Les résultats relatifs à la structure des préférences, développés dans ce chapitre, constituent un socle de base en économie mathématique. Ces concepts, tels que la théorie de l’utilité espérée, sont largement abordés dans les ouvrages classiques de Fishburn, Kreps, et Savage. Les travaux historiques sur lesquels ces théories reposent remontent à des auteurs tels que Debreu, Eilenberg, et Milgram, et concernent principalement la caractérisation des relations de préférences et des représentations numériques affines. Ces résultats sont essentiels non seulement pour la théorie économique, mais aussi pour la compréhension de nombreux mécanismes financiers, en particulier dans le cadre de la modélisation de choix d’actions et d'optimisation de portefeuilles.
Dans ce cadre, l'un des points essentiels est l’interprétation économique du théorème de Hardy, Littlewood, et Polya, qui a jeté les bases des ordres partiels dans les théories de décision. Ce théorème a trouvé une application importante dans les travaux de Strassen, qui ont permis de développer une analyse plus fine des préférences robustes. L'idée centrale de ces travaux est qu'une préférence robuste garantit que les décisions prises sous incertitude restent cohérentes même lorsque l'information est limitée ou incomplète, ce qui a des implications profondes dans les domaines de la finance et de l'assurance.
L’un des concepts clefs de cette analyse est l’idée de "superhedging" des options d'achat, qui, comme le souligne l’approche de Goovaerts et al., permet de garantir une couverture contre des événements incertains. Ce type de couverture est particulièrement pertinent dans les stratégies d’options et les contrats d'assurance où les risques doivent être gérés dans un cadre de préférence robuste. Cela conduit directement à la notion de mesures de risque cohérentes, qui ont été introduites par Artzner et al., et qui forment la base des calculs de risque dans les modèles financiers modernes.
Les relations entre les préférences robustes et la prise de décision sous risque sont aussi d'une importance capitale. La théorie des préférences robustes, bien que développée principalement dans les années récentes, repose sur les principes classiques de l'utilité espérée, mais en les adaptant à des situations de plus grande incertitude. Cette évolution a permis de mieux comprendre l'impact des préférences personnelles sur les décisions financières, notamment en ce qui concerne le choix optimal d'un portefeuille. Les modèles de maximisation de l'utilité, qui sous-tendent la majorité des théories économiques modernes, ont ainsi été étendus pour inclure des préférences vis-à-vis des risques et des incertitudes.
Il est important de noter que les implications pratiques de ces théories ne se limitent pas à la simple analyse des portefeuilles ou des primes d'assurance, mais s'étendent aussi à des contextes plus complexes comme l'optimisation des profils d’actifs. Par exemple, la minimisation de l’entropie relative, dans le cadre d’un portefeuille optimal, est une méthode qui trouve son application dans la gestion d’actifs et le calcul des risques associés. Cette approche, analysée en profondeur dans les travaux de Csiszar, fournit une interprétation financière de la réduction de l’incertitude, et est étroitement liée à la gestion des risques financiers en théorie du portefeuille.
Un autre aspect fondamental de cette discussion est la question de l’égalité des risques dans un marché économique. Bien que la théorie de l’équilibre d’Arrow-Debreu, à l’origine formulée pour les marchés de biens, ait été étendue aux marchés financiers, elle demeure un outil puissant pour comprendre les allocations d’actifs sous incertitude. Ces résultats sont essentiels pour la modélisation de marchés d’assurances, de réassurances, et pour l’étude de la formation des prix dans un environnement incertain. La mise en œuvre de ces théories dans un cadre infiniment dimensionnel, comme l’ont développé Bewley et Mas-Colell, permet de mieux appréhender les comportements des agents économiques face à la volatilité du marché.
Les travaux récents sur les mesures de risque convexes, qui ont été développés par Föllmer et Schied, apportent un éclairage complémentaire sur les méthodes de calcul du risque dans des contextes de plus en plus complexes. Ces approches sont particulièrement pertinentes dans les domaines de l’assurance et de la finance de marché, où la gestion du risque est essentielle. Les mesures de risque cohérentes et convexes permettent d’élargir les possibilités de couverture et d’investissement, tout en maintenant une rigueur théorique essentielle pour garantir des décisions de qualité.
Il est également crucial de comprendre que l’extension des théories économiques classiques à des situations de risque non linéaire et de préférence robuste ouvre la voie à des stratégies d'investissement et de gestion de portefeuille plus flexibles. Cela inclut des approches comme l’optimisation sous contraintes de risque, qui est devenue un pilier dans la théorie des portefeuilles modernes. La recherche continue sur ces concepts, en particulier en lien avec la dynamique des marchés financiers, promet de nouvelles avancées importantes dans la modélisation des risques et la gestion de l'incertitude économique.
Quels sont les liens entre les ordres stochastiques croissants, concaves et leurs implications sur les paramètres de distribution ?
L’étude des ordres stochastiques croissants et concaves révèle des relations profondes entre les distributions de probabilités et leurs caractéristiques fondamentales telles que la moyenne et la variance. Considérons deux distributions μ et μ̃ liées par des transformations exponentielles à partir de distributions normales ν = N(α, σ²) et ν̃ = N(α̃, σ̃²). L’ordre croissant-concave, noté ≽icv, permet d’établir des comparaisons fines entre ces distributions. Par exemple, si μ ≽icv μ̃, alors il en résulte que la moyenne m(μ) est supérieure ou égale à m(μ̃), ce qui correspond à une dominance stochastique en moyenne. En outre, on obtient que la variance σ² est inférieure ou égale à σ̃², ce qui implique que la distribution μ est, en un certain sens, plus concentrée ou moins dispersée que μ̃.
Cette relation entre les paramètres se déduit à partir de l’analyse des intégrales contre des fonctions concaves et croissantes, notamment en utilisant une approximation avec des fonctions comme f_ε(x) = log(ε + x). L’extension linéaire de telles fonctions permet de recourir à la définition même de l’ordre ≽icv sur ℝ. Par un argument de convergence monotone, on établit que l’inégalité intégrale se maintient dans la limite ε → 0, assurant ainsi la dominance croissante-concave entre ν et ν̃. Par conséquent, on obtient la chaîne d’inégalités sur les paramètres α, α̃, σ², σ̃² qui caractérisent l’ordre stochastique sur les distributions normales.
Cependant, l’ordre ≽icv ne se répercute pas toujours symétriquement sous la transformation exponentielle inverse. Alors que μ ≽icv μ̃ entraîne ν ≽icv ν̃, la réciproque ne tient pas systématiquement. Cela signifie qu’une dominance croissante-concave des distributions normales ne garantit pas la même dominance pour leurs images exponentielles. Ce phénomène découle du fait que les relations entre moyennes et variances des deux distributions ne s’inscrivent pas toujours dans un cadre simple, notamment lorsque les paramètres α et σ² diffèrent selon certaines contraintes, comme illustré par l’inégalité α + ½σ² < α̃ + ½σ̃².
Cette dualité subtile se manifeste également dans le cadre de l’évaluation des options financières, où les distributions exponentielles des variables normales jouent un rôle crucial. En particulier, la fonction de prix des options, formulée par la célèbre formule de Black-Scholes, dépend de la volatilité σ, et l’ordre ≽icv permet d’établir que la distribution des actifs diminue lorsque la volatilité augmente, toutes choses égales par ailleurs. La dérivée de l’espérance d’une fonction payoff d’option par rapport à σ est strictement positive, soulignant l’impact direct de la volatilité sur la valeur espérée.
Par ailleurs, l’ordre stochastique croissant, noté ≽i, ou dominance stochastique du premier ordre, se définit par la comparaison des intégrales contre toutes fonctions croissantes bornées. Il s’agit d’un ordre partiel robuste qui s’exprime en termes de distribution cumulative : si μ ≽i ν, alors les fonctions de répartition satisfont F_μ(x) ≤ F_ν(x) pour tout x. Cette condition implique que la distribution μ place plus de masse vers les valeurs élevées que ν, ce qui est conforme à l’intuition d’une "distribution plus élevée".
Une caractérisation constructive de cet ordre est donnée par l’existence de variables aléatoires couplées sur un même espace probabilisé, où une variable X_μ est presque sûrement supérieure ou égale à X_ν, ce qui traduit la dominance stochastique par une inégalité quasi certaine entre les réalisations. De plus, cet ordre peut s’interpréter via des noyaux stochastiques spécifiques qui "réduisent" les valeurs tout en conservant la structure probabiliste.
Enfin, cet ordre croissant est un raffinement naturel de l’ordre croissant-concave puisque μ ≽i ν entraîne μ ≽icv ν, et donc une inégalité sur les moyennes m(μ) ≥ m(ν). Cette hiérarchie des ordres stochastiques fournit un cadre unifié pour analyser les préférences robustes en situation d’incertitude, en s’appuyant sur les propriétés analytiques des fonctions test intégrées contre les mesures considérées.
Il est important de noter que l’étude de ces ordres stochastiques ne se limite pas à une dimension. Des généralisations existent pour les distributions sur ℝ^d ou sur des espaces polonais plus généraux, avec des relations similaires mais plus complexes, adaptées à des structures de préférences continues. De plus, la théorie s’étend à des ordres stochastiques d’ordre supérieur (n≥2), permettant de modéliser des préférences plus fines selon des critères croissants de risque ou d’aversion.
Au-delà de la structure formelle, la compréhension de ces ordres stochastiques offre un outil puissant pour interpréter et comparer des distributions aléatoires dans divers contextes, notamment financiers, économiques et décisionnels. Le lien entre les paramètres classiques de la distribution, tels que la moyenne et la variance, et ces ordres fournit un pont essentiel entre des notions abstraites de dominance et des quantités mesurables. La maîtrise de ces concepts permet ainsi d’appréhender la notion de préférence sous incertitude de manière rigoureuse et nuancée, ouvrant la voie à une analyse fine des choix dans un environnement probabiliste.
Comment mesurer le risque financier dans un marché avec contraintes ?
La mesure du risque dans un contexte financier repose sur une modélisation rigoureuse des positions et des stratégies possibles sur le marché. Considérons un marché où plusieurs actifs sont cotés à deux instants distincts, t=0 et t=1. Les prix au temps 1 sont modélisés par des variables aléatoires non négatives, tandis que les prix au temps 0 sont donnés par un vecteur fixe. L'objectif est d’évaluer le risque associé à une position financière, notée X, en tenant compte des stratégies de trading admissibles.
Une position est dite sans risque (ou acceptable) si elle peut être couverte par une stratégie de trading sans coût initial supplémentaire, autrement dit si l’on peut trouver un portefeuille ξ tel que le gain net actualisé ξ ⋅ Y, combiné avec la position X, soit presque sûrement positif. L’ensemble des positions acceptables forme un cône convexe A_0, et à partir de ce cône, on définit une mesure de risque cohérente ρ_0. Cette mesure est sensible, c’est-à-dire capable de détecter toute opportunité d’arbitrage, si et seulement si le modèle de marché est exempt d’arbitrages. La sensibilité garantit également que la mesure est continue par le haut et admet une représentation duale en termes de mesures de probabilité équivalentes, appelées mesures risk-neutrales.
Cependant, dans la pratique, il est souvent nécessaire de restreindre l’ensemble des stratégies admissibles à un sous-ensemble S de toutes les stratégies possibles, pour diverses raisons : contraintes sur le montant investi, interdictions de vente à découvert, limites liées à la liquidité du marché, etc. Ces contraintes rendent le modèle plus réaliste et plus complexe. L’ensemble A_S des positions acceptables devient alors plus restreint mais reste convexe et non vide sous des conditions naturelles, notamment l’absence d’arbitrages dans S. La mesure de risque ρ_S définie à partir de A_S conserve la convexité mais n’est plus nécessairement cohérente au sens fort, en particulier si S impose des contraintes sévères.
La continuité par le haut de ρ_S, essentielle pour une représentation duale claire, dépend alors de propriétés géométriques de S, notamment de sa fermeture et de la fermeture du cône qu’il engendre. Sous ces hypothèses, ρ_S est sensible si et seulement si S ne contient pas d’opportunités d’arbitrage. La représentation duale de ρ_S s’exprime alors via un supremum sur l’ensemble des mesures de probabilité et un infimum sur S, mettant en lumière un lien profond entre la pénalité minimale associée à une mesure Q et l’évaluation des gains admissibles dans S sous Q.
La fonction de pénalité minimale α_min^S, définie sur l’ensemble des mesures de probabilité, se caractérise comme le supremum des espérances des gains associés aux stratégies admissibles ξ ∈ S. Cette construction offre une compréhension claire de la manière dont les contraintes de portefeuille influencent la mesure du risque : plus S est restreint, plus la pénalité est élevée, reflétant un risque accru dû à la limitation des stratégies de couverture.
Il importe de souligner que l’admissibilité des portefeuilles, qui exige que les gains ξ ⋅ Y soient bornés inférieurement presque sûrement, exclut certaines pratiques financières non réalistes, notamment les ventes à découvert non couvertes d’actifs non bornés. Ce cadre est cohérent avec la notion d’acceptabilité des positions à risque borné.
Au-delà de la théorie, cette approche met en lumière des concepts fondamentaux pour le praticien : la nature des contraintes imposées aux stratégies de trading modifie profondément la mesure du risque et ses représentations duales. La notion d’arbitrage, centrale dans la finance, agit comme un filtre essentiel, assurant que la mesure de risque soit à la fois sensible et mathématiquement bien comportée. La continuité de la mesure de risque garantit la stabilité des évaluations, un point crucial dans la gestion quotidienne des risques.
Il faut également comprendre que ces résultats sont souvent développés dans un cadre statique, à un instant donné, et leur extension à des modèles dynamiques plus réalistes, avec contraintes évolutives, requiert une théorie plus fine. Cette dynamique apporte de nouveaux défis, notamment dans la caractérisation des pénalités minimales et des conditions d’absence d’arbitrage avec contraintes.
Enfin, la modélisation rigoureuse des contraintes du marché, loin d’être un simple détail technique, influence profondément la gestion et la régulation financière. Une compréhension approfondie de ces mécanismes est essentielle pour appréhender la complexité réelle des marchés, où les risques ne peuvent être mesurés indépendamment des limites imposées aux stratégies d’investissement.
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