En mécanique, pour qu'un corps soit en équilibre statique, il doit être correctement soutenu. Les conditions de soutien sont essentielles pour déterminer comment les forces et les moments affectent la structure. Toutefois, dans la réalité, il n'existe pas de dispositif parfait qui résiste sans bouger un minimum. Cependant, si les mouvements induits sont suffisamment petits, il est justifié de modéliser le soutien comme idéal, afin de simplifier l'analyse.

Les dispositifs de soutien idéalisés sont souvent représentés sous différentes formes dans les diagrammes de corps libres, et il est crucial de comprendre les bases de ces représentations pour résoudre les problèmes mécaniques. Un soutien fixe, par exemple, empêche tout mouvement de translation ou de rotation. Dans un problème plan, il est modélisé par une force de réaction et un moment. Un soutien encastré, par contre, ne permet pas la translation, mais autorise la rotation. Un tel soutien est représenté dans un diagramme de corps libre uniquement par une force de réaction, sans moment. Le soutien à rouleau permet quant à lui à la structure de se déplacer le long du plan tout en autorisant la rotation autour de l'axe du rouleau. Dans ce cas, la seule réaction est une force normale à la surface de contact.

En trois dimensions, les conditions de soutien deviennent plus complexes, avec des possibilités de restrictions sur les translations et les rotations. Par exemple, un soutien universel permet la rotation libre dans toutes les directions, mais empêche toute translation du point de soutien. Dans les systèmes tridimensionnels, il y a donc une multitude de conditions possibles : six composants de mouvement peuvent être soit restreints, soit libres à un point de soutien. Cela donne 64 configurations différentes pour un point de soutien, selon les directions et types de restrictions appliquées.

Cependant, la réalité ne respecte pas toujours ces idéalismes parfaits. Un joint entre une poutre en I et une plaque peut être idéalement modélisé comme un soutien encastré ou un soutien articulé, mais, en pratique, il se trouve quelque part entre ces deux modèles en raison de la flexibilité et des dimensions de la connexion réelle. Par exemple, un joint où une poutre en I est boulonnée à une plaque à travers un profilé d'angle, comme illustré, n’est pas parfaitement fixe. Il y a une certaine flexibilité, mais souvent cette flexibilité est négligeable par rapport aux effets de la translation et de la rotation. Les ingénieurs doivent donc savoir quand il est approprié d'utiliser ces idéalisations pour simplifier les analyses tout en restant réalistes.

Un autre dispositif souvent utilisé dans les structures est le joint interne à broche, ou charnière interne. Cette configuration permet à plusieurs barres d’être liées entre elles par une broche, tout en permettant à chaque barre de pivoter autour de l'axe de la broche. Le diagramme de corps libre de cette configuration montre que, tant que la broche reste en équilibre, le joint est également en équilibre. Cela démontre que la mécanique des systèmes internes peut également être comprise en termes de forces de réaction qui sont égales et opposées, selon la troisième loi de Newton.

Dans l’étude de l’équilibre statique, il est essentiel de comprendre que les supports idéalisés ne sont que des simplifications qui facilitent les calculs et les modélisations. Cela ne signifie pas que ces conditions existent parfaitement dans la réalité, mais elles permettent de faire des approximations suffisantes pour mener à bien l’analyse dans des situations pratiques. En outre, le choix du modèle de soutien doit toujours être judicieux et adapté au contexte de l'analyse, car il peut affecter la précision des résultats obtenus. Par exemple, dans des cas où la précision n’est pas primordiale, un modèle simplifié peut suffire, mais dans des analyses plus critiques, une modélisation plus détaillée peut être nécessaire pour obtenir des résultats fiables.

Les ingénieurs et les concepteurs doivent donc toujours évaluer les compromis entre la simplicité des modèles et les réalités physiques des dispositifs de soutien dans le monde réel. Ce processus est au cœur de la modélisation des structures et des systèmes mécaniques.

Comment prouver l'existence des forces internes dans une barre en équilibre statique ?

Dans un système en équilibre statique, la somme de toutes les forces qui s'exercent sur ce système est nulle. Pour analyser une barre soumise à des forces, on peut effectuer une coupe virtuelle en un point xx le long de sa longueur. Cette coupe divise la barre en deux parties distinctes, chacune devant également satisfaire à la condition d’équilibre statique. Or, pour respecter les lois de Newton, il est indispensable d’introduire aux extrémités de la coupe des forces internes représentant l’effet des forces appliquées à la partie de la barre « enlevée » lors de la coupe. Ces forces internes n’apparaissent donc que lorsqu’on modélise la barre par des diagrammes de corps libres avec une coupe, d’où leur nom. Elles constituent le mécanisme fondamental par lequel les forces extérieures sont transmises à l’intérieur d’un corps solide.

L’existence des forces internes est démontrée par l’impossibilité d’établir l’équilibre des deux segments résultant d’une coupe sans les introduire. Par exemple, dans le cas d’une barre soumise à deux forces égales et opposées de module PP aux extrémités, la barre est en équilibre global. Cependant, si on la coupe et qu’on ne place aucune force à la coupe, chaque segment n’est plus en équilibre et serait soumis à une accélération. Pour restaurer l’équilibre, il faut appliquer une force axiale interne N(x)N(x), égale en module à PP, au niveau de la coupe. Cette force interne est en réalité le résultat de contraintes, définies comme une force par unité de surface, traduisant l’état interne de force dans la barre. On peut ainsi considérer la barre comme étant soumise à un état de contraintes, uniquement perceptible via une coupe.

Les contraintes, notées σ(x,y,z)\sigma(x,y,z), sont distribuées sur la section transversale de la barre et agissent sous forme de tractions. La traction, force répartie sur une surface, est un vecteur définissant l’intensité et la direction des forces internes par unité de surface. Le résultat de la somme de toutes ces tractions sur la section transversale constitue la force axiale résultante N(x)N(x), donnée par l’intégrale Aσ(x,y,z)dA\int_A \sigma(x,y,z) \, dA. Cette force résultante permet de simplifier les calculs d’équilibre, car elle condense en un vecteur unique l’effet total des contraintes sur la section coupée.

Il est important de noter que, bien que les contraintes puissent varier sur la section, ce qui importe pour l’équilibre statique est uniquement leur résultante. On peut donc résoudre des problèmes de barre axiale en connaissant simplement la force résultante N(x)N(x), sans détailler la distribution précise des contraintes.

Une condition supplémentaire essentielle dans la théorie des barres axiales est que les tractions sur une section ne produisent pas de moment résultant autour de l’axe longitudinal xx. Mathématiquement, la somme vectorielle des moments des forces de traction par rapport à cet axe doit être nulle. Cette contrainte s’exprime par la nullité de Ar×σe1dA=0\int_A \mathbf{r} \times \sigma e_1 \, dA = 0, où r\mathbf{r} est le bras de levier d’un point de la section par rapport à l’axe. Si les contraintes sont uniformes, cela impose que l’axe xx passe par le centroïde de la section transversale, garantissant ainsi l’absence de moment.

Les conditions aux limites jouent un rôle fondamental pour résoudre les problèmes d’équilibre des barres axiales. Ces conditions précisent ce qui est connu aux extrémités de la barre, en termes de déplacement ou de force interne. Une extrémité peut être soit fixe (immobilisée), soit libre de se déplacer. Pour une extrémité fixe, le déplacement est nul (u(0)=0u(0) = 0 ou u(L)=0u(L) = 0). Pour une extrémité libre, l’effort interne est généralement nul, sauf s’il y a une force concentrée appliquée à cette extrémité. Dans ce dernier cas, la force interne à la limite correspond à la force appliquée, ce qui peut être déduit par un argument d’équilibre à l’aide d’un diagramme de corps libre réduit.

Ainsi, pour un problème typique où une barre est fixée à une extrémité et chargée par une force concentrée à l’autre, les conditions aux limites sont mixtes : la contrainte cinématique au point fixe (déplacement nul) et la contrainte statique à l’extrémité libre chargée (valeur donnée de la force interne).

Enfin, pour établir les équations d’équilibre, on analyse une portion infinitésimale de la barre. On considère les forces internes agissant aux extrémités de ce segment ainsi que les forces distribuées appliquées, puis on applique la condition que la somme vectorielle des forces est nulle. Cette approche conduit à une équation différentielle fondamentale régissant la distribution des forces internes dans la barre.

Il est crucial de comprendre que la force, concept originaire de la mécanique des particules, se manifeste dans les solides sous la forme d’une distribution continue de contraintes. Cela signifie que les forces ponctuelles n’existent pas dans la nature des matériaux solides. C’est pourquoi la notion de traction et la considération des contraintes en chaque point de la section sont indispensables pour décrire précisément le comportement mécanique d’un corps.

Au-delà de la compréhension immédiate des forces internes et de leur existence, il faut saisir que la distribution des contraintes et la force résultante N(x)N(x) conditionnent la résistance et la déformation des structures. La connaissance de la force résultante permet de prédire comment la barre va réagir face à des charges externes, tandis que l’étude détaillée des contraintes locales éclaire les mécanismes d’endommagement ou de rupture potentiels.

Comment caractériser la déformation homogène et déterminer le tenseur de déformation ?

Le mouvement d'un corps rigide dans un plan peut être décrit par une simple translation et une rotation autour d'un point de référence. Dans ce contexte, la position finale de chaque particule est obtenue en combinant un vecteur de translation et une matrice orthogonale représentant la rotation. Cette matrice, appelée tenseur de rotation, conserve les distances et les angles, ce qui signifie qu'il n'y a pas de déformation du matériau, seulement un déplacement rigide. Par exemple, si un point est situé à une position donnée dans la configuration initiale, sa position après déplacement rigide sera une combinaison linéaire de la translation et de la rotation, sans changement des longueurs relatives ou des angles entre les lignes du corps.

Lorsque la déformation est homogène, le mouvement peut être représenté par une fonction de mappage linéaire composée d'une translation et d'un tenseur de déformation F\mathbf{F}. Ce tenseur contient toutes les informations nécessaires pour décrire comment chaque point du corps est déplacé. Pour déterminer F\mathbf{F}, il suffit de connaître la position de deux points indépendants dans l'espace en configuration de référence ainsi que leurs positions correspondantes dans la configuration déformée. En construisant deux matrices formées par ces vecteurs, on peut obtenir F\mathbf{F} en multipliant la matrice des points déformés par l'inverse de la matrice des points de référence. La condition d'indépendance des vecteurs est cruciale : si ces vecteurs sont colinéaires, l'inverse n'existe pas et F\mathbf{F} ne peut pas être déterminé. Physiquement, cela signifie que pour saisir entièrement la déformation dans un plan, il faut au minimum deux directions indépendantes ; elles forment une base permettant d'exprimer toute autre direction et ainsi d'appréhender la déformation globale.

En trois dimensions, ce raisonnement s'étend naturellement : il faut trois points indépendants non coplanaires pour déterminer un tenseur de déformation 3×33 \times 3. Si ces points sont coplanaires, l'information sur la déformation hors de ce plan reste inaccessible. Il est également intéressant de noter que dans le cas d'une déformation plane, la coordonnée hors plan reste inchangée, ce qui justifie le recours aux matrices 2×22 \times 2 dans ces situations.

Une illustration classique est la transformation homogène d'un triangle rectangle, où l'on calcule explicitement F\mathbf{F} à partir des positions des sommets avant et après déformation. Ce calcul repose sur l'inversion d'une matrice 2×22 \times 2, appliquée aux vecteurs position des points. Le résultat donne un tenseur qui exprime la manière dont chaque vecteur initial est déformé, incluant étirement, compression, cisaillement et rotation.

La notion de déformation conduit naturellement à celle de déformation relative ou « strain », qui mesure le changement local des longueurs et des angles au sein du matériau. Si l’on considère un segment de droite dans la configuration initiale, sa longueur après déformation peut changer. La grandeur fondamentale est alors le rapport d'étirement λ=LL0\lambda = \frac{L}{L_0}, où L0L_0 est la longueur initiale et LL la longueur après déformation. Cette quantité, sans unité, sert de base à diverses définitions de la déformation.

La définition dite « ingénieur » de la déformation est donnée par ε=λ1\varepsilon = \lambda - 1, soit la variation relative de la longueur. Cette mesure est intuitive mais présente des limites, notamment lorsqu’il s’agit de grandes déformations. D’autres définitions, comme la déformation lagrangienne, prennent en compte des aspects plus complexes de la géométrie du déplacement.

Il est essentiel de comprendre que la déformation ne se réduit pas simplement à un changement de longueur : elle inclut aussi la variation des angles entre les directions, ce qui est particulièrement important en deux et trois dimensions. Cela justifie la nécessité d’un tenseur pour caractériser pleinement l’état de déformation, permettant de modéliser rigoureusement la réponse des matériaux soumis à différentes sollicitations.

La compréhension du tenseur de déformation et des différentes mesures de la déformation est fondamentale pour la modélisation mécanique des matériaux et la prédiction de leur comportement sous charge. La capacité à déterminer ces grandeurs à partir des positions avant et après déformation est au cœur de nombreuses méthodes expérimentales et numériques en mécanique des solides.

Il convient enfin de noter que ces concepts s’appliquent aussi bien aux déformations élastiques qu’aux déformations plastiques ou viscoélastiques, à condition d’adapter les hypothèses et les modélisations à chaque cas particulier.

Comment déterminer les directions principales et la variation volumique dans la déformation tridimensionnelle ?

Considérons l'analyse de la déformation dans un solide en trois dimensions, où le tenseur des déformations se réduit à une forme particulière représentée par les invariants Ĵ1(E), Ĵ2(E) et Ĵ3(E). Ces invariants, respectivement la trace, le second invariant (relié au déterminant dans le cas 2D) et le troisième invariant (produit des valeurs propres), offrent une base essentielle pour comprendre la nature de la déformation. La résolution de l’équation caractéristique associée à ce tenseur révèle les valeurs propres de la déformation, aussi appelées les déformations principales. Dans le cas tridimensionnel, on trouve systématiquement une racine nulle, ce qui correspond à une direction propre associée au vecteur orthogonal e3, tandis que les deux autres valeurs propres sont obtenues via la formule quadratique, fournissant ainsi un lien direct avec le cercle de Mohr, bien connu en mécanique pour la représentation graphique des contraintes et déformations planes.

L’orientation des directions principales, associées aux valeurs propres ε1 et ε2, est déterminée en résolvant le problème aux valeurs propres, où les vecteurs propres n1 et n2 doivent être orthogonaux entre eux et orthogonaux à la direction e3. Ces directions sont paramétrées par un angle principal θp qui se calcule à partir des composantes du tenseur de déformation selon une relation trigonométrique fine, impliquant le rapport α qui synthétise la différence des composantes normales εxx, εyy, et la composante de cisaillement εxy. Cette formulation montre une parfaite cohérence entre les approches algébriques et géométriques, garantissant que la direction principale est celle pour laquelle le tenseur devient singulier.

Dans le contexte de la variation volumique, une déformation purement dilatante, c’est-à-dire sans cisaillement, se manifeste par une expansion uniforme dans toutes les directions principales. Le volume d’un parallélépipède rectangulaire initial, défini par les dimensions a, b, c selon ces directions, varie selon un produit dépendant des déformations principales ε1, ε2 et ε3. Cette variation volumique peut être exprimée précisément en fonction des invariants du tenseur de déformation, où le premier invariant J1 correspond à la somme des déformations principales, le second J2 à la somme des produits par paires, et le troisième J3 au produit des trois. Dans la limite des petites déformations, les contributions de J2 et J3 deviennent négligeables devant J1, ce qui permet une approximation simple et intuitive : le changement relatif de volume est égal à la trace du tenseur de déformation, c’est-à-dire la somme des déformations principales.

Cette relation s’étend naturellement à une formulation plus générale impliquant le tenseur de Green, où le volume déformé est proportionnel au déterminant du tenseur C = FᵀF, F étant le gradient de déformation. Cette expression exacte englobe les effets non linéaires et permet d’aborder des déformations importantes et complexes.

Enfin, dans la réalité pratique, la plupart des corps solides subissent des déformations non homogènes. Cela signifie que le champ de déformation varie spatialement, et il devient essentiel d’introduire le concept de gradient de déformation, qui caractérise localement les variations du champ. Ces gradients sont particulièrement prononcés dans des zones critiques telles que les coins rentrants des assemblages soudés ou près des extrémités de fissures, où les concentrations de contraintes et déformations atteignent des niveaux élevés. Comprendre et modéliser ces gradients est fondamental pour prédire la réponse mécanique des structures soumises à des charges complexes, incluant extension, flexion ou torsion. La déformation non homogène nécessite donc une approche qui étend les notions présentées pour la déformation homogène, en intégrant la dépendance spatiale et en tenant compte des transformations géométriques entre configuration initiale et configuration déformée, via la fonction de déformation x = ϕ(z).

Il est crucial de reconnaître que dans cette approche, la position d’un point dans la configuration déformée dépend de sa position initiale dans la configuration de référence, et que les origines ainsi que les bases vectorielles peuvent différer. Pour simplifier l’analyse, on peut choisir un système commun pour les deux configurations, facilitant ainsi l’étude des gradients de déformation.

Le gradient de déformation, défini comme la variation du vecteur position dans la configuration déformée par rapport à la configuration de référence, est au cœur de la compréhension des champs de déformation non homogènes. Il permet de relier localement la géométrie et la mécanique, et de capturer les effets complexes qui ne peuvent être abordés dans une approche purement homogène.

Comprendre ces notions est essentiel pour toute analyse avancée de la mécanique des milieux continus, notamment lorsqu’il s’agit d’étudier les phénomènes de plasticité, de rupture, ou encore d’élasticité non linéaire. La maîtrise des invariants de déformation, des directions principales et des gradients de déformation constitue une base solide pour appréhender les comportements mécaniques réels des matériaux et des structures soumis à des conditions variées.