Les avions commerciaux modernes, tels que l'Airbus A320 ou le Boeing 737-800, nécessitent des études avancées sur leur comportement aérodynamique dans diverses conditions, y compris les situations de givrage des ailes. Ces études sont d'une importance capitale pour assurer la sécurité et l'efficacité énergétique des aéronefs. La version CRM65 à échelle réduite à 65 % du CRM (Common Research Model) est utilisée pour simuler ces phénomènes, offrant un modèle à échelle intermédiaire entre les grandes structures d'avions commerciaux et les contraintes des installations d'essai, telles que le tunnel de vent de l'Université de Wichita.

Dans cette étude, un modèle réduit du CRM65, avec un rapport de réduction de 8,9 %, a été employé pour tester l'aérodynamique d'une aile givrée dans le tunnel de vent Walter H. Beech de l'Université de Wichita. Les principales caractéristiques de l'aile incluent une envergure de 1,524 m, une corde aérodynamique moyenne (MAC) de 0,4234 m, un rapport de réduction de la corde de 0,23 et un angle de balayage du bord d'attaque de 37,2°. Les conditions de flux utilisées pour cette étude ont été choisies en fonction des paramètres expérimentaux recueillis lors d'études précédentes, avec un nombre de Reynolds de 1,8 × 10⁶ et un nombre de Mach de 0,18.

L'objectif principal de cette simulation est de comprendre comment un flux aérodynamique non stable, comme celui généré par le givrage d'une aile, se comporte sous différentes conditions d'attaque. Pour ce faire, les méthodes de simulation numérique de turbulence, telles que la Simulation des Grandes Éddes (LES) et la Simulation des Éddes Détachées (DES), sont employées pour modéliser le comportement turbulent de l'écoulement de l'air autour des ailes.

La méthode LES, bien que puissante, est coûteuse en termes de ressources de calcul, notamment en mémoire RAM et en temps de CPU. Elle est capable de résoudre les grandes éddes du flux mais nécessite une grille fine et un grand nombre de points de calcul. Afin de contourner les limitations des simulations LES pures, le modèle DES a été introduit. Ce modèle hybride RANS/LES divise l'écoulement en trois régions distinctes : une région RANS pour les couches limites attachées, une région « grise » où la transition de RANS à LES se produit, et enfin une région résolue par LES pour les zones où l'écoulement est fortement séparé. Cette approche hybride permet de réduire la charge de calcul tout en conservant la capacité de modéliser des écoulements non linéaires complexes. Cependant, ce modèle comporte également des défis, tels que le phénomène de « depletion du stress modélisé » (MSD) et la séparation induite par la grille (GIS), qui peuvent affecter la précision des résultats.

Les méthodes DES et IDDES (DES retardée et améliorée) ont été développées pour surmonter certains des problèmes rencontrés avec le DES classique. Ces méthodes sont conçues pour améliorer la modélisation des écoulements complexes, notamment en réduisant l'apparition précoce de la séparation des flux et en permettant une modélisation plus précise des couches limites par des simulations LES. En employant ces méthodes, il est possible de mieux prédire l'impact du givrage sur la performance aérodynamique des ailes et d'optimiser ainsi la conception des aéronefs.

L'une des principales difficultés lors de l'utilisation de ces méthodes réside dans la capacité à résoudre correctement les régions de transition entre un flux attaché et un flux séparé, en particulier à des nombres de Reynolds élevés. La mise en place de grilles suffisamment fines et la gestion de la transition entre les modèles RANS et LES sont cruciales pour garantir des résultats fiables. Cette « zone grise » entre les deux approches est une composante essentielle de la simulation, et elle permet de combler l'écart entre des écoulements légèrement séparés et des écoulements fortement turbulents, comme ceux observés sur des ailes à fort angle d'attaque.

Il est également important de comprendre que, bien que ces simulations numériques offrent des avantages significatifs dans la prédiction des comportements aérodynamiques complexes, elles ne remplacent pas les tests expérimentaux dans des tunnels de vent. Les données expérimentales, telles que celles obtenues par des mesures de forces, des pressions de surface et des visualisations par flux d'huile, sont cruciales pour valider les modèles numériques et ajuster les paramètres utilisés dans les simulations.

L'utilisation des méthodes avancées comme le DES et l'IDDES ne se limite pas seulement à la simulation des ailes givrés des avions commerciaux. Ces techniques sont également appliquées à d'autres domaines de la conception aérospatiale, où la modélisation des écoulements turbulents complexes et des séparations de flux est essentielle pour améliorer la performance et la sécurité des aéronefs dans une variété de conditions. Cependant, l'optimisation de ces méthodes, ainsi que la compréhension des phénomènes physiques qu'elles modélisent, restent un défi continu pour les chercheurs et les ingénieurs en aérodynamique.

L'impact du mouvement oscillant bidimensionnel sur la formation de glace sur les hélicoptères : Modélisation numérique et défis associés

L’étude du mouvement oscillant bidimensionnel et de ses effets sur l’accumulation de glace a révélé des résultats intéressants concernant les interactions complexes entre la dynamique de l’air et l’accumulation de glace sur les pales des rotors. Selon les analyses numériques, l’instabilité générée par le mouvement oscillant des pales modifie de manière significative les simulations d’accumulation de glace, affectant ainsi les prévisions de forme de glace. Dans ce cadre, plusieurs approches numériques ont été développées pour mieux comprendre et prédire ces phénomènes.

Les travaux antérieurs de Morelli et Guardone ont introduit un cadre tridimensionnel novateur pour la simulation de l’accumulation de glace sur les rotors, en couplant une modélisation tridimensionnelle avec une approche quasi-transitoire (Morelli et Guardone, 2021). Ce cadre repose sur la résolution des équations de Navier-Stokes non stationnaires pour analyser le champ de flux autour des pales. La déformation du maillage, en réponse au mouvement de la pale, est obtenue en utilisant la technique de déformation de maillage par fonction de base radiale (RBF), permettant ainsi de suivre les changements de géométrie de l’aile glacée au fil du temps.

L’utilisation de la méthode de suivi des particules lagrangiennes pour simuler la trajectoire des gouttelettes d’eau super refroidie joue un rôle essentiel dans la réduction de la sous-estimation de la forme de glace, en particulier lors de l’impact des gouttelettes et de leur rupture. Cependant, un défi majeur de cette approche réside dans la modélisation précise des gouttelettes individuelles, qui, lorsqu’elles sont traitées avec une approche Eulerienne tridimensionnelle, peuvent mener à des limitations dues à la complexité des interactions fluides-solides.

L’une des avancées les plus marquantes de cette recherche est la prise en compte des forces centripètes, cohésives et adhésives agissant entre la glace et la surface de la pale. Cette analyse permet de déterminer les points de rupture potentiels de la glace, ce qui est essentiel pour modéliser les phénomènes de détachement de la glace. Ces forces sont calculées à l’aide de corrélations empiriques et sont intégrées dans une approche qui applique une méthode d’équilibre des forces à chaque segment de la glace pour prédire son détachement.

Les simulations de l’accumulation de glace ont montré que, dans des conditions de température spécifiques, l’accumulation de glace se concentre principalement à l’extrémité des pales, avec une forme de glace plus homogène près de la racine. Ces résultats ont été validés par comparaison avec des données expérimentales obtenues dans des essais avec des rotors en rotation (Morelli et Guardone, 2021), offrant une correspondance précise avec les formes de glace observées dans les expériences. Toutefois, malgré la précision de ces simulations, des validations supplémentaires sont nécessaires pour améliorer la précision des prévisions locales de la forme de glace.

En ce qui concerne la simulation de la formation de glace sur le fuselage des aéronefs, celle-ci est souvent perçue comme un problème secondaire par rapport à la formation de glace sur les pales du rotor, qui impacte directement la performance aérodynamique. Cependant, la formation de glace sur le fuselage présente plusieurs risques notables pour la sécurité aérienne. L’accumulation de glace sur l’entrée d’air des moteurs peut altérer le flux d’air, entraînant des pertes de stabilité du moteur. De plus, l’accumulation de glace sur les écrans de débris peut obstruer l’injection d’air et provoquer des défaillances moteur. L’impact de la glace sur les radômes et les vitres peut également compromettre la visibilité du pilote et perturber les instruments de communication.

Les premières études numériques ont souvent adopté une approche quasi-stationnaire pour modéliser la glace sur le fuselage, similaire à celle utilisée pour les avions à voilure fixe. Cependant, le flux induit par les rotors, qui affecte fortement le comportement des gouttelettes d’eau, ne peut être ignoré. Il est donc impératif de tenir compte de l’effet du sillage des rotors pour estimer précisément les zones d’impact des gouttelettes et leur trajectoire.

Les travaux sur la simulation de la formation de glace sur le fuselage ont notamment utilisé des modèles de disque d’actionneur (ADM) et de surface d’actionneur (ASM), qui permettent de prendre en compte les effets transitoires tout en réduisant les exigences computationnelles. Ces modèles, bien que plus accessibles d’un point de vue informatique, ne permettent cependant pas de capturer toute la complexité du phénomène en raison des approximations qu’ils impliquent. Par exemple, bien que l’ADM permette de modéliser l’écoulement induit par le rotor, il ne résout pas directement l’effet dynamique des pales en rotation sur les gouttelettes d’eau.

En conséquence, des méthodes plus avancées sont nécessaires pour améliorer les simulations de formation de glace sur le fuselage. Ces méthodes incluent l’utilisation de modèles hybrides qui combinent des approches quasi-stationnaires et transitoires, intégrant de manière plus réaliste les effets du sillage des rotors et des interactions aérodynamiques. Les défis associés à ces simulations sont considérables, notamment en raison des besoins de puissance de calcul élevés pour modéliser les conditions d’entrées multiples, ce qui limite l’applicabilité des simulations dans des environnements opérationnels.

Comment la modélisation de l'accrétion de glace sur une surface évolue avec l'intégration des systèmes de protection électrothermiques

L'un des premiers modèles élaborés pour étudier l'accumulation de glace sur une surface fut celui de Messinger (1953), un modèle de régime permanent qui reste aujourd'hui la base de nombreuses simulations d'adhésion de glace (Beaugendre et Morency, 2003; Gent, 1990; Dillingh et Hoeijmakers, 2003; Hedde et Guffond, 1995; Paraschivoiu et Saeed, 2001; Wright, 2008). Cependant, cette approche statique présente plusieurs limitations lorsqu'il s'agit d'intégrer des systèmes de protection thermiques dynamiques. En effet, elle ne permet pas de simuler de manière réaliste l'interaction entre l'accumulation de glace et un système de protection en fonction du temps. L'une des hypothèses fondamentales de ce modèle est que la température dans le bloc de glace reste uniforme dans la direction normale à la surface. Par conséquent, les flux thermiques ne sont pas pris en compte et le modèle est mal adapté aux applications impliquant des systèmes de protection thermiques, notamment pour modéliser la fonte de la glace lorsqu'un système de protection thermique est activé.

En revanche, dans le cadre de systèmes de protection thermiques électrothermiques, il est crucial de modéliser l'accumulation de glace de manière dynamique, notamment en prenant en compte la variation temporelle de l'accumulation et la fusion de la glace. Cela nécessite des approches avancées telles que l'extension du modèle de Messinger via une approche multi-couches pour tenir compte de l'interaction entre la glace et l'eau liquide présente sous forme de film. Cette méthode permet d'englober la dynamique de l'évaporation, les changements de phases ainsi que les effets thermiques induits par un système de chauffage.

Le modèle tridimensionnel non-stationnaire développé par Bourgault et al. (2000) repose sur l’hypothèse de la théorie de la lubrification, qui reste l'approche la plus utilisée pour la modélisation des phénomènes d'accumulation de glace dynamique. Ce modèle décrit plusieurs phénomènes critiques tels que le retour de l'eau liquide sur la surface, le changement de phase dynamique et la formation de couches statiques ou en fusion. L’intégration de ces phénomènes dans les simulations permet de représenter plus fidèlement la dynamique de l'accumulation de glace sur une surface dans des conditions réelles d'aviation ou de génie thermique.

En outre, la modélisation de la protection contre la glace dans les systèmes électrothermiques nécessite une attention particulière à la fois sur la manière dont les couches d'adhésion se forment, et sur la manière dont elles interagissent avec les flux thermiques. La chaleur produite par le système de protection électrothermique doit être suffisamment distribuée pour provoquer la fonte de la glace à des endroits stratégiques tout en évitant des effets indésirables tels qu'une évaporation excessive ou une migration incontrôlée des couches liquides. C’est pourquoi des modèles comme celui de Messinger ont été étendus pour tenir compte de ces nouvelles conditions, en particulier par l’introduction de profils de température non linéaires et par l’ajout de couches supplémentaires représentant la glace et l’eau.

Le modèle de triple couche, illustré par Chauvin et al. (2018), est l'une des solutions les plus robustes pour simuler l'accumulation de glace dans des systèmes dynamiques. Ce modèle distingue trois couches distinctes : la couche de film d’eau en écoulement, la couche de glace, et la couche statique formée lorsque la glace fond sous l'effet de la chaleur. Chaque couche est caractérisée par des paramètres géométriques spécifiques, qui doivent être intégrés dans les équations différentielles partielles (EDP) régissant le système. La couche de film d’eau est directement en contact avec l’air, et sous l’action des forces aérodynamiques, elle migre vers l’arrière de la surface. La couche de glace, quant à elle, représente la glace qui se forme lors des conditions d’accumulation, et la couche statique est formée lorsqu'une partie de cette glace fond et reste sous forme liquide.

Le modèle de triple couche présente une grande flexibilité en permettant de modéliser différents modes d’accumulation de glace, allant de l’accumulation simple de givre à l’accumulation de glace avec fusion à la surface. Par exemple, lors de la formation de glace en surface sous un système de protection thermique, une partie de la glace peut fondre et former une couche statique qui interagit avec le flux d’air. Les simulations de ce modèle permettent d’identifier les zones les plus critiques pour l'activation du chauffage et l’évacuation de la glace de manière optimale.

L'un des défis majeurs reste de coupler ces modèles avec des outils de simulation thermique afin de rendre les calculs plus efficaces sans sacrifier la précision. Par exemple, la méthode des éléments finis (comme les éléments de Lagrange P1) est couramment utilisée pour discrétiser ces modèles et obtenir des solutions numériques. Cela permet de résoudre les équations différentielles qui décrivent l’évolution des températures dans les différentes couches de glace et d'eau, tout en permettant de simuler les interactions entre les flux thermiques et les processus d'accumulation de glace de manière détaillée.

Enfin, la prise en compte des phénomènes d’échange de chaleur et de masse dans des systèmes électrothermiques protège contre la formation excessive de glace. Il est important de noter que ces modèles doivent également intégrer les effets des variations de température, qui peuvent considérablement affecter la dynamique de l’accumulation de glace et la performance globale du système de protection thermique.

Comment la méthode de couplage Schwarz est utilisée pour la simulation de l'accumulation de glace et son dégel dans les systèmes de protection thermique électrothermique

Dans la simulation des phénomènes physiques complexes, l'un des défis majeurs réside dans le couplage de modèles différents mais interdépendants. C’est le cas, par exemple, des systèmes de protection contre le givre dans les aéronefs, où les phénomènes aérodynamiques, les trajectoires des gouttelettes, ainsi que les transferts thermiques et de masse sont simultanément pris en compte. Ces phénomènes requièrent l’utilisation de solveurs distincts, mais qui doivent échanger des informations de manière fluide pour permettre une simulation cohérente et précise.

Le modèle dynamique d'accumulation de glace, ainsi que sa simulation numérique, implique des solutions de l'équation de chaleur, tant dans des formes unidimensionnelles qu'en géométries complexes et hétérogènes. Lors de l'accumulation de glace sur une aile d'avion, le processus peut être affecté par des paramètres tels que l'évaporation, la sublimation et la fonte de la glace. C’est dans ce contexte qu'intervient le modèle de couplage entre le solveur de conduction thermique et le solveur d'accumulation de glace. Ce couplage, en particulier via la méthode de Schwarz, permet de résoudre l’équation de chaleur dans des domaines non chevauchants tout en prenant en compte des conditions aux limites non linéaires.

La méthode de Schwarz, introduite pour la première fois en 1870 par Schwarz lui-même, repose sur l’idée de résoudre le problème sur plusieurs sous-domaines, qui sont ensuite interconnectés par des conditions aux limites. Dans le cas de la simulation du givre sur les surfaces des aéronefs, ces sous-domaines sont représentés par les différentes régions de l’aile, notamment les zones où se produisent les échanges thermiques entre l'air, la glace et la surface métallique. Le processus de couplage de ces domaines est itératif, chaque sous-problème étant résolu à tour de rôle, en ajustant les conditions aux limites à l’interface entre les domaines.

Dans la simulation de l'accumulation de glace, un autre défi majeur réside dans la gestion de la transition entre différents modes de glace. Par exemple, lorsqu'une cellule du maillage est en mode givre et que la solution de l’équation de chaleur pour cette cellule suggère que la température à la surface est supérieure au point de fusion de la glace, il devient nécessaire de changer de mode pour passer d’un mode de givre à un mode de fonte. Cela peut entraîner une évolution de la géométrie du maillage en fonction du temps, ce qui complique davantage la simulation. Pour y faire face, un algorithme de points fixes est utilisé, où l’on effectue des itérations locales jusqu'à convergence, en ajustant les conditions aux limites en fonction des transitions de phase.

La procédure de couplage entre le solveur de conduction thermique et le solveur d'accumulation de glace repose sur une approche de décomposition de domaine. Cette technique permet de résoudre des équations de conduction thermique dans des sous-domaines qui ne se chevauchent pas. Le couplage de ces sous-domaines se fait grâce à des conditions de transmission Robin, qui assurent une continuité thermique à l’interface des différentes régions. Ces conditions de transmission permettent de prendre en compte les échanges thermiques entre les différentes couches de glace, l’air et la surface de l’aéronef. La convergence de cette méthode a été largement étudiée, notamment par des travaux récents qui se sont concentrés sur l'optimisation des coefficients de couplage pour garantir une stabilité et une précision accrues dans les simulations.

Outre la résolution de l’équation de chaleur, les conditions aux limites jouent un rôle essentiel dans la modélisation du phénomène de formation et de dégel de la glace. En effet, dans des simulations typiques de givrage, les termes d'évaporation peuvent introduire des conditions aux limites non linéaires, rendant les calculs plus complexes. De plus, la formation de la glace dépend de la dynamique du fluide et de la géométrie de l’aile, qui évolue au fur et à mesure du temps. L’utilisation d’un maillage dynamique, qui s’adapte aux changements de forme de la couche de glace, est ainsi nécessaire pour capturer correctement les phénomènes de transition entre différents types de glace, comme le givre ou la glace fondue.

Dans la pratique industrielle, il est souvent nécessaire de séparer les codes de simulation de l’accumulation de glace et de la protection thermique. Cette séparation permet de mieux gérer les différents aspects physiques du phénomène, tout en optimisant les performances des simulations. La méthode de Schwarz, dans sa version optimisée, offre ainsi une solution robuste pour les simulations impliquant des domaines non chevauchants, en garantissant la stabilité et la convergence même dans des configurations complexes et hétérogènes.

La capacité à gérer des conditions aux limites non linéaires et à adapter dynamiquement le maillage est essentielle pour la simulation précise des systèmes de protection contre le givre. Le couplage entre les différentes couches de glace, la dynamique du fluide et les phénomènes thermiques constitue un défi majeur pour les ingénieurs et chercheurs dans ce domaine. Cependant, les progrès réalisés dans la méthode de Schwarz et dans l’optimisation des techniques de couplage permettent aujourd’hui d’atteindre une grande précision dans la simulation de ces phénomènes complexes.

Comment modéliser et simuler la solidification des gouttes d’eau surfondue en suspension et sur substrat froid ?

La solidification des gouttes d’eau surfondue, qu’elles soient en suspension dans un flux gazeux ou déposées sur un substrat froid, est un phénomène complexe impliquant des transferts thermiques et massiques couplés avec un changement de phase. La compréhension approfondie de ces processus est cruciale, notamment dans des secteurs comme l’aéronautique où la formation de glace peut compromettre la sécurité et la performance des appareils. Pour aborder ce problème, la modélisation mathématique et la simulation numérique jouent un rôle fondamental.

Une méthode hybride combinant analyse numérique et analytique, connue sous le nom de Generalized Integral Transform Technique (GITT), permet de résoudre avec un contrôle d’erreur les problèmes aux frontières mouvantes liés à la conduction thermique non linéaire transitoire avec changement de phase. Cette technique s’applique efficacement à la modélisation unidimensionnelle d’une goutte sphérique suspendue ainsi qu’à une formulation bidimensionnelle d’une goutte sphérique reposant sur un substrat solide, capturant ainsi la dynamique de la surfusion et de la solidification.

Parallèlement, une approche mixte dite Coupled Integral Equations Approach (CIEA) reformule le problème sous une forme combinant modèles lumped (agrégés) et différentielles, améliorant ainsi la simplicité et l’efficacité des calculs pour les gouttes suspendues en dimension un. Cette réduction de modèle facilite la résolution via GITT, en combinant les avantages des deux méthodologies. Ces outils permettent non seulement de simplifier les modèles multidimensionnels complexes mais aussi de valider les simulations grâce à des campagnes expérimentales bien documentées.

Les paramètres dimensionnels et sans dimension jouent un rôle déterminant dans la description des transferts. Parmi eux, le nombre de Biot (Bi) caractérise l’échange thermique convectif entre la goutte et l’air ambiant, ainsi que le transfert de contact entre la goutte et le substrat. Le nombre de Stefan (St) traduit l’importance relative du changement de phase dans la dynamique thermique, tandis que des coefficients spécifiques décrivent les échanges radiatifs, la diffusion de la vapeur d’eau et les transferts de masse. La prise en compte de ces différents phénomènes, couplée à l’évolution spatiale et temporelle des températures, permet de tracer précisément la position de la frontière solide-liquide au sein de la goutte en cours de congélation.

Le comportement thermique diffère notablement selon que la goutte soit libre en suspension ou appuyée sur un substrat. En suspension, le refroidissement est largement influencé par la convection avec le flux d’air ambiant, tandis que sur substrat, le transfert thermique au point de contact devient prépondérant, modifiant le profil de température et la vitesse de cristallisation. La surfusion elle-même, état métastable où l’eau reste liquide sous son point de congélation, joue un rôle clé dans le déclenchement du phénomène de solidification, que la modélisation doit capturer avec finesse.

Il est essentiel de comprendre que la solidification d’une goutte surfondue est un processus multifactoriel où la géométrie, les propriétés thermophysiques du fluide, les conditions aux limites et l’interaction avec l’environnement jouent tous un rôle intégré. La simulation fidèle de ces phénomènes nécessite ainsi une représentation précise des échanges thermiques par convection, conduction et rayonnement, couplée aux transferts de masse liés à la vapeur d’eau.

Par ailleurs, la validation expérimentale des modèles numériques constitue une étape cruciale, car elle permet d’affiner les paramètres et de garantir que les prédictions reproduisent fidèlement les comportements observés. Cette confrontation théorie-expérience est indispensable pour développer des solutions pratiques, notamment des revêtements anti-givrage et des stratégies de contrôle du givre.

La maîtrise des processus de solidification des gouttes surfondues est donc au carrefour de plusieurs disciplines, impliquant des phénomènes physiques complexes et souvent non linéaires. La modélisation hybride proposée offre un cadre rigoureux et adaptable pour analyser ces processus dans différents contextes, allant du vol en atmosphère froide aux applications cryogéniques.

En résumé, une approche intégrée combinant les techniques GITT et CIEA permet d’aborder efficacement les problèmes de transfert thermique et massique couplés à un changement de phase dans des gouttes surfondues, en suspension ou en contact avec un substrat. La compréhension des mécanismes à l’œuvre et la capacité à simuler précisément ces phénomènes ouvrent la voie à des avancées technologiques majeures dans la prévention du givrage et la gestion thermique dans des environnements extrêmes.

Il est important de considérer aussi les effets dynamiques induits par la vitesse du flux d’air et les variations de température ambiante, qui peuvent fortement modifier les conditions de surfusion et la cinétique de solidification. La topographie et les propriétés thermiques du substrat sont également déterminantes pour le transfert de chaleur au contact, influençant la propagation du front de gel. Enfin, les phénomènes de nucléation et de recalescence, phases critiques dans la cristallisation, doivent être pris en compte pour une modélisation complète. Comprendre ces subtilités permet de mieux anticiper la formation de glace et de concevoir des matériaux et surfaces plus efficaces pour le contrôle du givrage.