L'alchimie dont je parle n'est pas celle des métaux mais celle des passions et des éléments : une réaction, universelle et implacable, entre la chaleur qui blesse et l'eau qui apaise, entre la flamme qui enfante et la cendre qui tue. Kathy et moi en avons été traversés comme par une expérience chimique. Elle fut d'abord ma secrétaire — petite, brune, aux mains fines, portée aux couleurs vives et aux miettes pour les oiseaux — engagée par agence sur Mael, diplômée en « Secretarial Science » de l'Institut local, une anomalie sociale qui illustre combien les mondes se transforment sous la pression des besoins et des titres. Sa science administrative me paraissait surdimensionnée: elle automatisa tout, bouleversa mes classements, me mit en retard; puis, quand elle sut manier la vieille machine que j'avais fait reconstruire, je lui appris le sténographe et elle devint cette alliée discrète capable de tracer, en lignes griffonnées, ce que seule notre complicité savait déchiffrer.

Notre histoire n'eut rien d'un apaisement. Les premiers mois furent déchirants : j'étais la couverture humide, elle la petite flamme qui pleurait chaque fois que je l'éteignais d'un mot. Mais de ces heurts naquit une nécessité mutuelle ; elle devint indispensable, non pour ses diplômes mais parce que, lentement, nos misères et nos petites victoires s'imbriquèrent. Nous eûmes deux fils. Puis le feu vint — la catastrophe du Stardock de Miami — et emporta Kathy quand elle accourait vers moi pour une conférence. L'image du feu comme agent de séparation se grava en moi : l'alchimie avait opéré à nouveau, mais pour séparer ce qui allait rester.

Mes mondes naquirent de la combustion comme d'un four : Cocytus, New Indiana, St. Martin, Buningrad, Mercy, Illyria — tous forgés par des cycles de brûlure, de lavage, de vapeur et de refroidissement. Je marche maintenant dans les bois d'Illyria, une parure que j'avais conçue pour les gens qui croient encore aux arbres et aux chemins. Le tourisme, la quiétude, tout a été vidé ; la terre est blessée, le lac pollué, les arbres tordus, et le sang de la montagne — la lave — palpite encore sous la peau du sol. Le spectacle me rend malade : des nuées de suie traversent l'air comme des avis de décès, et je pense à Kathy, à ce qu'elle eût aimé ici si elle l'avait connu autrement.

La marche me rend attentif aux détails : la suie colle à la peau, la chaleur s'insinue, la mémoire aussi. Green Green, compagnon de voyage, gémit de son épaule et de sa fatigue, mais il est tenace. Nous partageons des silences. L'île, là-bas, se dresse comme une ombre immobile au‑dessus des eaux bouillonnantes d'Acheron ; la surface est un miroir verbène qui ne renvoie que le feu. Les poissons flottent, ventre au ciel, et l'air embaume l'œuf pourri des sulfures. La plage offre une langue étroite de sable noir, un sentier en épingle qui monte vers les chalets et les cavernes où jadis l'esprit de création aimait se terrer.

Je songe aux routes du rachat : l'approche frontale est la plus évidente — falaises abruptes, plages rares — mais il y a toujours la porte de derrière. J'ai façonné la face nord pour paraître infranchissable, alors qu'elle possède, à qui sait lire la pierre, des prises et des failles. Ce goût de laisser une échappée me trahit ; j'aime qu'une construction ait aussi ses secrets, ses issues cachées. J'entends les possibles tromperies : Green Green, télépathe, peut-il être fiable ? Shandon existe‑t‑il vraiment ? Les alliances se devinent comme des stratagèmes. Ainsi je garde pour moi la route secrète et décide d'attaquer par le haut, de descendre vers le chalet comme un homme qui connaît autant la création que la chute.

L'eau me paraît amie contre le feu, pourtant elle est ici complice, chauffée par des courants qui rendraient toute nage suicidaire. Le bateau que nous avions laissé a disparu — emporté peut‑être par les secousses — et la solution devient matérielle, pragmatique : scier du bois, lier des pièces, improviser une embarcation. Loin de toute naïveté, cette entreprise est à la fois technique et symbolique : construire un radeau, c'est conjurer le feu par l'invention ; c'est refuser la destin qui voudrait nous réduire à observer l'île comme un mausolée.

Il est important d'ajouter au texte des éléments qui rendent la scène plus compréhensible et vivante pour le lecteur : préciser le contexte historique et social de Mael et de l'Institut de Secretarial Science afin de montrer pourquoi un diplôme de sténographie a changé des destins, expliciter la nature et l'intensité des catastrophes stellaires (comme le Stardock de Miami) pour saisir la portée traumatique de la perte, et donner quelques données techniques sur les phénomènes volcaniques et les courants thermiques du lac Acheron afin que les dangers physiques accompagnent la menace symbolique. Il convient d'approfondir le portrait psychologique du narrateur — ses contradictions entre amour et destruction, sa relation ambivalente au pouvoir créateur et destructeur — et de dévoiler plus nettement le sort des fils pour maintenir l'enjeu humain. Fournir des détails sensoriels supplémentaires (odeurs, textures, bruits) et quelques fragments de correspondances ou de sténogrammes (Gregg) renforcerait l'intimité et la véracité du récit. Enfin, expliciter la capacité télépathique de Green Green, ses limites et ses possibles motivations, ainsi que l'histoire et les intentions de Shandon, permettra au lecteur de juger de l'incertitude et du risque qui pèsent sur l'expédition, sans dissiper la part de mystère qui fait aussi la force de cette allégorie des éléments.

Comment la spiritualité Pei'an façonne la perception de l'humanité à travers la prière et le pouvoir psychique

Dans un quartier religieux isolé, entre sanctuaires et temples dédiés à des divinités aussi anciennes que Zoroastre ou Jésus-Christ, l'arrivée dans l'enceinte d'un lieu particulier marqué par l'empreinte d'une autre civilisation est toujours un moment chargé de signification. Ce lieu se trouve dans la section Pei’an, un domaine où la vision du monde et de la divinité n’a rien de comparable à celle des terriens. L'entrée dans ce sanctuaire, modeste en apparence, cachait un univers bien plus vaste, un monde sacré où la prière, le savoir ancien et la connexion psychique à une intelligence supérieure se rejoignent.

Les Pei’ans, des êtres d'une taille imposante et d'une nature profondément différente de la nôtre, sont des créatures d'une sagesse millénaire, dont la culture, pourtant sur le déclin démographique, a influencé de nombreuses civilisations à travers la galaxie. Leur langage est un labyrinthe de significations et de symboles, un défi intellectuel pour qui cherche à le comprendre. Ces êtres, d’un vert profond, possèdent une physiologie fascinante : leurs corps, exempts de cheveux et de lèvres, se nourrissent en digérant leur propre peau, un mécanisme biologique aussi étrange qu'efficace. Pourtant, malgré cette apparente étrangeté, leur beauté est indéniable, presque envoûtante. Leur apparence, leur calme et leur grâce, font des Pei’ans non seulement des êtres intelligents mais aussi des créatures esthétiques dont la simple présence impose le respect.

Leur religion, le Strantri, est un autre reflet de leur profondeur spirituelle. Un univers polytheiste qui s’est nourri au fil des âges de diverses croyances et rituels, sans jamais abandonner aucune divinité, si excentrique ou éloignée soit-elle. Ce culte n'est pas limité à une seule planète, ni à un seul groupe ethnique; c'est une croyance universelle qui pourrait bien un jour être la foi qui unira l'ensemble de l’humanité et au-delà. Les Pei’ans, malgré la réduction de leur population, ont conservé une richesse spirituelle hors du commun, leur histoire, immense, écrite dans des volumes incommensurables. Leur culte des déités, qui parfois évoquent des formes aussi variées qu’intrigantes, symbolise leur approche inclusive et respectueuse de toute forme de vie.

Cependant, le lien qui se crée entre un être humain et ces divinités Pei’ans n’est pas facile à expliquer. C'est par le biais de noms, portés par les individus, que la connexion se fait. Ces noms ne sont pas anodins. Ils sont choisis avec soin, ou peut-être choisis par les divinités elles-mêmes, comme ce fut le cas pour moi avec Shimbo, un dieu qui, bien qu’humain en apparence, représente une forme de puissance divine imprégnée de la foudre et des cieux orageux. Cette relation avec une divinité, aussi complexe soit-elle, joue un rôle central dans la vie de ceux qui entrent en contact avec la culture Pei’an. Chaque passage dans un sanctuaire, chaque récitation du nom sacré, est un acte de communion avec une force bien au-delà de la simple piété.

Le pouvoir psychique est également une caractéristique omniprésente de cette civilisation. Les Pei’ans, grâce à leurs capacités télépathiques et à d’autres dons rares, sont capables de créer des liens avec ceux qui portent leurs noms, comme un canal d'énergie pure qui circule entre le monde physique et les domaines spirituels. Lorsqu’un porteur de nom entre dans un sanctuaire, la divinité qu’il incarne s’illumine à travers la mosaïque des vitraux, remplissant l’espace de lumière et de puissance. Ce phénomène, bien que difficile à comprendre pleinement, est une expérience qui dépasse le simple acte religieux : c’est un instant de communion totale, où l’individu, l’espace et la divinité se rencontrent et fusionnent dans une forme d’extase collective.

Ce qui est fascinant, cependant, c’est la philosophie sous-jacente à ce système religieux. L'approche des Pei’ans en matière de spiritualité est loin d’être dogmatique. Au contraire, elle invite à l'exploration continue et à l'intégration de nouvelles croyances sans jamais renier les anciennes. C'est cette flexibilité, cette capacité à accueillir et à intégrer, qui pourrait expliquer l'attrait grandissant de la religion Strantri à travers les systèmes stellaires. Contrairement à d'autres cultes qui imposent une forme rigide de croyance, le Strantri offre un éventail de possibilités qui permettent à chacun de se retrouver dans une forme d'harmonie religieuse propre à sa propre expérience de vie et de monde.

En fin de compte, ce voyage au cœur du sanctuaire Pei’an et cette rencontre avec leurs déités ne sont pas seulement une expérience religieuse, mais un véritable voyage spirituel et intellectuel. La possibilité de se connecter à une intelligence divine à travers des rituels anciens et des capacités psychiques crée une nouvelle perception de la réalité. C’est un monde où la frontière entre le divin et le quotidien devient floue, un monde où chaque prière, chaque mot prononcé, chaque geste effectué dans l’enceinte d’un sanctuaire, a le pouvoir de transformer la perception que l’on a de l’univers.