Le processus de formation des trous noirs dans un modèle Lemaître–Tolman (L-T) en expansion est fondamentalement lié à la dynamique de l'espace-temps et à l'évolution de la masse dans des régions de densité suffisamment élevée. En effet, la condition nécessaire à la formation de tels objets est que la masse dans une région donnée dépasse un seuil critique, ce qui conduit à une contraction de la géométrie spatiale. Cette prédiction, bien qu’étant théorique, marque le début de l’étude des trous noirs dans le contexte cosmologique.

Dans le modèle L-T à énergie négative, on définit des fonctions particulières pour les instants du Big Bang (BB) et du Big Crunch (BC). Les fonctions tB(M) et tC(M), qui décrivent respectivement le temps de l’origine de l’univers et la fin de son évolution, sont données par :

  • tB(M)=bM2+tB0t_B(M) = -bM^2 + t_{B0},

  • tC(M)=aM3+T0+tB0t_C(M) = aM^3 + T_0 + t_{B0},

aa, bb, tB0t_{B0} et T0T_0 sont des constantes choisies pour rendre les calculs et graphiques illustratifs, sans se rapporter directement à des quantités astrophysiques précises. Cette approche simplifiée permet de rendre plus accessibles des concepts autrement complexes. Lorsqu'on analyse l'évolution temporelle de la géométrie de l'univers, on constate que la masse MM est liée à un espace de volume infini à mesure que MM devient très grand, contrairement aux modèles de Friedmann où la courbure positive de l'espace mène à un volume fini.

Les horizons apparents, représentés par la courbe AH+, apparaissent à une distance finie du centre et se caractérisent par un minimum en t=thst = t_{hs}, situé avant le moment du Big Crunch. Ce phénomène marque une rupture entre l’évolution de l’univers et la formation du trou noir. Après ce moment, toute la masse déjà engloutie par la singularité est forcément inférieure à la masse du trou noir MbhM_{bh}, et cette masse MsM_s, la masse absorbée avant la formation du trou noir, ne peut être estimée par des méthodes astronomiques classiques.

À mesure que le temps avance, MsM_s et MbhM_{bh} croissent simultanément, chacun suivant son propre rythme d'évolution. Cette distinction est cruciale pour comprendre comment la masse d’un trou noir évolue indépendamment de l'accumulation de matière avant son apparition. Ainsi, les géodésiques nulles radiales, tracées dans un diagramme en trois dimensions, montrent comment les différentes régions de l’espace-temps interagissent avec les horizons apparents, révélant des transitions entre des états de courbure infinie et de densité élevée.

Le rôle des géodésiques nulles est fondamental pour localiser l'horizon des événements (EH). En effet, ces géodésiques permettent de visualiser la propagation des rayons lumineux qui, en s'approchant asymptotiquement de l'horizon apparent futur (AH+), forment un horizon des événements. Cependant, la détermination de cet horizon, en pratique, devient extrêmement difficile car il nécessite une connaissance complète de l’espace-temps, une tâche complexe au regard des observations astronomiques limitées à un voisinage restreint de notre cône lumineux.

L'approche théorique la plus avancée pour localiser un tel horizon est la transformation de Penrose, qui compresse l'infini en un ensemble fini, facilitant ainsi l'analyse de la trajectoire des géodésiques à grande échelle. Cependant, en raison de la complexité des coordonnées dans le modèle L-T, il est souvent nécessaire de recourir à des simplifications comme la transformation M=tan(μ)M = \tan(\mu), t=tan(τ)t = \tan(\tau), qui permet de compresser l’espace-temps en un rectangle fini.

Dans cette nouvelle représentation, les courbes représentant le Big Crunch (BC) et l'horizon apparent futur (AH+) se rapprochent tellement qu’elles semblent se confondre, rendant l’interprétation visuelle des géodésiques asymptotiques encore plus complexe. Les géodésiques sont perpendiculaires aux surfaces correspondant à des masses constantes, ce qui signifie que les trajectoires de ces géodésiques ne peuvent pas être suivies de manière stable sur de longues périodes sans entraîner des erreurs numériques.

La difficulté d’une telle analyse souligne la nature intrinsèquement instable des systèmes à grande échelle, où les propriétés locales de l’espace-temps deviennent déformées de manière significative au fur et à mesure que la masse et la densité augmentent dans les régions proches des singularités. La formation des trous noirs dans ce contexte est donc non seulement une question de physique théorique, mais aussi un problème computationnel délicat.

Il est crucial de comprendre que bien que la modélisation et la simulation de ces phénomènes donnent des aperçus fascinants, l’observation directe des trous noirs et de leurs horizons reste hors de portée avec les technologies actuelles. La compréhension de ces objets dans des modèles cosmologiques comme celui de Lemaître–Tolman est donc avant tout une construction théorique, bien que ses résultats puissent un jour être validés par des découvertes observationnelles futures.

Comment la relativité générale et la géométrie de l'espace-temps influencent la compréhension des singularités et des distributions de masse

La théorie de la relativité générale d'Einstein, qui a redéfini la conception de la gravitation, a introduit une vision radicalement nouvelle de l'univers, où l'espace et le temps ne sont pas des entités séparées mais forment une structure dynamique et déformable. La matière, par sa présence, courbe cette toile de fond qu’est l’espace-temps, et cette courbure détermine le mouvement des corps massifs. Cette interaction intime entre matière et géométrie est au cœur de l’étude des singularités et des solutions de la relativité générale, en particulier lorsqu'il s'agit de la distribution de la masse dans un espace-temps donné.

Un des concepts les plus fascinants, et aussi les plus déroutants, est celui de la singularité. Dans le cadre des solutions spheriquement symétriques de la relativité générale, la question de l'existence et de la nature des singularités devient particulièrement cruciale. Une singularité représente un point dans l'espace-temps où la courbure devient infinie, et les lois de la physique, telles que nous les connaissons, cessent d'être applicables. Cela se produit souvent dans des situations de collapse gravitationnel, comme dans le cas des trous noirs.

Les solutions de la relativité générale pour des configurations de masse spheriquement symétriques, telles que celles des étoiles ou des trous noirs, ont été largement étudiées au fil des décennies. Les travaux de pionniers comme Oppenheimer et Snyder (1939) ont montré qu'une étoile très massive pourrait, sous l'effet de la gravitation, finir par se contracter en une singularité, où la densité et la courbure de l'espace-temps atteignent des valeurs infinies. Une telle singularité se forme à la fin du processus de collapse gravitationnel, lorsqu'une étoile explose sous l’effet de sa propre gravité.

En analysant ces phénomènes à l'aide de la géométrie riemannienne, on peut décrire les propriétés locales de l'espace-temps et les singularités qui peuvent y émerger. Des concepts comme la courbure scalaire, définie en termes de la métrique de l'espace-temps, deviennent essentiels pour caractériser ces objets extrêmes. Par exemple, la métrique de Schwarzschild, qui décrit l’espace-temps autour d'un trou noir non chargé et non rotatif, possède une singularité au centre, à r = 0, où la courbure devient infinie et où les lois de la physique classique se dégradent.

Le comportement des solutions à ces équations, notamment les singularités dites "nues", est un sujet de débat parmi les cosmologistes et les physiciens théoriciens. Alors que la plupart des modèles astrophysiques prédisent que des trous noirs se forment en cas de collapse gravitationnel, les singularités nues, qui n'ont pas de horizon de particules, sont envisagées dans certaines solutions théoriques de la relativité générale. Ces solutions sont théoriquement possibles, mais leur existence physique reste incertaine, car elles posent de sérieuses questions sur la causalité et la stabilité de l'univers.

Les travaux d’Einstein, en particulier ses équations gravitationnelles, fournissent un cadre mathématique pour comprendre ces phénomènes. Mais, comme l'ont démontré des chercheurs comme Penrose (1969), l'analyse des singularités implique également des outils plus avancés de la géométrie différentielle, tels que la topologie et l'étude des structures géométriques globales. L’un des principaux résultats de la relativité générale est que la formation de singularités n’est pas uniquement une curiosité mathématique, mais un aspect fondamental de la structure de l’espace-temps dans des conditions extrêmes.

Outre l’étude des trous noirs, il est important de considérer les implications plus larges des singularités dans la cosmologie. La question de savoir si l’univers lui-même a émergé d'une singularité au début du Big Bang a conduit à de nombreuses spéculations. Dans ce cadre, la cosmologie moderne, avec ses observations du fond diffus cosmologique et la découverte de l’accélération de l’expansion de l’univers, a fourni de nouveaux indices qui pourraient potentiellement revisiter certains des aspects les plus profonds de la relativité générale.

Enfin, une des implications les plus fascinantes de ces recherches réside dans la compréhension des conditions aux limites de l’espace-temps. Par exemple, la notion de "singularité visible", discutée dans des travaux tels que ceux de Nolan et Debnath (2007), interroge la possibilité que certaines singularités, bien qu’inaccessibles à la matière, puissent avoir des effets mesurables sur le rayonnement et la dynamique des objets proches. Cette question est d’autant plus pertinente à l'ère des observations astrophysiques modernes, qui permettent de détecter des phénomènes de plus en plus proches de ces objets extrêmes.

La géométrie de l'espace-temps, enrichie par les découvertes théoriques de la relativité générale, nous invite à reconsidérer notre compréhension de l'univers, de ses origines et de son évolution. Les singularités, qui sont le point où la physique se trouve confrontée à ses limites, sont à la fois un défi conceptuel et une fenêtre sur la compréhension de phénomènes extrêmes, tels que les trous noirs et les premières instants de l’univers. La recherche continue dans ce domaine pourrait bien un jour éclairer l’un des plus grands mystères de la physique moderne: l’unification de la relativité générale et de la mécanique quantique.

Comment calculer le champ gravitationnel dans le cadre de la théorie d'Einstein linéarisée

Dans le cadre de la théorie de la gravitation d'Einstein, le champ gravitationnel généré par une source donnée peut être calculé de manière beaucoup plus simple dans l'approximation linéarisée que dans la théorie complète d'Einstein. Cette approximation est particulièrement utile lorsque les perturbations du champ gravitationnel sont faibles, c'est-à-dire lorsque la métrique du spacetime diffère légèrement de la métrique plate. Sous cette condition, il est possible de traiter les équations d'Einstein de manière linéaire, ce qui simplifie considérablement les calculs tout en permettant une description adéquate des phénomènes physiques.

Dans cette approximation, la métrique perturbée gμνg_{\mu\nu} peut être exprimée comme une somme de la métrique plate ημν\eta_{\mu\nu} et d'une petite perturbation hμνh_{\mu\nu}, telle que :

gμν=ημν+hμνg_{\mu\nu} = \eta_{\mu\nu} + h_{\mu\nu}

hμν1|h_{\mu\nu}| \ll 1, indiquant que les perturbations sont petites par rapport à la métrique plate. Une autre forme utile de cette métrique perturbée est obtenue en utilisant une nouvelle variable h~μν\tilde{h}_{\mu\nu}, qui permet de simplifier les calculs tout en préservant les propriétés de symétrie du tenseur de Riemann dans la limite linéaire. Le champ de gravitation peut ainsi être décrit par des équations simplifiées, telles que l'équation de propagation d'ondes dans un espace-temps perturbé.

L'une des principales équations qui émerge de cette approximation est l'équation linéarisée d'Einstein :

ρρhαβηαβρσhρσ=2κTαβ\partial^\rho \partial_\rho h_{\alpha\beta} - \eta_{\alpha\beta} \partial^\rho \partial_\sigma h_{\rho\sigma} = 2\kappa T_{\alpha\beta}

TαβT_{\alpha\beta} est le tenseur énergie-impulsion de la source gravitationnelle. Cette équation ressemble à une équation d'onde inhomogène, similaire à celles que l'on trouve en électrodynamique, et elle permet de décrire comment les perturbations gravitationnelles se propagent dans l'espace-temps en réponse à la distribution de matière et d'énergie.

Dans la théorie linéarisée, on suppose généralement que la source de gravitation est éloignée de l'observateur, ce qui permet de développer des séries d'approximation pour les termes impliquant les distances spatiales. Les coordonnées utilisées dans ce cadre peuvent être ajustées pour s'assurer que les perturbations restent petites et que les effets relativistes sont correctement modélisés. Une transformation de coordonnées xαxα+bα(x)x^\alpha \to x^\alpha + b^\alpha(x) est souvent appliquée pour préserver cette condition.

L'intégration de l'équation d'onde permet de trouver une solution générale pour le champ gravitationnel en termes de la distribution de matière et d'énergie. Cela peut être formulé sous la forme suivante :

hαβ(t,r)=κ2VTαβ(r,trrc)rrd3rh'_{\alpha\beta}(t, r) = - \frac{\kappa}{2} \int_V \frac{T_{\alpha\beta}(r', t - \frac{|r - r'|}{c})}{|r - r'|} \, d^3r'

rr et rr' désignent les coordonnées spatiales de l'observateur et du point de la source respectivement, et l'intégrale s'étend sur la région où Tαβ0T_{\alpha\beta} \neq 0.

Dans le cas où l'observateur est très éloigné de la source de gravité, on peut utiliser des approximations supplémentaires en développant les distances et les termes temporels dans une série en 1/r1/r, ce qui permet d'obtenir des expressions plus simples pour les perturbations gravitationnelles. Cependant, il est essentiel de veiller à ce que les termes d'ordre supérieur ne soient pas négligés de manière injustifiée, surtout lorsqu'ils peuvent avoir un impact non négligeable sur les résultats finaux.

Les moments physiques de la source, tels que la masse totale, le dipôle de masse, et le quadrupôle de masse, jouent un rôle central dans la détermination du champ gravitationnel. Ces moments sont définis comme des intégrales sur la distribution de matière de la source, et ils sont cruciaux pour comprendre la façon dont la gravitation se manifeste à grande échelle. Par exemple, la masse totale MM de la source est donnée par l'intégrale du composant T00T_{00} du tenseur énergie-impulsion, tandis que les moments dipolaires et quadrupolaires fournissent des informations sur la distribution de la matière et l'asymétrie de la source.

La conservation de l'énergie et de l'impulsion dans ce cadre peut être exprimée par la loi de conservation αTαβ=0\partial_\alpha T^{\alpha\beta} = 0, qui impose que la masse et l'impulsion de la source soient constantes dans le temps. De même, le moment angulaire total de la source est conservé, ce qui implique que le moment angulaire de la source ne change pas au cours du temps, sous réserve des symétries du système.

En conclusion, bien que l'approximation linéarisée d'Einstein simplifie de manière significative les équations de la gravité, elle nécessite une compréhension approfondie des propriétés du champ gravitationnel et de la façon dont les différentes sources (masse, moment dipolaire, quadrupolaire, etc.) contribuent à la structure de l'espace-temps. Les méthodes de calcul basées sur cette approximation sont essentielles pour étudier les phénomènes gravitationnels dans des régimes faibles où les effets relativistes ne sont pas trop prononcés, mais elles restent puissantes et largement utilisées dans la recherche cosmologique et astrophysique.

Quel est l'impact du champ de Schwarzschild sur la déviation des rayons lumineux ?

La déviation des rayons lumineux dans le champ de Schwarzschild est l'une des premières preuves de l'influence de la gravité sur la trajectoire de la lumière, une idée qui remet en question la vision classique de l'espace-temps et de la propagation lumineuse. La compréhension de ce phénomène commence avec l'étude des géodésiques nulles dans la géométrie de Schwarzschild, qui décrit le champ gravitationnel autour d'un objet sphériquement symétrique et non chargé, comme une étoile ou un trou noir.

Le calcul exact de la déviation nécessite la résolution des équations des géodésiques nulles dans cette géométrie spécifique. Les trajectoires de la lumière sont modifiées par la courbure de l'espace-temps, ce qui entraîne une déviation des rayons lumineux passant à proximité d'un objet massif. Bien que la solution exacte soit complexe, une approximation utile permet de déterminer l'angle de déviation sous forme d'une équation qui dépend de la masse de l'objet central et de la distance du rayon lumineux à ce dernier. L’expression obtenue est la suivante :

Δϕ=4GMc2R\Delta \phi = \frac{4GM}{c^2 R}

MM est la masse de l'objet central, RR est la distance entre la source lumineuse et le centre de l'objet, et cc est la vitesse de la lumière. Cette formule est l'une des prédictions les plus remarquables de la relativité générale, car elle a été confirmée par des observations expérimentales, en particulier lors de l'éclipse solaire de 1919, qui a permis de mesurer la déviation de la lumière des étoiles passant près du Soleil.

Cependant, une erreur fréquente dans la littérature consiste à essayer de calculer cette déviation en utilisant une combinaison de la relativité restreinte et de la théorie de la gravitation de Newton, en supposant que le photon possède une masse. Cela mène à un résultat erroné, qui est la moitié de la déviation correcte. L'erreur provient d'un traitement inadéquat des théories physiques, car la relativité générale nécessite une approche cohérente, qui ne peut pas être obtenue en utilisant des éléments de différentes théories physiques de manière indépendante. Ce détail démontre l'importance de respecter la logique interne de chaque théorie physique lorsqu'on effectue des calculs.

Dans le cadre de la gravitation newtonienne, le calcul de l'angle de déviation des rayons lumineux mène à une formule différente, qui sous-estime de moitié l'effet réel. Cela nous montre à quel point il est crucial d'appliquer correctement les principes de la relativité générale. La déviation de la lumière par un objet massif, qu'il soit une étoile, une planète ou un trou noir, peut ainsi être mesurée, mais les angles de déviation deviennent de plus en plus difficiles à détecter à mesure que la distance entre l'observateur et l'objet massif augmente.

L’angle de déviation dépend de la distance RR, et est plus grand pour les rayons lumineux qui passent près de l’objet massif. Par exemple, pour un rayon lumineux frôlant la surface du Soleil, où RR est de l'ordre de 6.96×1086.96 \times 10^8 m, l'angle de déviation est d'environ 1.751.75 secondes d'arc. Cependant, pour les étoiles plus lointaines, la précision nécessaire pour mesurer cette déviation devient presque inaccessible avec les technologies actuelles, ce qui limite la possibilité d'observer ce phénomène au-delà de notre propre système solaire.

Un autre point important est que cette formule de déviation s'applique uniquement dans des conditions de faible gravité. Elle n'est donc pas valable pour les rayons lumineux qui s'approchent trop près d'objets extrêmement massifs, tels que les trous noirs ou les étoiles à neutrons, où la gravité est suffisamment forte pour induire des effets relativistes bien plus complexes, qui ne peuvent pas être capturés par une telle approximation.

Lorsqu'on parle de la déviation des rayons lumineux, il est essentiel de noter que ce phénomène ne se limite pas aux seules ondes lumineuses visibles. Il s'applique également à toutes sortes de radiations électromagnétiques, comme les rayons X, les rayons gamma et les micro-ondes. Cependant, à l'époque des premières tentatives d'observation de la déviation de la lumière, la technologie ne permettait de détecter que les ondes optiques. Ce n'est qu'avec les progrès technologiques du 20e siècle que l'astronomie a pu s'étendre à d'autres types de radiations, ouvrant ainsi la voie à une meilleure compréhension des phénomènes cosmiques.

Il est donc crucial de comprendre que la déviation des rayons lumineux, bien qu'elle puisse sembler un phénomène simple, est en réalité un indicateur clé de la validité de la relativité générale et de la manière dont la gravité influence la trajectoire de la lumière. La compréhension de ce phénomène est essentielle non seulement pour la validation de la théorie, mais aussi pour la mise en place de techniques observationnelles avancées qui nous permettent de sonder l'univers à des échelles de plus en plus petites, et à des distances de plus en plus grandes.

Quelle est la signification physique du théorème de Goldberg–Sachs et en quoi affecte-t-il la propagation des rayons lumineux dans l’espace-temps courbe ?

Le théorème de Goldberg–Sachs, formulé en 1962, énonce une condition remarquable : un espace-temps vide est algébriquement spécial si, et seulement si, il admet un champ de vecteurs nuls, géodésiques et sans cisaillement. Lorsque le tenseur de Weyl n’est pas nul, ce champ est aligné avec le champ dégénéré de Debever. Cela implique une structure intrinsèque de l’espace-temps où la géométrie, exprimée à travers le tenseur de courbure, encode des symétries profondes ayant des conséquences directes sur la propagation de la lumière et l’évolution de la matière dans le vide relativiste.

Les calculs successifs des conditions d’intégrabilité associées aux dérivées directionnelles non commutatives révèlent une contrainte stricte sur certaines composantes de la connexion de Levi-Civita, à savoir que Γ⁰₂₀ = 0 dans les deux branches envisagées. Cette condition découle naturellement de la consistance des équations de structure et des identités de Bianchi appliquées au contexte vide. Ce résultat n’est pas simplement un artefact calculatoire, mais l’indice géométrique fondamental d’un espace-temps contenant une congruence de géodésiques nulles particulières : elles ne sont ni divergentes ni soumises à un cisaillement, ce qui les rend aptes à définir les directions privilégiées dans les solutions algébriquement spéciales des équations d’Einstein.

La pertinence physique de cette observation devient manifeste lorsqu'on examine la propagation des rayons lumineux à travers un espace-temps courbe. La distance dite "de surface" ou "distance de zone" est l’un des rares concepts opérationnels de distance qui soit réellement accessible par l’observation astronomique. Cette distance ne dépend pas d’un chemin spatial unique entre deux événements, mais de la relation entre le flux reçu par un observateur et la section transverse du faisceau lumineux émis par une source donnée.

En considérant un faisceau de géodésiques nulles, la conservation du flux lumineux impose que la quantité (1 + z)² ℱ δS reste constante le long du faisceau. Cependant, en régime relativiste, le facteur d’expansion θ de la congruence obéit à l’équation de Raychaudhuri. Sous les hypothèses de vide (R_{μν} = 0), sans rotation (ω = 0) et sans accélération, l’évolution de θ le long des géodésiques nulles implique que θ décroît systématiquement. Il peut donc devenir négatif, ce qui indique un phénomène de concentration du faisceau lumineux, même en l'absence de matière. La courbure de l’espace-temps agit donc comme une lentille gravitationnelle inhérente, capable de focaliser les rayons lumineux.

Ce mécanisme conduit, dans certains cas, à des surfaces caustiques, et non à un point focal unique. À ces endroits, la luminosité apparente d’une source peut augmenter de façon anormale, indépendamment de la distance proprement dite. Cela signifie que l’intensité lumineuse mesurée ne suit pas une décroissance monotone avec la distance, contredisant ainsi l’intuition newtonienne.

La formule obtenue pour le flux observé ℱ_O = L / [4π (1 + z)² r²_G] révèle donc une dépendance explicite au redshift z et à la distance de zone r_G. Cette dernière, définie par r²_G = δS_O / δΩ_G, introduit une mesure non locale de la distance, fondée sur la géométrie des faisceaux lumineux, et non sur les coordonnées. En particulier, lorsque la courbure induit un phénomène de réfocalisation, il est possible que des sources très éloignées apparaissent plus brillantes et plus grandes qu’attendu.

Dans une interprétation stricte, cela suppose que l’on puisse isoler l’effet de la courbure de celui du redshift ou de l’absorption interstellaire. En pratique, de telles observations nécessitent des ajustements précis, mais le phénomène fondamental reste : la courbure de l’espace-temps modifie intrinsèquement la relation entre luminosité, distance, et géométrie de propagation.

Ainsi, le théorème de Goldberg–Sachs, en caractérisant les structures géométriques privilégiées de certains espaces-temps vides, fournit une base théorique essentielle à l’analyse fine des propriétés optiques du vide relativiste. Il relie l'algèbre du tenseur de Weyl à la géométrie des rayons lumineux, et par conséquent, à la physique observable.

Dans cette perspective, il est crucial de ne pas se limiter à une vision purement métrique de la distance, mais de tenir compte du comportement global des faisceaux lumineux, de leur convergence et de leurs singularités géométriques. L’astrophysique relativiste contemporaine ne peut être séparée de cette vision profondément géométrique de l’univers.