La notion de distribution invariante sous un champ de vecteurs joue, en théorie des systèmes de contrôle non linéaires, un rôle analogue à celui de sous-espace invariant dans la théorie des systèmes linéaires. Plus précisément, une distribution A est dite invariante sous un champ de vecteurs f si le crochet de Lie [f,r] de f avec tout champ de vecteurs r∈A appartient également à A, c’est-à-dire r∈A⇒[f,r]∈A.
On peut exprimer cette condition de manière condensée en introduisant la distribution [f,A], engendrée par tous les crochets [f,r] avec r∈A. Ainsi, l’invariance s’écrit simplement [f,A]⊂A.
Lorsque la distribution A est régulière de dimension d, on peut localement exprimer tout champ de vecteurs r∈A comme une combinaison linéaire r=∑i=1dαi(x)Ti(x), où les Ti engendrent localement A. Il suffit alors que [f,Ti]∈A pour tout i=1,…,d pour garantir l’invariance. Cette condition est non seulement nécessaire (car les Ti appartiennent déjà à A), mais aussi suffisante : le développement du crochet [f,r], en utilisant la linéarité et la propriété du crochet de Lie, reste alors dans A.
Cela permet d’écrire que la somme A+[f,A] est engendrée par les champs T1,…,Td,[f,T1],…,[f,Td], ce qui sera d’une utilité particulière dans les développements ultérieurs, notamment pour les procédures de prolongement de distributions invariantes.
Cette notion d’invariance s’inscrit dans une perspective plus large. En effet, dans le cas linéaire, un sous-espace V⊂Rn invariant sous une application linéaire A (i.e. AV⊂V) induit une distribution AV(x)=V constante en tout point x, et un champ vectoriel fA(x)=Ax linéaire. On peut montrer alors que AV est invariante sous fA. Pour cela, il suffit de considérer une base {v1,…,vd} de V, qui définit des champs Ti(x)=vi, invariants par translation, et d’observer que [fA,Ti]=ATi, ce qui est encore un vecteur de V, donc [fA,Ti]∈AV.
L’intérêt profond de l’invariance d’une distribution se manifeste lorsqu’on considère des distributions involutives, c’est-à-dire complètement intégrables. Si une telle distribution A de dimension d est également invariante sous f, on peut alors, au voisinage de chaque point x0, construire un changement de coordonnées z=ϕ(x), tel que f prenne une forme triangulaire particulière.
Dans ce système de coordonnées adapté, les derniers n−d champs ∂/∂zk, k=d+1,…,n, engendrent l’orthogonal de A. Ainsi, tout champ r∈A s’annule dans ses composantes zd+1,…,zn, et comme [f,r]∈A, il en va de même pour le crochet, ce qui impose l’annulation des dérivées ∂fk/∂zi pour k>d, i≤d. Autrement dit, la dépendance de fk vis-à-vis des premières coordonnées z1,…,zd est supprimée dans les équations correspondant aux zk, k>d.
Le système dynamique x˙=f(x) s’écrit alors dans les nouvelles coordonnées :