Le processus de capture du dioxyde de carbone (CO2) dans les centrales électriques à gaz à cycle combiné (GTCC) repose sur une technologie d'absorption chimique utilisant des solutions aqueuses d'alkanolamines, telles que la monoéthanolamine (MEA) et la diéthanolamine (DEA), ainsi que des amines stéréiquement encombrées comme la pipérazine. Cette technologie, bien qu'ayant une longue histoire d'application dans l'industrie chimique, fait face à de nombreux défis lorsqu'elle est mise en œuvre à grande échelle, notamment en raison des faibles pressions partielles de CO2 dans les gaz de combustion et de la grande quantité d'énergie nécessaire à la régénération du solvant.

Le système de capture du CO2 se compose de deux composants principaux : un absorbeur, où le CO2 est capturé, et un régénérateur (ou colonne de déstratification), où le CO2 est libéré sous forme concentrée et où le solvant est récupéré. Avant de procéder à la capture, les gaz de combustion, à environ 90°C dans la cheminée du système HRSG (Heat Recovery Steam Generator) des centrales GTCC les plus efficaces, sont généralement refroidis à environ 45-50°C. Ce refroidissement permet de réduire les particules susceptibles de provoquer des problèmes opérationnels et d'autres impuretés, évitant ainsi des pertes coûteuses du solvant dans un refroidisseur en contact direct ou une « tour de lavage ». L’amine présente dans le solvant réagit chimiquement avec le CO2 et, dans une moindre mesure, avec des traces de NOx pour former un composé faiblement lié.

Un ventilateur supplémentaire, ou soufflante, est nécessaire pour surmonter la perte de pression dans l'installation de capture, ce qui représente une consommation d'énergie parasitaire significative. Toutefois, la plus grande contrainte imposée à la production d'énergie de la centrale par le système PCC (post-combustion capture) provient de la grande quantité de chaleur requise pour régénérer le solvant. Cette chaleur, habituellement fournie par de la vapeur extraite du cycle inférieur, entraîne une réduction de la puissance de la turbine à vapeur et diminue considérablement l'efficacité nette du GTCC. L'énergie nécessaire pour compresser le CO2 capturé, afin de l'acheminer vers un site de stockage ou de l'injecter dans un réservoir, constitue également un facteur important de consommation énergétique.

Les technologies de purification des gaz de synthèse et de désulfuration des gaz, utilisant des alkanolamines, sont couramment employées depuis un siècle dans l'industrie chimique. L'absorption chimique pour la récupération du CO2 a vu le jour dans les années 1930 avec un brevet américain accordé à R. R. Bottoms, et son application à la récupération du CO2 pour le renforcement de la production pétrolière (Enhanced Oil Recovery, EOR) a débuté dans les années 1970. La proposition de capturer et de stocker le CO2 pour atténuer le changement climatique a émergé en 1977, bien que des défis importants demeurent, notamment la faible pression partielle du CO2 dans les gaz de combustion et la haute énergie nécessaire pour régénérer le solvant. L’oxygène, présent à hauteur de 12% dans les gaz de combustion, peut également entraîner une dégradation du solvant et favoriser la corrosion des équipements. Malgré l’utilisation efficace d'inhibiteurs pour contrer ces effets, la nécessité d'éliminer en continu les impuretés de la solution augmente les coûts d'exploitation.

L'intégration d'un système de capture du CO2 dans une centrale électrique à gaz affecte également la rentabilité. Par exemple, les données sur les coûts et les performances d'un système de capture par absorption chimique avec MEA, publiées dans une étude de l'IEA GHG (International Energy Agency Greenhouse Gas R&D Programme) et de SINTEF, montrent un impact considérable sur l'efficacité nette et les coûts d'investissement. Selon ces études, le coût marginal de l'ajout du bloc de capture du carbone s'élève à environ 1 080 USD par kilowatt installé (en tenant compte des coûts supplémentaires liés à la compression du CO2 à 100 bars). Un autre critère utile pour évaluer les coûts de capture est le coût annualisé par tonne de CO2 capturée, qui, selon les données de SINTEF, serait de 80,8 USD par tonne. Cependant, ces estimations sont souvent jugées trop optimistes, et la véritable évaluation des coûts nécessite des études détaillées de conception préliminaire (FEED), prenant en compte tous les aspects financiers d’un projet industriel.

Un autre facteur essentiel à prendre en compte est l'impact des économies d'échelle, qui ne sont pas toujours aussi importantes que prévu dans les études disponibles. Par exemple, une étude réalisée pour une centrale électrique à gaz naturel de 420 MW à Norvège a révélé que l'impact de l'optimisation de la taille du projet sur les coûts d'investissement était moins favorable que prévu. De plus, la consommation de vapeur pour la régénération et les coûts liés à la compression du CO2 à des pressions élevées constituent des défis supplémentaires.

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Quel est le coût réel de la capture du CO2 à grande échelle et quels sont les défis associés?

La capture du dioxyde de carbone (CO2) à partir des gaz de combustion, en particulier dans les centrales électriques utilisant des cycles combinés gaz-vapeur (GTCC), représente un défi technique et économique majeur. Dans les études menées en 2009 et 2021, les coûts en capital (CAPEX) et d'exploitation (OPEX) pour la mise en place d'une telle technologie ont été analysés et mis en perspective. Les chiffres obtenus sont souvent utilisés pour évaluer la viabilité économique de ces projets dans le cadre de la transition énergétique, bien que ces estimations soient largement influencées par le taux d'utilisation des centrales électriques et par des technologies spécifiques employées.

Selon l’étude de 2009, les coûts d’installation du système de capture du CO2 ont été estimés à 2,24 milliards de couronnes norvégiennes (NOK), soit environ 472,5 millions de dollars en 2016, un chiffre qui a évolué en 2021 pour atteindre 477 millions de dollars. Ces estimations sont basées sur l'utilisation d'un processus générique d'absorption chimique avec des amines, qui capte 85% du CO2 émis. Cette technologie, bien que fiable, nécessite d'importants investissements en raison de l'énorme infrastructure qu'elle requiert. Par exemple, les études de 2009 et 2021 indiquent que les coûts par tonne de CO2 capturée varient selon le nombre d'heures de fonctionnement de la centrale. Plus la centrale fonctionne, plus ces coûts se réduisent, atteignant des valeurs d'environ 95-100 dollars par tonne pour 6 000 heures de fonctionnement par an.

Cependant, ces coûts ne prennent pas en compte plusieurs aspects critiques de la capture du CO2 à grande échelle. Tout d'abord, les études tendent à sous-estimer les dépenses réelles en raison de la faible rentabilité de nombreux projets pilotes et du manque de transparence concernant les technologies plus avancées, telles que les amines propriétaires ou les processus uniques, dont les informations sont souvent protégées par des droits de propriété. De plus, une étude plus poussée montre que les technologies de capture utilisées aujourd'hui ont un impact important sur l'efficacité thermique des centrales, augmentant ainsi la consommation énergétique parasite et diminuant la production nette d'électricité. Cela constitue un frein majeur à l'intégration de la capture du CO2 dans les centrales GTCC, dont le rendement énergétique est déjà contraint.

Un autre facteur à considérer est la faible concentration de CO2 dans les gaz de combustion des centrales à cycle combiné gaz-vapeur. Cette faible teneur en CO2 complique le processus de capture, car la « force motrice » nécessaire à l'absorption du CO2 est limitée. Pour contourner ce problème, des solutions ont été proposées, telles que l'envoi partiel des gaz de combustion vers une autre turbine à gaz afin d'augmenter la concentration en CO2, mais ces modifications techniques sont complexes et peuvent coûter très cher.

Le projet Petra Nova, un exemple significatif de capture post-combustion, a été conçu pour capturer et stocker 1,4 million de tonnes de CO2 par an à partir des gaz d'une centrale électrique au charbon. Ce projet, qui a démarré en janvier 2017, a fait face à des problèmes mécaniques récurrents et à des difficultés économiques, notamment la chute des prix du pétrole. Malgré des investissements initiaux de près de 1 milliard de dollars, incluant des subventions et des prêts gouvernementaux, l'installation a été fermée en mai 2020, après avoir souffert de pannes pendant près d'un an. Cette fermeture illustre les défis financiers et techniques associés à la capture du CO2, qui, même avec des technologies avancées, reste une solution coûteuse et souvent peu rentable.

Les données actuelles suggèrent que, même avec des efforts de conception détaillée et des études approfondies, des changements imprévus dans les conditions du marché et des performances techniques insuffisantes peuvent rendre un projet non viable. En effet, la capture du CO2 nécessite non seulement un investissement en capital élevé, mais entraîne également une perte d'efficacité thermique, ce qui accroît la consommation d'énergie et, par conséquent, le coût global de l'électricité produite.

Ainsi, pour améliorer la viabilité de ces systèmes de capture, la recherche se concentre sur des technologies qui minimisent l'impact sur l'efficacité thermique des centrales électriques. Parmi celles-ci, on trouve les amines avancées, les solvants alternatifs tels que l'ammoniac, ainsi que des technologies plus novatrices comme l'adsorption, la séparation par membrane, et même la séparation cryogénique. L’utilisation de systèmes biomimétiques et de microalgues, bien que moins développée, suscite également un intérêt croissant dans la communauté scientifique.

Les obstacles à surmonter sont nombreux, et le chemin vers une capture efficace du CO2 nécessite à la fois des innovations technologiques majeures et des ajustements financiers considérables. Les projets comme Petra Nova illustrent que, même avec un soutien gouvernemental substantiel et des technologies de pointe, les systèmes de capture post-combustion restent loin d’être une solution viable à grande échelle sans une évolution significative des coûts et des performances.

Comment optimiser l'exploitation des turbines à gaz et à vapeur dans les centrales électriques modernes ?

Les turbines à gaz et à vapeur sont deux moteurs principaux essentiels à la production mondiale d'électricité. Bien qu'auparavant, dans de nombreuses régions du monde, la turbine à vapeur ait été au centre de la production, notamment aux États-Unis, la situation a radicalement changé ces dernières décennies. Alors que le charbon dominait le secteur énergétique, remplacé progressivement par le gaz naturel dans les centrales modernes à cycle combiné, il est désormais clair que ces deux technologies, associées dans des cycles combinés, restent au cœur des centrales électriques à haut rendement.

Les turbines à gaz, en particulier celles fonctionnant en cycle combiné, présentent plusieurs avantages notables. Leur efficacité thermique peut dépasser les 40 % en cycle simple, et jusqu'à plus de 60 % pour les centrales combinées. Cette efficacité est associée à une grande densité de puissance, puisque des turbines de 50 Hz peuvent produire plus de 500 MWe. De plus, elles se distinguent par leur grande flexibilité, avec un démarrage rapide et une capacité de régulation de charge (load ramps) importante, tout en maintenant des coûts d'installation relativement bas – moins de 1 000 $ par kW pour un cycle combiné.

Ces turbines sont également plus écologiques que d'autres formes de production d'énergie. Leur conception permet d’émettre des quantités minimales de polluants, notamment de dioxyde de soufre (SOx), de mercure, et de monoxyde de carbone (CO), tout en minimisant les émissions de dioxyde de carbone (CO2) et d’oxydes d'azote (NOx). Ces caractéristiques font des turbines à gaz une solution attrayante dans le cadre de la transition énergétique, particulièrement dans le contexte de la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Cependant, l'optimisation de l'exploitation de ces turbines n'est pas seulement une question d'efficacité. La gestion des systèmes associés, tels que les générateurs de vapeur à récupération de chaleur (HRSG) et les cycles thermodynamiques avancés, joue également un rôle déterminant. La performance de ces installations repose sur une interconnexion parfaite entre les différentes technologies – des turbines elles-mêmes jusqu'aux systèmes de refroidissement et de génération de chaleur. Un aspect souvent négligé dans les analyses techniques est l’opérabilité de ces systèmes. En effet, au-delà de la simple production d'énergie, il s'agit de garantir une exploitation sûre et fiable de ces équipements tout en respectant des exigences opérationnelles strictes.

Dans ce contexte, l’opérabilité se définit comme la capacité de maintenir une installation ou un équipement en état de fonctionnement sûr et fiable, tout en répondant aux exigences opérationnelles prédéfinies. Ces exigences sont multiples et peuvent concerner la disponibilité (la capacité à démarrer et fonctionner à la demande), la fiabilité (maintenir une performance constante pendant une période prolongée), et la maintenabilité (facilité d'entretien et de réparation).

L'un des plus grands défis dans l'exploitation des turbines à gaz et à vapeur réside dans la gestion des états transitoires, où l'unité ne fonctionne pas dans des conditions idéales. En effet, une centrale n’opère que rarement à son point de conception, c’est-à-dire dans les conditions exactes pour lesquelles ses équipements ont été dimensionnés. L’opération hors des points de conception – aussi appelée opération hors des limites – implique de traiter des variations de charge et de température de manière efficace, ce qui nécessite des équipements capables de s'adapter à des conditions ambiantes variées.

La maintenance prédictive, l’intégration de solutions de contrôle avancées et l’optimisation de la consommation de carburant sont des pistes essentielles pour maximiser la performance des turbines à gaz. À ce titre, des innovations comme la combustion d'hydrogène ou des solutions de stockage d'énergie avec air comprimé font partie des tendances émergentes. Ces nouvelles technologies visent à diversifier l'approvisionnement en énergie et à garantir une flexibilité maximale dans la gestion des pics de demande.

Il est crucial de comprendre que la conception et l’opérabilité des centrales électriques modernes reposent sur une approche intégrée et flexible. Une turbine ne fonctionne pas seule : elle fait partie d’un ensemble complexe de systèmes interconnectés où la synchronisation des différents composants devient essentielle pour garantir une production d’énergie stable, fiable et efficace. Cette approche requiert des capacités de gestion rigoureuses, des technologies de surveillance avancées, et une formation continue du personnel d'exploitation pour anticiper les pannes et intervenir en cas de défaillance.

Les centrales à cycle combiné (GTCC) représentent une avancée technologique majeure, mais leur efficacité dépend d’une gestion minutieuse des conditions d’exploitation. Cela inclut la gestion des cycles thermiques, le contrôle de la production d’énergie sous différentes charges et le respect des normes environnementales. D’ici quelques décennies, l’intégration de technologies comme les réacteurs nucléaires modulaires ou les systèmes solaires combinés à des turbines à gaz pourrait transformer davantage le paysage énergétique mondial.