La notion de dimension d'un sous-ensemble algébrique est un concept fondamental dans la géométrie algébrique. Elle permet de comprendre la "taille" ou la "complexité" de la variété algébrique associée à un idéal. Pour un sous-ensemble algébrique irréductible AAnA \subset \mathbb{A}^n, la dimension est définie comme le degré de transcendance de son corps de fonctions, soit dimA=trdegKK(A)\dim A = \text{trdeg}_K K(A), où KK est une extension algébriquement close du corps de base kk. Pour un sous-ensemble algébrique général AA, la dimension est donnée par dimA=max{dimAi}\dim A = \max\{\dim A_i\}, où A=A1ArA = A_1 \cup \dots \cup A_r est la décomposition en composantes irréductibles de AA sur KK.

Dans ce contexte, la dimension d'une variété algébrique est intimement liée aux propriétés de l'idéal qui définit cette variété. Par exemple, le critère de la base de Gröbner permet de déterminer la dimension d'une variété en utilisant des idéaux et des ordres monomiaux. Plus précisément, si II est un idéal dans l'anneau polynomial k[x1,,xc,y1,,yd]k[x_1, \dots, x_c, y_1, \dots, y_d], et A=V(I)Ac+dA = V(I) \subset \mathbb{A}^{c+d} est le sous-ensemble algébrique associé, un critère fondé sur une base de Gröbner peut établir que si rad(Lt(I))=(x1,,xc)\text{rad}(L_t(I)) = (x_1, \dots, x_c), alors dimA=d\dim A = d.

Ce critère repose sur la projection π:AAd\pi : A \to A^d, qui doit être surjective, et sur la condition que pour chaque composant irréductible de AA, la dimension soit égale à dd. Il est également important de noter que si II est un idéal dont tous les premiers associés ont la même dimension, alors on parle d'un ensemble algébrique non-mélangé. Ce concept permet de classer les variétés algébriques en courbes, surfaces, ou 3-variétés, selon leur dimension.

L'utilisation de bases de Gröbner pour déterminer la dimension peut être approfondie par l'examen de la théorie des extensions d'anneaux intégraux, qui joue un rôle central dans la démonstration du théorème de dimension. Une extension d'anneau intégral est une relation entre deux anneaux RSR \subset S, où un élément sSs \in S est dit intégral sur RR s'il satisfait une équation monique avec des coefficients dans RR. L'extension RSR \subset S est dite finie si SS est généré de manière finie en tant que module sur RR.

Cette notion est cruciale dans l'étude des idéaux et de leur comportement sous les extensions de corps. Par exemple, le critère de Gröbner repose sur la compréhension de la structure des idéaux et de leur décomposition primaire. Chaque idéal primaire associé définit une variété algébrique de dimension dd, ce qui permet de caractériser la dimension totale de la variété définie par un idéal.

Enfin, il est essentiel de saisir le rôle des extensions d'anneaux dans la géométrie algébrique. Lorsqu'une variété algébrique est définie par un idéal dans un anneau k[x1,,xn]k[x_1, \dots, x_n], l'étude de la dimension repose sur la manière dont les éléments de l'idéal interagissent avec les autres composants de la variété. Les extensions d'anneaux intégrales et les décompositions primaires d'idéaux permettent de déterminer la structure fine de la variété, et donc d'en déduire sa dimension exacte.

Le théorème de la "levée" (lying-over) est un autre outil important dans cette théorie. Si RSR \subset S est une extension d'anneaux intégrale et pp est un idéal premier de RR, alors il existe un idéal premier PP de SS tel que p=PRp = P \cap R. Ce théorème est essentiel pour comprendre la propagation des idéaux premiers sous les extensions, ce qui peut avoir des implications sur la dimension des variétés associées.

En résumé, la dimension d'un sous-ensemble algébrique est une mesure fondamentale qui permet de classer et d'analyser les variétés algébriques. La compréhension de cette dimension passe par des outils tels que les bases de Gröbner et la théorie des extensions d'anneaux, qui permettent de décomposer les idéaux et de caractériser la structure des variétés algébriques. La géométrie algébrique moderne repose ainsi sur un réseau complexe de théorèmes et de définitions interconnectées, dans lequel la dimension joue un rôle central.

Comment la géométrie algébrique projective généralise la géométrie affine

La géométrie algébrique projective offre un cadre puissant pour étudier les ensembles algébriques, en particulier en ce qui concerne les ensembles algébriques de dimension zéro. Dans ce contexte, le nombre de solutions d'un ensemble algébrique affine est un invariant numérique. Cependant, pour étendre ce concept à des ensembles plus généraux, on introduit la notion d'ensemble algébrique projectif. Ce changement de perspective permet de généraliser les notions classiques de nombre de points et de degré d'une hypersurface, qui était traditionnellement définie par le degré de son équation de définition, et ce, en une notion de degré applicable à tout ensemble algébrique projectif.

Le passage de la géométrie affine à la géométrie projective est facilité par le théorème de Bertini et ses corollaires. Un corollaire fondamental, le Corollaire 14.1.3 du théorème de Bertini, établit une relation géométrique entre ces deux types de géométrie. Cela introduit la nécessité de définir correctement l'espace projectif, ses chartes standard et la fermeture projective d'un ensemble algébrique affine.

L'espace projectif est défini à travers des idéaux homogènes dans l'anneau polynomial gradé S=K[x0,x1,,xn]S = K[x_0, x_1, \dots, x_n], où KK est un corps. La structure de l'anneau de coordonnées homogènes d'un ensemble algébrique projectif APnA \subset P^n est donnée par SA=S/I(A)S_A = S/I(A), où I(A)I(A) est l'idéal homogène d'annulation de AA. Cela conduit à la définition du degré d'un idéal homogène en termes du coefficient dominant du polynôme de Hilbert associé.

La définition de l'espace projectif commence par une intuition géométrique, remontant à la Renaissance. Les artistes de cette époque ont observé que deux lignes parallèles dans le plan affine A2A^2 ne se rencontrent pas. Cependant, dans la perspective, elles se rejoignent à un point à l'infini, sur l'horizon. L'espace projectif formalise cette intuition en définissant P2(R)P^2(\mathbb{R}) comme l'ensemble des droites passant par l'origine dans R3\mathbb{R}^3, chaque point du plan {z=1}\{z = 1\} correspondant à un point de P2(R)P^2(\mathbb{R}), et l'horizon correspondant à des sous-espaces vectoriels de dimension un dans R3\mathbb{R}^3.

Plus formellement, l'espace projectif P(W)P(W) est défini comme l'ensemble des sous-espaces vectoriels de dimension un d'un espace vectoriel fini-dimensionnel WW. Pour W=kn+1W = k^{n+1}, on définit Pn(k)=P(kn+1)P^n(k) = P(k^{n+1}). Un point dans Pn(k)P^n(k) est donc une classe d'équivalence sous la relation aba \sim b si b=λab = \lambda a pour un λk\lambda \in k^*, où a,ba, b sont des éléments non nuls de kn+1k^{n+1}. Les coordonnées homogènes (a0:a1::an)(a_0 : a_1 : \dots : a_n) sont utilisées pour représenter un point pPnp \in P^n, avec les relations bien définies pour les rapports ai:aja_i : a_j lorsque aj0a_j \neq 0.

L'une des propriétés essentielles des ensembles algébriques projectifs est leur définition à l'aide de polynômes homogènes. Un polynôme homogène ff de degré dd sur K[x0,,xn]K[x_0, \dots, x_n] est dit homogène si chaque terme du polynôme a le même degré total dd. La solution à l'équation f(p)=0f(p) = 0 est alors bien définie sur PnP^n. Un ensemble algébrique projectif V(f1,,fr)V(f_1, \dots, f_r) est un sous-ensemble de PnP^n défini par les équations homogènes fif_i, où les fif_i sont des polynômes homogènes de degrés did_i.

Les ensembles algébriques projectifs sont fermés sous la topologie de Zariski, qui est une topologie particulière sur l'espace projectif. Les ensembles ouverts de Zariski, qui servent de chartes dans l'atlas standard de PnP^n, sont définis comme les sous-ensembles de PnP^n où au moins une des coordonnées homogènes aia_i est non nulle. Ces chartes permettent de modéliser l'espace projectif comme une variété différentiable ou complexe compacte, selon le corps de base.

L'espace projectif est aussi perçu comme une compactification de l'espace affine. Par exemple, un hypersurface affine A=V(f)AnA = V(f) \subset A^n peut être homogénéisé pour être représenté comme un ensemble dans PnP^n. Cette homogénéisation est cruciale pour l'étude des singularités et des asymptotes des courbes et surfaces dans le cadre projectif.

En outre, l'espace projectif PnP^n peut être vu comme l'addition de l'espace affine AnA^n avec des "hypersurfaces infinies" Pn1P^{n-1} qui servent de limite à l'infini. Ce lien entre les espaces affines et projectifs permet une compréhension plus riche des propriétés géométriques, notamment pour étudier les singularités ou les comportements à l'infini de courbes et surfaces algébriques.

Dans cette approche, chaque espace projectif, qu'il soit réel ou complexe, apporte une nouvelle perspective sur les relations géométriques. Par exemple, les espaces projectifs réels comme P2(R)P^2(\mathbb{R}) sont non orientables, ce qui est un aspect géométrique fondamental. De même, les transformations linéaires agissant sur PnP^n induisent des automorphismes de PnP^n, et ce phénomène est lié à des actions de groupes comme PGL(n+1,K)PGL(n+1,K).

Les transformations et automorphismes de l'espace projectif révèlent la structure profonde de cet espace et sont essentiels pour la compréhension des correspondances entre points et sous-espaces dans le contexte algébrique.

Qu'est-ce qu'une variété algébrique projective et comment la morphisme de Veronese influence-t-il sa structure géométrique ?

Dans le contexte des variétés algébriques projectives, les sous-variétés définies par les mineurs 2 × 2 de matrices spécifiques comme ∆ jouent un rôle crucial dans la structure géométrique des espaces de projectivité. Ces mineurs, qui sont contenus dans l'idéal I, définissent des relations algébriques complexes entre les différentes composantes d'une variété projective donnée. La variété de Veronese, notée Vn,dV_{n,d}, en est un exemple typique, représentant l'image d'un plongement de Veronese dans l'espace projectif PNP^N, où N dépend des dimensions et du degré du plongement.

En étudiant ces variétés, nous notons que l'intersection de Vn,dV_{n,d} avec certains sous-espaces standards UjU_j dans PNP^N n'est pas triviale ; en fait, elle est vide dans des configurations particulières, comme dans l'exemple de V(y(d,0,...,0),,y(0,...,0,d))V(y(d,0,...,0), \ldots, y(0,...,0,d)). Ce résultat montre la manière dont les différentes projections et inclusions géométriques interagissent au sein des espaces projectifs, et plus spécifiquement comment les variétés de Veronese, en tant que sous-variétés de PNP^N, peuvent être comprises à travers leur intersection avec ces chartes.

Un aspect central de l'étude des variétés de Veronese est la compréhension de la manière dont elles se comportent sous des morphismes, en particulier les morphismes de Veronese. Ces morphismes sont des isomorphismes locaux dans certains cas, ce qui signifie qu'ils peuvent transformer des espaces de manière à préserver certaines propriétés géométriques fondamentales, telles que la structure projective des variétés. Par exemple, la restriction du morphisme ρn,d\rho_{n,d} à l'espace U0U_0 et son inverse sont définis par des relations polynomiales qui correspondent aux différentes combinaisons des coordonnées projectives.

La question de la dimension de la fibre d'un morphisme est également un aspect crucial à considérer. En particulier, la définition d'un morphisme projectif, tel que celui qui relie une variété projective AA à un autre espace BB, nous apprend que l'image de cette variété sous un morphisme est toujours un sous-ensemble fermé dans l'espace cible. Ce résultat fondamental se base sur l'idée que tout morphisme projectif induit une relation algébrique fermée, ce qui signifie que l'image de toute variété projective sous un tel morphisme reste elle-même une variété fermée dans l'espace de destination.

Les polynômes de Hilbert jouent aussi un rôle essentiel dans cette discussion, car ils permettent de calculer des invariants géométriques des variétés, notamment leur degré. Le polynôme de Hilbert associé à une variété peut ainsi fournir des informations cruciales sur la structure géométrique et topologique de la variété, en particulier concernant sa dimension et son degré de non-singularité. Cette approche est utilisée dans les exercices sur les surfaces de Veronese et leur projection, qui montrent comment les projections isomorphes préservent certaines caractéristiques géométriques, comme la dimension de la surface.

Il est également pertinent de souligner l'importance des morphismes entre variétés quasi-projectives et projectives. Le théorème fondamental d'élimination et le fait qu'un morphisme projectif soit un « mappage fermé » revêtent une importance particulière dans l'étude de la géométrie algébrique, car ils permettent de relier des propriétés locales et globales des variétés algébriques dans le cadre de la topologie de Zariski.

Enfin, un autre élément essentiel est la continuité semi-définie de la dimension des fibres. Lorsqu'un morphisme est projetif, les fibres au-dessus de chaque point de l'espace cible sont des sous-variétés algébriques fermées dans l'espace de départ. Cette propriété donne une structure claire aux préimages dans les morphismes projectifs, et elle a des conséquences directes sur l'étude de la dimension des fibres et sur la façon dont les variétés projectives se comportent sous transformation.

Le calcul du degré d'une variété, en particulier dans le cas des variétés de Veronese et de leurs projections, est un autre aspect fondamental qui permet de mieux comprendre l'impact des morphismes projectifs. Le calcul de ce degré, via des méthodes algébriques comme les idéaux homogènes et la saturation, est crucial pour l'analyse détaillée de la géométrie de ces variétés dans les contextes plus complexes.

Comment définir un diviseur canonique et une forme différentielle rationnelle sur une courbe algébrique ?

Soit CC une courbe algébrique irréductible et lisse, de genre arithmétique pa(C)=0p_a(C) = 0. Selon le théorème de Riemann-Roch, une telle courbe est isomorphe à P1\mathbb{P}^1, la droite projective. Cela signifie qu'il existe une correspondance naturelle entre les formes différentielles rationnelles et les diviseurs canoniques de CC. Ces diviseurs jouent un rôle crucial dans la théorie des courbes algébriques, particulièrement en relation avec les fonctions meromorphes et les différentielles rationnelles.

Un diviseur canonique est défini par un certain type de forme différentielle, et il est associé à des propriétés géométriques importantes de la courbe. Pour comprendre cette définition, il faut se plonger dans les détails de la structure des différentielles rationnelles et des diviseurs qui en résultent. Tout d'abord, il est essentiel de comprendre comment la notion de degré et la propriété des différentielles rationnelles interagissent.

Différentielles rationnelles et divisibilité

Une forme différentielle rationnelle sur une courbe CC est un objet qui peut être exprimé sous la forme ω=gdh\omega = g \, dh, où gg et hh sont des fonctions rationnelles définies sur CC. Le diviseur de cette forme différentielle, noté WW, est obtenu en calculant la valuation de ω\omega en chaque point de la courbe, c'est-à-dire en examinant le comportement de ω\omega autour de chaque singularité ou point régulier. Ce diviseur est bien défini, car il ne contient qu'un nombre fini de points où la valuation est non nulle.

La construction des formes différentielles rationnelles repose sur les concepts de base de l'algèbre commutative et de la géométrie algébrique. Les bases de ces espaces vectoriels sont des éléments comme dxdx et dydy, qui génèrent l'espace des différentielles rationnelles. Dans ce cadre, la règle du produit et de la somme pour les différentielles permet de décrire comment les formes différentielles se combinent entre elles. L'existence de relations de dépendance, telles que d(fg)=fdg+gdfd(fg) = f dg + g df, est un aspect fondamental de ce type de calcul.

Diviseurs canoniques et leurs propriétés

Un diviseur canonique est défini comme étant un diviseur associé à une forme différentielle rationnelle ω\omega. Si ω\omega est une forme régulière, c'est-à-dire que la valuation de ω\omega est non négative partout sur CC, alors le diviseur associé est un diviseur valide sur la courbe. Ce type de diviseur est crucial pour comprendre la structure de la courbe et les propriétés de ses fonctions rationnelles.

La définition du diviseur canonique implique que les formes différentielles ω=fdt\omega = f \, dt sont associées à un point pCp \in C, où tt est un générateur local de l'idéal maximal mC,pm_{C,p}. Les éléments tt et ss de cet idéal génèrent des bases de l'espace des différentielles rationnelles, et leurs dérivées déterminent la structure du diviseur canonique. Ces bases sont liées entre elles par des relations de type ds=udtds = u \, dt, où uu est une unité dans OC,p\mathcal{O}_{C,p}, l'anneau des fonctions régulières en pp.

Relation entre les diviseurs canoniques et les propriétés géométriques

Les diviseurs canoniques ne dépendent pas seulement de la forme des fonctions rationnelles mais aussi de la géométrie de la courbe elle-même. En particulier, le genre arithmétique pa(C)p_a(C) d'une courbe joue un rôle crucial dans la définition de ses diviseurs canoniques. Ce genre peut être interprété comme une mesure de la complexité topologique de la courbe et est invariant sous isomorphisme. Les courbes de genre 0, comme P1\mathbb{P}^1, ont des diviseurs canoniques simples, tandis que les courbes de genre plus élevé ont des structures de diviseurs plus complexes.

La structure de l'espace des différentielles rationnelles

L'espace des différentielles rationnelles, Ω(C)\Omega(C), est un espace vectoriel sur le corps des fonctions rationnelles K(C)K(C), et il est généré par des différentielles élémentaires comme dxdx et dydy. Cet espace est de dimension 1 pour une courbe projective lisse, ce qui signifie qu'il existe une base unique de cet espace, et toute forme différentielle rationnelle peut être exprimée comme une combinaison linéaire de ces formes de base.

Cependant, l'espace des différentielles rationnelles peut se comporter différemment selon le champ KK sur lequel la courbe est définie. Par exemple, dans le cas d'un corps de caractéristique p>0p > 0, des phénomènes particuliers peuvent se produire, et il peut exister des fonctions rationnelles qui ont des différentielles triviales. Toutefois, dans le cadre des courbes définies sur un corps algébriquement clos comme C\mathbb{C}, les différentielles rationnelles ne sont jamais triviales, sauf dans les cas où la courbe a une structure géométrique particulière.

Considérations finales

L'étude des formes différentielles rationnelles et des diviseurs canoniques sur des courbes algébriques s'inscrit dans une compréhension plus large des relations entre géométrie algébrique, topologie et analyse complexe. En plus de fournir des outils puissants pour classer les courbes algébriques, cette théorie permet également d'explorer la structure intrinsèque des fonctions rationnelles sur ces courbes, offrant ainsi des perspectives uniques sur la géométrie des variétés algébriques.

Comment résoudre le problème d'appartenance à un idéal dans les anneaux de polynômes ?

Le problème de l'appartenance à un idéal dans un anneau de polynômes est un problème central en algèbre commutative et en géométrie algébrique. Étant donné un champ kk et un idéal (f1,,fr)(f_1, \ldots, f_r) dans l'anneau k[x1,,xn]k[x_1, \ldots, x_n], et un polynôme fk[x1,,xn]f \in k[x_1, \ldots, x_n], la question est de savoir si ff appartient à cet idéal, c'est-à-dire si f(f1,,fr)f \in (f_1, \ldots, f_r). Ce problème a des implications profondes dans de nombreux domaines des mathématiques, en particulier dans la résolution de systèmes d'équations algébriques.

Le théorème de Hilbert, dans sa version faible (le Nullstellensatz), permet de relier le problème de l'appartenance à un idéal à une question géométrique. Le Nullstellensatz de Hilbert nous dit que, pour un champ algébriquement clos KK, si f1,,frK[x1,,xn]f_1, \ldots, f_r \in K[x_1, \ldots, x_n] sont des polynômes, alors l'ensemble des points où tous ces polynômes s'annulent, noté V(f1,,fr)V(f_1, \ldots, f_r), est non vide si et seulement si le polynôme constant 11 appartient à l'idéal (f1,,fr)(f_1, \ldots, f_r). En d'autres termes, si nous pouvons exprimer 11 comme une combinaison linéaire des générateurs de l'idéal, alors l'ensemble V(f1,,fr)V(f_1, \ldots, f_r) est vide, ce qui signifie qu'il n'existe pas de solution aux équations définies par ces polynômes.

La question de savoir si un système d'équations algébriques a une solution est donc intimement liée à la capacité de déterminer si 1(f1,,fr)1 \in (f_1, \ldots, f_r). Pour cela, il existe des algorithmes qui permettent de résoudre ce problème d'appartenance. Ces algorithmes reposent sur des concepts avancés d'algèbre commutative, en particulier sur l'utilisation des bases de Gröbner.

Les bases de Gröbner sont un outil puissant pour résoudre le problème d'appartenance à un idéal. Elles sont basées sur des ordres de monomes, qui permettent de simplifier les calculs algébriques. Un monome dans l'anneau k[x1,,xn]k[x_1, \ldots, x_n] est un élément de la forme xα=x1α1xnαnx^\alpha = x_1^{\alpha_1} \cdots x_n^{\alpha_n}, où α\alpha est un vecteur d'exposants non négatifs. Par exemple, dans un anneau de polynômes en deux variables xx et yy, un monome peut être x2yx^2y ou xy3xy^3.

Les bases de Gröbner exploitent un ordre total sur les monomes pour organiser et simplifier les polynômes. L'un des ordres les plus courants est l'ordre lexicographique, où les monomes sont ordonnés en fonction de l'ordre lexicographique de leurs exposants. En choisissant un ordre approprié et en appliquant un algorithme de réduction, il est possible de déterminer si un polynôme donné appartient à un idéal défini par un ensemble de polynômes.

Dans le cas où les polynômes sont définis sur le champ des rationnels Q\mathbb{Q}, une méthode numérique peut être utilisée pour résoudre ces systèmes d'équations algébriques. Cependant, dans les champs finis comme Fp\mathbb{F}_p, la question de l'appartenance à un idéal peut être étudiée en réduisant les coefficients des polynômes modulo un nombre premier pp, ce qui permet de travailler avec des systèmes d'équations dans des corps finis. L'étude des points rationnels sur les variétés algébriques devient alors une question combinatoire et arithmétique, souvent reliée à la théorie des corps finis.

Il est également important de noter que l'étude des idéaux et des variétés algébriques ne se limite pas à la géométrie des solutions, mais joue également un rôle crucial dans la théorie des équations diophantiennes. Par exemple, si les équations sont définies sur l'anneau des entiers Z\mathbb{Z}, la recherche de solutions entières peut être abordée en étudiant les points rationnels modulo pp, ce qui donne des informations sur les solutions possibles dans les corps finis et sur les solutions réelles.

Un autre aspect intéressant des bases de Gröbner est qu'elles peuvent être utilisées pour effectuer des réductions algébriques systématiques, ce qui permet de déterminer si un système d'équations possède une solution ou non. Les propriétés algébriques des bases de Gröbner garantissent que, en cas de solution, cette solution peut être obtenue de manière efficace, ce qui est particulièrement utile dans des contextes computationnels.

La compréhension des bases de Gröbner repose sur une maîtrise des notions d'ordres de monomes et de réduction, mais aussi sur une bonne connaissance des structures algébriques sous-jacentes, telles que les idéaux et les variétés algébriques. Ces outils permettent de résoudre des questions complexes sur la solvabilité des systèmes d'équations, offrant ainsi un cadre puissant pour les mathématiques computationnelles.

Il est aussi essentiel de comprendre que l'approche basée sur les bases de Gröbner est hautement algorithmique et repose sur des méthodes efficaces de calcul, telles que la division euclidienne dans les anneaux de polynômes et la gestion des relations entre les monomes. Cela permet de résoudre des problèmes qui étaient auparavant inaccessibles, ouvrant ainsi de nouvelles voies dans la résolution des équations algébriques à grande échelle.