Les responsables d’entreprise consacrent une quantité considérable de temps à recruter et former des employés qualifiés. Ces talents sont cruciaux pour la performance de l’entreprise, mais de plus en plus souvent, les leaders assistent impuissants à leur départ vers d'autres opportunités. Cette perte représente un coût élevé pour les entreprises, non seulement en termes financiers, mais aussi en termes de productivité réduite et de moral en chute libre. La question fondamentale alors se pose : comment retenir vos meilleurs éléments ?

Aujourd'hui, un emploi ne se résume plus simplement à un salaire et à des avantages sociaux. L'offre de plus d'argent ou de meilleures conditions ne suffit plus à retenir un employé compétent. Le travail est devenu un domaine profondément personnel, et les efforts pour le retenir doivent l’être également. Les leaders et les managers doivent comprendre les forces et les besoins individuels de chaque membre de leur équipe afin de leur offrir des opportunités de développement, d'épanouissement et un sens à leur activité professionnelle tout au long de leur parcours au sein de l’organisation.

Pour réussir à fidéliser ses meilleurs talents, il est essentiel de les aborder sous un angle plus humain, en prenant soin de comprendre leurs motivations profondes et en leur offrant des possibilités de croissance continue. Un premier pas consiste à intégrer dès le début du parcours de l'employé une stratégie de rétention, ce qui implique de démarrer ce processus dès le premier jour avec un onboarding réfléchi et bien structuré. Cet accueil doit inclure une introduction non seulement aux tâches, mais aussi à la culture de l'entreprise, aux objectifs de l'équipe, et à la manière dont l'employé peut s'épanouir au sein de l'organisation.

Les managers doivent également poser les bonnes questions pour évaluer si leurs employés se sentent heureux dans leur travail. Ces conversations, souvent négligées, doivent être régulières et sincères. Les employés doivent se sentir vus, entendus et valorisés au quotidien, car il est prouvé que la reconnaissance et l'affirmation régulières renforcent l'engagement et diminuent la propension au départ. Cela implique de ne pas se contenter de discussions superficielles, mais d’investir dans des échanges qui permettent aux employés d’exprimer leurs frustrations, leurs besoins et leurs aspirations.

Un aspect central de cette fidélisation est le sens que l’on peut aider chaque collaborateur à trouver dans son travail. Encourager les employés à explorer ce qui les motive et comment leurs activités contribuent à un objectif plus large est crucial. Aider vos employés à trouver un but profond dans ce qu'ils font n’est pas seulement bénéfique pour eux, mais également pour l’entreprise. Lorsqu’un individu ressent que son travail a un impact réel, il devient plus difficile pour lui de quitter une organisation, car la satisfaction ne provient pas seulement d'une rémunération, mais d'un épanouissement personnel.

Le feedback, souvent perçu comme un simple outil de gestion, joue ici un rôle clé. Les meilleurs performeurs ont besoin d'un retour constructif, mais aussi d’une reconnaissance qui les incite à maintenir, voire dépasser, leurs performances. Cela doit être fait de manière spécifique et réfléchie, pour éviter toute banalisation ou rupture dans la relation. Cependant, la reconnaissance ne doit pas uniquement être réservée aux meilleures performances, mais également s'étendre à tous les membres de l'équipe, notamment à ceux qui constituent l'ossature de l’organisation.

Lorsque le développement professionnel est encouragé de manière régulière et que des opportunités d’apprentissage sont proposées tout au long de la carrière, la rétention est naturellement améliorée. Offrir des possibilités d'acquérir de nouvelles compétences, d’explorer d'autres domaines et de se réinventer professionnellement est l'un des moyens les plus puissants de maintenir l'engagement des employés. Des expériences professionnelles variées et l’ouverture à la découverte de nouvelles facettes du travail permettent aux employés de rester stimulés et engagés.

Il est aussi essentiel de comprendre que la flexibilité joue un rôle prépondérant. Dans un monde où les attentes de travail évoluent rapidement, offrir à vos équipes une certaine autonomie sur la manière dont elles organisent leur temps et équilibrent leur vie professionnelle et personnelle peut avoir un effet majeur sur leur satisfaction et leur fidélité. Cette flexibilité n’est pas seulement limitée à l’heure d’arrivée ou de départ, mais inclut également la possibilité de travailler sur des projets ou de modifier ses tâches quotidiennes pour stimuler l’intérêt et éviter l'épuisement.

Enfin, il ne faut jamais sous-estimer l’importance de protéger vos meilleurs talents contre le burnout. Lorsqu'une personne performe à un haut niveau, les demandes sur son temps et ses ressources augmentent inévitablement. Il est essentiel de réévaluer régulièrement la charge de travail et de s'assurer qu'il existe un soutien pour éviter que ces collaborateurs ne se sentent accablés par des attentes irréalistes.

Les entreprises doivent également revoir leur stratégie de rétention en fonction des retours réguliers des équipes et en instaurant des programmes adaptés qui répondent aux besoins réels de leurs employés. Pour cela, il est indispensable de comprendre que la rétention des talents ne se limite pas à des actions ponctuelles, mais qu'elle doit s'ancrer dans une démarche continue d'écoute, de soutien et de développement.

Comment la Priorisation du Développement Professionnel Peut Améliorer la Rétention des Employés

Le développement professionnel sur le lieu de travail apparaît comme une solution presque parfaite aux nombreux problèmes de rétention auxquels les entreprises font face aujourd'hui. D'abord, parce que les employés le souhaitent. Le rapport mondial sur les tendances du talent de LinkedIn pour 2022 révèle que les employés considèrent le développement professionnel comme le moyen numéro un d'améliorer la culture d'entreprise. Les conséquences d'une négligence dans ce domaine sont conséquentes : selon une étude d'Execu|Search Group, 86 % des professionnels affirment qu'ils quitteraient leur emploi actuel si une autre entreprise leur offrait plus d'opportunités de développement professionnel.

Le développement professionnel est également bénéfique pour l'entreprise. Une étude de Better Buys montre que les employés ayant accès à des opportunités de développement sont 15 % plus engagés et ont un taux de rétention 34 % plus élevé que ceux qui n'en ont pas. Selon Deloitte, les organisations qui privilégient une culture d'apprentissage ont 92 % de chances en plus de développer de nouveaux produits et processus, 52 % de productivité en plus, 56 % de chances en plus d'être les premières à commercialiser leurs produits et services, et 17 % de rentabilité en plus par rapport à leurs pairs. En outre, leur engagement et leurs taux de rétention sont également 30 à 50 % plus élevés. Il est donc évident que la priorisation de l'apprentissage et du développement est essentielle pour la rentabilité d'une entreprise. Et cela ne nécessite même pas de dépenses excessives.

L'important est de rendre le développement professionnel personnel. Cela signifie que les programmes doivent être véritablement connectés à la réalité de l'employé, en prenant en compte ses besoins et ses ambitions. Par exemple, des entreprises comme Truckstop.com, une société de transport, intègrent le développement professionnel dès l'onboarding de leurs nouvelles recrues. Dès le premier jour, les employés commencent leur immersion en abordant les missions de l'entreprise et en entamant une réflexion sur leur propre développement personnel à travers des activités interactives, des discussions approfondies et un plan d'action. Cette approche permet de personnaliser l'intégration des employés et d'assurer que leurs talents et leur motivation soient rapidement alignés avec les attentes de l'entreprise.

LinkedIn, quant à elle, a instauré un programme de développement régulier et intégré. Chaque mois, un "InDay" est organisé, un jour où les employés sont invités à se concentrer sur leur bien-être personnel, leur travail et les enjeux du monde. Cette journée est l'occasion pour les employés d'explorer leurs intérêts à travers une variété d'activités, qu'elles soient dirigées ou indépendantes. Ce programme, qui devient une véritable ritualisation de l'apprentissage, permet aux employés de se reconnecter à leur rôle tout en grandissant personnellement. En 2018, LinkedIn a révélé que 94 % de ses employés seraient prêts à rester plus longtemps dans l'entreprise si celle-ci investissait davantage dans leur développement professionnel.

L'idée de créer des rituels d'apprentissage a également été adoptée par des entreprises comme Udemy. Ce site d'apprentissage en ligne a instauré un rituel mensuel nommé "Drop Everything and Learn" (DEAL), où, chaque mois, les employés cessent toute autre activité à 15h00 un mercredi pour participer à un cours de leur choix. Ce rituel montre que l'apprentissage ne doit pas toujours être directement lié au travail quotidien, mais qu'il peut aussi avoir une dimension personnelle, ce qui permet de maintenir les employés engagés et motivés.

La mise en place de coaching, au-delà du niveau de la direction générale, est un autre moyen efficace de favoriser le développement professionnel. Historiquement, le coaching était réservé aux cadres supérieurs ou aux employés jugés à haut potentiel. Aujourd'hui, de plus en plus d'entreprises offrent des séances de coaching à leurs employés à tous les niveaux, y compris ceux qui sont en début de carrière. Cette pratique, adoptée par des entreprises comme Betterment, permet aux employés d'aborder des questions complexes telles que leur promotion, la gestion de leurs équipes ou encore la façon de mener une conversation difficile avec un collègue.

Il ne s'agit pas simplement de mettre en place des formations ou des activités. Le véritable enjeu réside dans la personnalisation de ces expériences d'apprentissage. Cela peut inclure des moments de réflexion personnelle, des espaces pour découvrir des passions qui ne sont pas directement liées au travail ou des occasions d'apprentissage collectif qui renforcent la cohésion d'équipe.

Pour l'entreprise, il est également essentiel de comprendre que l'apprentissage doit être un processus continu et non ponctuel. Intégrer des pratiques de développement professionnel dès le départ, au moment de l'intégration des nouvelles recrues, et les maintenir régulièrement à travers des rituels ou des formations récurrentes, permet de créer une culture d'entreprise basée sur la croissance. Cela non seulement augmente la rétention, mais également la performance individuelle et collective, contribuant à un environnement de travail plus dynamique et plus performant.

Pourquoi les promotions "sèches" échouent-elles ? L'importance de repenser la gestion des carrières et des opportunités internes

Les organisations modernes sont confrontées à un paradoxe : bien qu’elles investissent massivement dans la formation et le recrutement, une grande partie de leurs employés les plus performants, comme Marta, finissent par quitter l'entreprise après avoir reçu des promotions sans augmentation salariale. Ces situations, parfois appelées « promotions sèches », où les employés se voient attribuer un nouveau titre sans compensation financière, engendrent une insatisfaction profonde, conduisant à des départs précipités.

Marta, dans notre exemple fictif mais représentatif, illustre un phénomène qui devient de plus en plus courant dans le monde du travail : les promotions qui ne s'accompagnent pas de rémunération supplémentaire ne font qu’augmenter la valeur d'un employé sur le marché extérieur, tout en ne comblant pas ses attentes au sein de l'entreprise. Ainsi, une pratique censée renforcer la fidélité des employés aboutit souvent à leur départ, ce qui démontre l'absurdité de cette approche. En économisant sur les augmentations salariales, les entreprises perdent bien plus en raison des coûts élevés liés au turnover, ce qui, au final, s'avère être une stratégie contre-productive.

Le cas de Marta n'est qu'un symptôme d'une problématique plus large qui touche de nombreuses entreprises : la gestion des carrières et des promotions est en crise. Selon un rapport d'ADP, près de 29% des employés démissionnent dans le mois qui suit une promotion sans augmentation salariale, contre seulement 18% chez ceux qui n'ont pas été récemment promus. Cette situation est d'autant plus frappante que les entreprises continuent d’offrir des titres et des responsabilités supplémentaires sans ajuster la rémunération. Ce type de promotion, loin de motiver les employés, les pousse à chercher une reconnaissance ailleurs.

Mais le problème ne réside pas seulement dans le manque d'ajustements salariaux. Il découle également du manque d'opportunités réelles de développement de carrière à l'intérieur même de l'organisation. Dans un marché du travail où les employés aspirent à plus que de simples changements de titre, les opportunités de mobilité interne sont cruciales. Les entreprises doivent comprendre que le développement de leurs talents ne peut pas se limiter à des promotions horizontales ou à de simples changements de position. Il faut une véritable politique de gestion des carrières qui permette aux employés d’explorer différentes fonctions, d'élargir leurs compétences et de s’impliquer dans des projets qui les enthousiasment.

Cela dit, le concept de « mobilité interne » reste encore largement sous-exploité dans de nombreuses organisations. Bien que des systèmes internes de mise en relation existent depuis la fin des années 90, comme les « tableaux d’offres internes » ou les systèmes de « mise en enchères » d’emplois, ces systèmes n'ont pas toujours eu l'impact escompté. L'un des problèmes majeurs reste le « rétentionnisme » des managers, qui ont souvent tendance à bloquer les talents internes par peur de perdre des employés précieux. Cela crée une atmosphère de méfiance et de stagnation qui finit par miner la motivation des collaborateurs et augmente le risque de départs vers des entreprises concurrentes.

Face à ce constat, la mise en place de plateformes de talents internes, comme celles utilisées par des entreprises comme Unilever, IBM ou Schneider Electric, pourrait offrir une réponse efficace. Ces systèmes permettent aux employés de publier des descriptions de leurs aspirations professionnelles et de partager leurs compétences avec leurs managers, tout en restant ouverts à de nouvelles opportunités internes, temporaires ou permanentes. En permettant une plus grande transparence et en éliminant les blocages managériaux, ces plateformes encouragent la mobilité interne tout en renforçant l'engagement des collaborateurs.

Cependant, la simple création d'une telle plateforme ne suffit pas. Pour qu’un marché interne de talents fonctionne réellement, il est nécessaire que la direction et les managers soutiennent activement ce processus. Une culture organisationnelle qui valorise la mobilité interne est essentielle. Le cas de Unilever, qui cherche à « démocratiser » le lieu de travail en permettant à tous les employés de « faire leurs courses de compétences », montre l'importance de faire de ce marché interne une nécessité business et non simplement un programme RH.

Les dirigeants doivent également mettre en place des incitations pour les managers, afin qu'ils ne perçoivent pas les mouvements internes comme une perte de talents, mais comme une opportunité de renforcer l'organisation dans son ensemble. Une gestion des talents proactive et une politique de mobilité interne bien pensée permettent non seulement de fidéliser les employés mais aussi de réduire les coûts de recrutement tout en augmentant la satisfaction et l’engagement des collaborateurs.

En résumé, les entreprises doivent repenser leur approche des promotions et de la mobilité interne. Il ne suffit pas d’offrir des titres ou de changer de fonction pour susciter la motivation des employés. Il faut avant tout s'assurer que les employés ont des opportunités concrètes de développement, à la fois horizontales et verticales, qui répondent à leurs attentes tout en renforçant la compétitivité et l'agilité de l'entreprise. Une gestion des carrières réinventée permet de créer un environnement de travail où les talents peuvent prospérer, tout en minimisant le risque de départs précipités.