La variation de la bande interdite lors du remplacement des atomes d’halogène est particulièrement marquée dans les systèmes à pérovskites doubles de formule (FA)₂BiCuX₆ (X = I, Br, Cl), couvrant l’ensemble du spectre visible. Cette caractéristique rend ces matériaux idéaux pour les diodes électroluminescentes colorées. Parmi ces composés, (FA)₂BiCuI₆ se distingue par un coefficient d’absorption élevé, des propriétés diélectriques prometteuses ainsi qu’une conductivité optique remarquable, surpassant les autres pérovskites doubles étudiées. Ces performances optoélectroniques exceptionnelles soulignent son potentiel pour des dispositifs innovants dans le domaine de l’éclairage et de l’optoélectronique.

Dans la famille des pérovskites hybrides bidimensionnelles à base de tin, le composé (PEA)₂SnI₄ (PEA = C₆H₅C₂H₄NH₃) montre des propriétés de photoluminescence supérieures à celles des pérovskites tridimensionnelles classiques comme CH₃NH₃SnI₃, ce qui favorise une meilleure performance des LED. Cependant, l’instabilité liée à l’oxydation du tin représente une limitation majeure pour le fonctionnement durable des dispositifs. Pour pallier ce problème, l’ajout d’acide valérique (VA) lors de la préparation des films minces de (PEA)₂SnI₄ s’est avéré efficace. Ce traitement conduit à un pic d’absorption excitonique étroit vers 612 nm et à une émission photoluminescente décalée vers le bleu d’environ 10 nm, traduisant une réduction des états pièges liés aux défauts. Cette modification accroît le rendement quantique des films par un facteur sept, principalement en réduisant les lacunes de Sn²⁺ et les états pièges, améliorant ainsi la recombinaison excitonique dans le matériau.

Les analyses temporelles révèlent une dynamique de recombinaison excitonique caractérisée par deux temps de vie distincts, associant une recombinaison rapide en surface et une recombinaison plus lente dans le volume, ce qui souligne la complexité des processus de relaxation des porteurs photo-excités dans ces matériaux.

Les pérovskites hybrides au tin, notamment en version bidimensionnelle, trouvent des applications prometteuses dans les transistors à effet de champ (FET), les cellules solaires et les LED, offrant des alternatives moins toxiques aux pérovskites au plomb. Par exemple, (PEA)₂SnI₄ utilisé comme canal semi-conducteur dans des transistors à couches minces, en association avec un polymère ferroélectrique pour la couche diélectrique, permet d’atteindre des rapports de commutation photoélectrique supérieurs à 100 et des temps de réponse courts, associés à une sensibilité élevée à la lumière.

Par ailleurs, la synthèse de pérovskites 2D stables incorporant des ligands π-conjugués, tels que (4Tm)₂SnI₄, a permis d’améliorer significativement la mobilité des trous (jusqu’à 2,32 cm²/V·s) et la stabilité des dispositifs par rapport aux composés précédents. Ces avancées ouvrent la voie à des dispositifs optoélectroniques plus performants et durables.

Concernant les LED à base de pérovskites hybrides, les performances ont progressé, bien que la dépendance au plomb et la pureté colorimétrique restent des défis. Des dispositifs utilisant (PEA)₂SnI₄ ont montré une luminance modérée mais un potentiel d’amélioration grâce à l’incorporation d’acide valérique, qui protège le tin de l’oxydation, ralentit la cristallisation et améliore la morphologie des films. Ceci se traduit par un rendement quantique externe (EQE) de 5 % et une durée de vie opérationnelle prolongée. D’autres stratégies, comme l’utilisation de H₃PO₂, visent à augmenter la barrière énergétique à l’oxydation du Sn, contribuant ainsi à la stabilité et à la qualité des films.

Dans le domaine photovoltaïque, les pérovskites au tin apparaissent comme des alternatives plus écologiques aux pérovskites au plomb, mais leurs performances et leur stabilité en atmosphère restent limitées. L’introduction de cations organiques tels que l’éthylenediammonium (en) dans MASnI₃ modifie les propriétés optoélectroniques sans altérer la structure cristalline, conduisant à une amélioration notable de l’efficacité de conversion (jusqu’à 6,63 %) et de la stabilité à l’air. Des composés similaires avec des cations organiques plus volumineux, comme le 4-(aminométhyl)pipéridinium (4AMP), permettent d’atteindre des efficacités proches de 11 % et une stabilité opérationnelle prolongée sous illumination continue, démontrant le potentiel d’ingénierie chimique pour surmonter les limitations liées à l’oxydation du tin.

Il est important de comprendre que l’équilibre entre la structure cristalline, la composition chimique et les procédés de fabrication influence profondément les propriétés optoélectroniques et la stabilité des pérovskites hybrides au tin. Le contrôle précis des défauts, la protection contre l’oxydation, ainsi que l’optimisation de la morphologie des films sont des facteurs cruciaux pour maximiser les performances des dispositifs. De plus, la compréhension des dynamiques de recombinaison excitonique, notamment la distinction entre recombinaison de surface et recombinaison de volume, est essentielle pour orienter le design de matériaux et interfaces plus efficaces.

Enfin, la recherche continue sur les pérovskites bidimensionnelles ouvre de nouvelles perspectives, car la réduction dimensionnelle modifie les propriétés électroniques et optiques, permettant d’accéder à des matériaux avec des caractéristiques adaptées à des applications spécifiques, allant de l’électronique flexible à la photodétection, en passant par des LED à haute pureté spectrale.

Comment les propriétés des matériaux semiconducteurs dépendent de leur morphologie à l'échelle atomique : théories et modèles computationnels

Le monde atomique et moléculaire, contrairement au monde macroscopique, ne peut être décrit avec précision que par la mécanique quantique. Les propriétés naturelles et le comportement des molécules et des matériaux sont difficiles à imaginer, et il est pratiquement impossible de les prédire sans avoir recours à des approximations. L'objectif de nombreux physiciens et chimistes computationnels est de combler le fossé entre les échelles de longueur atomistique, de l'ordre de l'Ångström (Å), soit 10⁻¹⁰ m, et les échelles mésoscopiques ou macroscopiques par le biais de simulations. Les études théoriques présentées ici reposent sur des modèles périodiques, et les calculs ab initio sont effectués principalement en utilisant la DFT associée à une fonctionnelle d'échange-corrélation, telle que le Perdew-Burke-Ernzerhof (PBE) et le Becke-3 Parameter-Lee-Yang-Parr (B3LYP). Bien que plusieurs programmes de calcul soient disponibles, cette section présente les résultats obtenus avec deux codes largement utilisés : VASP et CRYSTAL. Dans les deux cas, les systèmes sont étudiés dans des conditions de vide et à température nulle (0 K).

Les atomes sont décrits en utilisant des bases de pseudo-potentiels ou d’électrons complets. En particulier, les simulations VASP emploient des ondes planes et une méthode de vague projetée augmentée (PAW) pour décrire les interactions entre les atomes composant et les électrons de cœur-valence, respectivement. En revanche, les calculs CRYSTAL représentent les atomes à l’aide de bases de Gaussiennes délocalisées. Dans les deux logiciels, la fiabilité des résultats est garantie par l’utilisation des critères de convergence élevés recommandés pour chaque méthodologie. Les positions atomiques initiales et les paramètres de réseau sont définis selon des données expérimentales et/ou théoriques.

La première étape de l’étude théorique consiste en l’optimisation structurelle du modèle de la matière en vrac, suivie du calcul des dérivées secondes numériques de l'énergie totale par rapport aux déplacements ioniques. Cela permet ensuite de définir des modèles de lamelles pour la construction de Wulff et d’obtenir un ensemble de morphologies disponibles pour effectuer une étude sur le magnétisme. L’analyse structurelle et des propriétés électroniques peut ensuite être réalisée pour établir des corrélations avec les résultats expérimentaux.

Bien que le contrôle de la morphologie d'un matériau puisse, au départ, sembler n'être qu'une curiosité scientifique, ses implications vont bien au-delà de l'apparence esthétique. La morphologie ne se contente pas de contrôler ses propriétés physico-chimiques ; elle détermine également la pertinence et le mérite du matériau pour des applications spécifiques. Par conséquent, la compréhension des propriétés physiques et chimiques des surfaces des semiconducteurs est cruciale pour améliorer les performances des applications associées. Cela passe par la détermination des structures de surface et des liaisons chimiques rompues sur les surfaces exposées, qui contribuent aux propriétés du matériau.

Les processus photocatalytiques, par exemple, sont initiés par l'excitation d'un photocatalyseur semiconducteur par des photons d'énergie supérieure au gap de bande du semiconducteur, ce qui conduit à la formation de paires e−/h+. Ensuite, une grande variété de transformations redox écologiques peut se produire, impliquant des espèces chimiques ayant des potentiels redox appropriés adsorbées à la surface du photocatalyseur. Différentes techniques de caractérisation de surface et/ou de volume peuvent être utilisées pour mieux comprendre la corrélation spécifique potentielle entre les propriétés de surface des semiconducteurs et leur performance photocatalytique, et ainsi les intégrer dans la conception de photocatalyseurs efficaces et facilement applicables. Parmi ces techniques disponibles, la diffraction des rayons X (XRD) est utilisée pour étudier la relation entre la phase cristalline et la capacité photocatalytique ; la microscopie électronique à transmission à haute résolution (HR-TEM) et la microscopie à effet tunnel (STM) sont privilégiées pour fournir des informations sur les microstructures ainsi que la distribution des sites de réaction.

La science traditionnelle des surfaces a établi que les surfaces des grands cristaux peuvent réduire leur énergie en déplaçant les atomes de surface loin des sites du réseau dans le processus de reconstruction de surface. Les liaisons pendantes peuvent introduire de nouveaux états électroniques, et les molécules étrangères (tensioactifs ou adsorbats) peuvent altérer l’énergie et la réactivité d'une surface cristalline. Cependant, de nombreuses propriétés fondamentales des surfaces des semiconducteurs restent mal comprises en raison de leur complexité inhérente. La principale raison de cette méconnaissance réside dans le fait que les propriétés des oxydes métalliques dépendent de l’interaction entre la structure géométrique, la structure de bandes, la stœchiométrie locale de la surface, et les états d’oxydation des composants. Dans ce contexte, l'élaboration d'une théorie de surface à l'échelle atomique pour les oxydes métalliques constitue un défi majeur. Une telle théorie serait sans doute la base de la conception rationnelle des oxydes métalliques en tant que semiconducteurs.

Un système cristallin peut présenter plusieurs surfaces, les tendances principales étant observées sous forme de pics les plus marquants lors des analyses XRD. La caractéristique principale d’une surface est la symétrie cristalline rompue, ce qui entraîne une nouvelle organisation structurale avec de nouvelles propriétés chimiques et physiques. Dans le contexte computationnel, un modèle de surface est obtenu par des coupes dans une direction spécifique, et il est défini comme un modèle bidimensionnel avec une épaisseur finie (axe z). À l’instar de l’analyse expérimentale XRD, les modèles de surface sont également représentés en termes d’indices de Miller [hkl]. Les modèles de surface peuvent ainsi être considérés comme des couches atomiques (lamelles) empilées selon un indice de Miller spécifique, tout en maintenant la symétrie translationnelle observée dans le matériau en vrac.

La construction du modèle de surface prend en compte deux facteurs : l’épaisseur et la symétrie verticale, qui sont étroitement liés à la nature chimique et à la stabilité de la surface. Le premier fait référence au nombre de couches représentées par le modèle, et il doit être suffisamment large pour rendre négligeable l’interaction entre les terminaisons de la lamelle supérieure et inférieure. Quant à la symétrie verticale particulière, elle est observée pour chaque direction cristalline, ce qui peut ou non entraîner l'existence d'un moment dipolaire macroscopique perpendiculaire à la surface. Ce moment dipolaire macroscopique affecte la stabilité de la surface et peut être responsable d’un mécanisme de reconstruction, entraînant une nouvelle organisation des atomes. Les modèles de surface sont entièrement optimisés (relâchés), générant ainsi de nouvelles liaisons chimiques comme prévu dans le processus de reconstruction. Une méthode extrêmement efficace pour l’interprétation des modèles de surface a été développée par Tasker. Ce modèle, basé sur les cristaux ioniques, peut être compris comme un agrégat de lamelles composées de cations et d'anions, ce qui conduit à des surfaces avec différentes distributions de charges. Selon la classification de Tasker, les surfaces de type 1 et 2 sont potentiellement stables, tandis que les surfaces de type 3 possèdent un moment dipolaire macroscopique non nul perpendiculaire à la lamelle.