Les effets de la "vérité apparente" ou "truthiness", un concept qui désigne la tendance des individus à croire une affirmation simplement parce qu’elle semble facile à traiter cognitivement, sont largement étudiés dans les domaines de la psychologie cognitive et de la communication. L’un des résultats clés de ces recherches est que l’ajout de photos non probantes – c’est-à-dire des images qui n’apportent aucune information pertinente par rapport à l’affirmation qu’elles accompagnent – peut fausser notre jugement sur la véracité d'une déclaration. Cela se produit non seulement parce que les photos facilitent le traitement de l'information, mais aussi parce qu’elles créent des illusions de familiarité et de connaissance. Ce phénomène, loin d’être anecdotique, a des implications profondes, notamment dans le contexte de la désinformation et des fake news.

Il a été démontré que l'ajout de photos à une affirmation ou à un énoncé modifie la perception de sa véracité. Selon un modèle de "fluidité cognitive", les affirmations accompagnées de photos – même si elles ne sont en rien pertinentes – sont jugées plus vraies simplement parce qu'elles sont plus faciles à traiter cognitivement. Ces images semblent conférer un air de "légitimité" à l'énoncé, facilitant ainsi son acceptation. En d'autres termes, le traitement plus rapide et plus facile d’une affirmation associée à une image produit un effet de vérité apparente. Cette dynamique ne se limite pas aux informations clairement fausses, mais touche aussi les jugements concernant des faits ou des processus plus complexes, comme ceux relatifs à des connaissances scientifiques ou à des événements historiques.

L’un des effets les plus surprenants de ce phénomène est sa capacité à influencer notre perception de la familiarité. L'idée de familiarité, qui se base sur la rapidité avec laquelle une information peut être extraite de la mémoire, peut être manipulée par des variables contextuelles. Par exemple, il a été observé que les individus sont plus enclins à croire qu’ils ont déjà vu un mot ou un concept s'ils sont exposés à des photos récurrentes, même si ces mots ou concepts ne leur sont jamais apparus auparavant. De manière similaire, lorsque des photos non probantes sont associées à des affirmations, elles peuvent induire un sentiment erroné de familiarité, modifiant ainsi l’évaluation de ces affirmations.

Cela peut avoir des répercussions inquiétantes dans le cadre de la gestion des fake news et de la désinformation. Lorsqu'une photo est ajoutée à une nouvelle potentiellement fausse ou trompeuse, elle peut non seulement amplifier la perception de sa véracité, mais aussi conduire les gens à surestimer leurs connaissances sur le sujet en question. Par exemple, une simple image accompagnant une explication d’un phénomène complexe – comme le fonctionnement des arcs-en-ciel ou des moteurs – peut amener les individus à se sentir plus informés sur le sujet qu'ils ne le sont réellement, même si leur connaissance réelle reste limitée. Cela s'avère particulièrement préoccupant dans le contexte des médias sociaux, où les photos, souvent mises en avant, peuvent renforcer les croyances erronées.

De plus, il est crucial de comprendre que la fluidité cognitive et l'illusion de familiarité ne se limitent pas à des phénomènes isolés. Ces biais sont renforcés par la répétition et la familiarité croissante des informations, ce qui rend encore plus difficile pour un individu de distinguer une affirmation factuellement correcte d'une affirmation incorrecte. Cela peut mener à une acceptation tacite d'idées fausses simplement parce qu'elles sont associées à des éléments visuels répétitifs et familiers.

Une autre dimension de la "truthiness" qui mérite d'être abordée est son lien avec le processus de mémoire et d’évaluation des connaissances personnelles. Il a été observé que l'ajout de photos non probantes peut aussi amener les gens à surestimer la profondeur de leurs connaissances. Dans des études où des photos étaient associées à des explications de processus complexes, les participants évaluaient leur compréhension du sujet comme étant plus avancée qu'elle ne l'était en réalité. Ce phénomène d'illusion de connaissance peut conduire à un faux sentiment de compétence et d'expertise, notamment en matière d’évaluation de la véracité des informations.

Les recherches menées sur ce sujet montrent aussi que les individus ne sont pas tous égaux face à ces biais cognitifs. Les personnes disposant d'une connaissance préalable sur le sujet sont généralement moins influencées par les effets de fluidité cognitive. Cela signifie que les experts ou ceux qui sont déjà informés sur un sujet donné seront moins susceptibles d’être trompés par l'ajout de photos non pertinentes. Cependant, cet effet ne disparaît jamais complètement. Même les experts peuvent être légèrement influencés par la fluidité cognitive, bien que l'impact soit moindre.

Enfin, il est intéressant de noter que l'effet de la "truthiness" varie en fonction de la valence de l’affirmation. Les affirmations de nature négative, comme celles qui remettent en question la qualité d'un produit ou l'intégrité d'une personne, tendent à induire une forme de scepticisme ou à réduire l'impact des photos non probantes. Par exemple, une affirmation selon laquelle un vin est de mauvaise qualité peut être jugée moins crédible lorsqu'elle est accompagnée d'une photo, contrairement à une affirmation selon laquelle le même vin est de haute qualité, où l'effet des photos pourrait renforcer la perception de la vérité. Cela souligne l’importance du contexte émotionnel et de la tonalité des informations dans la formation de nos jugements.

Les effets des photos non probantes sur la vérité apparente ne se limitent donc pas à de simples manipulations visuelles. Ils s'étendent à des processus cognitifs profonds qui touchent notre mémoire, notre jugement de familiarité, et même notre estimation de nos propres connaissances. En ce sens, il est essentiel de développer une vigilance accrue face aux informations visuelles que nous consommons, en particulier dans un environnement saturé de contenus visuels manipulés ou détournés.

Comment se prémunir contre la désinformation et ses effets sur la démocratie ?

La désinformation représente aujourd'hui une menace sérieuse pour la démocratie, comme le souligne un rapport de l'Eurobaromètre (2018), selon lequel 83% des Européens estiment que les fausses informations constituent une menace pour leur système démocratique. Un autre rapport de YouGov (2017) révèle qu'à peine 4% des participants parvenaient à distinguer la fausse information de la vraie. Ce constat n'est guère surprenant à l'heure où les gens sont bombardés d'informations à chaque défilement de leur fil d'actualités, ce qui rend difficile une évaluation critique de ce qu'ils consomment. Dans un tel contexte, la diffusion de fausses informations représente un défi majeur pour un public censé être bien informé, élément indispensable au bon fonctionnement des démocraties.

Les conséquences sont profondes et multiples. Le paysage politique mondial devient de plus en plus polarisé, exacerbé par l’émergence de "bulles filtrantes" idéologiques, où les individus sont exposés à des informations qui confortent leurs croyances et opinions, sans remise en question. Ce phénomène empêche une vision nuancée des enjeux contemporains, allant des questions liées au climat et à la santé publique, comme la vaccination, jusqu'aux relations internationales. La désinformation affecte ainsi non seulement l’opinion publique, mais elle porte également atteinte à des processus décisionnels basés sur des faits.

Pire encore, la désinformation peut avoir des conséquences graves et concrètes : des rumeurs erronées peuvent entraîner des blessures, des morts, ou des crises sociales. De plus, une fois que des croyances erronées ont été assimilées, il est particulièrement difficile de les rectifier. Les recherches menées par Lewandowsky et ses collègues (2012) montrent que, même lorsque les individus reconnaissent l'erreur d’une information, il reste très difficile de corriger leurs croyances. Le simple acte de "démystifier" une information fausse semble souvent inefficace.

En réponse à cette crise, plusieurs solutions ont été proposées, allant des ajustements algorithmiques à des interventions législatives plus strictes. Dans le premier domaine, des géants comme Google et Facebook tentent d’améliorer leurs algorithmes pour limiter la propagation de fausses informations. Cependant, les résultats demeurent mitigés, car ces systèmes peinent à discerner la nuance et peuvent parfois accentuer le problème (par exemple, en bloquant des informations non fausses mais jugées biaisées). Les campagnes de vérification des faits, à l’instar de PolitiFact ou Snopes, ont également émergé comme réponse à la désinformation. Pourtant, ces initiatives, bien qu'importantes, ont des résultats limités, car la capacité de démentir toute information trompeuse est loin de suffire. En effet, la production de fausses informations nécessite moins de ressources que leur réfutation.

Une autre solution proposée repose sur la régulation législative, comme en France avec la loi contre les "fake news", instaurée notamment pendant les périodes électorales. Si ce type de législation semble prometteur, il soulève également des inquiétudes majeures concernant la liberté d’expression et la possibilité de manipulation des sources d'information par les autorités. Par exemple, l'initiative "EUvsDisinfo", financée par l’Union Européenne, a été critiquée pour avoir catalogué certains médias néerlandais comme sources de désinformation, ce qui a provoqué des débats sur la liberté de la presse et la neutralité des institutions publiques.

Dans ce contexte, un intérêt croissant se porte désormais sur l’approche psychologique de la désinformation, notamment à travers des initiatives éducatives et comportementales destinées à sensibiliser le public. Une approche traditionnelle pourrait consister à développer des compétences en "littératie médiatique" pour rendre les individus plus aptes à discerner les informations fiables de celles qui ne le sont pas. Cependant, cette approche rencontre des limites importantes. Tout d'abord, il n’est ni possible ni réaliste de corriger chaque erreur. Ensuite, la correction d’informations erronées peut s'avérer inefficace à long terme. En effet, la théorie de l’influence continue (Lewandowsky et al., 2012) montre que les personnes ont tendance à maintenir leurs croyances erronées, même après avoir été confrontées à des informations rectificatives.

Un des concepts les plus prometteurs dans la lutte contre la désinformation est celui de la "théorie de l’inoculation". Inspirée de la médecine, cette approche vise à renforcer la résistance psychologique aux tentatives de manipulation en exposant les individus à des versions affaiblies d’informations fausses avant qu’elles ne circulent massivement. Le modèle est simple : en introduisant une forme "d’information allégée" et en suscitant une réaction critique face à celle-ci, l’individu se protège mentalement contre les manipulations futures. L’idée est de rendre les gens moins vulnérables aux fausses informations en cultivant des "antibodies mentaux" qui rendront plus difficile l’adoption de croyances erronées.

Les premières recherches sur ce modèle, menées par des psychologues comme William McGuire dans les années 1960, ont montré que l’exposition à des "microdoses" de désinformation pouvait préparer les individus à résister à des tentatives de persuasion futures. Cette stratégie, qui s’apparente à un vaccin contre la désinformation, permettrait de renforcer les défenses cognitives des individus face aux contenus mensongers, bien avant qu'ils ne soient exposés à des récits complètement fallacieux. Ce modèle suggère ainsi qu'une éducation préventive, qui prépare l’esprit à repérer les techniques de manipulation, pourrait être plus efficace que les tentatives de correction après coup.

En définitive, il devient essentiel non seulement de se concentrer sur la détection et la correction des informations fausses, mais également de développer des mécanismes de résistance préventive. La véritable solution à la désinformation réside probablement dans une combinaison de stratégies : des interventions algorithmiques pour limiter la propagation des fausses informations, des législations qui régulent sans restreindre la liberté d’expression, et une approche psychologique visant à renforcer la résilience individuelle face à la désinformation.

Comment les cadres culturels façonnent nos processus de pensée et de jugement

Les codes opérants, ou cadres de signification qui permettent aux individus de comprendre leur monde, sont les réseaux de connaissances culturelles qui, au fil du temps, orientent leur manière de faire face aux situations quotidiennes. Ces réseaux d’associations, ancrés dans la culture, offrent des modèles mentaux qui permettent à chacun de prédire comment une situation se déroulera, mais aussi de déterminer ce qu’il veut et comment l’obtenir. Chaque solution « suffisamment bonne » qu’une culture propose comporte un réseau de connaissances, incluant le contenu, les procédures et les objectifs qui sous-tendent ses grands thèmes, tels que l’individualisme, le collectivisme ou l’honneur. Ainsi, chaque pratique culturelle repose sur un ensemble de réseaux de savoirs, souvent implicites, concernant la manière dont les choses se déroulent – que ce soit la tenue des mariées, le contenu d’un petit-déjeuner, et bien d’autres aspects encore.

Les contextes immédiats activent certains sous-ensembles de ces réseaux de connaissances culturelles, qui deviennent accessibles au moment où un individu doit juger une situation. Cette activation permet aux personnes d’appliquer automatiquement les procédures mentales associées à un certain état d’esprit culturel. Par exemple, lorsque l’individualisme est activé, les gens sont plus aptes à nommer rapidement un objet distinct dans un ensemble visuel, ce qui suggère l’utilisation d’un procédé de séparation. En revanche, lorsqu’un état d’esprit collectiviste est activé, les individus sont plus enclins à se rappeler où se trouvent les objets dans un ensemble visuel et éprouvent des difficultés à ignorer les informations visuelles ou auditives superflues, ce qui témoigne d’un procédé qui privilégie la relation et l’interconnexion.

Des études menées à travers plusieurs cultures (États-Unis, Norvège, Hong Kong, Corée) ont montré que les personnes se laissaient guider par l’activation d’un état d’esprit collectiviste en fonction des indices culturels présents dans leur environnement immédiat. Cela se manifeste par une volonté accrue de compléter un ensemble, même au prix de devoir accepter des options moins souhaitées, ou par des difficultés à trouver la meilleure correspondance lorsque l’on fait face à des antonymes ou des analogies standardisées. Les identités de groupe, qu’elles soient nationales (par exemple, être Britannique) ou locales (par exemple, être rural ou patriote), jouent un rôle crucial dans cette activation de l’esprit collectiviste. Ce dernier favorise une attention plus grande aux connexions entre éléments, ce qui peut, paradoxalement, rendre plus difficile la détection d’erreurs logiques.

En outre, la connaissance culturelle influe non seulement sur la fluidité de traitement de certaines informations, mais aussi sur la manière dont nous traitons l’inattendu. En effet, lorsque les événements se déroulent comme prévu, il est facile pour un individu de les comprendre et d’agir en conséquence. En revanche, toute déviation par rapport aux attentes culturelles suscite un sentiment de confusion, qui peut induire un changement de mode de raisonnement, passant du raisonnement intuitif à un raisonnement plus systématique et fondé sur des règles. Un exemple classique de cette dynamique provient de l’expérience de Bruner et Postman (1949), où des étudiants américains ont mis plus de temps à identifier des formes (cœurs, carreaux, trèfles, piques) si celles-ci étaient délibérément présentées dans des couleurs qui ne correspondaient pas aux attentes culturelles associées à ces symboles (par exemple, un pique rouge). Les participants ont automatiquement appliqué leurs connaissances culturelles, malgré l’absence d’instructions explicites à cet égard. Ce phénomène souligne l'importance de la culture dans le traitement cognitif, même en l'absence de signal explicite.

Les connaissances culturelles, en effet, ne se contentent pas de faciliter la gestion des informations compatibles avec les attentes culturelles; elles rendent également la détection des anomalies plus difficile. Lorsque des informations ou situations s’écartent de ce qui est habituellement perçu comme "normal" ou "attendu" selon la culture de l'individu, cela peut perturber son jugement intuitif, entraînant un passage vers une réflexion plus analytique. Par exemple, des expériences menées par Mourey, Lam et Oyserman (2015) ont révélé que l’exposition à des situations culturellement fluentes (qui respectent les attentes culturelles) rendait le traitement des informations plus rapide et intuitif. En revanche, un cadre culturelement disfluent (qui va à l’encontre des attentes) entraînait une difficulté à traiter l’information de manière fluide, ce qui poussait les individus à adopter un raisonnement plus logique et systématique.

Un exemple en matière de raisonnement montre à quel point la culture influence les réponses intuitives. Lorsqu’un individu est confronté à un problème de type mathématique, comme celui-ci : « Une canne à pêche et un appât coûtent ensemble 1,10 $ en total. La canne à pêche coûte 1 $ de plus que l’appât. Combien coûte l’appât ? », une réponse intuitive serait de 0,10 $, car l’on soustrairait simplement 1 $ du total. Cependant, la réponse correcte, fondée sur un raisonnement systématique, serait de 0,05 $, en utilisant une approche plus logique qui applique les règles de l’équation donnée. Cette distinction entre raisonnement intuitif et raisonnement fondé sur des règles montre comment les individus, influencés par leurs connaissances culturelles, peuvent être poussés à faire des erreurs en l’absence d’un cadre culturel familier.

Les connaissances culturelles ne se contentent pas de guider les individus dans des tâches quotidiennes, elles influencent aussi profondément leur manière de raisonner face à des situations qui ne respectent pas les attentes culturelles, activant ainsi des processus cognitifs plus complexes. Ce phénomène est fondamental pour comprendre comment les individus prennent des décisions, jugent des situations et interagissent avec leur environnement. Dans une société où les contextes culturels peuvent se mélanger ou se confronter, il est essentiel de prendre en compte non seulement les connaissances explicites, mais aussi les mécanismes implicites et souvent automatiques qui influencent nos jugements.

Comment la fluidité culturelle influence nos décisions et perceptions

Les recherches sur la fluidité culturelle ont montré qu’une exposition à des indices culturels familiers ou peu familiers peut grandement affecter notre manière de raisonner et, en conséquence, nos prises de décision. Ce phénomène, bien que subtil, a des répercussions importantes sur notre capacité à traiter de l'information de manière critique. Ainsi, même lorsque des situations exigent un raisonnement systématique basé sur des règles, les individus exposés à des indices culturellement fluides sont plus enclins à se fier à un raisonnement intuitif, basé sur des associations immédiates, plutôt qu’à appliquer des règles logiques. Cette tendance a été démontrée dans plusieurs expériences, où les participants, malgré la présence d’indices culturels favorables à un raisonnement basé sur des règles, ont préféré utiliser des réponses instinctives.

Dans un premier ensemble d’expériences, des participants ont été exposés à des photographies de mariages culturellement fluides et non fluides. Les images correspondant aux traditions de mariage occidentales classiques, comme la robe blanche de la mariée et le gâteau à étages, ont été jugées comme culturellement fluides, tandis que celles qui présentaient des éléments culturels moins conventionnels, comme des robes de mariée aux couleurs vives ou des décorations excentriques, ont été classées comme culturellement non fluides. Malgré la simplicité de l'application d'une règle logique, comme celle de répondre selon des critères stricts de tradition, les participants exposés à des photos culturellement fluides ont plus fréquemment utilisé leur intuition pour juger des photos. Cette préférence pour un raisonnement intuitif a persisté même lorsque les tâches suivantes étaient séparées des indices culturels, démontrant la force de ces influences subconscientes.

Une autre série d'expériences a impliqué l'exposition à des notices de décès, où les participants ont été confrontés à des versions culturellement fluides et non fluides d'obituaires. Les obituaires culturellement fluides étaient rédigés dans un ton triste et louant les qualités du défunt, tandis que les obituaires non fluides étaient plus neutres et ne contenaient pas d’éloges. Les résultats ont révélé que ceux qui avaient été exposés à des messages culturellement fluides étaient plus enclins à accepter les informations sans exercer un raisonnement systématique, montrant ainsi une plus grande vulnérabilité à l'acceptation de messages potentiellement erronés ou biaisés.

Ces résultats ont d'importantes implications pour comprendre comment la fluidité culturelle influence la perception des messages persuasifs. Il a été suggéré que les messages persuasifs qui suivent les attentes culturelles tacites des individus, en termes d'images, de phrases et de contenu, activent un raisonnement basé sur l'identité plutôt que sur l'information. Dans ce contexte, le raisonnement systématique est inhibé, car l'individu accorde davantage de poids à des éléments sociaux et culturels familiers qu'à la qualité ou la véracité du message. Par conséquent, lorsqu'une personne est exposée à un message culturellement fluide, elle est plus susceptible de se concentrer sur l'apparence et la familiarité du message plutôt que de l'analyser en profondeur.

En outre, la manière dont un message est perçu et traité peut également dépendre de la logique de la communication. Les individus partent généralement du principe que ceux qui communiquent des informations ont l’intention d’informer, et non de manipuler ou de persuader. Ce principe, connu sous le nom de maximes de Grice, est un fondement de la communication, mais il devient problématique lorsqu'un message est conçu non pas pour informer, mais pour influencer un jugement ou un choix. Les personnes exposées à des messages persuasifs culturellement fluides sont moins susceptibles de remettre en question la véracité ou la partialité de l'information, ce qui les rend plus vulnérables à la désinformation.

Il est essentiel de comprendre que la fluidité culturelle ne réside pas uniquement dans les éléments visibles d'un message, mais dans la façon dont ces éléments interagissent avec les attentes et les connaissances tacites des individus. Cette interaction entre la culture et la cognition peut rendre difficile la distinction entre l'information factuelle et la désinformation, surtout lorsque les messages sont formulés d’une manière culturellement fluide.

Ainsi, pour se protéger contre les manipulations subtiles de l’information, il est crucial de développer une conscience critique de ces dynamiques culturelles. Les individus doivent être en mesure de reconnaître les indices culturels qui activent des processus de raisonnement intuitif et les différencier des messages qui visent véritablement à informer de manière objective et impartiale. Le fait de prendre du recul par rapport à l’aspect culturel d’un message et d’adopter un raisonnement systématique, basé sur une analyse rigoureuse du contenu, est une compétence essentielle dans notre monde saturé d’informations.