Donald Trump, élu président des États-Unis en 2016, a bousculé les attentes traditionnelles de la politique étrangère américaine. Ses déclarations et son comportement vis-à-vis des alliances internationales ont semé l'incertitude et provoqué des débats passionnés. En tant que candidat, Trump a remis en question les engagements sécuritaires des États-Unis, affirmant que le pays ne pouvait plus se permettre de défendre des nations comme l'Arabie Saoudite, le Japon, l'Allemagne et la Corée du Sud. Cette remise en question du rôle traditionnel de l'Amérique sur la scène internationale a éveillé des inquiétudes, notamment parmi les experts en politique étrangère qui ont vu en lui un défenseur d'une « nouvelle isolationnisme » ou d'un « nationalisme exacerbé ».

L'un des aspects les plus frappants de la campagne de Trump a été sa position sur la prolifération nucléaire. Trump a suggéré que des pays comme le Japon et la Corée du Sud pourraient envisager de développer leur propre dissuasion nucléaire, ce qui représentait un défi direct à des décennies de politique américaine, qui s'était traduite par des garanties de sécurité pour ces pays en échange de leur non-développement d'armements nucléaires. Ces déclarations ont créé une division importante avec l'establishment politique américain, qui considère l'architecture sécuritaire dirigée par les États-Unis comme essentielle à la stabilité internationale.

En parallèle, Trump a exprimé une volonté de réévaluer les relations avec la Russie. Ses propos sur le souhait d'établir de bonnes relations avec Moscou, tels que « Ce serait une chose formidable si nous pouvions nous entendre avec la Russie », ont suscité des critiques, surtout après l'émergence des rapports sur l'ingérence de la Russie dans les élections présidentielles de 2016. Le discours pro-russe de Trump allait à l'encontre de la position traditionnelle des États-Unis, qui a longtemps vu la Russie comme un adversaire stratégique dans un contexte de guerre froide prolongée.

Mais peut-on réellement parler d'une rupture radicale avec la politique étrangère des États-Unis sous Trump ? En réalité, malgré ses discours et ses déclarations provocatrices, les actions de Trump à la tête de la Maison-Blanche ont souvent semblé se conformer aux grandes lignes de la politique étrangère américaine post-Seconde Guerre mondiale. Par exemple, Trump a réaffirmé l'engagement de sécurité des États-Unis envers l'OTAN, renforcé la présence militaire américaine en Europe de l'Est et continué de soutenir des alliés clés comme le Japon et la Corée du Sud face aux menaces nucléaires et militaires. De plus, il a approuvé la livraison d'armements létaux à l'Ukraine dans sa lutte contre les séparatistes soutenus par la Russie, ce qui est une action qui s'inscrit dans la continuité des politiques des administrations précédentes.

Malgré sa rhétorique isolattionniste, Trump a aussi poursuivi des interventions militaires en réponse à des crises internationales. Les frappes aériennes contre la Syrie en 2017 et 2018, en réponse à l'usage présumé d'armes chimiques par le régime d'Assad, ont rappelé à la communauté internationale que, même avec Trump à la tête des États-Unis, le pays restait engagé dans un rôle actif de "gendarme du monde". Ces interventions, bien que limitées en comparaison des grandes guerres du passé, ont été perçues comme des témoignages de l’influence persistante des États-Unis dans les affaires mondiales.

Cependant, la question demeure : Trump avait-il une vision claire et cohérente de la politique étrangère américaine, ou ses actions étaient-elles davantage le reflet de décisions impulsives et opportunistes, dictées par ses intérêts électoraux et ses relations personnelles avec certains dirigeants mondiaux ? Il est difficile de répondre de manière définitive à cette question. Beaucoup d'analystes estiment que Trump manquait des connaissances et de la préparation nécessaires pour développer une stratégie étrangère cohérente. Ses déclarations ont parfois semblé refléter une absence de compréhension des enjeux internationaux complexes et des limites de l'influence américaine. Comme l'a souligné Steve Bannon, un de ses anciens conseillers, Trump « ne savait pas beaucoup de détails », et sa maîtrise des sujets de politique étrangère semblait limitée.

En somme, bien que Trump ait certes contesté certaines normes et pratiques de la politique étrangère traditionnelle américaine, il est difficile de le considérer comme un véritable réformateur. Ses actes ont parfois contredit ses paroles, et sa présidence a été marquée par une oscillation entre l’isolationnisme annoncé et l’interventionnisme pragmatique, selon les circonstances. Le rôle des États-Unis dans l'ordre international post-Seconde Guerre mondiale est-il en train de changer sous Trump, ou bien s'agit-il d'une phase transitoire, alimentée par un président à la fois instable et imprévisible ? C’est la question centrale à laquelle il faudra répondre dans les années à venir.

La guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine : Quelles implications pour l'économie mondiale ?

Les relations économiques entre les États-Unis et la Chine ont toujours été marquées par une dynamique complexe, oscillant entre coopération et compétition. Sous la présidence de Donald Trump, cette relation a été placée sous haute tension, en particulier en ce qui concerne les politiques commerciales. L'administration Trump, dès ses premiers jours, a sévèrement critiqué la Chine, en particulier ses pratiques commerciales, accusant Pékin de manipuler sa monnaie, de voler la propriété intellectuelle et d'imposer des barrières commerciales injustes. Ces accusations ont conduit à l'imposition de droits de douane sur plus de 250 milliards de dollars de produits chinois à partir de mai 2019, et la menace de doubler ce montant si la Chine ne faisait pas des concessions majeures.

Cependant, bien que la Chine adopte effectivement certaines pratiques commerciales considérées comme déloyales, l'accent mis par l'administration Trump sur cette question occulte la valeur considérable de la relation économique bilatérale entre les deux géants mondiaux. En 2017, la valeur totale des échanges commerciaux entre les États-Unis et la Chine a dépassé les 635 milliards de dollars, ce qui représente un bénéfice énorme pour les deux pays et l'une des relations commerciales bilatérales les plus importantes au monde. De plus, en 2016, les entreprises chinoises ont investi plus de 50 milliards de dollars dans le secteur privé américain, contribuant à la création de plus de 200 000 emplois aux États-Unis.

Ce contexte de guerre commerciale a non seulement entraîné des pertes économiques importantes pour les deux pays, mais a également affecté certains secteurs stratégiques comme l'automobile, la technologie et l'agriculture. L'ironie réside dans le fait que même si la stratégie punitivement agressive de l'administration Trump venait à contraindre la Chine à modifier ses politiques économiques pour répondre aux demandes américaines, cela ne servirait pas nécessairement les intérêts économiques des États-Unis. Par exemple, dans le cadre des négociations commerciales, la Maison-Blanche a demandé à la Chine d'acheter plus d'un trillion de dollars de biens et services américains. Toutefois, en raison des coûts de production élevés aux États-Unis, de nombreuses entreprises américaines pourraient être contraintes d'ouvrir de nouvelles usines en Chine, augmentant ainsi la dépendance vis-à-vis des autorités chinoises et exacerbant les risques de vol de propriété intellectuelle.

En réalité, les États-Unis ne sont pas exempts de pratiques commerciales déloyales. Le pays est le deuxième après la Chine en termes de plaintes formelles déposées au sein de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) pour violations des politiques commerciales. Pourtant, la Chine respecte souvent mieux les règles de l'OMC une fois les plaintes déposées. Ce constat suggère qu'une diplomatie habile avec la Chine, visant à trouver des compromis sur les politiques commerciales, pourrait s'avérer bien plus productive qu'un affrontement frontal. Un tel effort pourrait être bien moins dommageable qu'une guerre commerciale, qui, en plus de provoquer des représailles économiques, risque d'intensifier les tensions géopolitiques entre les deux puissances.

Par ailleurs, la montée en puissance de la Chine ne doit pas être perçue uniquement sous un angle négatif. Le développement naval et les revendications territoriales de la Chine en mer de Chine méridionale ne sont pas simplement le résultat d'une agressivité gratuite, mais sont également dictés par un sentiment d'insécurité militaire et économique. L'acquisition de pouvoir militaire et économique par les grandes puissances passe souvent par des pratiques commerciales discutables, mais il est probable que la Chine réduira progressivement ces comportements à mesure qu'elle consolide sa position de grande puissance mondiale. Ce processus est bien plus fréquent dans l’histoire des grandes nations que ce que l’on pourrait croire.

Les politiques de confrontation directe menées par l'administration Trump risquent de créer une rivalité amère avec la Chine, une guerre que les États-Unis ne peuvent ni gagner ni se permettre d'engager. Les transitions hégémoniques, où une puissance dominante cède sa place à un challenger monté en puissance, ont toujours été dangereuses et propices aux conflits, notamment à travers des escalades locales auxquelles chaque acteur croit pouvoir répondre sans confrontation militaire directe. La diplomatie, la prudence et la flexibilité sont essentielles pour surmonter ces risques inhérents. Malheureusement, la politique antagoniste de Trump, couplée à une méfiance croissante entre les deux pays, a non seulement exacerbé la rivalité mais a également rendu plus probable une escalade non maîtrisée.

L’un des aspects les plus inquiétants de cette politique de confrontation est l’implication des États-Unis dans des disputes locales qui n'ont qu'un intérêt stratégique limité pour leur sécurité nationale. Un exemple est l’extension de l’engagement des États-Unis vis-à-vis des Philippines, en déclarant que toute attaque contre les forces philippines dans la mer de Chine méridionale entraînerait l'application de l'article IV du traité de défense mutuelle. Bien que cette déclaration visait à dissuader la Chine de poursuivre ses revendications territoriales, elle n’a fait qu’augmenter le risque d'escalade involontaire sans pour autant offrir de solution durable à la question du contrôle territorial en mer de Chine méridionale.

Pour les États-Unis, une approche diplomatique plus nuancée, centrée sur la coopération économique et l'engagement stratégique, offrirait une bien meilleure chance de gérer la montée en puissance de la Chine de manière pacifique et constructive. Il est crucial de comprendre que, même si la Chine adopte encore des comportements qui peuvent sembler menaçants, la confrontation directe n'est pas la solution la plus efficace pour gérer cette dynamique mondiale complexe. Une politique étrangère plus mesurée, qui intègre la Chine comme un partenaire stratégique plutôt qu'un ennemi, est la clé pour éviter une escalade inutile et préparer un avenir de coopération durable.