Le cycle Allam, une approche innovante de la production d'énergie utilisant le dioxyde de carbone supercritique (sCO2), présente des caractéristiques intéressantes sur le papier, mais sa mise en œuvre pratique soulève plusieurs défis liés à l'efficacité thermique et à la consommation d'énergie parasitaire. L’efficacité du cycle Allam dépend de trois facteurs majeurs : l'efficacité de la récupération thermique, l'impact de la consommation d'énergie parasitaire par l'unité de séparation de l'air (ASU) et l'intégration thermique entre l'ASU et le bloc de production d'énergie.

Un des éléments cruciaux pour l'efficacité globale du cycle est la capacité à intégrer efficacement la chaleur récupérée du gaz d'échappement de la turbine dans le processus. Or, une simple récupération thermique s’avère inefficace : la température de sortie du sCO2 est bien inférieure à celle du gaz d’échappement de la turbine. Cette dissociation thermique nuit à l'efficacité globale du cycle, car la chaleur récupérée est mal utilisée dans la production d’énergie. En l'absence d'une récupération thermique complexe, les performances du cycle diminuent, ce qui implique que la conception de l'échangeur de chaleur et l'intégration avec l'ASU sont essentielles pour améliorer les rendements.

Une autre difficulté réside dans les coûts associés à la production d'oxygène pur pour le processus d'oxycumbustion. L'ASU (Air Separation Unit) utilise une quantité considérable d'énergie pour séparer l'oxygène de l'air, une tâche qui devient encore plus complexe si l'on vise une pureté élevée (99,5 % ou plus). La production d'oxygène pur est donc gourmande en électricité, ce qui ajoute un facteur de consommation d'énergie parasitaire non négligeable, réduisant ainsi l'efficacité nette de la centrale.

Les chiffres de performance du cycle, même après avoir pris en compte ces défis, sont néanmoins impressionnants. Par exemple, le rendement thermique net du cycle s'élève à 59,06 %, un chiffre qui reste compétitif comparé à d’autres technologies de production d'énergie, mais qui ne tient pas compte de l'ensemble des coûts et des pertes liés à la production et à la gestion des ressources nécessaires. La prise en compte des consommateurs d'énergie parasitaires, comme la compression de l'oxygène ou la compression du gaz combustible, fait chuter l'efficacité nette à 45 % dans des conditions plus réalistes.

En outre, la gestion de l'eau de refroidissement est un autre aspect technique important. Dans de nombreuses régions du monde, les centrales ne peuvent pas rejeter directement de l'eau de refroidissement chaude dans des plans d'eau naturels sans respecter des normes environnementales strictes. Cela oblige souvent à recourir à des systèmes de refroidissement à sec, comme des tours de refroidissement ou des échangeurs à ailettes, augmentant ainsi la complexité et le coût des installations.

L'optimisation de ce cycle implique de nombreuses variables : de la gestion de l'ASU à l'intégration thermique entre les différentes parties du système. Les performances du cycle peuvent s'améliorer significativement si l’on parvient à concevoir des récupérateurs plus sophistiqués et à intégrer plus efficacement la chaleur générée par la turbine dans l'ensemble du processus. Cela pourrait permettre d'atteindre des rendements théoriques plus élevés (jusqu'à 55 % ou 59 %) mais nécessiterait des investissements technologiques lourds.

En termes d’application, le cycle Allam ne semble pas encore pouvoir rivaliser, sur le long terme, avec les cycles combinés à turbines à gaz de classe avancée et des technologies de capture du carbone après combustion. Bien que la récupération du CO2 sous pression soit un atout indéniable de la technologie Allam, la nécessité de produire de l'oxygène et de compresser le gaz naturel à des pressions élevées pour optimiser les rendements entraîne des coûts supplémentaires, rendant ainsi l'efficacité de la centrale moins compétitive par rapport à d'autres méthodes plus établies.

Les perspectives de développement du cycle Allam sont donc indissociables de la capacité à réduire la consommation parasitaire, à améliorer l'efficacité des récupérateurs de chaleur et à intégrer de manière plus fine les systèmes de production d'oxygène et de CO2. Une réflexion sur les coûts à long terme, en particulier en matière d'infrastructure pour la production d'oxygène et la gestion des ressources thermiques, sera essentielle pour évaluer la viabilité de cette technologie dans un futur proche.

L'intégration des technologies solaires à concentration pour les centrales ISCC : défis et opportunités

L'une des questions essentielles dans le domaine de l'énergie solaire thermodynamique (CSP) réside dans l'intégration des systèmes de stockage thermique (TES) au sein des centrales solaires à concentration (CSP), en particulier pour les installations à tours solaires ou à collecteurs paraboliques. Le concept de centrales solaires à concentration intégré à des systèmes hybrides (ISCC) offre une approche intéressante, notamment en raison de l’attrait d’exclure les systèmes de stockage thermique dans le cadre de coûts d’installation et de complexité supplémentaires. Le coût estimé du stockage thermique, bien qu'en diminution, reste important (environ 90 $/kWth, mais devrait baisser à 25 $/kWth dans un avenir proche), ce qui affecte l'ensemble des coûts d’exploitation et de maintenance des installations.

Cependant, l'ajout d’un système de stockage thermique, même limité à quelques heures de capacité (par exemple, six heures de stockage), peut accroître le rendement des systèmes comme les tours solaires par concentration (PTR) ou les systèmes à récepteurs centralisés (CRS). Un tel ajout augmenterait le SM à des valeurs comprises entre 1,8 et 2,0 pour PTR et CRS, ce qui se traduit par une amélioration de la performance énergétique tout en maintenant un coût compétitif. Les avantages incluent la réduction des transitoires de pression et de température dans les turbines à vapeur, ainsi qu'une gestion optimisée du stress thermique, ce qui permet de démarrer plus rapidement après un arrêt, notamment grâce à des températures plus élevées des turbines durant les périodes de non-production.

Un autre bénéfice significatif du stockage thermique limité, en particulier pour les systèmes de turbines à vapeur haute pression, réside dans la possibilité de réduire les pertes de capacité de génération dues aux transitoires thermiques lents. Une étude récente a démontré une augmentation de la production d'énergie quotidienne pouvant atteindre 10 %, ce qui est crucial pour les systèmes de haute pression avec des pressions de vapeur dépassant les 2 000 psia. Cette augmentation de la production est d'autant plus pertinente pour les centrales dont les performances peuvent être sévèrement réduites par des ajustements thermiques trop lents.

L'expérience de plusieurs centrales CSP utilisant des récepteurs solaires et des systèmes de stockage thermique à sels fondus montre des résultats intéressants. Par exemple, la centrale Solana en Arizona, avec une capacité de 280 MW, et Andasol 1 en Espagne, avec une capacité de 150 MW, ont prouvé la faisabilité et l'efficacité du stockage thermique dans le cadre de CSP à champ de collecteurs paraboliques. En revanche, les centrales utilisant des tours solaires avec stockage thermique à sels fondus restent encore rares, avec seulement quelques projets notables comme Solar Two, Gemasolar et Crescent Dunes. Ces derniers ont démontré les défis liés à la mise en œuvre de technologies de stockage thermique complexes, notamment en matière de conception, de construction et de fiabilité à long terme.

L'exemple de Solar Two, un projet de démonstration de 10 MWe ayant fonctionné entre 1996 et 1999, a validé la technologie des tours solaires à sels fondus, mais il reste limité en termes de capacité de production. Gemasolar, avec une capacité de 20 MWe et une capacité de stockage thermique de 15 heures, représente une réalisation réussie dans ce domaine et est en fonctionnement depuis 2011. Cependant, des problèmes techniques ont affecté le projet Crescent Dunes, initialement prometteur avec une capacité de 110 MWe et un stockage thermique de 10 heures, qui a été mis hors ligne en 2016 en raison d'une fuite dans un réservoir de sel fondu, avant de reprendre partiellement son fonctionnement en 2017. Les difficultés rencontrées par Crescent Dunes rappellent que le stockage thermique à sels fondus est une technologie complexe et qu'une mise à l'échelle de ce type de système n'est pas sans risques.

La maturité de la technologie des tours solaires avec stockage thermique à sels fondus (MSST) est encore un sujet de débat. Selon les critères de la DOE américaine, les tours solaires avec stockage thermique à sels fondus seraient proches du niveau de maturité commerciale, même si elles ne représentent qu'une petite portion de la capacité totale des tours solaires actuellement en opération. Cette situation met en lumière la question de la scalabilité des systèmes de stockage thermique à sels fondus, qui se heurte à des difficultés techniques et économiques importantes, comme l’a montré l'échec du projet Crescent Dunes. Néanmoins, la technologie de stockage à sels fondus reste prometteuse, mais elle nécessite des améliorations continues en matière de fiabilité et de coûts.

Les systèmes de stockage thermique à sels fondus, comme celui utilisé dans les centrales Solana et Andasol, fonctionnent grâce à un réservoir constitué de sels fondus qui emmagasinent l'énergie thermique générée durant la journée pour permettre une production d'électricité continue pendant la nuit ou par temps nuageux. Ce processus repose sur un échange thermique entre le fluide caloporteur (généralement du sel fondu) et l'eau pour produire de la vapeur qui alimente la turbine. Bien que cette technologie soit efficace dans les centrales à grande échelle, elle pose des défis en termes de contrôle thermique et de gestion des températures élevées, qui peuvent entraîner des pertes énergétiques et des défaillances de composants.

La technologie CRS, centrée sur l'utilisation de tours solaires avec un récepteur central et un stockage thermique, semble être la plus adaptée pour des applications ISCC. Cette technologie repose sur l'utilisation de champs de héliostats qui concentrent la lumière solaire sur un récepteur situé en haut d'une tour, où la chaleur est transférée à un fluide caloporteur pour produire de la vapeur. Ce fluide peut être de l'eau ou du sel fondu, ce qui permet de stocker la chaleur pour une utilisation ultérieure. Les défis liés à cette technologie comprennent la conception de récepteurs efficaces et la gestion du flux thermique pour éviter les pertes d'énergie.

L'un des points clés dans l'optimisation de cette technologie réside dans la conception du récepteur, qui doit maximiser l'absorption de la chaleur solaire tout en évitant la surchauffe du fluide caloporteur. Un bon récepteur permet de transmettre efficacement la chaleur au fluide sans que celui-ci ne perde trop d'énergie au contact du récepteur ou de l'environnement extérieur. Par ailleurs, le choix du matériau des tubes de l'échangeur thermique et des caractéristiques du fluide caloporteur joue un rôle crucial dans l'efficacité globale du système.

Comment le stockage d'énergie par gaz comprimé (CGES) peut-il révolutionner le secteur énergétique ?

Le concept de stockage d'énergie par gaz comprimé (CGES) repose sur l'analogie avec la technologie de stockage d'air comprimé (CAES), mais avec une différence majeure : le fluide de stockage. Au lieu d'utiliser l'air comprimé comme médium de stockage, le CGES se base sur l'utilisation du gaz naturel. Cette approche, qui a vu le jour dans une installation de stockage de gaz à Madera, en Californie, exploite des équipements déjà présents dans l'installation existante, à savoir un train de compresseurs avec entraînements à fréquence variable, ainsi qu'un espace de stockage dédié au gaz naturel.

L'ajout d'une unité turbo-expanseur dans cette installation permet de transformer cette infrastructure de stockage de gaz naturel en une centrale électrique utilisant la technologie CGES. Cela fonctionne de manière analogue à un système CAES, la différence essentielle étant que le gaz stocké est du gaz naturel et non de l'air. Le cœur de ce concept est un turbo-expanseur à deux étages, associé à des chauffages de gaz. Ce système permet de générer de l'énergie en faisant se détendre le gaz provenant du réservoir vers la pression de pipeline.

Le processus de détente du gaz est délicat et nécessite un préchauffage du gaz avant qu’il ne passe par les différentes étapes de détente. Sans préchauffage, la température du gaz chuterait à un niveau tel que la formation de liquide et d’hydrates de gaz serait inévitable, ce qui serait problématique pour l'expansion et la récupération d'énergie. Par exemple, si le gaz se détendait sans préchauffage, la température atteindrait environ -28°C, une température qui, dans des conditions réelles, entraîne des phénomènes indésirables comme la formation de condensats. Par conséquent, le préchauffage permet non seulement d’éviter ces phénomènes, mais aussi d'augmenter la production d’énergie, ce qui améliore l’efficacité du système.

Dans le cadre de l'expansion du gaz, chaque étape du turbo-expanseur, en étant préchauffée à environ 93°C, peut produire une puissance d'environ 11 MW, contre 8 MW sans préchauffage. Cette augmentation de la puissance est cruciale pour les performances de la centrale, car elle optimise l'efficacité tout en réduisant les risques liés à l'humidité et à la formation de liquides dans le système.

Le CGES représente une option particulièrement intéressante pour la gestion de l'énergie en période de faible demande ou lorsqu'il y a un excédent d'énergie générée par des sources renouvelables, telles que l'énergie solaire ou éolienne. En utilisant un stockage par gaz comprimé, il est possible de stocker l'excédent d'énergie et de le restituer lorsque la demande augmente ou lorsque les ressources renouvelables ne sont plus disponibles. Ainsi, cette technologie offre une flexibilité importante, notamment dans les systèmes hybrides où l’électrolyseur fonctionne à faible capacité en utilisant l'énergie générée par le turbo-expanseur du CAES pour minimiser les cycles de démarrage et d'arrêt fréquents qui peuvent endommager l’équipement.

Un des grands avantages de cette technologie est sa capacité à fonctionner avec des installations de stockage de gaz existantes. Cela permet une transition plus rapide et moins coûteuse vers un système de stockage d'énergie à grande échelle, tout en utilisant des infrastructures déjà présentes. Cependant, le choix du gaz naturel comme fluide de stockage nécessite également une gestion rigoureuse des risques liés à l'environnement et à la sécurité, notamment en termes de fuites possibles et de la gestion des impacts environnementaux liés à l'extraction et au stockage du gaz.

L’efficacité du système peut aussi varier en fonction de la manière dont les gaz sont chauffés. Différents scénarios peuvent inclure des options de chauffage pré- ou post-expansion, ce qui influence directement les performances de la centrale. Le contrôle précis des températures de chauffage, ainsi que l'adaptation de la pression dans les réservoirs, sont essentiels pour maximiser les rendements énergétiques et minimiser les risques de défaillances.

Pour le lecteur, il est important de comprendre que le CGES ne se limite pas à une simple alternative au CAES, mais qu’il constitue une technologie évolutive permettant d’intégrer des solutions de stockage de gaz naturel dans le cadre de la transition énergétique. Ce modèle hybride présente des avantages considérables en termes de flexibilité et de compatibilité avec les réseaux énergétiques existants, tout en posant des défis techniques et environnementaux à surmonter pour garantir sa viabilité à long terme.

Enfin, au-delà des aspects techniques, la réussite du CGES dépendra aussi de la manière dont il sera intégré dans les stratégies énergétiques globales. La gestion des coûts, les considérations environnementales, et l'acceptabilité sociale de l’utilisation de gaz naturel dans des systèmes de stockage d'énergie devront être prises en compte pour garantir que cette technologie puisse jouer un rôle clé dans le mix énergétique de demain.

Comment la combustion de l'hydrogène influence-t-elle les émissions et la conception des pipelines ?

La combustion de l’hydrogène présente des caractéristiques thermodynamiques uniques qui influencent à la fois la production de NOx et les systèmes de distribution de l’énergie. Dans un contexte de turbines à gaz modernes, la gestion des flux de combustion et des gradients de pression joue un rôle clé dans l'optimisation des émissions. Lorsqu'un gradient de pression défavorable se forme, un phénomène de vortex se déclenche, conduisant à une recirculation des gaz de combustion. Ce flux de recirculation permet de stabiliser la flamme en fournissant une source de chaleur stable, essentielle pour maintenir l'ignition des réactants frais. Simultanément, la partie négative du gradient de pression agit comme une barrière qui empêche les gaz de combustion de pénétrer dans les canaux de la buse de carburant, un processus désigné par les ingénieurs sous le terme de "flame lifting" (élévation de la flamme). Cette technique permet de prévenir le phénomène de flashback, où la flamme se propagerait vers l'amont du moteur, ce qui pourrait compromettre la sécurité et l'efficacité de la combustion.

Il est indéniable que la combustion de l’hydrogène peut produire davantage de NOx que le gaz naturel, principalement le méthane (CH4). Cependant, la méthode conventionnelle de mesure des émissions, à savoir "les parties par million en volume (ppmv) sur une base sèche à 15 % d’O2" (ppmvd à 15 % O2), peut entraîner une surestimation artificielle des différences entre ces deux carburants. Cette assertion a été confirmée par une étude menée par Douglas et al., qui a comparé plusieurs métriques d'émissions de NOx, telles que ppmvdr, ppmv (sans correction), et la masse de NOx émise par unité de travail (ng/Je) et par apport de chaleur (ng/Jth), à travers une large gamme de mélanges de carburants CH4-H2.

Les résultats ont montré que la différence en pourcentage des émissions, comparée à la combustion de 100 % de CH4, variait peu lorsqu'on mesurait les émissions selon les unités ng/Je et ng/Jth. En revanche, la différence représentée par ppmvdr augmentait considérablement avec la teneur en hydrogène, atteignant environ 115 % à 75 % (v) d'H2 et presque 140 % à 100 % d'H2. Cela indique que les concentrations accrues de H2O et d'O2 dans les gaz d'échappement des carburants à forte teneur en hydrogène peuvent entraîner des valeurs de ppmvdr artificiellement élevées, sans que cela n'implique nécessairement une augmentation réelle de la production de NOx.

En prenant l'exemple d'une turbine à gaz avancée avec une performance de charge de base ISO de 346 MWe et une efficacité nette de 42,3 % LHV, supposons que pour un carburant 100 % CH4, les émissions de NOx sont rapportées à 25 ppmvdr. Ce chiffre correspond à 102,3 ng/Je et 43,2 ng/Jth. Pour cette machine, en utilisant un carburant 100 % H2, avec la même masse de NOx émise par unité de travail (102,3 ng/Je), les autres métriques d'émissions sont calculées à 44,3 ng/Jth (2,5 % de plus) et 35,1 ppmvdr (40 % de plus). Cette différence résulte de l'évolution des proportions de H2O et d’O2 dans les gaz d'échappement lorsque la teneur en hydrogène augmente.

Concernant le transport de l'hydrogène, bien que des défis techniques existent, notamment la fragilisation des pipelines en acier par l'hydrogène (hydrogène embrittlement), l’infrastructure pour la distribution de l’hydrogène devient de plus en plus essentielle pour son déploiement à grande échelle. Les pipelines actuels, qui transportent du gaz naturel, ne sont pas adaptés pour l’hydrogène, car ce dernier entraîne la dégradation des matériaux métalliques. Le problème majeur réside dans la jonction des pipelines, qui génère des coûts élevés et aggrave la fragilisation de l’acier. De plus, la fuite d'hydrogène et sa perméabilité soulèvent des défis significatifs pour la conception de ces systèmes. Les pipelines en acier spécifiques à l’hydrogène peuvent coûter jusqu’à 68 % de plus que ceux destinés au gaz naturel, selon les recherches du NIST.

Des alternatives, comme les pipelines construits en composites polymères et en plastiques renforcés, pourraient permettre de réduire les coûts d’installation tout en offrant des solutions plus sûres et fiables. De nouvelles recherches portent sur l’utilisation de nanocomposites polymères ayant une perméabilité à l'hydrogène considérablement réduite, ce qui pourrait permettre de créer des revêtements de protection pour les pipelines non métalliques.

L'infrastructure de livraison d'hydrogène nécessitera des investissements substantiels et une technologie avancée pour garantir une sécurité optimale. Par exemple, en 2022, Kawasaki Heavy Industries a livré la première cargaison d’hydrogène liquide à grande échelle via le navire Suiso Frontier, un progrès significatif dans la gestion du stockage et du transport de l'hydrogène. Le coût de cette livraison est également une considération importante, avec une estimation de 3,6 $/kg pour l’hydrogène produit à partir de la gazéification du lignite, avec l’option de capturer le carbone à l’avenir.

Quant au stockage de l’hydrogène, il peut se faire sous forme gazeuse à haute pression (350-700 bars) ou liquide à température cryogénique (−252,8 °C). Bien que le stockage sous forme gazeuse soit plus courant, sa faible densité volumétrique demeure un obstacle majeur. Un système de stockage efficace, adapté aux exigences énergétiques des turbines à gaz modernes, devrait être capable de fournir plusieurs millions de kWh tout en maintenant la sécurité et l'efficacité des opérations.

Quels sont les défis et les opportunités des systèmes de piles à combustible à oxyde solide pour la production d'électricité à grande échelle ?

Les piles à combustible à oxyde solide (SOFC) représentent une technologie prometteuse pour la production d'électricité à partir de diverses sources de combustible, notamment le charbon, le gaz naturel ou les gaz de synthèse produits à partir de la gazéification de matières solides. Leur capacité à fonctionner avec des combustibles à faible teneur en carbone et leur efficacité énergétique en font un choix intéressant pour les systèmes de production d'énergie de grande échelle, tels que ceux proposés dans le cadre du programme SECA (Solid State Energy Conversion Alliance).

Le principal objectif du programme SECA est de développer des centrales électriques qui utilisent le charbon comme source d'énergie de manière plus propre et plus efficace que les centrales électriques classiques à charbon, avec un rendement énergétique supérieur à 60 % en valeur calorifique supérieure (HHV), et la capture de plus de 97 % du dioxyde de carbone (CO2). Par rapport aux centrales à charbon classiques avec capture du carbone, ces systèmes SOFC ont des rendements nettement plus élevés et génèrent beaucoup moins de pollution de l'air. Ces centrales peuvent également être conçues pour avoir des besoins minimaux en eau brute, ce qui est un avantage non négligeable dans les régions où l'eau est une ressource limitée.

L'une des configurations les plus intéressantes pour la production d'électricité à partir de SOFC est le système intégré de gazéification et de piles à combustible (IGFC), qui combine la gazéification du charbon avec des piles à combustible pour maximiser l'efficacité énergétique. Ce système peut également utiliser du gaz de synthèse produit par la gazéification ou la reformage à la vapeur du méthane (SMR) à partir du gaz naturel, ce qui en fait une option viable pour des applications utilisant différentes matières premières. Le processus de gazéification génère un gaz riche en monoxyde de carbone (CO) et en hydrogène (H2), qui est ensuite purifié pour éliminer les impuretés avant d'être utilisé dans la pile à combustible.

Dans une configuration IGFC à pression atmosphérique, le gaz de synthèse est converti en électricité dans une pile à combustible SOFC à température et pression proches de l'atmosphère. L'air nécessaire pour la réaction électrochimique et pour le refroidissement des modules est fourni par un ventilateur. Les gaz sortants du module sont ensuite brûlés dans un oxy-combusteur, et la chaleur dégagée est récupérée pour générer de la vapeur, qui est ensuite utilisée dans un cycle de production d'énergie supplémentaire. La configuration pressurisée, bien que plus complexe, permet d'augmenter la tension de la pile et d'améliorer le rendement global du système. Cependant, elle entraîne également des défis techniques, notamment lors du démarrage, de l'arrêt et des transitoires.

Dans les deux configurations, l'objectif est de maximiser l'utilisation du carburant et de récupérer autant de chaleur que possible pour améliorer l'efficacité globale du système. Cependant, la version pressurisée du système IGFC présente des avantages en termes de rendement énergétique, avec une augmentation de la tension de la pile à 40 bars par rapport à 1 bar, mais elle implique également une complexité accrue, nécessitant des composants tels que des compresseurs et des générateurs turboexpanseurs. De plus, la suppression du cycle à vapeur dans cette version réduit les besoins en eau et simplifie la conception globale.

Les progrès réalisés dans le cadre du programme SECA ont permis de réduire le coût des SOFC, tout en maintenant une densité de puissance élevée, rendant cette technologie de plus en plus viable pour une production d'électricité à grande échelle. L'objectif du programme SECA est de permettre une opération commerciale du système IGFC d'ici 2035, avec des rendements prévus dans la gamme de 45 à 50 % (en HHV) pour les gazéificateurs existants.

En dehors de la production d'électricité à grande échelle, les piles à combustible à hydrogène (FCEV) et les applications résidentielles constituent des domaines d'avenir pour cette technologie. Pour les véhicules électriques à hydrogène (FCEV), bien que le nombre de véhicules à hydrogène vendus dans le monde augmente, la principale difficulté reste l'infrastructure de distribution de l'hydrogène, qui n'est pas encore suffisamment développée pour rendre cette technologie compétitive face aux autres solutions énergétiques.

Enfin, la question de l'oxygène produit par électrolyse pour la production d'hydrogène mérite d'être abordée. L'électrolyse de l'eau génère de l'hydrogène, mais aussi de l'oxygène, ce qui peut offrir des opportunités intéressantes. L'oxygène produit pourrait être utilisé dans des processus industriels ou de production d'énergie. Cependant, cela nécessiterait des infrastructures de stockage et de transport supplémentaires, et il reste à déterminer si cela serait économiquement viable. Une solution pourrait être l'utilisation de l'oxygène produit dans le processus de reformage autothermique combiné à l'électrolyse (CRE), où l'oxygène servirait à remplacer l'oxygène produit par l'unité d'air séparé (ASU).

La clé de ces technologies réside dans leur capacité à évoluer pour atteindre des rendements et une rentabilité suffisants pour faire face aux défis environnementaux et économiques de demain. L'intégration de ces systèmes avec des énergies renouvelables et des solutions de capture du carbone pourrait permettre de transformer la production d'énergie et de réduire les émissions de gaz à effet de serre, en ouvrant la voie à une ère énergétique plus propre et plus durable.