L'élection présidentielle de 2016 aux États-Unis, suivie des élections parlementaires italiennes de 2018, ont marqué un tournant dans l’histoire politique contemporaine, caractérisé par un virage notable vers le populisme. En particulier, les politiciens populistes semblent s’appuyer davantage sur la communication en ligne et les fausses nouvelles que leurs homologues traditionnels. Cette tendance a suscité de nombreuses analyses, soulevant l’hypothèse que la diffusion de fausses nouvelles pourrait influencer les résultats électoraux. Pourtant, bien que cette corrélation soit fréquemment citée, la question de savoir si nous assistons à une relation causale véritable entre la propagation des fausses informations et l’évolution du vote demeure encore largement ouverte. De nombreuses études ont analysé différents types de campagnes basées sur des fausses nouvelles, leurs modes de propagation et leur impact potentiel, mais la question centrale reste celle de leur influence réelle sur les attitudes politiques des citoyens, notamment lors des élections.
Les fausses nouvelles, bien que souvent présentées comme un phénomène moderne lié à la montée des réseaux sociaux, existent sous diverses formes depuis des décennies. Les efforts commerciaux et politiques pour manipuler l’opinion publique à travers des informations trompeuses ne sont pas nouveaux, mais l’émergence des plateformes numériques a radicalement transformé ce paysage. Grâce à leurs caractéristiques uniques – faibles barrières d’entrée, contenu généré par les utilisateurs et viralité des messages – les réseaux sociaux ont démocratisé et amplifié la portée de ces phénomènes (Allcott et Gentzkow, 2017). L'ampleur du phénomène actuel, bien qu’inédite, ne doit pas occulter ses racines dans des stratégies plus anciennes de manipulation de l’opinion.
Les motivations derrière la création de fausses nouvelles sont multiples. L'une des principales raisons est financière : l’algorithme des réseaux sociaux récompense le contenu viral, et les fausses informations, souvent sensationnelles, sont particulièrement susceptibles de susciter de l’engagement et de générer des revenus publicitaires conséquents. Une autre motivation, tout aussi importante, est idéologique. Des groupes ou individus cherchent à utiliser les fausses nouvelles pour soutenir des causes politiques ou des candidats spécifiques, en façonnant l’opinion publique selon leurs intérêts.
En définitive, les fausses nouvelles se caractérisent par un contenu souvent entièrement fabriqué ou délibérément trompeur, conçu pour induire en erreur l’audience en présentant des informations politiquement chargées. Ces informations, bien que fausses ou biaisées, sont diffusées avec l’intention explicite de manipuler le jugement des électeurs et, par conséquent, leurs comportements de vote.
L'analyse de l'impact des fausses nouvelles sur les comportements électoraux exige une compréhension approfondie des facteurs déterminants du vote. Ces facteurs sont eux-mêmes influencés par des éléments psychologiques complexes : la manière dont les individus consomment l’information et leur disposition à accepter ou rejeter certains contenus en fonction de leurs croyances préexistantes. L'un des aspects les plus fascinants de ce phénomène est la psychologie derrière la consommation des nouvelles, notamment le rôle du biais de confirmation, selon lequel les individus ont tendance à privilégier les informations qui confirment leurs opinions déjà établies, et à ignorer celles qui les contredisent. Ce biais cognitive renforce l’effet des fausses nouvelles : lorsqu'un individu est exposé à des informations qui s’alignent avec ses convictions, il est plus susceptible de les croire, même si elles sont factuellement incorrectes.
Dans ce contexte, il devient crucial de comprendre comment les campagnes électorales utilisent ces mécanismes pour influencer les électeurs. Les campagnes populistes, par exemple, exploitent souvent des narratives simplistes et émotionnellement chargées qui résonnent particulièrement bien auprès des électeurs sensibles aux messages de peur, de colère ou d’injustice. L’impact de ces messages peut être considérablement amplifié lorsqu’ils sont relayés par des plateformes sociales, où la viralité et l'engagement sont des facteurs clés. Mais cela soulève la question suivante : à quel point ces influences modifient-elles réellement les comportements de vote, et dans quelle mesure les électeurs conscients de ces manipulations peuvent-ils y résister ?
Les recherches récentes suggèrent que, bien que les fausses nouvelles puissent effectivement affecter les perceptions politiques et, par extension, les attitudes électorales, l’effet observé varie considérablement en fonction de plusieurs facteurs. D’une part, les électeurs déjà engagés politiquement, et ceux dont les opinions sont solidement ancrées, montrent une plus grande résistance à la désinformation. D’autre part, les électeurs plus indécis ou moins informés sont davantage susceptibles d'être influencés par des informations erronées. Cela signifie que l'impact des fausses nouvelles sur le comportement électoral n’est pas homogène et dépend largement de la manière dont elles sont perçues par différentes catégories d’électeurs.
Il est également essentiel de prendre en compte la dynamique des médias sociaux et leur rôle dans la diffusion rapide des fausses informations. En plus des plateformes populaires telles que Facebook et Twitter, de nouvelles formes de communication en ligne, comme les forums anonymes et les blogs, jouent un rôle majeur dans l’amplification des messages politiques. Ces espaces virtuels sont souvent moins régulés et permettent une propagation rapide de contenus biaisés ou complètement erronés. De plus, l'algorithme des réseaux sociaux tend à privilégier les contenus sensationnels, ce qui amplifie encore l'impact des fausses nouvelles.
Enfin, un autre aspect important de ce phénomène est la capacité des citoyens à discerner le vrai du faux. Cela implique un certain niveau de rationalité épistémique, ou la capacité à évaluer correctement la fiabilité des informations auxquelles ils sont exposés. Ce processus dépend non seulement des capacités cognitives individuelles, mais aussi de la motivation des électeurs à rechercher et à accepter des informations qui ne confirment pas nécessairement leurs croyances. L'efficacité des efforts visant à contrer les fausses nouvelles dépendra donc de l'éducation des électeurs et des efforts visant à promouvoir une culture de la vérification de l'information.
L'impact de la désinformation pendant la pandémie de Covid-19 : comment les informations fausses se propagent et leurs conséquences
Le monde a été secoué par la pandémie de Covid-19, qui a non seulement bouleversé la santé publique et l'économie mondiale, mais a également donné naissance à une épidémie d’informations trompeuses. Ce phénomène de désinformation et de mésinformation, bien que ni nouveau ni exclusif à cette crise sanitaire, a pris une ampleur sans précédent avec la montée en puissance des réseaux sociaux et des plateformes numériques. Dans cette époque de confusion et de peur, le défi principal n'était pas seulement d'affronter un virus invisible, mais aussi une vague de fausses informations qui circulait à la même vitesse, voire plus rapidement.
La première déclaration officielle concernant le Covid-19 a été émise par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en janvier 2020. Moins d'un mois après, l'OMS qualifiait la situation de pandémie mondiale. Mais alors que la situation sanitaire se détériorait, un autre phénomène tout aussi préoccupant prenait de l'ampleur : l’infodémie. Le terme, utilisé pour décrire l'explosion de fausses informations relatives au Covid-19, a été introduit par le Directeur général de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus. Les informations erronées, qu'elles soient involontaires (mésinformation) ou délibérément fausses (désinformation), se sont propagées à une vitesse vertigineuse. Dans ce contexte, des récits fabuleux et des théories du complot ont fleuri, semant la confusion parmi la population mondiale, certains allant jusqu'à affirmer que la maladie était le résultat d'une consommation de soupe de chauve-souris ou que boire de l'eau de javel pouvait en guérir.
Mais pourquoi et comment ces informations erronées se propagent-elles si facilement pendant une crise sanitaire d'une telle ampleur ? Pour comprendre cela, il faut d'abord rappeler que l'humain, depuis des siècles, a toujours été vulnérable aux rumeurs et aux mythes en période de maladie. Les grandes épidémies, de la peste noire du Moyen Âge à la grippe espagnole de 1918, ont toujours été accompagnées d’une multitude de spéculations sur leur origine et leur traitement. Bien que les temps aient changé et que la science ait fait des progrès considérables, la tendance à chercher des explications simples et rassurantes face à l'inconnu persiste. La pandémie de Covid-19 n'a fait que raviver ce réflexe.
Les plateformes numériques jouent un rôle central dans la propagation de la désinformation. En raison de leur architecture, qui privilégie le contenu sensationnaliste et viral, ces espaces deviennent des vecteurs privilégiés pour les nouvelles fausses. Un article de The Guardian publié en novembre 2016 soulignait déjà l'influence de Facebook dans la victoire électorale de Donald Trump, notamment à travers la diffusion de fausses informations. Cette réalité se retrouve à l'échelle mondiale durant la pandémie, où chaque personne, connectée à Internet, devient potentiellement un relais de la désinformation. Des recherches montrent que les informations fausses se propagent non seulement plus rapidement que les informations vérifiées, mais qu'elles bénéficient également d'une attention accrue des utilisateurs.
Le problème de la désinformation, cependant, ne réside pas uniquement dans la fausse information elle-même, mais dans ses conséquences. Ces récits erronés peuvent mettre des vies en danger en incitant les gens à ignorer les consignes sanitaires, à se tourner vers des traitements non prouvés, ou même à rejeter des mesures de prévention comme les vaccins. À cet égard, la question de la confiance dans les institutions et les experts devient centrale. Plus que jamais, il est essentiel de distinguer entre les véritables sources d'information – celles qui sont appuyées par la recherche scientifique et validées par des institutions de santé publiques – et les sources douteuses qui alimentent la confusion.
Lors de la gestion de cette crise, les gouvernements et les organisations internationales ont tenté diverses stratégies pour contrer la désinformation. La vérification des faits, la diffusion d'informations précises et la promotion de l'éducation aux médias sont des mesures qui visent à enrayer la propagation des fausses nouvelles. Pourtant, la tâche est complexe, car chaque société et chaque culture réagit différemment aux informations en circulation. Des recherches ont également montré que l'adhésion à une information fausse est souvent le résultat d'un manque de raisonnement critique plutôt que d’un biais idéologique préexistant.
Les périodes de crise, qu’elles soient sanitaires, économiques ou politiques, sont toujours fertiles pour la propagation de la désinformation. Toutefois, il est crucial de comprendre que cette désinformation n’est pas un phénomène isolé, mais un élément de l’histoire humaine. Par le passé, lors de chaque grande pandémie, des récits fictifs ont circulé, alimentant la peur et l'incertitude. Aujourd'hui, l'ampleur de la désinformation est exacerbée par la rapidité des technologies modernes, mais la tendance reste fondamentalement la même : l'homme cherche des réponses simples à des événements complexes.
Dans ce contexte, il est essentiel de comprendre l'importance de la pensée critique. Se questionner sur l'origine des informations, sur la source de celles-ci et sur les motivations qui peuvent sous-tendre leur diffusion est un acte nécessaire dans une époque où chaque individu, armé d'un smartphone, peut devenir un acteur dans la propagation de la vérité ou du mensonge. En outre, la recherche scientifique et les experts doivent continuer à jouer un rôle clé, non seulement dans la lutte contre le virus, mais aussi dans la lutte contre l'infodémie.
Comment les bots influencent-ils les débats politiques sur Twitter ?
L’analyse des flux d’informations sur les réseaux sociaux, et plus particulièrement sur Twitter, révèle des dynamiques fascinantes concernant la propagation des messages et l'influence des comptes automatisés dans les discussions politiques. En particulier, lors des débats autour des flux migratoires en Méditerranée et des réactions liées à la pandémie de Covid-19, il est devenu évident que les bots jouent un rôle central dans la diffusion du contenu. L’étude des interactions au sein des communautés et entre elles permet de comprendre l'importance des « hubs », ces comptes influents, et leur lien avec les comptes automatisés.
Dans le contexte de la migration, les débats sont largement dominés par des communautés politiques bien définies, notamment celles associées à la droite et à l'extrême droite, comme en témoignent les comptes de Matteo Salvini et Giorgia Meloni. Ces personnalités, représentant des partis politiques de droite en Italie, partagent des opinions similaires concernant la gestion des migrations, ce qui renforce leur influence sur les discussions en ligne. Leur présence dans les « hubs » les plus influents est renforcée par un soutien massif de comptes automatisés, ou bots, qui amplifient leurs messages et augmentent leur visibilité.
Une observation notable est la convergence des bots entre les comptes authentiques des leaders politiques et ceux de la sphère médiatique, ce qui amplifie encore leur message. Par exemple, un compte appartenant à un journaliste proche de la politique de droite ou un média pro-gouvernemental bénéficie du soutien d'une armée de bots, qui retweetent massivement leurs publications. Cette coopération entre comptes humains et bots montre à quel point les dynamiques de propagation des informations peuvent être manipulées pour atteindre un large public.
Les résultats de l'analyse des groupes de bots ont révélé que ces derniers sont principalement utilisés pour retweeter le contenu des comptes humains associés aux hubs les plus influents. Ce phénomène ne se limite pas aux frontières des partis politiques : des bots liés aux communautés de droite mentionnent également des figures politiques du centre-gauche, voire des institutions neutres telles que la présidence de la République. Cependant, ce processus semble avoir pour objectif de pousser les figures institutionnelles à intervenir, notamment en ce qui concerne la gestion des flux migratoires.
Une caractéristique frappante de cette dynamique est la prédominance de certains sites web comme source principale des tweets originaux. Par exemple, 97 % des URL citées par les bots pointent vers des sites de désinformation, tels que voxnews.info, un site noirci par des fact-checkers italiens. Cela souligne un aspect inquiétant de cette stratégie : l’utilisation des bots pour propager des informations manipulées ou fausses, alimentant ainsi un discours politique biaisé.
En revanche, l'analyse sur la pandémie de Covid-19 a révélé une activité de bots moins prononcée à l'époque de l'étude. Cela peut s'expliquer par la nature médicale de la discussion, qui n'avait pas encore pris un tour aussi politique qu'il l'a fait plus tard. Il est probable que lorsque le débat sur la pandémie est devenu plus politisé, le nombre de bots dans cette discussion ait augmenté, comme cela s'est produit avec la gestion des migrations.
Les données indiquent également que la propagation des informations est dominée par des comptes humains, avec les bots jouant principalement un rôle de relais, plutôt que d'initiateurs de contenu. Bien que l'activité de retweet entre comptes humains et bots soit significative, elle reste limitée, avec un nombre restreint de véritables utilisateurs rétweetant les bots. Ce phénomène démontre que, bien que les bots soient une force d’amplification, ils ne créent pas les discussions, mais interviennent principalement pour accentuer celles qui existent déjà.
Les interactions entre bots et utilisateurs humains sont complexes, mais elles montrent clairement comment les réseaux sociaux peuvent être manipulés pour influencer l'opinion publique. La combinaison de comptes vérifiés et de bots permet de contrôler et d'amplifier certains messages politiques, rendant le paysage numérique de plus en plus difficile à démêler. Cette dynamique soulève des questions sur la transparence de l'information et sur la manière dont les débats publics peuvent être façonnés, en particulier dans des sujets aussi sensibles que la migration.
Les réseaux sociaux, loin d’être des espaces démocratiques ouverts à toutes les voix, sont en réalité des arènes où l’influence des bots peut remodeler les débats et amplifier certaines voix politiques au détriment d’autres. Comprendre ces mécanismes est essentiel pour naviguer dans le paysage numérique actuel, où la vérité devient souvent une construction collective façonnée par ceux qui contrôlent les moyens de diffusion.
Les Organisations Politiques de Droite Radicales en Europe Centrale : Activisme Numérique et Mobilisation Visuelle
Les organisations politiques de droite radicale en Europe centrale, telles que celles présentes en Slovaquie, en Hongrie, en République tchèque et en Pologne, exploitent de manière significative les outils numériques pour diffuser leur idéologie et mobiliser leurs partisans. Ces mouvements, qui vont au-delà des partis politiques traditionnels, utilisent de plus en plus le web comme un espace stratégique pour leur activisme, notamment à travers des campagnes visuelles et textuelles qui visent à engager un large public. L'analyse du contenu en ligne de ces organisations révèle la manière dont elles adaptent leur discours à la spécificité du numérique, où la forme visuelle joue un rôle crucial dans la communication politique. L’iconographie et la manipulation d'images, couplées à des discours percutants et souvent polémiques, visent à créer une mobilisation forte, tout en renforçant l'identité et la cohésion des groupes qui les soutiennent.
Les résultats de l’étude menée sur ces pratiques comparatives entre les pays d’Europe centrale permettent d’établir des parallèles intéressants avec les organisations de droite radicale en Europe de l’Ouest. Si certaines techniques de mobilisation sont similaires, d’autres divergent en fonction des contextes politiques et sociaux propres à chaque région. En Pologne, par exemple, le nationalisme catholique se reflète dans les visuels et messages politiques, tandis qu’en Hongrie, un discours anti-immigration est souvent mis en avant par des moyens visuels très percutants. Ces organisations exploitent des stratégies communes d’engagement en ligne, mais leurs messages se façonnent en fonction de la réalité nationale et de l’actualité politique locale.
Au-delà des comparaisons régionales, cette analyse fait également un lien avec l’activisme numérique observé dans les pays occidentaux, où des mouvements similaires cherchent à influencer les discours politiques. Les méthodes de communication sur Internet ne se limitent pas à des forums de discussion ou des plateformes sociales : elles s’étendent à la création de contenu viral qui peut rapidement capter l’attention de millions de personnes. Dans ce contexte, la frontière entre la réalité et la fiction devient floue, ce qui renforce le pouvoir de ces groupes de manipuler l'opinion publique.
Cependant, l'impact de ces stratégies numériques n’est pas sans conséquences. Les partis de droite radicale en Europe centrale, tout comme leurs homologues de l'Ouest, participent à un phénomène global de polarisation. Le web, en offrant une plateforme ouverte et facilement accessible, devient un terrain où la désinformation, les discours haineux et les manipulations politiques prospèrent. Il est donc crucial de comprendre l’importance des outils numériques non seulement pour ces groupes politiques, mais aussi pour les démocraties modernes qui tentent de réguler ces nouvelles formes de mobilisation.
Il est essentiel de prendre conscience de l'évolution rapide de ces pratiques, et d’envisager les implications de leur utilisation à l’échelle européenne. Au-delà des stratégies purement politiques, ces organisations utilisent la technologie pour s’impliquer activement dans la diffusion de récits alternatifs, souvent en contradiction avec les faits établis. Le phénomène est global, et bien que les législations nationales tentent de suivre le rythme de l’innovation numérique, les défis restent immenses pour les gouvernements, qui doivent jongler entre la protection de la liberté d’expression et la lutte contre les discours haineux.
Ainsi, la compréhension du rôle des technologies dans les politiques de droite radicale nécessite une réflexion sur les mécanismes de régulation du web et sur l’importance d’une gouvernance démocratique de l’information. Les législations en place dans certains pays européens, telles que celles en Allemagne contre les fausses informations, ou les initiatives de fact-checking en Suède, offrent des exemples de réponses institutionnelles, mais ces actions doivent s’accompagner d’une éducation à la citoyenneté numérique pour éviter l’instrumentalisation des technologies à des fins idéologiques.
Les médias et les journalistes, dans ce contexte, ont un rôle essentiel à jouer. Leur intégrité professionnelle et leur capacité à vérifier les faits sont plus importantes que jamais. L’émergence de nouvelles plateformes de vérification de l’information, tout en étant un pas dans la bonne direction, doit encore faire face à des résistances internes et externes. Les journalistes eux-mêmes doivent continuer à s’adapter à un paysage numérique en constante évolution, tout en préservant leur indépendance vis-à-vis des pressions politiques et économiques.
Il est donc crucial de comprendre non seulement les stratégies des groupes de droite radicale, mais aussi la manière dont ces technologies peuvent à la fois renforcer et affaiblir les processus démocratiques. Les solutions législatives et éthiques, notamment en matière de régulation des plateformes en ligne et de soutien aux initiatives de vérification des faits, deviennent des enjeux primordiaux pour préserver un environnement numérique sain et transparent.
Comment les réseaux sociaux influencent la liberté d'expression : enjeux et régulations
Les réseaux sociaux occupent aujourd'hui une place centrale dans les dynamiques sociales et politiques mondiales. L'usage généralisé de ces plateformes a provoqué un changement radical dans la manière dont les informations sont produites, partagées et perçues. Ce phénomène soulève une série de questions fondamentales sur la liberté d'expression, la désinformation, et le rôle des entreprises privées dans la régulation de l'information en ligne.
La liberté d'expression, essentielle dans toute société démocratique, est mise à l'épreuve par les nouveaux défis engendrés par les technologies numériques. D'un côté, les plateformes comme Facebook, Twitter, et YouTube offrent un espace de parole sans précédent, permettant à des millions de personnes d'échanger librement des idées, de s'organiser et de mobiliser. Mais de l'autre, ces mêmes plateformes sont devenues des foyers de désinformation, de discours haineux et de manipulation politique. Les régulations mises en place par les gouvernements et les entreprises pour contrer ces phénomènes sont souvent sujettes à controverses.
L'affaire Manhattan Community Access Corp. v. Halleck (2019), par exemple, illustre la difficulté qu'ont les juridictions américaines à trancher sur la question du statut des plateformes en ligne. La Cour suprême des États-Unis a choisi de ne pas se prononcer sur l'étendue de la liberté d'expression dans ce contexte, laissant la place à une régulation fragmentée. Les décisions récentes des tribunaux, comme celle dans Williby v. Zuckerberg (2019), montrent à quel point il est complexe de définir les contours de la liberté d'expression lorsqu'il s'agit de plateformes privées, qui, bien que publiques dans leur usage, relèvent de régulations privées.
Cette ambivalence se reflète également au niveau européen. L'Union européenne a adopté le Code de conduite sur la lutte contre la haine en ligne, qui impose aux entreprises de supprimer rapidement tout contenu illégal. Cependant, cette approche soulève des préoccupations relatives à la liberté d'expression et à la censure. La question centrale est de savoir jusqu'où les entreprises privées doivent aller pour protéger les utilisateurs tout en préservant la diversité des opinions. Ce défi est particulièrement évident dans le contexte de la désinformation, notamment les "fake news", qui se propagent rapidement sur les réseaux sociaux, souvent sans aucune vérification préalable.
Les fausses informations, alimentées par des bots et des comptes automatisés, influencent non seulement l'opinion publique mais perturbent aussi le fonctionnement des démocraties modernes. Les campagnes de désinformation, telles que celles observées lors du Brexit ou des élections présidentielles américaines de 2016, ont démontré l'impact destructeur que peuvent avoir des informations erronées ou manipulées sur les décisions politiques majeures. Les régulations mises en place pour contrer cette désinformation, telles que le Code de pratique sur la désinformation adopté par la Commission européenne, sont encore en cours de développement et de mise en œuvre.
Il est nécessaire de distinguer entre la désinformation délibérée, qui vise à manipuler l'opinion publique, et les erreurs involontaires, qui peuvent résulter de la complexité du paysage médiatique numérique. Les régulations actuelles tentent de mettre en place un équilibre fragile entre la lutte contre la propagation de la désinformation et la protection des droits fondamentaux, dont la liberté d'expression fait partie intégrante.
La question de la régulation privée des réseaux sociaux est également cruciale. Bien que ces plateformes soient souvent perçues comme des espaces de liberté, elles sont gérées par des entreprises privées, dont les décisions sur ce qui peut ou ne peut pas être publié influencent de manière significative la circulation de l'information. Dans ce contexte, la notion de "censure privée" devient pertinente. En effet, les plateformes comme Facebook ou Twitter disposent d'un pouvoir quasi-judiciaire lorsqu'elles choisissent de bloquer des contenus, d'interdire des comptes ou de censurer certains discours. Cette situation soulève la question de savoir si ces entreprises, agissant en tant que "gouverneurs de l'espace public", ne devraient pas être soumises à des régulations plus strictes, afin de garantir que leurs décisions ne portent pas atteinte à des droits fondamentaux.
En outre, l'usage des algorithmes pour filtrer l'information est un autre élément qui mérite une attention particulière. Ces systèmes sont conçus pour classer, recommander et parfois censurer des contenus en fonction de critères qui échappent souvent à la transparence du public. Bien que ces algorithmes puissent aider à lutter contre la désinformation, ils peuvent aussi renforcer des biais cognitifs et de filtrage, créant des "bulles de filtre" où les utilisateurs ne sont exposés qu'à des informations qui confirment leurs croyances préexistantes. Ce phénomène renforce la polarisation de la société et fragilise encore davantage la cohésion démocratique.
Ainsi, tout en reconnaissant l'importance des réseaux sociaux pour la libre circulation des idées, il est crucial de comprendre que les plateformes en ligne ne sont pas des espaces totalement neutres. Leur gestion privée et l'usage d'algorithmes posent des questions fondamentales sur la régulation de l'information, la protection des droits de l'homme, et la préservation de la démocratie à l'ère numérique.

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