L’étude des singularités dans les modèles cosmologiques de type Lemaître–Tolman (L–T) révèle des scénarios où des singularités nues globales et puissantes peuvent apparaître, remettant en question certaines formulations du principe de censure cosmique. Ces singularités sont dites fortes lorsque la limite de l’expression λ²Rαβkαkβ, où kα est le vecteur tangent à une géodésique nulle atteignant la singularité, ne tend pas vers zéro quand le paramètre affine λ s’annule. Cela signifie que l’intensité de la courbure de l’espace-temps à proximité de la singularité est suffisamment élevée pour être détectable, et non simplement une faiblesse mathématique.

Plusieurs travaux, notamment ceux de Waugh et Lake (1988), Gorini, Grillo et Pelizza (1989), ainsi que Joshi et Dwivedi dans les années 1990, ont démontré que certaines configurations auto-similaires ou choisies spécifiquement dans le cadre des modèles L–T peuvent engendrer de telles singularités fortes, souvent localement nues. Ces résultats illustrent que la censure cosmique, postulat selon lequel les singularités ne sont jamais visibles de l’extérieur, n’est pas universellement vérifiée, du moins dans certaines formulations rigoureuses. L’existence de familles continues de courbes non spatio-temporelles (nonspacelike) émanant d’une singularité atteste de cette visibilité locale, voire globale.

Par ailleurs, la résolution du problème de l’horizon, souvent attribuée à l’inflation, se trouve remise en question par une approche alternative proposée dans le cadre des modèles L–T avec Λ=0. Ce problème de l’horizon réside dans l’observation que des régions éloignées du cosmos présentent une homogénéité et une isotropie que la causalité classique, limitée par la vitesse de la lumière, ne devrait pas permettre. Le paradigme inflationniste postule alors une phase d’expansion exponentielle, faisant intervenir un champ scalaire à effet de constante cosmologique répulsive, qui « lisse » ces différences.

Cependant, comme le soulignent Céllier et Szekeres (2002), l’inflation ne fait que repousser le problème temporellement : il existe toujours des régions suffisamment éloignées qui demeurent causalement déconnectées. Une autre voie, ingénieusement explorée par Céllier et Schneider (1998), consiste à considérer une fonction de Bang-Big tB(r) croissante, provoquant un croisement de coquilles (shell crossing) à des temps ultérieurs à tB(r). Ce croisement engendre une géométrie où certaines géodésiques nulles rétrogrades, émises depuis un observateur donné, rencontrent ces croisements, ce qui modifie les propriétés causales de l’espace-temps.

Par l’analyse détaillée des géodésiques radiales nulles k1 et k2 dans ce cadre, on montre que toute région visible par l’observateur a pu, dans un passé suffisamment éloigné, être en contact causal avec une source commune. Autrement dit, la structure même de l’espace-temps dans ces modèles assure une communication causale permanente entre les différentes régions observables, éliminant ainsi le problème de l’horizon de façon définitive, et non par simple report temporel. Cette propriété repose sur la croissance stricte de la fonction de croisement de coquilles tS(r), garantissant que les rayons lumineux ne rencontrent pas de barrières physiques empêchant la communication.

La subtilité de cette solution met en lumière la richesse des modèles inhomogènes et anisotropes, souvent négligés au profit de la cosmologie homogène et isotrope standard. Elle invite à une réflexion plus profonde sur la nature même des singularités, de la causalité cosmique et de l’origine de l’homogénéité observée. Il est crucial de comprendre que les hypothèses sur la topologie et la dynamique de l’univers jouent un rôle déterminant dans l’interprétation de ces phénomènes, et que l’inflation, bien que séduisante, n’est pas la seule voie viable.

Enfin, les définitions rigoureuses des singularités fortes et leur stabilité face aux perturbations symétriques impliquent que ces phénomènes ne sont pas de simples artefacts mathématiques. Ils possèdent une réalité physique potentielle qui pourrait avoir des conséquences sur la formation structurelle et l’évolution globale de l’univers. La compréhension approfondie de ces singularités, associée à l’étude des géodésiques dans des modèles réalistes, reste donc un enjeu majeur pour la cosmologie théorique.

Il importe également de noter que la résolution permanente du problème de l’horizon par ce mécanisme de croisement de coquilles repose sur la condition stricte d’une fonction de croisement croissante. Cette contrainte n’est pas triviale et implique des choix précis des fonctions de masse et de temps de Bang-Big, ce qui soulève la question de leur justification physique dans le cadre d’un univers réel. De plus, ces solutions montrent que la causalité cosmique peut être subtilement affectée par la topologie locale, ce qui incite à une vigilance accrue dans l’interprétation des observations cosmologiques classiques.

Les Espaces Riemanniens Conformément Liés et leur Métrologie

Les cartes géographiques, ainsi que d'autres représentations de la surface terrestre, sont des instruments d'une grande complexité mathématique et géométrique. En effet, bien que la surface de la Terre soit sphérique, elle doit être projetée sur une surface plane, comme celle d'une page d'atlas. Ce processus de projection implique une manipulation des métriques géométriques, et c'est là que la notion de "métrique tirée" prend toute son importance. Ainsi, la page d’un atlas, bien qu'elle suive sa propre métrique euclidienne, présente également la métrique tirée de la surface terrestre. Les navigateurs d'antan, lors de leurs explorations de vastes régions, ne faisaient en réalité qu'extraire la métrique d'une sphère à partir de leurs cartes.

Les espaces riemanniens, qui sont des objets de grande utilité dans la description de courbures et de structures géométriques complexes, peuvent être mis en relation de manière spécifique. Lorsqu'un espace riemannien VnV_n et un autre espace UnU_n de même dimension sont reliés par un difféomorphisme FF, et lorsque leurs métriques respectives sont gαβg_{\alpha\beta} et habh_{ab}, on peut parler de la métrique "tirée" sur chaque espace. Ce phénomène, qui fait appel à des fonctions différentiables et aux transformations géométriques, est central pour la compréhension des relations entre ces deux espaces. Le calcul de cette transformation implique la notion de "mappage conforme", qui peut être décrite par une fonction scalaire φF\varphi_F, permettant de relier les deux métriques par un facteur scalaire.

Un mappage conforme est défini par la relation suivante :

gαβ(y)=φF(y)hab(y),g_{\alpha\beta} (y) = \varphi_F(y) h_{ab}(y),

ce qui indique que la métrique de VnV_n est liée à celle de UnU_n par un facteur scalaire qui ne modifie pas les angles entre les vecteurs. Cette propriété géométrique fondamentale montre que, si deux espaces riemanniens sont liés de manière conforme, leurs structures angulaires demeurent invariables malgré les transformations subies par leurs métriques.

Un aspect crucial de cette notion est l'impact de ces transformations sur la courbure des espaces en question. La courbure riemannienne est souvent représentée par un tenseur de Riemann RαβγδR_{\alpha\beta\gamma\delta}, qui peut être contracté pour produire le tenseur de Ricci RαβR_{\alpha\beta}. Cependant, en géométrie conforme, la quantité qui nous intéresse est la courbure conforme, décrite par le tenseur de Weyl CαβγδC_{\alpha\beta\gamma\delta}, qui capture la partie de la courbure liée aux fluctuations ou aux déformations de la métrique, tout en restant invariant sous des transformations conformes.

Les espaces riemanniens qui sont "conformément plats" sont ceux dont la courbure conforme est nulle. Cela signifie qu’il existe une fonction φ\varphi qui permet de transformer la métrique de l’espace en une métrique plate. Cela est particulièrement important en relativité générale, où la courbure de l’espace-temps est déterminée par la présence de matière et d’énergie. La propagation des ondes gravitationnelles, par exemple, est décrite par des espaces conformément plats, où la métrique peut être transformée de manière conforme sans affecter les propriétés angulaires du système.

Il existe des conditions mathématiques très précises qui permettent de déterminer si un espace riemannien est conforme à un autre, ou s'il est conforme à un espace plat. Ces conditions sont liées à la nullité de la courbure conforme. Par exemple, en dimensions supérieures à deux, l'existence d'une fonction φ\varphi qui transforme la métrique d'un espace en une métrique plate dépend de la satisfaction de certaines relations algébriques complexes. La compréhension de ces relations est essentielle pour la classification des espaces riemanniens et pour l’étude des phénomènes physiques dans des cadres géométriques avancés.

La définition et l'étude de la courbure conforme sont particulièrement pertinentes en relativité, notamment pour la compréhension des ondes gravitationnelles et d'autres phénomènes où la structure de l'espace-temps est modifiée de manière conforme. Dans ce contexte, la courbure conforme, représentée par le tenseur de Weyl, est un outil clé pour analyser la propagation des distorsions de l'espace-temps en dehors des sources de ces perturbations.

Il est important de noter que, bien que la courbure conforme soit identiquement nulle dans certains cas (comme dans les espaces de dimension trois), cela ne signifie pas que tous les espaces de cette dimension sont conformes à des espaces plats. La condition nécessaire et suffisante pour qu'un espace tridimensionnel soit conforme à un espace plat est liée à l'annulation du tenseur de Cotton-York, qui est un objet mathématique décrivant les déformations de la courbure dans ces espaces.

Dans le cas particulier des espaces de dimension deux, chaque espace riemannien est automatiquement conforme à un espace plat, ce qui reflète la simplicité géométrique de ces espaces à deux dimensions. En effet, en deux dimensions, les propriétés géométriques permettent de réduire toute courbure à une forme conforme, sans nécessiter de transformations complexes.

Ainsi, la géométrie conforme offre un cadre puissant pour l'étude des espaces riemanniens et de leurs propriétés. Elle permet de simplifier les calculs et de mieux comprendre la structure de l’espace, notamment dans les contextes de la relativité et des théories de la gravité. Les concepts de métriques conformes et de courbure conforme sont donc essentiels pour appréhender la dynamique de l'espace-temps et ses interactions avec la matière et l’énergie.