La loi forestière de 1996 représente un tournant majeur dans l'approche environnementale du Costa Rica, introduisant un cadre légal novateur qui a permis la création du programme des Paiements pour les Services Environnementaux (PSE). Avant cette réforme, la loi forestière de 1990 avait instauré le FONAFIFO, le Fonds national de financement forestier, mais c'est après 1996 que ce dernier a vu ses fonctions et responsabilités se renforcer considérablement. FONAFIFO est devenu l'organe en charge de la gestion du programme PSE, supervisant le financement des propriétaires fonciers pour les services environnementaux rendus par leurs terres.

Le programme PSE, qui a vu le jour en 1997, s'inscrit dans une dynamique de paiement des propriétaires terriens pour quatre services environnementaux spécifiques : la séquestration du carbone, la conservation de la biodiversité, les services hydrologiques et la beauté paysagère. À l'origine, le financement du programme venait d'une taxe sur la consommation de produits dérivés du pétrole brut, une mesure audacieuse qui visait à allouer un tiers des revenus de cette taxe à FONAFIFO. Cependant, cette allocation a été réduite avec la loi de réforme fiscale de 2001, limitant le montant alloué à seulement 3,5 % de cette taxe.

Les répercussions de cette réforme législative se sont rapidement fait sentir, notamment dans le contexte de la politique de développement durable du pays. La loi de 1996 a inscrit le Costa Rica comme un leader mondial dans la gestion durable des forêts tropiques, une initiative qui s'inscrit dans un contexte où la question du changement climatique devenait de plus en plus pressante. Cependant, bien que les autorités locales aient espéré un soutien financier international substantiel, ce financement n'est pas parvenu dans les proportions attendues, laissant le pays s'appuyer en grande partie sur ses propres ressources internes.

Les services liés à la beauté paysagère et à la gestion des bassins versants avaient un impact principalement local, visant à améliorer la qualité de vie des citoyens costariciens, tandis que la séquestration du carbone et la biodiversité avaient des bénéfices globaux. Cette distinction souligne non seulement la préoccupation des autorités pour les problèmes environnementaux internes, mais aussi leur capacité à penser de manière altruiste, prenant en compte les besoins globaux liés à la crise climatique.

Le succès de la loi forestière de 1996 ne réside pas uniquement dans l'instauration du programme PSE, mais aussi dans l'intégration progressive du pays dans les débats internationaux sur le changement climatique. Dès la fin des années 1990, le Costa Rica s'est positionné comme un acteur clé des négociations mondiales sur le climat, cherchant à attirer des financements internationaux pour soutenir ses efforts de conservation. Le pays a ainsi réussi à combiner sa politique de gestion durable des forêts avec les dynamiques mondiales émergentes, notamment à travers la vente de crédits carbone.

Toutefois, l'une des dynamiques intéressantes observées est le rôle des élus locaux dans l'adoption de la taxe sur les combustibles fossiles. Ceux représentant les zones rurales ont vu dans cette taxe un moyen de redistribuer les richesses des zones urbaines vers les régions plus marginalisées du pays. Cette redistribution semblait être une réponse à une dynamique plus large, celle de la recherche d'un équilibre entre les intérêts urbains et ruraux, tout en favorisant la conservation de l'environnement.

La mise en place de ce programme a également permis au Costa Rica de se diversifier financièrement, avec l'apport de fonds provenant de sources variées telles que la Banque mondiale ou le Fonds pour l'environnement mondial. Le pays, autrefois dépendant de l'aide internationale, a réussi à attirer des investissements étrangers tout en consolidant ses politiques internes. Ce modèle de financement hybride a permis au Costa Rica d’avancer dans ses projets environnementaux malgré les réductions des aides étrangères.

Ce changement de paradigme dans la gestion environnementale, incarné par la loi de 1996, s'inscrit dans un cadre plus large où la durabilité, la biodiversité et la lutte contre le changement climatique sont devenues des enjeux mondiaux. Le Costa Rica a non seulement transformé ses forêts en un atout économique, mais a également servi de modèle pour d'autres nations en développement, démontrant qu'il est possible d'intégrer la conservation de la nature dans une politique économique moderne.

Il est crucial pour le lecteur de comprendre que cette législation ne constitue pas seulement un modèle de gestion forestière, mais aussi un exemple de gouvernance qui lie les défis locaux à des enjeux mondiaux. Les efforts du Costa Rica, bien que marqués par certaines illusions de financements externes qui ne se sont pas concrétisés, ont permis de renforcer l'image du pays comme pionnier en matière de politique environnementale durable. Toutefois, il est essentiel de garder à l'esprit que la réussite de ce modèle dépend de la volonté politique constante, de l'innovation dans la gestion des ressources naturelles, ainsi que de la capacité à intégrer les préoccupations locales et globales dans une même démarche de conservation.

La puissance de la révolution climatique : l'héritage des Figueres et l'impact des leaders visionnaires

Christiana Figueres incarne une forme de leadership unique, forgée par son héritage familial et son engagement envers la lutte contre le changement climatique. Avec une stature physique modeste de cinq pieds, son énergie et sa concentration la propulsent pourtant au cœur de l’action diplomatique mondiale. Elle incarne, à bien des égards, l’héritage de son père, José Figueres Ferrer, un homme qui, bien qu'ayant une constitution physique similaire, a laissé une empreinte indélébile sur la politique internationale. Leur capacité commune à connecter avec des individus de milieux sociaux très divers est l’un des fils conducteurs de leurs parcours respectifs. La petite taille de Christiana et son côté « volcanique », comme l’ont décrit ses collaborateurs, contraste avec la rigueur et la précision de son approche du changement climatique. Une description marquante de son caractère par Elizabeth Kolbert (2015) souligne sa capacité à émouvoir, à rire, mais aussi à pleurer, parfois avec une spontanéité déconcertante pour une diplomate. Ces qualités humaines, loin de les réduire, renforcent son influence auprès des nations.

Christiana Figueres n’est pas seulement une diplomate accomplie. Elle est un exemple frappant de l'importance des relations humaines dans la résolution de problèmes mondiaux. Son père, José Figueres, en politique, avait cette même capacité à se connecter avec des personnes issues de toutes les couches sociales, sans distinction. Exilé en 1942 après avoir critiqué le gouvernement du Costa Rica, José Figueres a vécu au Salvador, où il a affronté une situation difficile dans un contexte d’hospitalité souvent paradoxale. Ce n’est pas seulement le pouvoir politique qui façonne l’héritage de cette famille, mais une vraie philosophie du vivre-ensemble. Leurs interactions, qu'elles soient avec les élites ou les plus démunis, montrent que l'influence politique et sociale ne se limite pas aux murs des salons diplomatiques. Les Figueres ont toujours cherché à établir une relation authentique, sincère et directe avec les autres, peu importe leur statut ou origine.

Une telle approche est également visible dans les moments décisifs qui ont marqué l’histoire de la famille Figueres. José Figueres, par exemple, ne se contentait pas de penser aux grandes idées politiques, mais abordait aussi les projets les plus concrets avec une intensité comparable. Henrietta Boggs, dans son récit, évoque un passage fascinant de sa vie avec José Figueres, lorsque celui-ci décida de construire une cheminée. Ce projet, à première vue anodin, fut abordé avec une détermination hors du commun. Figueres se plongea dans les encyclopédies, résolut chaque détail du projet avec une ferveur inouïe, et en moins de temps que prévu, la cheminée fut construite, concrétisant ainsi l'idée en un symbole de son pragmatisme et de sa rapidité d'exécution. Ce type de focus, cette capacité à résoudre un problème avec une précision presque scientifique, n’est pas étranger à Christiana, qui, en tant que leader des négociations climatiques, aborde les défis mondiaux avec la même rigueur.

Dans le cadre de la conférence de Paris en 2015, cet héritage familial s’est fait sentir. Les efforts pour aboutir à un accord mondial sur le climat ont été marqués par la contribution de 186 pays, qui ont soumis leurs contributions nationales déterminées (NDC) pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Cet engagement culmina avec l’Accord de Paris, qui visait à limiter le réchauffement climatique à 1,5°C par rapport aux niveaux préindustriels, tout en fixant des objectifs révisables tous les cinq ans. La détermination de Christiana à obtenir des résultats tangibles, même dans un cadre international complexe, est une preuve supplémentaire de l’efficacité du leadership familial qui s'étend bien au-delà des frontières du Costa Rica.

L’un des aspects souvent sous-estimés du travail de Christiana est la capacité de ces leaders à naviguer à travers des systèmes bureaucratiques tout en restant profondément ancrés dans les réalités humaines. Christiana Figueres ne s’est pas contentée de défendre une cause noble ; elle a su la rendre concrète, en impliquant des acteurs de tous horizons, des responsables politiques aux citoyens ordinaires. Il en va de même pour son père, dont la vision de la politique était globalement orientée vers un dialogue international qui ne se limitait pas aux institutions gouvernementales, mais qui englobait l’ensemble de la société civile. En cela, Christiana suit les traces de son père, tout en apportant sa propre touche unique au monde de la diplomatie climatique.

Les deux figures partagent une approche de la politique fondée sur l’ouverture, l’humilité et la détermination. Leurs vies illustrent comment un leadership authentique peut naître de la capacité à écouter, à comprendre et à travailler avec des personnes de toutes origines, tout en poursuivant des objectifs ambitieux et nécessaires à l'échelle mondiale. Leur héritage montre que l’action politique efficace ne se résume pas à la prise de décision ; elle nécessite aussi une capacité rare à tisser des liens humains et à faire preuve de résilience face aux défis mondiaux.

Les leaders comme Christiana et José Figueres rappellent l’importance de l’humanité dans le leadership. L’empathie et l’efficacité ne sont pas des opposés, mais des alliés puissants lorsqu’il s’agit de transformer des idées en actions concrètes. C’est ce que l’on doit retenir de leur parcours et de leur travail : un leadership ancré dans les valeurs humaines, mais capable de traiter les problèmes mondiaux avec une rigueur méthodologique sans égale. Cela ouvre la voie à une diplomatie plus humaine et à une action internationale plus cohérente face à des enjeux globaux comme le changement climatique.