L’existence et l’unicité des solutions faibles d'entropie pour des équations hyperboliques scalaires sont des questions fondamentales dans la théorie des équations aux dérivées partielles (EDP). Ces problèmes sont souvent abordés dans le cadre des équations de conservation, où l'objectif est de déterminer les solutions qui respectent certaines propriétés physiques comme la conservation des quantités et la gestion des discontinuités, telles que les chocs ou les rarefactions.

Une question centrale dans l’étude des solutions de ce type d’équations concerne l’entropie, qui permet de sélectionner la solution appropriée parmi plusieurs candidates. Dans le cas général, les solutions peuvent être multiples, mais la sélection de la solution correcte repose sur l’usage des entropies et des flux d’entropie qui satisfont à des conditions particulières, notamment celles définies par les entropies de Kruzhkov et les solutions faibles.

Dans le cadre de l’équation hyperbolique scalaires de conservation, un problème typique prend la forme suivante :

tu+xf(u)=0\partial_t u + \partial_x f(u) = 0

avec des conditions initiales u(x,0)=u0(x)u(x, 0) = u_0(x), où u(x,t)u(x, t) est la variable recherchée et f(u)f(u) est une fonction convective, souvent choisie sous la forme f(u)=u2f(u) = u^2 dans le cas des fluides ou des gaz parfaits.

L’une des premières questions qui se posent est celle de la régularité de la solution. Une solution faible d'entropie est une fonction qui, bien que non nécessairement lisse, satisfait une forme affaiblie des équations de conservation en intégrant des testeurs contre des fonctions de test bien choisies. Ces solutions peuvent décrire des phénomènes physiques tels que des chocs, des discontinuïtés ou des solutions en forme de rarefaction.

Existence et Unicité avec les Conditions aux Limites

L’existence de solutions à ce type d'équation peut être prouvée en utilisant des techniques basées sur des approximations successives et des méthodes numériques. Par exemple, une méthode consiste à introduire un terme de diffusion pour régulariser l'équation hyperbolique, et à faire tendre ce terme vers zéro, ce qui permet de démontrer l’existence d’une solution. Une autre approche consiste à considérer des schémas numériques monotones, qui sont capables de garantir l’existence de solutions faibles.

Cependant, l'unicité des solutions n'est pas toujours garantie. Un exemple typique de non-unicité se produit lorsque l'on utilise les entropies de Kruzhkov classiques. Dans ce cas, il existe des solutions multiples, en particulier lorsque l’on considère une condition initiale présentant des discontinuités.

Prenons un exemple classique de solution non unique : si l’on considère une équation de conservation avec des conditions initiales u0(x)=1u_0(x) = 1 presque partout sur [0,1][0, 1], il est possible d’obtenir deux solutions différentes en fonction du choix de la fonction de test pour l’entropie. La première solution peut être une solution continue, alors que la seconde correspond à une propagation de discontinuïtés dans la solution. Ce phénomène de non-unicité est lié à l’utilisation de certaines entropies, notamment celles qui sont basées sur la norme uk|u - k|, où kk est une constante choisie dans l'intervalle des valeurs possibles de uu.

Pour garantir l’unicité, il est essentiel d'utiliser des entropies plus restrictives, comme les semi-entropies de Kruzhkov, qui sont définies par des fonctions η(s)=(sk)+\eta(s) = (s - k)_+ et η(s)=(sk)\eta(s) = (s - k)_-, où (sk)+(s - k)_+ est la partie positive de sks - k et (sk)(s - k)_- est la partie négative. Ces entropies permettent de sélectionner une seule solution parmi les multiples solutions possibles.

Propriétés des Espaces de Variation Bornée

L’une des notions clés dans l’analyse des solutions faibles d'entropie est celle des fonctions de variation bornée, ou espaces BVBV. Une fonction est dite de variation bornée si sa variation totale est finie sur un intervalle donné. Dans le cadre de l’équation hyperbolique, les solutions u(x,t)u(x, t) peuvent être des fonctions de variation bornée dans xx pour chaque instant tt. Cela signifie que la solution présente des discontinuités, mais ces discontinuités sont limitées en nombre et en amplitude.

Les solutions de classe BVBV sont particulièrement intéressantes car elles permettent de modéliser des phénomènes comme les chocs ou les zones de rarefaction, qui sont essentiels dans les équations de conservation. La condition uBV([0,1])u \in BV([0,1]) signifie que la solution a des limites finies aux bords du domaine, ce qui est fondamental dans l'étude des problèmes avec des conditions aux limites.

Exemple Numérique

En ce qui concerne les schémas numériques pour résoudre ce type de problème, un exemple courant est celui des schémas de Godunov, qui sont basés sur une approche de flux de type conservatif. Ces schémas permettent de calculer des solutions approximatives à des équations de conservation tout en préservant les propriétés de stabilité et d'existence de solutions faibles. Ces méthodes sont particulièrement efficaces pour résoudre des problèmes de flux convectifs non linéaires, en garantissant la convergence vers une solution faible d'entropie.

Ainsi, dans le cadre de ces problèmes de conservation, il est crucial de comprendre non seulement la nature des solutions faibles et des entropies, mais aussi comment ces solutions peuvent être obtenues de manière numérique et comment elles se comportent en présence de conditions aux limites et de discontinuités. La sélection de l'entropie correcte, la compréhension de la variation bornée et l’utilisation de schémas numériques adaptés sont des éléments essentiels pour traiter efficacement ces problèmes complexes.

Comment garantir l’existence et l’unicité des solutions dans les problèmes quasi-linéaires elliptiques ?

Considérons le problème elliptique quasi-linéaire suivant, défini sur un domaine borné Ω de ℝⁿ, avec n≥1 : trouver u dans l’espace de Sobolev 𝐻₀¹(Ω) tel que pour tout testeur v ∈ 𝐻₀¹(Ω),

Ωa(u)vdx=Ωfvdx,\int_{\Omega} a(\nabla u) \cdot \nabla v \, dx = \int_{\Omega} f v \, dx,

où la fonction a:RNRNa : \mathbb{R}^N \to \mathbb{R}^N vérifie certaines propriétés essentielles, et ff appartient à un espace de Lebesgue adéquat.

L’étude de ce type de problème met en lumière la nécessité de conditions fortes pour assurer l’existence d’une solution, ainsi que son unicité. On observe notamment que la continuité de ff ou sa dépendance simple à uu ne suffisent pas à garantir l’unicité des solutions. Par exemple, le cas linéaire f(u)=λuf(u) = \lambda u peut admettre plusieurs solutions, dont la solution nulle et une fonction propre non triviale u2u_2. Pour dépasser ce problème, il est classique d’introduire une modification de ff pour la rendre compacte et Lipschitzienne, tout en conservant ces solutions, notamment grâce à la borne uniforme sur u2u_2.

Le critère de Lipschitzianité de ff n’assure pas pour autant l’unicité. Pour démontrer celle-ci, il est indispensable de restreindre à des cas où ff est indépendant de uu, c’est-à-dire f(x,s)=d(x)f(x, s) = d(x), et où les fonctions auxiliaires aa et φ\varphi sont Lipschitz continues. Cette hypothèse permet de recourir à des méthodes analytiques fondées sur la manipulation d’inégalités fonctionnelles, intégrales, et sur la construction d’opérateurs de troncature TεT_\varepsilon pour contrôler la différence entre deux solutions candidates.

La démonstration d’unicité s’appuie sur l’application ingénieuse de cette fonction de troncature, combinée à la coercivité de aa (c’est-à-dire, l’existence d’un α>0\alpha > 0 tel que a(u)αa(u) \geq \alpha presque partout) et sur une utilisation habile des inégalités de Cauchy–Schwarz et des immersions de Sobolev. Ces arguments mènent à la conclusion que la différence entre deux solutions u1u_1 et u2u_2 est nulle presque partout, assurant ainsi l’unicité.

Dans un cadre plus général, lorsque aa dépend non seulement de uu mais aussi de son gradient u\nabla u, la question de l’existence devient plus délicate. La continuité et la borne uniforme de a(u)a(\nabla u) ne suffisent pas pour appliquer directement le théorème de Schauder en dimension infinie, en raison du manque de compacité de l’opérateur correspondant. Pour surmonter cette difficulté, on utilise une méthode d’approximation : on résout des problèmes dans des sous-espaces de dimension finie, puis on fait tendre la dimension vers l’infini en s’appuyant sur la monotonicité de l’opérateur.

La propriété clé introduite est la monotonicité de l’opérateur, qui s’exprime sous la forme :

(a(ξ)a(η))(ξη)0ξ,ηRN,(a(\xi) - a(\eta)) \cdot (\xi - \eta) \geq 0 \quad \forall \xi, \eta \in \mathbb{R}^N,

ce qui garantit que l’opérateur udiv(a(u)u)u \mapsto -\operatorname{div}(a(\nabla u) \nabla u) est monotone entre les espaces fonctionnels H01(Ω)H_0^1(\Omega) et son dual H1(Ω)H^{ -1}(\Omega).

Ce cadre s’inscrit dans la théorie des opérateurs de Leray–Lions, qui formalise la coercivité, la croissance contrôlée, la continuité et la monotonicité nécessaires pour assurer l’existence d’une solution faible. Les hypothèses de croissance et coercivité, telles que

a(ξ)ξαξp,a(\xi) \cdot \xi \geq \alpha |\xi|^p,

et

a(ξ)C(1+ξp1),|a(\xi)| \leq C (1 + |\xi|^{p-1}),

avec p>1p > 1, permettent d’encadrer le comportement de aa pour garantir la stabilité des approximations. Ces propriétés sont fondamentales, notamment dans des modèles physiques complexes comme la simulation des écoulements turbulents (LES, Large Eddy Simulation).

Au-delà de l’existence, ces conditions permettent aussi de construire des opérateurs compacts ou faiblement continus nécessaires pour obtenir des solutions par passage à la limite dans des approximations. La combinaison des techniques d’analyse fonctionnelle (Lax–Milgram, Schauder, monotonicité) avec la manipulation précise des espaces de Sobolev et de Lebesgue est au cœur de la résolution des problèmes quasi-linéaires elliptiques.

Il importe de saisir que ces méthodes ne garantissent pas uniquement l’existence formelle d’une solution, mais fournissent aussi une compréhension qualitative de ses propriétés, notamment sa régularité, sa stabilité, et les limites dans lesquelles l’unicité peut être assurée. En pratique, ces résultats éclairent la modélisation mathématique des phénomènes physiques non linéaires et guident la conception d’algorithmes numériques robustes.

Comment la densité de Cc(Ω)C^\infty_c(\Omega) dans les espaces de Sobolev W1,p(Ω)W^{1,p}(\Omega) contribue à leur étude

Le concept de densité dans les espaces de Sobolev, en particulier la densité de Cc(Ω)C^\infty_c(\Omega) dans W1,p(Ω)W^{1,p}(\Omega), est un pilier fondamental de l’analyse fonctionnelle, en particulier dans les théories de régularité et de traces. Cela s’applique à diverses situations géométriques et analytiques où la densité de fonctions lisses et à support compact joue un rôle clé dans la compréhension des propriétés des espaces de Sobolev.

Lorsqu'on considère un sous-ensemble Ω\Omega de RN\mathbb{R}^N, la densité de Cc(Ω)C^\infty_c(\Omega) dans W1,p(Ω)W^{1,p}(\Omega) pour p<+p < +\infty repose sur une procédure de construction qui fait intervenir deux étapes fondamentales : la troncature et la régularisation.

Dans le cadre de l’espace RN\mathbb{R}^N, la première étape consiste à considérer des fonctions uW1,p(RN)u \in W^{1,p}(\mathbb{R}^N), à support compact. En prenant une fonction ψD(RN)\psi \in D(\mathbb{R}^N) telle que 0ψ(x)10 \leq \psi(x) \leq 1, avec ψ(x)=1\psi(x) = 1 pour x1|x| \leq 1 et ψ(x)=0\psi(x) = 0 pour x2|x| \geq 2, on définit des fonctions unu_n par un(x)=u(x)ψ(x/n)u_n(x) = u(x) \psi(x/n). Il est possible de montrer que unuu_n \to u dans W1,p(RN)W^{1,p}(\mathbb{R}^N) lorsque nn \to \infty. Ce premier pas démontre la densité de Cc(RN)C^\infty_c(\mathbb{R}^N) dans W1,p(RN)W^{1,p}(\mathbb{R}^N).

La seconde étape, la régularisation, repose sur une fonction ρD(RN)\rho \in D(\mathbb{R}^N) telle que ρ(x)=0\rho(x) = 0 pour x1|x| \geq 1 et ρ(x)=1\rho(x) = 1 pour x1|x| \leq 1. En définissant ρn(x)=nNρ(nx)\rho_n(x) = n^N \rho(nx) pour nNn \in \mathbb{N}^*, on peut créer une séquence un=uρnu_n = u * \rho_n qui, sous certaines conditions de régularité, converge vers uu dans W1,p(RN)W^{1,p}(\mathbb{R}^N). La régularisation permet ainsi de démontrer que Cc(Ω)C^\infty_c(\Omega) est dense dans W1,p(Ω)W^{1,p}(\Omega).

En ce qui concerne la dimension géométrique, lorsqu'on considère Ω=R+N\Omega = \mathbb{R}^N_+, l'extension du résultat est similaire, mais avec une légère modification de la seconde étape pour prendre en compte les spécificités du domaine R+N\mathbb{R}^N_+. En effet, en étendant uu à zéro à l'extérieur de R+N\mathbb{R}^N_+, et en adaptant la fonction ρn\rho_n pour qu'elle soit nulle à l’extérieur de la demi-espace, on montre que la convergence se fait toujours dans W1,p(R+N)W^{1,p}(\mathbb{R}^N_+).

Un autre aspect crucial est l'opérateur d'extension PP, qui est un opérateur linéaire continu de W1,p(Ω)W^{1,p}(\Omega) vers W1,p(RN)W^{1,p}(\mathbb{R}^N), tel que pour tout uW1,p(Ω)u \in W^{1,p}(\Omega), P(u)=uP(u) = u presque partout dans Ω\Omega. Cet opérateur joue un rôle déterminant dans les espaces de Sobolev, car il permet de prolonger des fonctions définies sur des sous-domaines tout en préservant certaines propriétés fonctionnelles.

Dans un cadre plus général, lorsqu'on considère Ω\Omega comme un sous-ensemble ouvert et borné de RN\mathbb{R}^N avec une frontière Lipschitz, les résultats concernant la densité de Cc(Ω)C^\infty_c(\Omega) dans W1,p(Ω)W^{1,p}(\Omega) se réduisent à des situations spécifiques, notamment celles où Ω\Omega peut être approximée par des demi-espaces ou des ensembles réguliers. Cette réduction permet de simplifier les démonstrations et de mieux comprendre les propriétés de régularité de ces espaces.

Il est également important de noter que dans le cas où Ω\Omega est un sous-ensemble ouvert et borné, l'espace D(Ω)D(\Omega) n’est pas dense dans H1(Ω)H^1(\Omega), mais sa fermeture dans cet espace donne lieu à un sous-espace strict de H1(Ω)H^1(\Omega), noté H01(Ω)H_0^1(\Omega). Cette notion est essentielle pour comprendre la structure des espaces de Sobolev et pour les applications aux problèmes aux limites.

Enfin, la notion de trace, qui est intimement liée à la densité de Cc(Ω)C^\infty_c(\Omega) dans les espaces de Sobolev, permet d’étudier le comportement des fonctions aux frontières de Ω\Omega. En particulier, pour Ω=R+N\Omega = \mathbb{R}^N_+, il existe un opérateur linéaire et continu γ\gamma qui associe à chaque fonction uW1,p(Ω)u \in W^{1,p}(\Omega) une fonction u(0,)u(0, \cdot) sur la frontière Ω\partial \Omega, avec des propriétés de continuité et de linéarité cruciales pour les applications en analyse de frontières et en calcul des traces.