La rue Buck's Row, aujourd'hui connue sous le nom de Durward Street, a une histoire tragique liée aux événements terrifiants de la fin du XIXe siècle. Cette rue, située dans le quartier de Whitechapel à Londres, est principalement connue pour être le site du premier meurtre attribué à l’assassin de Jack l’Éventreur, mais l’histoire de Buck's Row ne s’arrête pas à ce sinistre événement. La transformation de ce quartier au fil du temps reflète les bouleversements sociaux, économiques et urbains qui ont marqué la fin de l'ère victorienne et le début du XXe siècle.

Avant sa renommée macabre, Buck's Row était une rue typique de l’Est londonien, composée de petites habitations et de bâtiments industriels. C'était un lieu où se mêlaient différentes classes sociales, des ouvriers aux commerçants, et où l'immigration avait façonné une population diverse. Le bordel de la rue, ainsi que plusieurs établissements pour indigents, faisaient partie du décor de ce quartier pauvre, que beaucoup de Londoniens désiraient fuir. L'isolement et la misère dans lesquels vivaient ses habitants étaient des facteurs qui alimentaient la violence et le crime.

C’est dans ce contexte qu’en 1888, la rue Buck's Row a été marquée à jamais par le meurtre de Mary Ann Nichols, dont le corps fut retrouvé le matin du 31 août. Ce meurtre, brutal et particulièrement atroce, a non seulement choqué la communauté locale, mais il a également éveillé l'attention mondiale, jetant les bases de ce que l'on appellera plus tard les meurtres de Jack l’Éventreur. Le nom de la rue, ainsi que celui de la victime, seraient à jamais gravés dans l'histoire criminelle de Londres.

L'identité de Mary Ann Nichols est complexe. Elle était une femme de 43 ans, petite, avec des traits fins et une apparence qui trahissait les signes d'une vie difficile. Bien que certains témoins aient identifié son corps rapidement, le véritable choc résidait dans les circonstances de sa mort. Elle avait été sauvagement assassinée, son corps mutilé d’une manière qui suggérait une brutalité inouïe. Les détails de son meurtre, ainsi que ceux des autres victimes attribuées à Jack l’Éventreur, dessinent un portrait de la violence qui régnait dans les quartiers pauvres de l’Est de Londres à cette époque.

Au-delà des meurtres eux-mêmes, l’histoire de Buck's Row est aussi marquée par des évolutions architecturales et sociales majeures. Dans les années qui suivirent les meurtres, la rue connut une série de transformations. Elle fut partiellement détruite lors de la construction de la ligne de chemin de fer East London Railway, qui traversait le quartier. Des maisons furent démolies, et des bâtiments comme New Cottage furent érigés pour loger les ouvriers. Cependant, avec la dégradation des conditions de vie et l’abandon progressif de certains bâtiments, le quartier se transforma peu à peu en un lieu de désolation. En 1892, Buck's Row fut rebaptisée Durward Street, un acte symbolique pour fuir l’infamie qui pesait sur le nom de la rue, conséquence directe des meurtres qui avaient défiguré l’histoire de Whitechapel.

Le site a continué à évoluer au fil des décennies, en particulier pendant la Seconde Guerre mondiale, lorsque des bombes ont dévasté le quartier, endommageant des bâtiments comme la station de métro de Whitechapel et des propriétés voisines. La destruction du vieux quartier était inévitable. Les anciens entrepôts et logements furent détruits, et des tentatives de reconstruction virent le jour dans les années 1960 et 1970. Toutefois, ces rénovations ne purent effacer les traces du passé.

Aujourd’hui, la rue Durward Street, une fois théâtre de meurtres horribles, n’est plus qu’un vestige du Londres d’autrefois, dont les cicatrices sont invisibles aux yeux de ceux qui y vivent désormais. Cependant, la mémoire de ces événements, notamment la brutalité du meurtre de Mary Ann Nichols, reste gravée dans l’histoire de la ville, marquant à la fois la pauvreté et les injustices sociales d’une époque révolue. Le souvenir de ces meurtres, ainsi que la transformation progressive du quartier, rappelle combien les lieux de notre quotidien portent parfois des traces indélébiles du passé.

Enfin, il est important de noter que les événements autour de Buck’s Row, bien que tragiques, reflètent aussi l’évolution de la société de l’époque. Les conditions de vie des plus démunis, les tensions sociales et la violence endémique dans certains quartiers de Londres ont contribué à créer un terreau fertile pour des phénomènes comme les meurtres de Jack l’Éventreur. Ces événements ont suscité une attention internationale qui a mis en lumière non seulement les crimes eux-mêmes, mais aussi la manière dont les autorités et la société ont répondu à cette violence. Buck’s Row est ainsi un symbole de l’histoire complexe et sombre de l'East End, un lieu où la misère sociale et les drames humains se sont entremêlés pour donner naissance à un mythe qui perdure encore aujourd’hui.

Qui était le mystérieux homme aperçu avec Mary Kelly avant sa mort ?

Le compagnon de Mary Kelly avait environ 36 ans, une constitution robuste et un teint clair, mais son visage était marqué par des taches. Il portait de petites favoris et une moustache épaisse et carotte. Il était vêtu de vêtements sombres et usés, d’un long manteau sombre et d’un chapeau noir à bords étroits. L'homme, visiblement modeste dans sa tenue, ne laissait aucune impression particulière si ce n’est une allure négligée, pourtant sa rencontre avec Kelly allait marquer les dernières heures de sa vie.

Le 9 novembre 1888, vers 2h du matin, George Hutchinson, un homme qui revenait de Romford, croisa Mary Kelly près de Hrawl Street. Ils échangèrent quelques mots, et elle lui demanda si par hasard il avait de l’argent à lui prêter. Hutchinson, affirmant être sans le sou, lui répondit par la négative. Peu après, Kelly se dirigea vers Miller's Court, où elle vivait. Aucun témoin n’a vu quelqu'un d’autre entrer ou sortir de la pièce où elle résidait ce soir-là, et l’on n’entendit pas le moindre bruit de sa chambre. Il semblait que Mary Kelly se préparait à une nuit tranquille, à l’abri de la rue bruyante.

Vers 3h du matin, Hutchinson aperçut de nouveau Mary Kelly, mais cette fois elle était accompagnée d’un homme qui, selon lui, avait une apparence juive. Il semblait bien plus jeune que Kelly, mais d'une carrure plus imposante. L’homme posa une main sur l’épaule de Kelly, et ils se mirent à discuter tandis qu’ils se dirigeaient vers Dorset Street. Hutchinson les suivit de loin, cherchant à observer l’homme sans éveiller ses soupçons. Ce dernier, cependant, sembla rapidement comprendre qu'il était observé et, en baissant son chapeau sur son visage, il dissimula toute possibilité de le reconnaître. Leurs voix se firent entendre, mais il était difficile de distinguer leurs paroles à cause de la distance. Kelly, apparemment enjouée, répondit à l’homme avec un « Tout va bien », et ce dernier lui assura : « Tu seras en sécurité pour ce que je t’ai dit. » Quelques minutes plus tard, Hutchinson les vit se diriger vers l’entrée de Miller’s Court. Il resta là, dans l’obscurité de la rue, guettant d'éventuels mouvements, mais rien ne se passa. Le silence fut de nouveau total. Après un moment, il s’éloigna, sans rien comprendre de plus.

Dans les heures qui suivirent, plusieurs voisins de Kelly rapportèrent avoir entendu des cris, des cris semblant provenir de la chambre de la victime. Certains d’entre eux mentionnèrent avoir entendu un cri qui leur sembla être un appel à l’aide, un « meurtre ! », à 3h30, puis à nouveau à 4h. Un autre témoin, Mary Ann Cox, déclara avoir entendu des bruits de pas qui semblaient quitter Miller’s Court vers 5h45, bien que ce fût un bruit quotidien dans cette zone si animée. Cependant, à 6h30, la porte de la chambre de Kelly resta fermée et aucune réponse ne fut donnée aux coups de porte.

Mary Kelly, quant à elle, semblait s’être endormie sans se déshabiller. Il ne semblait pas y avoir de lutte ni de perturbation notable dans sa chambre cette nuit-là. La dernière rencontre avec l’homme en question fut donc une rencontre banale, presque anonyme, mais pourtant fatale.

Les pubs de la région, comme la Ten Bells ou la Britannia, étaient connus pour être des lieux où Mary Kelly et ses compagnes de misère passaient du temps. Leurs relations avec ces établissements semblaient être une partie intégrante de leur quotidien, bien que les témoignages concernant la présence de Kelly dans ces lieux varient considérablement. Il est intéressant de noter que bien que de nombreux témoins aient affirmé avoir vu Kelly boire dans ces tavernes, aucun ne fournit une image claire de ce qui se passa cette nuit-là, et les diverses versions des événements ne font qu’ajouter à l’atmosphère de confusion qui entoure les derniers moments de la victime.

Les témoins comme Hutchinson, bien qu'ayant potentiellement vu l’homme qui accompagna Kelly dans ses derniers instants, furent incapables de fournir des détails clairs permettant d’identifier l’assassin. Hutchinson, par exemple, évoqua l'apparence de l'homme mais n’en fournit aucune description suffisamment précise qui aurait pu permettre de le retrouver. Et si l’homme restait une figure énigmatique, il n’en était pas moins l’élément central du drame tragique qui allait se jouer dans les heures suivantes.

Un aspect essentiel à comprendre dans cette histoire est que l'identité de l’assassin, bien qu’éventuellement suspectée dans des recherches ultérieures, demeure floue. Si la victime était connue pour sa fréquentation des tavernes et des rues mal famées de l’East End, il ne faut pas oublier que Mary Kelly faisait partie d'un monde complexe de relations sociales et économiques, où le risque de violence n'était jamais bien loin. La société victorienne, avec ses tensions sociales et sa pauvreté omniprésente, créait un terreau fertile pour des événements tragiques comme ceux-là, et ce qui pourrait sembler un simple « coup de chance » pour certains devenait un enchevêtrement de rencontres et de malheurs. La victime, comme tant d’autres dans ce contexte, semblait condamnée non seulement par la pauvreté, mais par les structures sociales et policières qui ignoraient ou minimisaient son existence.

Qui était Jack l'Éventreur ? Un regard sur les suspects possibles

Le mystère de l'identité de Jack l'Éventreur, le tueur en série tristement célèbre des quartiers pauvres de Whitechapel à Londres, continue de fasciner et d'intriguer. Plusieurs théories ont été proposées concernant l'identité de cet assassin, mais l'un des éléments clés réside dans l'examen des suspects les plus notables, dont les noms apparaissent régulièrement dans les archives policières et les mémoires des officiers ayant enquêté sur les meurtres.

L'un des suspects majeurs, Montague John Druitt, est souvent cité comme étant le tueur, mais cette hypothèse repose principalement sur des éléments indirects. Après que le corps de Druitt ait été retrouvé dans la Tamise à la fin de 1888, plusieurs pièces de preuves ont été découvertes, dont une lettre adressée à des "suspects" et un document inquiétant mentionnant son désir de mettre fin à ses jours. La lettre faisait référence à une confession implicite, affirmant que "la meilleure chose pour moi était de mourir". Cette idée suicidaire, ainsi que l’état mental de sa mère, qui avait été internée en asile peu avant, a jeté un doute sur la véritable nature de Druitt : était-il un meurtrier ou simplement un homme désespéré cherchant à échapper à ses démons intérieurs ? La thèse selon laquelle Druitt pourrait être le tueur est renforcée par le fait que les meurtres ont cessé après sa mort, mais son implication reste sujette à débat.

Un autre suspect de poids est Aaron Kosminski, un juif polonais résidant à Whitechapel et interné à l'asile de Colney Hatch en 1891, à la suite de troubles mentaux sévères. Selon les témoignages de deux officiers de haut rang, Sir Robert Anderson et Donald Swanson, Kosminski correspondait à de nombreux critères du tueur : une haine profonde des femmes, en particulier des prostituées, et des tendances meurtrières notables. Bien que les preuves concrètes liant Kosminski aux meurtres soient faibles, son profil et son internement en asile psychiatrique en font un suspect plausible. De plus, des éléments nouveaux ont été apportés à la discussion en 2014, avec la découverte d'un foulard taché de sang, qui, selon certaines analyses ADN, porterait des traces du suspect. Cependant, cette découverte reste controversée, et il est difficile d'affirmer sans l'ombre d'un doute que Kosminski était effectivement le tueur.

Un autre nom figurant parmi les suspects est Michael Ostrog, un médecin russe et un criminel notoire, qui a été interné dans un asile psychiatrique avant d'être libéré. Bien que ses antécédents criminels et médicaux le rendent suspect, peu de preuves le lient directement aux meurtres. La rumeur selon laquelle il aurait disparu mystérieusement après sa libération rend son implication encore plus floue. Ostrog, bien que décrit comme un homme de mauvaise réputation, ne présente aucune preuve tangible le reliant aux meurtres de Whitechapel, et son nom semble avoir été ajouté à la liste des suspects sur la base de conjectures plus que de faits solides.

Le mystère entourant Jack l'Éventreur ne se limite pas seulement à l'identité des suspects. L'enquête a été marquée par des incohérences et des lacunes dans les témoignages, en particulier concernant un témoin mystérieux qui aurait vu l'assassin en action. Ce témoin, dont l'identité reste incertaine, aurait été en mesure d'identifier le tueur lorsqu'il l’a rencontré, mais a refusé de témoigner contre lui, probablement en raison de la peur ou d’une crainte personnelle. Des spéculations ont été émises concernant le fait que ce témoin pourrait être un juif, ce qui reste un élément controversé de l’enquête. Le témoignage de ce témoin reste un facteur clé dans la compréhension de l'affaire, mais les détails restent fragmentés et difficiles à vérifier.

La confusion autour des suspects et des témoins, couplée aux incohérences dans les rapports policiers, a alimenté un débat sans fin parmi les historiens, les détectives amateurs et les chercheurs. Chaque nouvelle piste semble ne faire qu'ajouter à la complexité du mystère, et bien que des hypothèses aient été formulées sur les différentes théories, il est probable que nous ne saurons jamais avec certitude qui était réellement Jack l'Éventreur.

Il est important de noter que l’évolution des connaissances psychiatriques et criminologiques n’était pas aussi avancée au XIXe siècle qu’elle l’est aujourd'hui. Le diagnostic des troubles mentaux était souvent erroné, et les critères pour déterminer si quelqu'un était réellement apte à commettre des crimes violents étaient flous. Ainsi, plusieurs suspects, bien qu’éventuellement internés en asile ou ayant manifesté des comportements violents, ne peuvent pas être clairement associés aux meurtres en raison du manque de preuves matérielles directes. La persistance de l'incertitude sur l'identité de Jack l'Éventreur nous rappelle à quel point il est difficile de tirer des conclusions définitives dans les enquêtes criminelles, même avec les meilleurs moyens d'investigation à notre disposition.