La mécanique quantique, tout comme la relativité, a bouleversé notre manière de comprendre l'univers. Contrairement à la physique classique, qui postule que les objets sont dotés de propriétés précises et observables, la mécanique quantique affirme que les objets quantiques, tels que les électrons, n'ont pas de caractéristiques définies en dehors de l'acte d'observation. Cette idée a été radicalement développée par Heisenberg, dont la renonciation à la représentation géométrique et continue des objets quantiques a ouvert la voie à l'un des changements les plus profonds de l'histoire de la physique.

Heisenberg a proposé que, contrairement aux objets classiques, les propriétés des objets quantiques ne sont pas observables par des instruments traditionnels. Au lieu de cela, ce sont les effets des interactions entre les objets quantiques et les instruments d'observation qui sont mesurés. Ces effets sont eux-mêmes définis par des probabilités de transition, qui ne sont pas liées à des trajectoires spécifiques ou à une représentation géométrique. En ce sens, la mécanique quantique se distingue fondamentalement de la physique classique, où chaque objet a des propriétés bien définies, indépendantes de l'observateur.

La théorie de Bohr, notamment sa conception du "saut quantique", avait déjà introduit une rupture avec la vision classique. Toutefois, cette rupture n'était pas aussi radicale que celle d'Heisenberg. Selon Bohr, les électrons dans un atome peuvent passer d'un état énergétique à un autre de manière discrète, mais il restait une certaine continuité dans la manière dont ces états étaient conceptualisés. Heisenberg, quant à lui, a abandonné la notion d'orbite électronique, préférant considérer ces transitions comme des "sauts quantiques", sans représentation géométrique ou physique des trajectoires des électrons.

Cette conception a profondément modifié le rôle de l'observation en physique. Dans les théories classiques et relativistes, l'observation et la mesure sont des activités qui permettent de découvrir des propriétés préexistantes des objets. En revanche, dans la mécanique quantique, l'observation ne fait pas que révéler une propriété; elle crée le phénomène observé. L'observateur, à travers l'instrument de mesure, participe à la "création" du phénomène quantique, qui ne peut exister en dehors de cette interaction. Ce processus est loin d'être intuitif, car il défie nos habitudes de pensée qui reposent sur la croyance que le monde existe indépendamment de notre perception.

Il est important de souligner que, bien que la mécanique quantique repose sur des principes probabilistes, cela ne signifie pas que l'univers quantique est régi par le hasard pur. Les probabilités quantiques sont des résultats mesurables, fondés sur les interactions des objets quantiques avec des instruments. Ces interactions sont décrites de manière précise par la théorie des probabilités, mais la question de savoir si elles révèlent une réalité objective sous-jacente reste une source de débat, en particulier avec des interprétations comme celle de Bohr et Heisenberg.

Les implications philosophiques de cette approche sont également considérables. Heisenberg, tout en rejetant une conception classique de la réalité physique, a exprimé une certaine tendance vers le platonisme. Cette vision, bien que subtile, suggère que la réalité ultime, en dehors de la mesure, pourrait être décrite par des objets mathématiques plutôt que par des entités physiques concrètes. Heisenberg lui-même, influencé par sa formation en classique, a été attiré par les idées de Platon, qui voyait dans les concepts mathématiques une forme de réalité pure, détachée des objets matériels.

Cependant, ce tournant quantique n'a pas été sans résistance. Einstein, par exemple, était farouchement opposé à la méthode de Heisenberg, qu'il considérait comme une forme de réduction du monde à une série de probabilités sans explication causale. Einstein défendait une vision réaliste et déterministe de l'univers, où les objets possédaient des propriétés indépendantes de l'observateur. Cette opposition entre les visions d'Einstein et de Heisenberg a été l'une des plus grandes batailles philosophiques du XXe siècle, un affrontement entre un réalisme déterministe et un réalisme probabiliste.

Ce débat, cependant, ne se limite pas à une simple question de philosophie. Il a des implications profondes sur la manière dont nous comprenons le monde. Les découvertes de la mécanique quantique ont non seulement redéfini la manière dont nous voyons l'atome, mais elles ont également montré que notre capacité à observer et à mesurer la réalité est conditionnée par des instruments qui, eux-mêmes, interagissent avec le phénomène observé. Cette interconnexion entre observation, mesure et phénomène quantique transforme le rôle de l'observateur, qui cesse d'être un simple spectateur pour devenir un acteur essentiel de la réalité qu'il explore.

Enfin, bien que la mécanique quantique offre un cadre extrêmement puissant pour prédire les résultats des expériences à l'échelle atomique, elle soulève également la question de l'accessibilité de la "réalité ultime". Peut-on, un jour, décrire le monde entre les événements quantiques par une représentation mathématique complète? Cette question reste ouverte, et il est probable que la réponse à cette interrogation pourrait un jour redéfinir notre compréhension de l'univers à un niveau fondamental.

Comment la théorie de Yang-Mills a façonné la topologie des variétés en quatre dimensions : Une étude sur l’interaction entre la physique et les mathématiques

La variété représente une généralisation vaste et radicale du concept de l’espace de couverture de Riemann. Cette extension découle, entre autres, de la possibilité de définir le groupe fondamental d’un espace topologique, tel qu’une surface de Riemann, de deux manières distinctes. D’abord, il peut être défini de façon plus géométrique, comme le groupe des classes d’équivalence des ensembles de toutes les boucles en un point donné, l’équivalence étant donnée par l’homotopie. En alternative, ce groupe fondamental peut également être défini comme un groupe de permutations des espaces de couverture. Dans ce cas, il se trouve être analogue au groupe de Galois de la clôture algébrique d’un corps, confirmant ainsi la généalogie de la cohomologie étale dans le cadre des travaux de Riemann et de Galois. La notion de cartes étales permet de définir suffisamment de jeux ouverts pour établir des groupes de cohomologie adéquats pour certains coefficients d'variétés algébriques sur des corps finis. Pour les variétés complexes, on retrouve les groupes de cohomologie standards avec des coefficients dans n'importe quel faisceau constructible.

La catégorie des mappings étales constitue un topos, un concept qui, pour le moment, représente la forme algébrique la plus abstraite de la spatialité en mathématiques. Ce concept a été perçu ainsi par Grothendieck lui-même, qui a comparé sa contribution à l'idée de l’espace en mathématiques à celle d’Einstein en relativité générale et à celle de Schrödinger en mécanique quantique (QM). Cette référence à Schrödinger n’est pas immédiatement évidente, mais elle peut être comprise comme faisant allusion au rôle des espaces de Hilbert dans QM, dans le cas de Schrödinger, des espaces de Hilbert infiniment dimensionnels, qui permettent de relier des événements dans l’espace physique réel représenté comme une variété tridimensionnelle. Ce parallèle souligne l’ambition de Grothendieck de transcender les conceptions traditionnelles de l’espace, créant ainsi une nouvelle forme de spatialité mathématique, plus flexible et plus générale.

Ce développement de la théorie des faisceaux étales et de la cohomologie a également motivé le concept de motif chez Grothendieck, bien que la théorie de Grothendieck-Teichmüller ait précédé les cohomologies étales. L’introduction de la notion de motif visait à regrouper différents objets géométriques sous un cadre plus abstrait, ce qui a permis d’étendre la théorie des variétés algébriques et de structurer les relations entre elles d’une manière plus sophistiquée et plus unifiée.

Un aspect fondamental de la relation entre les mathématiques et la physique au 20e siècle est l'influence de la théorie quantique des champs (QFT) sur la topologie moderne, en particulier dans le contexte des théories de Yang-Mills et de la topologie des variétés en quatre dimensions. Cette influence se manifeste dans l’étude de la structure lisse des variétés de dimension quatre, qui est unique en son genre. Non seulement la dimension quatre est la seule où la variété R4\mathbb{R}^4 possède une structure lisse exotique, mais de plus, il existe une infinité de telles structures lisses exotiques pour cette dimension.

La théorie de Yang-Mills repose sur les symétries locales non abéliennes. Les concepts de symétries locales et spécifiquement de symétries de jauge ont joué un rôle central dans les théories des champs, tant classiques que quantiques, depuis l’électrodynamique de Maxwell, la première théorie connue fondée sur une symétrie de jauge. Un tournant majeur dans cette histoire au 20e siècle a été l’idée de Weyl, selon laquelle l'invariance sous le changement d'échelle ou de jauge pourrait constituer une symétrie locale de la relativité générale. Bien que la tentative de Weyl de fusionner la relativité générale et l’électromagnétisme ait échoué, cette idée a trouvé un nouveau souffle dans la mécanique quantique, avec des contributions de Pauli, Fock et d'autres.

Dans les années 1950, Yang et Mills ont introduit les théories de jauge non abéliennes, élargissant l’invariance de jauge de l’électromagnétisme, initialement basée sur le groupe de symétrie U(1)U(1), pour traiter les interactions fortes avec un groupe SU(2)SU(2) d’isospin agissant sur le doublet proton-neutron. Cette extension des symétries de jauge a conduit au développement de la théorie du modèle standard, qui décrit l’interaction faible, la forte et électromagnétique. Le modèle standard repose sur un produit tensoriel de trois groupes de symétrie U(1)×SU(2)×SU(3)U(1) \times SU(2) \times SU(3) et présente douze bosons de jauge : le photon, trois bosons faibles et huit gluons.

La théorie de Yang-Mills, particulièrement dans les années 1970, après la renormalisation de la théorie électrofaible, a suscité un renouveau en mathématiques, comme ce fut le cas pour la théorie de la relativité générale ou de l’électrodynamique quantique au siècle précédent. Cela a donné naissance à de nouvelles recherches en géométrie différentielle, notamment dans le domaine de la topologie des variétés en quatre dimensions. Ce domaine a permis d’explorer des structures de variétés dotées de propriétés topologiques étonnantes, comme les structures lisses exotiques de R4\mathbb{R}^4.

Bien que les théories physiques aient conduit à l'émergence de nouvelles branches des mathématiques, il est essentiel de comprendre qu’il existe une distinction fondamentale entre l’influence physique et l’évolution des mathématiques. La physique, en particulier la théorie quantique, n’est pas simplement un moteur pour de nouvelles mathématiques, mais représente un modèle d’abstraction et de formalisation qui pousse les mathématiciens à explorer des concepts au-delà de leur fonction initiale de représentation des phénomènes physiques. Ce processus d’abstraction ne s’arrête pas à la résolution de problèmes physiques, mais englobe une exploration des structures mathématiques pures, indépendamment de toute application directe en physique. C’est ainsi que les mathématiques modernes ont évolué, en s’éloignant de leur rôle initial de simple outil de modélisation physique pour devenir un domaine d’étude autonome.

Comment la topologie géométrique aide à comprendre les défauts des milieux ordonnés et la dynamique des défauts

Récemment, un projet ambitieux a vu le jour, fruit de la collaboration entre Louis Funar, Daniele Otera et moi-même, qui cherche à prouver que tous les groupes de présentation finie sont géométriquement simplement connexes (propriété bien plus forte que la QSF) et qu'ils peuvent éviter les phénomènes de "cauchemar" de Whitehead, ce qui les rend « simples » au sens mathématique. Cette avancée a été annoncée dans mon article On the Whitehead nightmare and some related topics, publié dans les EMS Surveys in Mathematical Sciences, un volume dédié au 80e anniversaire de Dennis Sullivan (2023). Ce projet, auquel je suis particulièrement optimiste, utilise la technologie de la TRILOGIE QSF, judicieusement modifiée.

Cependant, deux grandes difficultés doivent encore être surmontées : (i) éliminer la "mousse infinie" (le groupe d'homotopie de second ordre infiniment généré) tout en conservant la propriété GSC, et (ii) rapprocher les choses de l'infini à une distance finie, tout en restant GSC. Une version préliminaire de ce travail existe déjà.

En ce qui concerne les idées plus ésotériques qui portent sur une nouvelle catégorie beaucoup plus large englobant les groupes de présentation finie, évoquées dans ma lettre de 2016, il y a désormais un peu plus à dire. En particulier, j'ai découvert une connexion précise entre une certaine forme de violation de GSC et la géométrie non commutative, qui semble être pertinente pour le sujet. Pour cela, deux de mes articles sur ce sujet sont d'une grande utilité : On geometric group theory, publié dans Topology and Groups, Essays Dedicated to V. Turaev, ainsi que Classical differential topology and non-commutative geometry, dans Surveys in Geometry I (2022).

Quant aux boules de Schoenflies en dimension 4 (DIFF Schoenflies), j'ai publié un article démontrant que ces boules sont GSC, notamment dans mon travail All smooth four-dimensional Schoenflies balls are geometrically simply connected (arXiv: 1609.05094, 2016). Une version plus courte est disponible dans Surveys in Geometry I (2022). Je travaille actuellement avec Dave sur un projet majeur pour prouver que les boules de Schoenflies en dimension 4, qui sont GSC, sont également standard. Ainsi, les idées exprimées dans ma lettre de 2016 ne sont plus d'actualité dans ce contexte.

Le sujet des défauts des milieux ordonnés, qui a été l'un de mes axes de recherche durant les années 70, est profondément lié à la topologie géométrique, en particulier dans l'étude des groupes d'homotopie et de leur connexion avec les défauts. En 1973, alors que j'étais professeur au Département de mathématiques de l'Université Paris-Sud (Orsay), j'ai donné une conférence introductive à la physique des milieux condensés, où j'ai fait la connaissance de Gérard Toulouse et Maurice Kléman. Ensemble, nous avons découvert que la dynamique des défauts dans ces milieux était liée aux groupes d'homotopie de l’espace des états internes, un espace qui encode le bris de symétrie. Nous avons observé que la non-commutativité de ces groupes fondamentaux empêchait les lignes de défaut de se croiser. Cette découverte a suscité l'intérêt de nombreux physiciens, notamment dans le domaine de la physique quantique, où la non-commutativité joue un rôle central.

Quelques années plus tard, sous l’impulsion de physiciens comme Sasha Polyakov, nous avons étendu notre analyse à des dimensions supérieures et avons fait une découverte inattendue : l'ensemble des groupes d'homotopie, lorsqu'il est muni du produit de Whitehead, forme une algèbre supersymétrique. Cette observation a conduit à la conclusion que la non-commutativité du produit de Whitehead constitue un obstacle pour le croisement des défauts dans des dimensions supérieures.

L’implication de la supersymétrie dans ce contexte nous a étonnés, et ce fut un véritable plaisir pour Gérard de découvrir cette nouvelle facette de la topologie. D’ailleurs, Jean Dieudonné, dans une réédition de son ouvrage sur les mathématiques de Bourbaki, a reconnu l’importance de cette connexion entre la topologie et la physique, corrigeant ainsi ses précédentes affirmations selon lesquelles la topologie n’aurait aucune application en physique.

Ce parcours de recherche illustre la manière dont les concepts mathématiques, notamment ceux liés à la topologie géométrique, peuvent éclairer des phénomènes physiques profonds et complexes, comme la dynamique des défauts dans les milieux ordonnés.

En poursuivant cette exploration, il est important de noter que la connexion entre topologie et physique n'est pas un hasard. Elle découle du fait que les objets topologiques, en particulier les groupes d'homotopie et les espaces de configuration, sont naturellement présents dans les modèles qui décrivent des systèmes physiques complexes. La capacité de la topologie à décrire des propriétés invariantes de ces systèmes, indépendamment des détails géométriques spécifiques, en fait un outil précieux pour comprendre des phénomènes aussi variés que les défauts dans les matériaux ou les singularités dans les champs de Higgs.

Quelle est l'obstruction totale à la déstabilisation du cadrage oblique stable d'une immersion?

Le concept de cadrage oblique stable et d'immersion stable occupe une place centrale dans la théorie de l'homotopie stable. Ce cadre mathématique trouve son origine dans les travaux de P. M. Akhmetiev et de nombreux autres chercheurs qui ont exploré les immersions de variétés de codimension élevée et les groupes de cobordisme associés. Dans cette section, nous allons étudier l'obstruction totale à la déstabilisation d'un cadrage oblique stable et son lien avec les groupes de bordisme des immersions.

Commençons par examiner la situation d'un cadrage oblique stable {\st2,θ0}\{ \st_2, \theta_0 \}, où les relations entre les vecteurs et les transformations invariantes sous l'involution TμT_\mu sont cruciales. Le cadrage oblique stable {\st2,θ0}\{ \st_2, \theta_0 \} est lié à l'immersion ϕ2\phi_2, une immersion dans un espace de dimension 2l+122l+1 - 2 et codimension 2l12l-1, un domaine souvent étudié dans la théorie des immersions et des variétés à singularités modérées.

L'élément clé ici est l'obstruction totale o(\st2,θ0)o(\st_2, \theta_0) qui se manifeste par un entier, indiquant la manière dont un cadre oblique stable peut être modifié ou déstabilisé. Cette obstruction est liée à la topologie des immersions en codimension élevée, et son étude repose sur des arguments de position générale et sur les involutions associées à la géométrie des immersions.

Pour démontrer que o(\st2,θ0)0 (mod 4)o(\st_2, \theta_0) \equiv 0 \ (\text{mod}\ 4), il faut explorer les transformations isotopiques des cadres obliques. Prenons l'isotopie FtF_t, où t[0,1]t \in [0, 1], qui commence par une déformation du cadrage θ0\theta_0 à t=0t = 0 et se termine par un cadrage sphérique à t=1t = 1. La déformation de chaque vecteur de θ0\theta_0 vers le cadrage stable \st2\st_2 suit des transformations orthogonales, sauf pour le dernier vecteur de l'indice ilast=Cn2l+12i_{\text{last}} = C_n - 2l + 1 - 2. Cette déformation s'avère essentielle pour analyser le comportement du cadre dans le contexte d'une immersion stable.

L'involution TπT_\pi, qui agit sur le faisceau normal N2l1N^{2l-1}, est un outil central pour comprendre la structure des immersions. En particulier, cette involution permet de relier les propriétés de TμT_\mu-équivariant du cadre oblique à la topologie du faisceau normal. Les calculs menant à la conclusion o(\st2,θ0)0 (mod 4)o(\st_2, \theta_0) \equiv 0 \ (\text{mod}\ 4) reposent sur le fait que le cadre oblique stable θ0\theta_0 correspond à un développement générique du cadre, où chaque intersection est bien définie et respecte les contraintes imposées par les invariants topologiques associés à l'immersion.

Le résultat de cette démonstration s'inscrit dans un contexte plus large, celui des immersions dans des espaces de dimension élevée, où les points d'auto-intersection jouent un rôle crucial. L'examen des points d'auto-intersection, en particulier dans le cas de l'immersion standard ff, révèle que ces immersions peuvent être analysées à travers leurs cadres obliques stables et leur obstructions associées. Par exemple, dans le cas de l'immersion ff, l'obstruction o(\st)o(\st) prend une valeur ±2 \pm 2, ce qui dépend du co-orientation de l'immersion standard.

Les résultats obtenus à partir de cette analyse ont des applications intéressantes dans l'étude de la théorie de l'homotopie stable et des problèmes associés à la non-existence d'éléments dans les groupes d'homotopie des sphères. Les récentes avancées en géométrie stable, notamment la théorie des invarients de Kervaire, illustrent l'importance de ces considérations dans l'étude des immersions et des variétés framées.

Il est également important de souligner que cette analyse des immersions stables et des obstructions associées est étroitement liée aux théorèmes de suspension, qui établissent des relations fondamentales entre les immersions stables et non stables. Ces théorèmes, comme celui de la desuspension de Kervaire, permettent de relier les différentes catégories de variétés immersives à la structure topologique des groupes d'homotopie des sphères.

Enfin, la déstabilisation des cadres obliques et les obstructions associées fournissent un moyen puissant d'examiner la structure des immersions et de leur cobordisme. Cette approche permet de mieux comprendre les singularités des immersions et d'étudier les conditions sous lesquelles des immersions stables peuvent être réduites ou modifiées, ce qui est essentiel pour la résolution de certains problèmes ouverts en géométrie et en topologie des variétés.

Comment les cartes C0-stables peuvent-elles être triangulées et leur importance en géométrie différentielle ?

Les cartes lisses entre variétés jouent un rôle central en géométrie différentielle, notamment dans les théorèmes concernant leur stabilité et leur capacité à être triangulées. Un des résultats importants dans ce domaine est le théorème de triangulation, qui affirme qu'il existe un ensemble ouvert dense de cartes C0-stables entre deux variétés lisses, dont une partie est équivalente à une carte PL (piecewise linear) pour certaines triangulations lisses des variétés. En d'autres termes, il est possible de trouver des cartes qui, bien qu'étant lisses, se comportent de manière similaire à des cartes linéaires par morceaux après une transformation adéquate, ce qui permet de simplifier leur étude tout en préservant les propriétés topologiques essentielles.

L'approche de Thom et Mather montre que l'ensemble des cartes C0-stables lisses entre deux variétés M et N, avec N étant compacte, contient un sous-ensemble ouvert dense de C∞(N, M). Plus précisément, une carte lisse f : N → M sera C0-stable et équivalente à une carte PL si elle est stratifiée de Thom, une propriété qui implique que la carte est bien définie dans un espace de jets stratifié. En d'autres termes, la stabilité C0 de la carte implique qu’elle possède des singularités bien contrôlées, ce qui rend possible une analyse précise et robuste de la carte dans des contextes géométriques et topologiques.

Un autre résultat significatif est le théorème de stabilité des cartes à corang un. Une carte lisse f : Nn → Mm est dite de corang un si, en tout point x de N, le noyau de la différentielle df_x est de dimension 1. Ce type de carte présente des propriétés géométriques intéressantes, notamment dans le cadre des cartes dites « plissées » ou « repliées », qui apparaissent fréquemment dans les applications à la topologie des singularités. Le théorème de stabilité des cartes de corang un stipule que l'ensemble des cartes C∞-stables de corang un est à la fois ouvert et dense dans l'ensemble des cartes de corang un, ce qui montre que ces cartes forment un sous-ensemble particulièrement « bien-behavié » du champ global des cartes lisses entre variétés. Ce résultat trouve de nombreuses applications dans l’étude des singularités et des morphismes topologiques entre variétés.

Une autre dimension de l’étude des cartes lisses est leur capacité à être rendues transverses à des complexes simpliciaux. Lorsqu’une carte PL est transversale à une triangulation, elle conserve des propriétés structurelles intéressantes, notamment la possibilité de subdiviser les complexes de manière à ce que la carte devienne « simpliciale », facilitant ainsi son analyse dans un cadre topologique combinatoire. Ce résultat se généralise à des cartes semi-linéaires entre complexes simpliciaux, où la transversalité à une triangulation assure que les préimages des simples sont collées de manière cohérente avec la structure de la triangulation.

En somme, la stabilité des cartes C0 et leur capacité à être triangulées sont des outils puissants pour l’analyse des variétés lisses. Elles permettent non seulement de simplifier les calculs et les démonstrations, mais aussi de mieux comprendre les structures géométriques sous-jacentes aux variétés et aux morphismes entre elles. Ces propriétés sont particulièrement utiles pour traiter des situations géométriques complexes, où l’on doit travailler avec des cartes lisses tout en garantissant leur stabilité et leur structure combinatoire.

Il est aussi crucial de souligner que la triangulation et la stabilité C0 ne concernent pas uniquement les cartes lisses, mais s’étendent également aux constructions combinatoires et topologiques qui sous-tendent les variétés. La possibilité de rendre une carte transversale à une triangulation de manière stable ouvre la voie à des études plus approfondies sur les singularités et sur les objets topologiques associés à ces cartes. Enfin, comprendre comment les cartes peuvent être stabilisées et triangulées permet d'ouvrir de nouvelles perspectives sur les morphismes entre variétés, notamment dans le contexte des embbedings et des applications des théorèmes de stabilité à des situations géométriques réelles.