Sous la présidence d'Oscar Arias, bien que l'environnement n'ait pas été une priorité politique apparente, l'impact de sa présence sur les initiatives climatiques de son administration fut significatif, bien que complexe. Un consensus semble se dégager parmi les personnes interrogées : bien que les politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre n'aient pas été au centre de ses préoccupations, son rôle symbolique a contribué à faire avancer ces politiques. Pour certains, sans Arias, des mesures de réduction du climat n'auraient pas progressé pendant ses années de mandat.
Félix, un universitaire et conseiller gouvernemental, exprime une profonde déception envers Arias, notamment après l'affaire Crucitas, où il accuse le président d'être "capturé par des groupes d'influence". Pour lui, il ne reste plus grand-chose d'environnemental à discuter lorsqu'il évoque Arias. Cependant, il reconnaît que l'initiative "Costa Rica Forever" – une association créée sous l'administration Arias – demeure l'une des réussites les plus marquantes de ces années, même s'il doute de l'authenticité de la volonté de Arias à la soutenir. Selon lui, ce n'est pas tant Arias qui a porté cette initiative, mais plutôt une équipe de conseillers qui a réussi à lui vendre l'idée, en s'appuyant sur la notoriété du président pour lever des fonds.
Pablo, collaborateur de Félix, souligne l'importance d'Arias dans l'instauration de la neutralité carbone, insistant sur le fait qu'il n'y aurait pas eu d'association "Costa Rica Forever" sans la crédibilité qu'Arias apportait à l'initiative. Mais, dans une autre veine, Emilia, une experte ayant participé aux décisions sur le climat au niveau national, note que même si Arias a forgé l'expression "Paix avec la Nature", il n’a jamais inspiré le pays à prendre cet engagement. Elle et d'autres spécialistes en politique environnementale ont dû faire preuve de plus de créativité et de détermination pour faire avancer les initiatives climatiques à une époque où le président ne semblait pas personnellement impliqué dans ces questions.
Il est évident que la véritable motivation derrière les engagements climatiques sous la présidence d'Arias ne résidait pas dans une conviction personnelle du président, mais dans l'initiative d'un groupe de conseillers, souvent issus de l'élite verte urbaine, qui ont su exploiter la réputation et l'influence internationale du président pour faire avancer l’agenda climatique. Humberto, conseiller de haut niveau, explique que l'idée de la neutralité carbone ne venait pas d'Arias, mais plutôt de ce groupe qui a convaincu le président d'adhérer à l'initiative de "Paix avec la Nature". Il souligne que même si le nom de cette initiative peut sembler un peu "vieux jeu", elle correspondait à la thématique de la paix, chère à Arias.
L'un des éléments clés de ce processus a été la manière dont Arias, malgré son manque d'engagement personnel envers l'environnement, a soutenu des initiatives comme celle de la nomination de Christiana Figueres à la tête de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC). L'importance de ce geste fut d’autant plus marquée par le fait que ce soutien de la part d'Arias se produisait à un moment où l'enjeu climatique devenait mondialement prioritaire, notamment dans un contexte où les pays s'engageaient de plus en plus fermement à lutter contre les changements climatiques.
Le retour au pouvoir d’Arias après son premier mandat a coïncidé avec une évolution notable de l'économie costaricienne, désormais centrée sur l'écotourisme, et une communauté internationale plus impliquée dans les questions climatiques. L'influence de Costa Rica sur la scène climatique mondiale avait pris de l'ampleur, et les membres de l'élite verte du pays, tels que Franz Tattenbach, étaient déjà engagés à l'échelle internationale dans des initiatives de développement durable. C’est ainsi qu’Arias, malgré ses intérêts personnels ailleurs, a dû soutenir une direction nationale en matière de climat, car il n’avait d’autre choix que de répondre aux attentes tant domestiques qu’internationales.
Il est intéressant de noter la distinction entre les présidences d’Arias et de son prédécesseur, José María Figueres, en ce qui concerne l'engagement climatique. Lors de son mandat, Figueres a joué un rôle crucial dans le positionnement du Costa Rica comme un leader en matière de développement durable, en grande partie en raison de son propre intérêt pour les questions environnementales. Sous Arias, cependant, c’est la pression d’une élite verte bien organisée et la nécessité de maintenir l'image de leader en matière de durabilité qui ont permis de faire avancer l’agenda climatique, souvent sans l'enthousiasme personnel du président lui-même.
L’initiative de neutralité carbone et la "Paix avec la Nature" sont donc des exemples de la manière dont les enjeux environnementaux peuvent être intégrés à une politique nationale, même en l'absence de convictions personnelles profondes au sein du gouvernement. Ce phénomène montre également l'importance de la coopération entre le gouvernement et des conseillers spécialisés qui peuvent, grâce à leur expertise et à leurs réseaux, faire avancer des projets environnementaux même lorsque les motivations politiques ne viennent pas directement des plus hauts niveaux du pouvoir.
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La fragilité de l'élite verte et les défis de la politique climatique au Costa Rica
L'engagement climatique du Costa Rica, s'il est souvent cité en exemple, demeure vulnérable à des changements structurels, notamment à l'instabilité des acteurs politiques et à la concentration des responsabilités. Ce phénomène peut être observé lors de la présidence de Laura Chinchilla (2010-2014), un mandat où les avancées en matière de politique climatique ont été perçues comme limitées. En effet, certaines figures emblématiques du gouvernement, comme Samuel, ancien ministre, ont estimé que les années de Laura étaient si peu significatives qu'elles ont été largement assimilées à celles de son prédécesseur, Oscar Arias. Selon lui, pendant cette période, "l'État n'a rien fait" et a même relégué l'agenda climatique à l'arrière-plan, comparé à d'autres périodes.
Un autre ministre, Ignacio, évoque un constat similaire : sous le gouvernement d'Arias, l'environnement a été relégué "sur l'étagère", et la situation n’a guère changé sous le mandat de Chinchilla. Cependant, une dimension plus subtile de cette analyse réside dans les transformations internes au sein de l'équipe gouvernementale. Le départ de conseillers clés, comme Humberto en 2010, a entraîné une perte d'un "capital humain" essentiel, constituant une des causes profondes de la stagnation des initiatives climatiques. Le gouvernement perdait ainsi des personnalités dotées de décennies d'expérience en matière de politiques climatiques internes, dont l'impact sur la continuité de ces politiques ne peut être négligé.
Cette fragilité de l’élite verte s'illustre par la concentration des responsabilités entre les mains de quelques individus. Lorsque ces acteurs-clés quittent leurs fonctions ou changent de rôle à l'échelle internationale, comme ce fut le cas de Christiana, la dynamique de la politique environnementale se trouve déséquilibrée. L’élite verte, déjà restreinte, peine à s’élargir et à intégrer de nouveaux talents, ce qui fragilise sa capacité à faire évoluer la politique climatique du pays. En l'absence de relais solides et d'une continuité entre les administrations, les avancées sont souvent lentes et fragmentées.
La présidence de Luis Guillermo Solís, élu en 2014, marque un tournant dans l'histoire politique du Costa Rica. Son élection, portée par le Parti de l'Action citoyenne (PAC), a été perçue comme une contestation du bipartisme historique, notamment celui du Parti libéral (PLN) et du Parti Unité sociale chrétienne (PUSC). Cependant, la question climatique a peu occupé une place centrale durant son mandat. À l’exception de son ministre de l'Environnement, le Dr. Edgar Gutiérrez-Espelta, qui a proposé des politiques plus concrètes et ambitieuses, Solís lui-même n’a pas donné une impulsion forte en matière de climat. Il a en effet délégué la participation aux conférences internationales, comme les COP, à ses vice-présidents, un signal faible quant à l’importance de ces enjeux pour son administration.
Les années 2010–2014 ont été marquées par un contexte international changeant. L'accord de Paris de 2015, fruit des négociations de la COP21, a modifié le cadre global des engagements climatiques. Le Costa Rica, au sein de cet environnement mondial, a dû réadapter ses objectifs et ses stratégies en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES). Sous la pression de la communauté internationale et des exigences des INDC (Contributions Déterminées au niveau National), le pays a réaffirmé son objectif ambitieux de neutralité carbone, héritage de la coalition "La Paix avec la Nature" instaurée par Arias. Cependant, l’adoption des INDC et la mise en œuvre de ces engagements se heurtent à plusieurs obstacles internes, notamment l’extension des problématiques environnementales qui dépassent la simple question des forêts et du sol, pour inclure désormais des enjeux marins et d’adaptation aux impacts du changement climatique.
Les dynamiques de pouvoir, les tensions idéologiques croissantes, et la croissance des inégalités sociales ont également contribué à une polarisation des débats climatiques. Alors qu'autrefois, les politiques environnementales étaient moins politisées et réunissaient une large adhésion sociale, elles deviennent désormais un champ de bataille idéologique, où les partis et les citoyens se divisent entre ceux qui plaident pour la protection de l’environnement et ceux qui se concentrent sur la croissance économique. Cette dichotomie devient particulièrement apparente dans la manière dont les politiques de marché du carbone sont perçues et traitées. Là où, dans le passé, il y avait une solidarité nationale autour de l’environnement, des clivages plus marqués apparaissent, compliquant la mise en œuvre de politiques efficaces.
Le défi principal réside alors dans la construction d'une élite verte plus robuste, capable de faire face aux évolutions politiques, économiques et sociales du pays. Il est impératif que le Costa Rica renforce ses institutions, crée des ponts intergénérationnels et internationaux, et soutienne la participation active de la société civile dans les processus décisionnels environnementaux. Cela passe par une ouverture vers de nouveaux acteurs, mais aussi par une redéfinition du rôle de l'État face aux enjeux climatiques, pour qu'il devienne un véritable moteur du changement au-delà des élections et des mandats.
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