Les déformations du cinquième métatarsien, telles que la déformation de type bunionette, représentent un défi clinique important, particulièrement lorsqu'elles deviennent résistantes aux traitements non chirurgicaux. Lorsque les symptômes sont réfractaires aux approches conservatrices, l'intervention chirurgicale devient nécessaire. Cependant, la réussite de ces interventions dépend de nombreux facteurs techniques et anatomiques.

Les ostéotomies du cinquième métatarsien, en particulier les ostéotomies obliques et modifiées, sont couramment utilisées pour corriger ces déformations. Plusieurs auteurs ont modifié l'ostéotomie oblique pour améliorer la stabilité biomécanique, notamment avec l'ostéotomie de Ludloff inversée. Cette approche théorique offre l'avantage d'appliquer une force de compression sur l'ostéotomie, plutôt qu'une force de distraction, ce qui pourrait améliorer les résultats à long terme. En parallèle, l'ostéotomie de DRP, une technique percutanée décrite par Mariano De Prado, permet une correction plus contrôlée de la déformation avec une petite coupe médiale, préservant le côté latéral de l'os.

Les complications post-opératoires sont une réalité inévitable dans ce type de chirurgie. L'insuffisance de fixation interne ou une mauvaise gestion des tissus mous peuvent entraîner une instabilité ou une non-union de l'ostéotomie. Il est essentiel de préserver l'apport sanguin dans la tête du cinquième métatarsien, principalement alimentée par la face médiale. Un mauvais traitement des tissus mous, particulièrement une dévascularisation excessive, peut mener à une nécrose avasculaire (AVN), une instabilité ou une défaillance de la fixation. Les erreurs techniques, telles que l'implantation incorrecte de la vis ou une mauvaise orientation de l'ostéotomie, peuvent également être responsables d'échecs chirurgicaux.

Un autre facteur à considérer est la gestion de la translation du fragment distal. Les erreurs dans la correction de la position du métatarsien peuvent entraîner des complications telles que la metatarsalgie de transfert, un problème fréquent après une ostéotomie mal réalisée. Les ostéotomies de type distal ont un taux élevé de complications, principalement dues à des mouvements non contrôlés du fragment osseux. Les ostéotomies plus proximales offrent un meilleur pouvoir de correction de l'angle IM (intermétatarsien), mais avec un risque accru de non-union si la vascularisation est compromise.

Les techniques de chirurgie minimalement invasive, bien qu'encourageantes, ne sont pas exemptes de défis. Malgré des résultats prometteurs, en particulier pour les déformations de type I et II, il existe une tendance vers des malunions dorsales qui rendent cette méthode difficilement recommandable comme technique de routine sans plus de données de suivi. La guérison osseuse après une chirurgie percutanée peut également être plus lente que prévu, et il est essentiel de surveiller de près les signes de consolidation radiographique, qui peuvent être retardés de plusieurs semaines par rapport aux signes cliniques.

En présence de kératose plantaire intractable, l'ostéotomie doit permettre une élévation contrôlée de la tête du cinquième métatarsien. Cette élévation est généralement plus importante dans les ostéotomies proximales. Il est crucial d'éviter une translation dorsale excessive, car cela peut conduire à une metatarsalgie de transfert. L'orientation de la coupe ostéotomique influence directement l'étendue de la translation, et plus elle est inclinée, plus l'élévation du fragment sera importante.

L'importance d'une fixation interne stable ne peut être sous-estimée. En cas de fixation insuffisante, il y a un risque accru de déplacement et de mauvaise consolidation, ce qui compromet le résultat à long terme. Les ostéotomies de la base du cinquième métatarsien, bien qu'efficaces pour les déformations sévères, comportent un risque de non-union en raison de la complexité de la vascularisation dans cette zone. Ainsi, la fixation interne, notamment avec des vis appropriées, est essentielle pour garantir la stabilité de l'ostéotomie et prévenir les complications.

La sélection correcte de l'ostéotomie en fonction du type et de la gravité de la déformation est également cruciale. Les ostéotomies plus proximales, telles que l'ostéotomie de Chevron proximal, peuvent offrir une plus grande capacité de correction des angles et de la déformation, mais elles nécessitent une évaluation attentive de la vascularisation et des tissus environnants. Dans les cas de déformation sévère, une ostéotomie de la base du cinquième métatarsien peut être envisagée, mais elle doit être effectuée avec une grande prudence en raison du risque de non-union.

Enfin, il est important de souligner qu'une mauvaise gestion post-opératoire peut affecter le résultat final. Les bandages postopératoires doivent maintenir l'angle inter-métatarsien et assurer que le cinquième orteil soit dans la position correcte durant les premières semaines après l'intervention. Le respect de ces principes de base, couplé à une fixation adéquate, peut améliorer les résultats cliniques.

Quelle est l'importance de la prise en compte des complications et des techniques de réamputation dans les amputations traumatiques des membres inférieurs?

Les amputations traumatiques des membres inférieurs posent des défis considérables en matière de gestion chirurgicale, notamment lorsqu’il s'agit de respecter des hauteurs d'ostéotomie ou de traiter des lésions très proximales. Dans de tels cas, le respect de la hauteur préconisée pour l'amputation peut devenir difficile, car cela dépend largement de l'état des tissus et de leur viabilité. Par conséquent, le consentement chirurgical doit impérativement mentionner les risques de complications, la nécessité d'une révision en milieu hospitalier, et même la possibilité d'une nouvelle amputation en cas de complications imprévues. En effet, les amputations traumatiques des membres inférieurs présentent un taux de complications élevé, ce qui est souligné par l'étude de Low et al. [9]. Parmi ces complications, le syndrome de compartiment est un facteur prédictif majeur, augmentant non seulement le taux de complications mais aussi la durée de l'hospitalisation, ainsi que le taux de révision des amputations.

Lors de l’amputation d’un membre inférieur, le chirurgien doit également se soucier de l’esthétique et de la fonctionnalité du moignon pour faciliter l’adaptation à une prothèse. Une des méthodes proposées par Lobos [10] vise à éviter les cicatrices épaisses et les "oreilles de chien" dans la zone de charge prothétique en modifiant la technique classique de "bouche de poisson". Cette approche consiste à modeler les flaps de manière à ce qu'ils se referment en imitant la forme d’une balle de tennis, où les deux bords des flaps s’embrassent pour former une fermeture ronde. Cette technique permet une coaptation parfaite des bords, minimisant ainsi la formation de cicatrices dans la zone de support et réduisant l’apparition des "oreilles de chien", souvent gênantes pour le port de la prothèse.

La procédure peut également être accompagnée de drains, mais ceux-ci sont rarement nécessaires selon Lobos. En outre, la longueur osseuse de 15 cm à partir du tubercule tibial, souvent recommandée, est respectée tout en modifiant la forme des flaps pour garantir une fermeture cylindrique parfaite du moignon. Cette approche minimise non seulement les cicatrices mais aussi les risques de complications post-opératoires. Il est également important que le plan musculaire soit bien maintenu pour éviter toute nécrose.

En ce qui concerne les amputations du pied, l'amputation au niveau de la cheville, connue sous le nom de "Chopart", est une première ligne de disarticulation. Ce type d’amputation conserve l'articulation de la cheville tout en permettant un appui sur la plante du pied. Bien qu’elle offre des avantages évidents, comme la préservation de l'articulation et l'absence de différence de longueur avec le membre contralatéral, elle comporte également des risques. L'un des plus grands défis est l’équilibre entre les muscles du complexe gastrocnémien et soléaire, pouvant entraîner une perte de dorsiflexion du pied, affectant ainsi la marche. Cette amputation est fréquemment indiquée en cas de dommages vasculaires importants, souvent dus au diabète, ou après des traumatismes graves. Les ligaments qui stabilisent cette articulation, notamment ceux reliant le calcanéus à l'astragale et à la naviculaire, sont cruciaux pour maintenir l'intégrité fonctionnelle de l'articulation après la disarticulation.

Une autre approche notable dans les amputations du pied est la technique de Pirogoff, qui conserve le tubercule calcanéen et le fusionne avec le tibia après une rotation de 90°. Cette méthode réduit l'abrègement du pied, mais une compression sur le talon peut survenir si elle n'est pas correctement gérée, ce qui peut affecter la capacité d’appui.

Les amputations du pied et du membre inférieur en général, qu’elles soient au niveau du tibia, de la cheville ou du pied, ont pour objectif principal de préserver la fonction et l’appui du membre, tout en minimisant les complications et les pertes de longueur. Dans ce contexte, il est impératif que le chirurgien prenne en compte non seulement la viabilité des tissus mais aussi les techniques qui permettront de réduire au minimum les cicatrices et de favoriser une réhabilitation rapide et efficace.

Les patients doivent également être informés de la complexité de ces interventions et des risques inhérents, ce qui inclut non seulement les complications physiques mais aussi les impacts psychologiques et sociaux liés à l’amputation. Une bonne gestion post-opératoire, avec un suivi attentif des complications possibles, est essentielle pour maximiser la qualité de vie du patient. De plus, le rôle des prothèses dans ce processus doit être intégré dans la rééducation fonctionnelle, car elles jouent un rôle crucial dans la récupération de la mobilité et de l’autonomie.

Pourquoi l'examen échographique du pied et de la cheville est-il essentiel chez les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde ?

L'impact de la polyarthrite rhumatoïde (PR) sur les articulations du pied et de la cheville est un sujet d'importance croissante, non seulement en raison des effets débilitants de la maladie sur la fonction de marche, mais aussi à cause des complications souvent sous-estimées qui touchent ces régions. Le pied, en particulier, demeure l'une des principales causes d'incapacité fonctionnelle chez les patients souffrant de cette pathologie. Une étude menée par Grondal et al. (2008) a révélé que parmi 1 000 patients atteints de PR, les douleurs et les déformations au niveau du pied sont les plus courantes et affectent directement la qualité de vie des patients. Les symptômes peuvent aller de l'arthrite inflammatoire locale à des déformations sévères, rendant le diagnostic précoce et le suivi thérapeutique d'autant plus importants.

Les recherches récentes sur l'utilisation de l'échographie, notamment l'étude menée par Gutierrez et al. (2016), ont démontré que l'examen échographique des articulations du pied et de la cheville est un outil précieux dans l'évaluation des signes inflammatoires. L'échographie permet de détecter plus efficacement que la radiographie traditionnelle les signes précoces d'inflammation ou de destruction articulaire, notamment au niveau des petites articulations comme les orteils. Ce type d'imagerie est particulièrement utile pour identifier les lésions synoviales et les érosions, qui peuvent souvent précéder les symptômes cliniques visibles. Cela offre l'opportunité de traiter la maladie à un stade plus précoce, améliorant ainsi les perspectives fonctionnelles à long terme des patients.

Les atteintes du pied dans la PR se manifestent souvent par une combinaison de déformations mécaniques et de dysfonctionnements des tendons. Une étude de Michelson et al. (1994) a observé des troubles dans le tendon tibial postérieur, ce qui a des conséquences sur la biomécanique du pied, créant une instabilité qui contribue à l'aggravation des symptômes. Le développement d’arthropathies dégénératives au niveau du pied, telles que des déformations du premier métatarsophalangien (Hallux valgus), est également un phénomène courant. Ces anomalies sont souvent aggravées par la combinaison de l'inflammation persistante et des traitements médicamenteux à long terme, qui peuvent affecter la santé osseuse.

Les méthodes d’imagerie modernes comme l’échographie et l'IRM permettent également de mieux comprendre la répartition de la synovite et des lésions dans le pied. Une étude de Loveday et al. (2012) a montré que l’échographie est plus sensible que la radiographie pour évaluer les signes d’arthrite dans le pied, en particulier dans les cas de PR avancée. Les érosions et les ostéophytes, qui étaient autrefois difficiles à diagnostiquer, peuvent maintenant être visualisés avec une grande précision, offrant une meilleure évaluation de la progression de la maladie.

Les déformations du pied liées à la PR peuvent également conduire à des problèmes mécaniques qui affectent la marche. Selon l’étude de Seltzer et al. (1997), la dysfonction du tendon tibial postérieur est fréquente chez ces patients et contribue à la déformation de l'arche du pied. Ce phénomène engendre souvent des douleurs et des limitations fonctionnelles qui réduisent la qualité de vie. Par conséquent, une gestion proactive est essentielle, non seulement pour traiter l'inflammation, mais aussi pour prévenir les complications à long terme telles que la perte de mobilité.

Il est également important de souligner que les patients souffrant de PR au niveau du pied et de la cheville peuvent éprouver des troubles sensoriels, comme la perte de sensation dans certaines zones du pied. L’étude de Wilson et Kirwan (2006) a mis en évidence que la réduction de la sensibilité dans les pieds de ces patients peut les exposer à un risque accru de blessures, car ils sont moins capables de détecter des altérations mécaniques ou des lésions cutanées. Ce facteur contribue également aux chutes et à l'incapacité fonctionnelle à long terme.

L’évaluation clinique du pied dans la PR doit être globale et inclure non seulement l’analyse des signes visibles de déformation, mais aussi une évaluation précise à l’aide de l’imagerie et de tests fonctionnels. Une étude de Jeong et al. (2017) a montré que l'atteinte du médio-pied et du hindfoot joue un rôle important dans l’incapacité fonctionnelle des patients. Ces régions du pied sont souvent sous-évaluées, bien qu’elles contribuent de manière significative à la douleur et à la déformation globale du pied.

En termes de traitement, plusieurs options chirurgicales et conservatrices existent pour traiter les complications du pied dans la PR. Les interventions chirurgicales peuvent inclure des ostéotomies, des arthroplasties ou des reconstructions pour rétablir la fonction du pied et de la cheville. Une étude de Ortega-Avila et al. (2019) a revu les approches chirurgicales et a souligné l'importance d'une évaluation préopératoire complète à l’aide de l’échographie pour garantir un choix thérapeutique optimal. Cependant, les traitements médicamenteux, notamment les antirhumatismaux modificateurs de la maladie (ARMM), sont également essentiels pour contrôler l’inflammation et prévenir l’aggravation des lésions articulaires.

Le suivi des patients atteints de PR, en particulier pour les troubles du pied, nécessite une approche multidisciplinaire incluant les rhumatologues, les chirurgiens orthopédistes et les kinésithérapeutes. L’adaptation des traitements en fonction de l’évolution des lésions articulaires, ainsi que l’utilisation d'appareils orthopédiques pour soulager la pression sur les articulations touchées, sont des éléments clés dans la prise en charge.

Traitement des lésions ostéochondrales du talus : Grafts homogènes et thérapies cellulaires régénératives

Les lésions ostéochondrales du talus, surtout lorsqu'elles dépassent les 3 cm2 ou sont accompagnées de kystes sous-chondraux de grande taille, posent un défi clinique majeur. Lorsque ces lésions deviennent non contenues ou affectent l'épaule du talus, il devient difficile d'utiliser le greffon ostéochondral autologue, avec un risque accru de mauvais résultats. Dans ce contexte, le recours au greffon ostéochondral homogène (allogreffe), provenant d'un cadavre frais, apparaît comme une option intéressante, notamment en raison de l'absence de morbidité dans la zone donneuse et de la possibilité d'intégrer des cellules viables dans le greffon.

La greffe ostéochondrale homogène permet de traiter des lésions ostéochondrales étendues en fournissant un tissu de cartilage viable et un os sous-chondral normal. Cependant, la cryopréservation, utilisée pour conserver ces greffons, entraîne une diminution importante du nombre de chondrocytes viables, avec une survie cellulaire ne dépassant pas 20 à 30 % après deux semaines de congélation. Cela signifie qu'il est impératif de réaliser la procédure dans un délai très court après la décongélation du greffon, généralement moins de deux semaines.

L'un des obstacles majeurs à l'utilisation de cette méthode est la transmission potentielle de maladies et les réactions immunologiques indésirables. De plus, l'intégration du greffon dans le lit récepteur et l'alignement correct avec la structure anatomique du talus peuvent être difficiles. Dans une étude menée sur 17 patients traités par greffe homogène, 29 % des cas ont échoué, bien que ces échecs n’aient pas entraîné de dégradation immédiate du pronostic pour d'autres interventions, telles que la réarthrodèse ou l'arthroplastie totale de la cheville.

Les résultats cliniques de cette procédure varient, et le taux de réussite des greffes homogènes reste inférieur à celui des greffes autologues. Il est donc essentiel que cette méthode soit considérée principalement comme un traitement de secours pour les lésions ostéochondrales larges ou pour celles ayant échoué à d'autres traitements. Bien que l’allogreffe ostéochondrale montre des résultats prometteurs, il faut rester prudent quant à son efficacité à long terme, en tenant compte du risque d’échec (30 %) et du besoin fréquent de procédures secondaires (40 %).

En parallèle, une autre approche, la thérapie cellulaire régénérative, notamment l'implantation autologue de chondrocytes (ACI), est de plus en plus utilisée. Cette technique, développée pour la première fois en 1994, consiste à prélever un petit fragment de cartilage sain du patient pour isoler et cultiver des chondrocytes en laboratoire. Après une période de culture de trois à six semaines, les cellules cultivées sont implantées dans la zone lésée. Ce procédé repose sur la création d'une chambre hermétique à l'aide d'un greffon de périoste qui maintient les cellules en place, ce qui permet aux chondrocytes de se fixer et de régénérer le cartilage.

L’ACI est recommandé principalement pour les lésions ostéochondrales récurrentes ou pour celles supérieures à 2,5 cm2, avec ou sans kystes sous-chondraux. Ce traitement est particulièrement adapté aux patients jeunes, âgés de 15 à 55 ans, qui ne présentent pas de lésions dégénératives ou d'instabilité articulaire. Les résultats préliminaires sont encourageants, montrant des taux de complication relativement faibles, ce qui en fait une option de choix pour les lésions importantes et persistantes.

Néanmoins, certaines complications peuvent survenir, notamment en raison de l'hypertrophie ou du décollement des membranes de périoste utilisées pour couvrir les lésions. Ces complications, bien qu'elles soient relativement rares, peuvent affecter jusqu'à 33 % des patients. Une analyse de plusieurs études a confirmé une amélioration fonctionnelle significative, mais a également mis en évidence la diversité des résultats en raison des critères variables de sélection des patients et des différences dans les protocoles de traitement.

Pour rendre cette approche encore plus efficace et moins invasive, plusieurs tentatives ont été faites pour améliorer les matériaux utilisés pour l’implantation des chondrocytes. L’utilisation d’une combinaison de fibrine et de thrombine pour créer un gel à base de cellules cultivées permet de simplifier la procédure et de réduire le temps de récupération, en permettant une mobilisation précoce de la cheville sans risque de dégradation du greffon.

En fin de compte, bien que l’ACI et les greffes homogènes soient des options prometteuses pour le traitement des lésions ostéochondrales du talus, il est important de bien comprendre que ces techniques ne sont pas exemptes de risques. La complexité de ces interventions, leur coût et leur disponibilité, ainsi que le suivi postopératoire nécessaire, sont des éléments à considérer de manière rigoureuse lors de la décision thérapeutique.

Comment assurer une réduction anatomique et une fixation stable dans les fractures complexes du calcanéum ?

La réduction anatomique de l’articulation sous-talienne est une étape cruciale dans le traitement des fractures du calcanéum, souvent confirmée par des images fluoroscopiques bidimensionnelles jugées peu informatives sur le plan dynamique. Une fois cette réduction validée, l’ostéosynthèse est réalisée par l’introduction d’une ou deux vis indépendantes de 3,5 mm sous la facette postérieure, directement dans le sustentaculum tali. Cette fixation primaire permet de stabiliser la hauteur du talon et de corriger toute déformation en varus ou en valgus à l’aide d’une vis de Schanz, agissant comme un levier pour ajuster finement le fragment tubérositaire. Ce dernier est ensuite fixé temporairement au bloc articulaire par des broches de Kirschner.

L’étape suivante consiste à réduire le processus antérieur. La visualisation de l’articulation calcanéocuboïdienne, accessible par la partie antérieure de l’incision, permet de traiter toute incongruité articulaire en repositionnant les fragments déplacés, de manière congruente, en s’aidant de la facette articulaire du cuboïde comme gabarit. L’emploi d’un distracteur collinéaire entre le calcanéum et le cuboïde facilite la restauration de la longueur du processus antérieur et le contrôle précis de la réduction articulaire. Les fragments sont alors stabilisés provisoirement par des broches parallèles à la surface articulaire, introduites de façon latérale.

La fixation définitive du calcanéum se fait généralement par une plaque latérale anatomiquement préformée, positionnée sans pliure le long de l’axe longitudinal de l’os. Le choix entre plaques classiques, verrouillées ou polyaxiales dépend de la morphologie fracturaire et de la qualité osseuse, bien que les études biomécaniques n’aient pas démontré de supériorité claire des plaques verrouillées. La fixation commence par des vis non verrouillées afin d’augmenter la friction entre la plaque et l’os sous-jacent, évitant ainsi tout déplacement latéral pouvant irriter les tendons péroniers. La plaque est fixée par deux vis dans le processus antérieur, la partie thalamique sous la facette postérieure, et la tubérosité. Après fixation, toutes les broches de Kirschner, à l’exception de celles subchondrales destinées à la stabilisation des petits fragments, ainsi que la vis de Schanz, sont retirées. La qualité finale de la réduction est vérifiée par fluoroscopie selon plusieurs incidences, voire par une fluoroscopie 3D intra-opératoire dans les cas complexes. En cas de doute persistant, un scanner postopératoire est recommandé pour une évaluation plus précise.

Dans les fractures-luxations du calcanéum où le fragment corporel associé à la tubérosité et la majeure partie de l’articulation sous-talienne sont déplacés en bloc vers le haut et latéralement, l’approche latérale extensile classique est inefficace en raison de l’intégrité de la paroi latérale et de la nécessité d’une dissection tissulaire excessive. Une extension de l’approche sinus tarsi, débutant au niveau de la fibula distale, permet un accès direct à l’articulation sous-talienne déplacée par le haut. Cette approche peut être étendue en arrière pour exposer la pointe fibulaire et le rétinaculum péronier, ainsi qu’en avant pour accéder au processus antérieur et à l’articulation calcanéocuboïdienne selon une ligne utilitaire latérale.

Lors de l’incision cutanée, les tendons péroniers luxés apparaissent sous-cutanés en avant de la malléole latérale et sont protégés par une lanière souple. L’articulation latérale calcanéenne disloquée et la ligne fracturaire primaire sont alors exposées. L’entrée sur cette dernière se fait par la facette postérieure à l’aide d’un ostéotome ou d’un élévateur lisse, permettant de rabattre latéralement la portion articulaire sous le talus. En cas de présentation retardée, l’utilisation d’un distracteur collinéaire, avec des broches fixées dans la fibula distale ou le talus et la tubérosité calcanéenne, est recommandée pour faciliter la réduction. Le nettoyage des fragments et débris, notamment au niveau du processus latéral du talus souvent fracturé, est impératif.

La réduction de la fracture intra-articulaire de la facette postérieure s’effectue sous vision directe. La compression des fragments principaux est réalisée à l’aide d’une pince à réduction pointue positionnée sur la paroi latérale et le sustentaculum, ce dernier accessible par une incision médiale minimaliste à travers la ligne sagittale fracturaire. La stabilisation provisoire est assurée par des broches introduites de latéral à médial. La fracture sagittale principale est consolidée par des vis de compression posées perpendiculairement à la ligne de fracture et parallèlement aux articulations sous-talienne et calcanéocuboïdienne. En présence d’une comminution importante du processus antérieur, une plaque additionnelle est fixée sur l’os cortical subchondral pour parfaire la fixation.

En cas de fracture luxation avec atteinte de la fibula distale due à l’impaction du fragment tubérositaire déplacé, une fixation des fragments fibulaires est nécessaire pour restaurer la stabilité latérale et prévenir les complications secondaires.

Il est essentiel de comprendre que la reconstruction anatomique du calcanéum ne repose pas seulement sur une réduction correcte des fragments osseux, mais également sur une restauration précise de la congruence articulaire et de la hauteur calcanéenne, ce qui conditionne la fonction du pied à long terme. Par ailleurs, l’absence d’indication claire pour le comblement des défauts osseux sous la facette sous-talienne, en raison de la physiologie particulière du triangle neutre où la trame trabéculaire est naturellement éparse, invite à privilégier une chirurgie respectueuse des tissus et une fixation stable plutôt qu’un recours systématique aux greffes osseuses.

La complexité des fractures-luxations impose une approche chirurgicale adaptée, souvent combinée à l’utilisation de techniques avancées d’imagerie peropératoire, pour assurer une réduction parfaite et une stabilisation durable. Le contrôle postopératoire doit intégrer systématiquement des examens tomodensitométriques afin de détecter d’éventuelles imperfections et optimiser la prise en charge fonctionnelle.