques historiques se répètent, mais se modifient à chaque génération. Les peuples qui subissent la violence du colonialisme, qu'ils soient Palestiniens, Autochtones ou autres, partagent une expérience commune de résistance. Cependant, la question reste ouverte : peut-on s’élever sans écraser les autres, sans devenir ce que l’on dénonce ? Ce poème, tout comme les réflexions plus larges sur le colonialisme et ses effets, pousse à la réflexion sur le coût de la liberté et sur le rôle de l’implication individuelle dans des luttes globales.

L'interconnexion des systèmes sociopolitiques indigènes et des vicissitudes de la démocratie descendante

Les systèmes sociopolitiques indigènes entretiennent une relation complexe et dynamique avec les réalités de la démocratie descendante, une interaction dans laquelle le présent dialogue constamment avec le passé. Ce dialogue n'est pas seulement une tentative de récupérer une mémoire culturelle, mais aussi une technique vitale de survie physique. Le passé offre à l'indigène une connaissance intime de ce que signifie « être libre », un état difficile à retrouver dans les contextes de domination coloniale, où la mémoire et l'histoire ont souvent été effacées ou réécrites. La réflexion sur ce passé permet aux peuples indigènes non seulement de préserver leur identité, mais aussi de se maintenir dans le monde présent, où les structures de pouvoir continuent d’entraver leur autonomie.

L’importance de cette mémoire est particulièrement évidente dans le contexte de la poésie, où les poètes palestiniens et indigènes se croisent. Dans l’œuvre de Darwish et celle de Means, l'identité indigène et palestinienne se croisent, se transforment et se nourrissent mutuellement, soulignant l’interconnexion de leurs luttes. Darwish, par exemple, dans son poème « The ‘Red Indian’s’ Penultimate Speech to the White Man », évoque une coexistence difficile, voire un compromis né d’un désespoir face à une violence coloniale omniprésente. Son poème ne se contente pas de dénoncer ; il offre aussi un espace d’imagination pour le dialogue avec un colonisateur dont la propre compréhension de la liberté et de la terre reste insuffisante.

Le poème de Darwish s’inscrit dans une réflexion sur l’impossibilité de réconciliation entre l’industrie moderne et les traditions indigènes. L’appel à vivre avec les vestiges du colonialisme, à accepter ce qui reste de la terre après son pillage, ressemble à une forme de résistance passivement affirmée. Cette idée trouve une résonance particulière dans les écrits de Carter Revard, qui parle de « survivance » — un terme qui allie à la fois survie et résistance. Il ne s’agit pas simplement d’une réaction à l’assimilation ou à l’effacement, mais d’une affirmation constante d’une existence en marge des puissances dominantes. La « survivance » ne se limite pas à l’acte de subsister, mais inclut aussi un refus de la soumission totale, une reconquête de la dignité et de l’identité à travers une lutte continue contre l’oubli.

Dans ce contexte, l’approche de Means va plus loin en affirmant, avec une urgence accrue, l’inévitabilité d'une réponse palestinienne — rapide et décisive, comme l’éclair. Ce n’est pas une simple représentation poétique de la colère ou de la frustration, mais une déclaration de résilience qui met en lumière la mémoire comme une arme de résistance. L’idéologie coloniale, dans cette dynamique, est non seulement une menace pour les peuples indigènes, mais aussi un vecteur de déshumanisation. Le narrateur de Means se distingue par sa capacité à comprendre et à agir selon une logique de résistance purement indigène, un retour immédiat et sans compromis à la terre et aux traditions.

Dans « The ‘Red Indian’s’ Penultimate Speech to the White Man », la réciprocité entre colonisateur et colonisé se dépeint à travers une série de métaphores naturelles. L’idée de « prendre ce que l’on veut, mais laisser quelque chose derrière pour que nous puissions survivre » est à la fois une tentative de compromis et une reconnaissance de l’injustifiable nature de la colonisation. Cette vision du monde est une illustration poignante de ce que l’on pourrait appeler une forme de survivalisme métaphysique, où l’héritage culturel, même dans sa dégradation, reste un fondement de la résistance.

En parallèle, le poème de Darwish fait état de l’incapacité du colonisateur à saisir la profondeur de la relation des indigènes avec leur terre. Dans le cadre de la poésie palestinienne, l’occupation israélienne et la perte des terres ancestrales résonnent avec l’expérience coloniale des peuples indigènes américains. La structure même du poème de Darwish, qui rappelle celle de l’œuvre de Euripide, semble montrer que, tout comme Médée revient chez elle pour conquérir son pays natal, les peuples colonisés finiront par revenir sur leurs terres, non pas pour s’y soumettre, mais pour les reconquérir.

L’une des plus grandes forces de la poésie indigène réside dans sa capacité à transformer cette mémoire de résistance en un acte esthétique de transgression. Elle ne se contente pas de parler de souffrance, mais revendique une alternative à l’ordre du monde imposé par les colonisateurs. La poésie devient ainsi un espace où les conflits ne sont pas seulement exprimés, mais aussi reconfigurés dans une perspective de renversement. Ce processus de réécriture de l’histoire, de revendiquer une nouvelle subjectivité, est essentiel pour comprendre les luttes des peuples indigènes et palestiniens, qui, par le biais de la mémoire et de la poésie, cherchent à redonner sens à leur existence face à l’effacement systématique de leur culture et de leur histoire.

La poésie, dans ce cadre, dépasse l’instrumentalisme et devient un moyen de reconstruire une identité, de repenser la relation entre l’indigène et son environnement, et de questionner l’hégémonie coloniale. L’un des aspects les plus importants dans cette dynamique est de comprendre que ces luttes, bien qu’éloignées géographiquement, partagent des racines profondes. La résistance à l’occupation, que ce soit en Palestine ou chez les peuples indigènes, repose sur des bases similaires : une revendication de la mémoire, une insistance sur l’autonomie, et un refus de l’effacement.

Pourquoi l'étude des peuples autochtones américains est-elle essentielle pour la solidarité avec la Palestine ?

L'évocation de la Palestine dans la poésie autochtone reste un phénomène relativement récent, bien que certains poètes autochtones aient toujours montré un engagement envers des causes pan-indiennes. Cette convergence de préoccupations politiques et culturelles, bien que moderne, cherche à déconstruire les paradigmes de la modernité. Le concept même de « poésie autochtone » se heurte à la difficulté de définir un ensemble cohérent de critères, car les cartographies de l’expression autochtone, orale et écrite, échappent aux classifications rigides des historiens littéraires américains. C’est précisément cette complexité inhérente qui rend l’approche inter/nationale utile, en mettant l’accent sur l’élargissement des possibilités dialogiques plutôt que sur la réduction des enjeux à un vocabulaire pragmatique néolibéral.

L’utilisation de la Palestine dans la poésie autochtone révèle plusieurs éléments significatifs. Lorsque les poètes autochtones mentionnent ou explorent la Palestine, c'est souvent comme un mode de réflexion sur eux-mêmes, une manière de repenser la notion de l'indigène, tant au niveau de l’identité personnelle que collective. La relation entre la Palestine et l’Amérique, dans ce contexte, devient un vecteur symbolique puissant. Palestine, dans cette perspective, devient non seulement un espace géographique, mais aussi un symbole universel de la lutte pour la survie nationale et la libération. Le poème autochtone, nourri par ces symboles, cherche à renouveler et réinventer les notions de soi et de société, à la fois sur le plan culturel et politique, dans un contexte de résistance.

Il convient de noter que cette approche ne se limite pas à un simple parallélisme entre les luttes des Palestiniens et celles des peuples autochtones des Amériques, mais s'inscrit dans un cadre plus large de décolonisation et de solidarité internationale. Les luttes pour la souveraineté et l’autodétermination des peuples autochtones partagent des similitudes profondes avec la lutte palestinienne, et cette reconnaissance permet de briser les frontières établies entre les différents mouvements de libération. En ce sens, la poésie et les écrits des peuples autochtones fonctionnent comme un moyen de réactiver cette conscience de l’interdépendance des luttes, loin des visions étriquées des politiques nationales ou régionales.

Dans le cadre plus vaste de l’étude des relations internationales et des luttes de décolonisation, l'étude des peuples autochtones américains offre des perspectives essentielles pour comprendre la solidarité avec la Palestine. Ce champ d’étude se révèle crucial pour les actions de solidarité, notamment à travers les questions de la liberté académique, de la gouvernance universitaire, de l’influence des donateurs et de la répression des opinions radicales. Ces problématiques doivent être abordées en tenant compte de la logique coloniale qui structure encore aujourd'hui les institutions universitaires. Les récentes controverses universitaires autour de la solidarité avec la Palestine, par exemple, devraient être vues à travers le prisme des luttes de décolonisation, y compris les questions spécifiques liées aux peuples autochtones.

Les universitaires et militants palestiniens qui omettent souvent de s’engager sérieusement avec les études autochtones américaines et indigènes se limitent dans leurs analyses et théorisations. Une approche complète de la solidarité palestinienne doit reconnaître que ces luttes s’inscrivent dans un contexte global de colonialisme et de décolonisation. En ignorant l’importance de l'étude des peuples autochtones dans ce cadre, on prive la solidarité avec la Palestine d’un axe d’analyse puissant qui pourrait en enrichir et en étendre les principes.

La solidarité, dans un cadre académique, ne se limite pas à des discours ou à des manifestations publiques. Elle peut prendre la forme de réflexion théorique, d'intervention pédagogique ou d'analyse critique des structures de pouvoir. La solidarité avec la Palestine doit, en outre, interagir avec les luttes pour la décolonisation et les mouvements de libération qui traversent le monde entier. Les discussions sur la Palestine dans le contexte académique ne peuvent pas se limiter à la seule question palestinienne ; elles doivent aussi prendre en compte les réalités de la décolonisation et de la résistance partout où elles se manifestent.

Il est impératif de voir la solidarité avec la Palestine non seulement comme une réponse aux violences coloniales que subit ce peuple, mais aussi comme un élément d'une lutte plus large pour l'émancipation des peuples autochtones. La clé de cette analyse réside dans la reconnaissance des liens de solidarité qui traversent les frontières géographiques et politiques, reliant les peuples dans leurs luttes communes pour la dignité, la liberté et l’autodétermination.