Lorsque l'on cherche à comprendre ce qui donne sens à notre vie, il devient crucial de savoir ce que nous valorisons vraiment. Identifier ces valeurs fondamentales est un processus délicat et parfois long. Certaines personnes connaissent instinctivement ce qui est important pour elles, tandis que d'autres doivent passer par un travail de clarification pour découvrir ce qui les anime véritablement. Pour ce faire, il faut souvent dépasser les attentes sociales ou familiales et explorer ce qui résonne profondément à l'intérieur de soi.

Il est essentiel de se poser des questions sur ce qui compte réellement : la famille, les amitiés, le travail, le bien-être physique, l'éducation, la spiritualité, la communauté. Chacun de ces domaines peut être évalué à travers un système de valeurs personnelles, de manière à en comprendre l'importance réelle. Par exemple, comment évalue-t-on l'importance de l'éducation ou du travail ? Ces domaines sont-ils des sources de satisfaction, ou répondent-ils davantage à des obligations ou des attentes externes ? Un simple chiffre, entre 1 et 10, peut déjà aider à hiérarchiser les priorités et à mieux comprendre ses besoins.

Toutefois, le processus de clarification des valeurs n'est pas toujours immédiat. Nombre de personnes, en particulier celles confrontées à l'anxiété, peuvent se retrouver englouties par leurs préoccupations quotidiennes et avoir du mal à se projeter dans l'avenir. Cela peut rendre l'exploration des valeurs difficile, car la peur ou l'anxiété nous poussent à rester centrés sur des préoccupations immédiates plutôt que sur une vision à long terme. Dans ce contexte, il est souvent nécessaire de recourir à des techniques spécifiques pour encourager l'exploration et ouvrir l'esprit, même si ce n'est qu'en laissant le processus se dérouler de manière créative, sans jugement hâtif.

Une méthode efficace pour aider à découvrir ses valeurs est de se rappeler ses rêves d'enfance. Quelles étaient les aspirations profondes avant que la réalité n'impose des choix pratiques ou des contraintes sociales ? Ces rêves peuvent souvent révéler des aspects de notre personnalité et de nos désirs qui restent enfouis sous des couches de responsabilités ou de conventions. Par exemple, une personne qui, enfant, rêvait de devenir explorateur, pourrait aujourd'hui réaliser que le voyage et l'aventure sont des valeurs essentielles pour elle, même si elle ne poursuit pas cette carrière spécifique.

En parallèle, il peut être utile d’imaginer la fin de sa vie et de réfléchir à ce que l'on aimerait que l'on dise de nous lors de notre funérailles. Cette perspective extrême permet de clarifier ce que l'on souhaite laisser derrière soi : des réalisations concrètes, des relations humaines profondes, ou peut-être une contribution à la société ? Cette réflexion aide souvent à s’éloigner des attentes sociales pour se concentrer sur ce qui apporte réellement de la signification à notre existence.

De plus, l’admiration que l’on porte à certaines personnes peut aussi fournir des indices précieux. Qu'il s'agisse d’un proche, d'un héros de fiction ou d’une personnalité publique, la façon dont nous percevons les autres révèle souvent nos propres valeurs. Les qualités que nous admirons chez eux, comme le courage, la bienveillance ou la persévérance, peuvent refléter ce que nous aspirons à incarner dans notre propre vie. Si l’on prend l'exemple d'un super-héros comme Waffleman, créé par l’enfant d’un auteur, il devient clair que des valeurs telles que l’entraide, l’adversité transformée en avantage et la loyauté ressortent. Ces caractéristiques peuvent sembler simples mais sont le reflet de valeurs profondes que l’on cherche à développer dans son propre parcours.

Les valeurs ne sont pas figées. Elles évoluent avec le temps et les expériences. Un travail constant de réflexion et d’exploration permet d’affiner ce qui est véritablement important. Il est essentiel de se rappeler que, même si certaines valeurs sont partagées au sein d’une culture ou d’une société, elles doivent avant tout être personnelles et authentiques. Le but ultime est de trouver ce qui rend la vie significative à notre échelle, indépendamment des pressions extérieures.

Il est aussi important de souligner qu'un tel processus peut être perturbant et même difficile à initier. L'anxiété, en particulier, peut rendre ce travail encore plus ardu, car elle tend à enfermer l'esprit dans des préoccupations immédiates, réduisant la capacité de penser à ce qui est véritablement épanouissant. Dans ce cas, la pratique de techniques de relaxation ou d’approches telles que la pleine conscience peut aider à réduire cette pression et permettre de revenir à une perspective plus sereine et plus claire.

Finalement, il ne faut pas sous-estimer la capacité qu’a chaque individu de redécouvrir ses valeurs à travers des expériences simples mais significatives. L'écoute de ses intuitions, la réflexion sur ses actions et la réévaluation constante de ce qui compte vraiment dans la vie permettent d’atteindre un sentiment plus profond de satisfaction et de direction.

Comment se détacher des pensées anxieuses : une pratique de défusion

Dans notre quotidien, il est fréquent de se laisser emporter par nos pensées, particulièrement celles qui génèrent de l'anxiété. Ces pensées, bien qu'elles soient une partie naturelle de notre existence, peuvent parfois prendre le contrôle de nos vies, nous incitant à lutter contre elles ou à essayer de les fuir. Cependant, cette approche finit souvent par amplifier leur pouvoir sur nous, nous enfermant dans un cycle où nous cherchons constamment à les ignorer ou les repousser. Pourtant, une approche différente existe : celle de la défusion cognitive, qui consiste à prendre de la distance par rapport à nos pensées, à les observer sans y être attaché, afin de ne plus en être dominé.

Il est important de s’entraîner à remarquer quand nos pensées commencent à nous emporter, même si nous avons déjà parcouru un certain chemin mental. Cette prise de conscience permet de commencer à se détacher de la spirale de l’anxiété. Lorsque vous réalisez que vous avez été pris dans un "train de pensées", imaginez-vous capable de vous élever au-dessus de ce train. Visualisez-vous dans le ciel, observant le train continuer son trajet là où il veut bien aller, tandis que vous, vous restez à une certaine distance, détaché de sa course. Le train de pensées n'est plus une partie intégrante de vous, il n'est qu'un phénomène parmi d'autres, qui poursuit son chemin sans vous affecter.

Cependant, il est probable qu'à un moment donné, vous soyez à nouveau tiré dans ce train de pensées, ou dans un autre. C'est une expérience courante, mais c'est là que la pratique devient essentielle. À chaque fois que vous remarquez que vous êtes à nouveau pris dans une pensée anxieuse, il s'agit de revenir à cet exercice : prendre de la hauteur, observer la pensée sans tenter de la contrôler ou de l’éliminer. En effet, il est inutile, voire épuisant, d’essayer de stopper un train en marche ; il est bien plus facile de descendre du train et de l’observer de loin.

Avec le temps et la pratique, vous serez en mesure de repérer plusieurs trains de pensées qui circulent simultanément dans votre esprit. Parfois, ces trains se croisent et nous nous retrouvons à vouloir débattre ou nous débarrasser de certaines pensées. Cependant, au lieu de chercher à supprimer ou à repousser ces pensées, il est plus judicieux d’adopter une attitude de curiosité, voire d’humour. L’idée est de ne pas lutter contre les pensées, mais d’apprendre à les accepter comme elles sont, sans s’y attacher. Plus vous vous entraînerez à observer vos pensées sans chercher à les contrôler, plus vous serez en mesure de vous en détacher de manière naturelle.

En plus de cet exercice mental, il est possible d'intégrer un autre type d'exercice : celui de "physiciser" vos pensées. L’objectif est de matérialiser une pensée anxieuse afin d’en prendre du recul. Par exemple, imaginez que la pensée se transforme en un objet concret. Quelle forme aurait cette pensée ? Quelle couleur ? Quelle taille ? Quelle vitesse ? En visualisant ainsi la pensée, vous pouvez vous rendre compte de son caractère souvent irréel et disproportionné. Au lieu de lutter contre elle, vous pouvez commencer à la voir comme une simple image qui ne contrôle pas vos actions.

À mesure que vous vous exercez à cette défusion, vous remarquerez qu'il devient plus facile de prendre du recul et de choisir si vous souhaitez ou non vous engager dans un train de pensées. Cela vous permet de mieux gérer votre énergie mentale et d'éviter que votre esprit ne soit constamment sollicité par des pensées anxieuses. Cette pratique peut aussi vous aider à mieux résoudre les problèmes de la vie réelle, car vous aborderez ces situations avec un esprit plus calme, non perturbé par des pensées qui surgissent sans cesse.

Au fur et à mesure de vos progrès, vous constaterez que la simple observation des pensées, sans leur attribuer trop de pouvoir, vous permet de gagner en sérénité. L’important dans ce processus n’est pas de chercher à stopper les pensées anxieuses, mais de leur accorder moins de pouvoir, de leur donner moins de poids dans vos actions et décisions. Ce faisant, vous devenez moins victime de vos pensées et plus capable de vivre pleinement, sans que l’anxiété ne vienne constamment troubler votre quotidien.

Le véritable défi consiste à accepter que les pensées anxieuses, bien qu'inconfortables, font partie intégrante de notre vie. Elles ne disparaîtront peut-être jamais totalement, mais elles peuvent perdre leur emprise sur nous. En les observant plutôt qu’en luttant contre elles, nous commençons à les laisser passer, comme des nuages dans le ciel, sans leur donner plus de pouvoir qu’elles n’en ont réellement. Au final, cela vous permettra de mieux comprendre la nature de vos pensées, d’accepter leur existence sans les laisser vous envahir.

Comment briser le cycle de l’évitement dans le traitement du traumatisme

Le traumatisme est une question fréquemment rencontrée en travail clinique, touchant de nombreuses personnes à divers degrés. Lorsqu'un individu vit un traumatisme, il existe des considérations particulières à prendre en compte, mais les principes d’évitement et d’acceptation sont cruciaux. Un facteur majeur dans la persistance du trouble de stress post-traumatique (TSPT) est la lutte interne constante entre les pensées, les souvenirs, les sentiments et les sensations corporelles. Ces expériences sont souvent si inconfortables que la personne traumatisée cherche à les éviter à tout prix. Elle organise sa vie de manière à minimiser le risque de rencontrer des éléments qui pourraient raviver le traumatisme, ce qui conduit à une existence de plus en plus restreinte. Au fil du temps, cette restriction mène à une vie centrée uniquement sur la survie, et non sur la véritable expérience de la vie.

Le TSPT, comme beaucoup d'autres troubles anxieux, se perpétue précisément par l’évitement. Loin d'être une stratégie efficace, l'évitement ne fait qu'augmenter l'intensité du traumatisme. Paradoxalement, les approches basées sur la pleine conscience, qui visent à détourner l'attention des symptômes en les ignorant, peuvent aggraver la situation (Boeschen, Koss, Figuerdo, & Coan, 2001; Sears & Chard, 2016). Toutefois, une utilisation appropriée de la pleine conscience et de l'acceptation permet aux patients de devenir plus à l'aise avec leur inconfort. En d'autres termes, ils cessent d'avoir peur de leurs propres expériences désagréables. Moins effrayés par ce qu'ils ressentent ou pensent, ils sont plus enclins à reprendre leurs activités et à faire face à ce qui est important pour eux, offrant ainsi une flexibilité accrue face à la souffrance.

Prenons un exemple personnel pour illustrer cette approche. Un Noël, ma fille et moi avons vécu une expérience traumatisante. Nous étions en canoë sur un lac gelé, et après un accident où le canoë s'est retourné, nous nous sommes retrouvés dans l'eau glacée. Le froid extrême, l’épuisement et la panique ont envahi mon esprit, mais heureusement, ma fille portait un gilet de sauvetage. Après l'incident, elle a eu des moments de grande peur, accompagnés de l'impression de ne pas pouvoir oublier l'événement. La tentation aurait été de l’encourager à ne pas penser à cela, de détourner son attention ou de lui dire de simplement « aller de l’avant ». Au lieu de cela, j’ai choisi de valider ses émotions et de lui expliquer que ces pensées et sensations faisaient partie du processus de guérison. Nous avons parlé de l’expérience à plusieurs reprises, et au bout de quelques semaines, elle a commencé à se sentir plus à l’aise, et l'idée de revenir près du lac ne lui semblait plus aussi terrifiante.

Ce processus d'acceptation est au cœur de la guérison face à un traumatisme. Les personnes atteintes de TSPT sont souvent coincées dans un combat interne où le cortex cérébral (le siège des pensées rationnelles) cherche à oublier l'événement traumatique, tandis que le système limbique (le centre des émotions) les pousse à revivre sans cesse cette expérience, au nom de la survie et de l'apprentissage. Ce conflit engendre des symptômes de reviviscence : flashbacks, cauchemars, pensées envahissantes et ressentis corporels accablants. Afin de briser ce cycle, il est essentiel d’adopter une posture d’acceptation. Plutôt que de se battre contre les émotions et les pensées, le patient apprend à les observer, à les reconnaître comme des éléments normaux de son vécu, et à leur accorder une place sans les juger ni chercher à les éliminer. Ce processus est d'une puissance thérapeutique incroyable.

Lors d'une séance, si un déclencheur émotif survient, il est crucial de ne pas chercher immédiatement à supprimer les pensées et émotions associées. L'objectif n'est pas de lutter contre l’expérience interne, mais de lui permettre de se manifester, puis de s’en détacher progressivement. Ce qui peut paraître accablant et insurmontable devient ainsi quelque chose qui peut être vécu sans qu'il ne prenne le contrôle total de la vie de l’individu. Plus tôt cette acceptation devient une pratique courante, plus vite la personne se libère du fardeau du traumatisme, et ce, sans avoir à fuir ou à supprimer ses émotions.

Ce processus d’acceptation ne signifie pas se résigner à vivre dans la souffrance, mais plutôt accepter la réalité du moment présent avec ses sensations, pensées et émotions, sans jugement ni fuite. C’est dans cette capacité à accepter l’inconfort que réside la clé de la guérison. L'acceptation permet de briser le cycle de l’évitement, de réduire l'intensité des réactions émotionnelles et de regagner une certaine liberté de vivre pleinement. En cultivant cette posture intérieure, il devient possible de reconstruire une vie qui n’est plus gouvernée par la peur, mais par une relation plus saine avec le passé, avec soi-même, et avec le monde extérieur.