Les progrès scientifiques se font par étapes, chaque découverte venant s'ajouter à la précédente, comme l’a si bien exprimé Isaac Newton en disant « Nous sommes comme des géants debout sur les épaules d'autres géants ». Cependant, la diffusion de la connaissance scientifique à travers des revues académiques et des publications peut parfois être compromise par des erreurs, des informations erronées ou des manipulations délibérées, ce qui rend le processus de validation d'autant plus crucial. À cet égard, le contrôle de la qualité des publications scientifiques et la prévention des faux articles sont au cœur du maintien de l'intégrité de la recherche.

Le rôle principal des revues scientifiques est de publier des travaux de qualité qui soient à la fois originaux, fiables et reproductibles. Pour garantir cela, la plupart des journaux scientifiques s'appuient sur un processus de révision par les pairs. Ce processus est censé permettre une évaluation impartiale des articles soumis, en s'assurant que chaque travail est vérifié par des experts dans le domaine concerné. Ces experts, souvent anonymes, ont pour tâche d’évaluer la véracité des données, la solidité des analyses, la pertinence des conclusions, et l’originalité de la recherche. Ils peuvent recommander des révisions mineures ou majeures, voire rejeter des articles qui ne respectent pas ces critères.

Malgré cette procédure rigoureuse, il est de plus en plus fréquent que des articles soient retirés des revues scientifiques. Les raisons peuvent varier : des erreurs administratives, des problèmes dans la citation des sources, des erreurs de copie ou de mise en page, ou encore des manipulations délibérées des données. Ces erreurs peuvent compromettre l'intégrité d'une publication, d'où la nécessité d'un processus de retrait d'article.

Cependant, les rétractations d’articles ne se limitent pas à des erreurs techniques. Certaines publications sont retirées en raison de fraudes plus graves, comme des falsifications de données, des plagiats ou des conflits d'intérêts non divulgués. Ce phénomène peut entraîner une perte de confiance dans la recherche scientifique, ce qui affecte non seulement les chercheurs mais aussi le grand public, qui dépend de la recherche pour des informations fiables.

Dans ce contexte, il devient nécessaire de questionner la fiabilité des informations scientifiques qui circulent. La mise en place d'outils tels que les vérifications de faits (fact-checking) devient alors primordiale. Les plateformes numériques jouent un rôle de plus en plus important dans la diffusion des informations, ce qui rend l’accès à des données fiables crucial pour éviter la propagation de rumeurs et de fausses informations. Les scientifiques et chercheurs doivent ainsi redoubler de vigilance et d'engagement pour garantir que leurs travaux respectent les standards les plus élevés de rigueur méthodologique et d’éthique.

L’essor des réseaux sociaux a accéléré la circulation de fausses informations, y compris celles liées à la science. Les études montrent que les informations erronées ont tendance à se propager plus rapidement que les informations vérifiées, notamment en raison de leur caractère sensationnaliste ou de leur capacité à toucher un large public rapidement. Ce phénomène peut exacerber les effets des erreurs scientifiques, en particulier lorsque ces dernières concernent des sujets sensibles comme la santé publique, le climat ou la politique. Par exemple, les campagnes de désinformation ont été largement observées lors des élections américaines de 2016, où les fausses informations ont joué un rôle clé dans la formation des opinions des électeurs, en influençant notamment leur perception des candidats et des événements politiques.

Le défi consiste donc à mettre en place des mécanismes efficaces pour vérifier les informations et contrer la désinformation, en particulier sur les plateformes numériques. Cela implique non seulement un effort de la part des institutions scientifiques, mais aussi un rôle actif de la société dans le décryptage et la remise en question des informations qu'elle consomme. L'engagement des utilisateurs dans des démarches de vérification des faits et la coopération entre différents acteurs du secteur technologique, éducatif et scientifique sont essentiels pour limiter les effets de la désinformation.

Ainsi, même si le processus scientifique reste un pilier de la connaissance et de l'avancement de la société, sa transparence et sa capacité à s'auto-corriger sont mises à l'épreuve par des forces externes, telles que la circulation rapide de fausses informations via les réseaux sociaux. Le maintien de l’intégrité scientifique nécessite une vigilance continue et des mécanismes robustes pour faire face aux défis de l'ère numérique, tout en assurant une éducation au discernement critique et à la vérification des informations au sein du public.

Pourquoi certains articles scientifiques sont-ils retirés ? Les causes sous-jacentes des rétractations dans la recherche biomédicale

Dans le domaine de la recherche biomédicale, les rétractations d'articles sont devenues un phénomène de plus en plus observé. L'une des causes principales en est la récurrence de certaines erreurs ou pratiques frauduleuses, bien qu'elles soient souvent perçues comme des anomalies, ces rétractations révèlent des questions sous-jacentes de grande importance. En analysant les données issues des rétractations dans les publications médicales et biomédicales, il est possible d'en dégager plusieurs raisons principales qui justifient l'annulation d'un article.

L'une des raisons les plus fréquentes évoquées dans les données sur les rétractations est l'investigation par les éditeurs ou les revues scientifiques. Cela peut sembler anodin, mais derrière ce processus se cachent des problèmes graves comme le plagiat, la manipulation d'images, des erreurs dans les données, ou encore des comportements déviants de la part des auteurs. Ces pratiques sont, dans la plupart des cas, des violations délibérées de l'éthique scientifique, notamment la règle fondamentale stipulant qu'un article soumis à une revue doit être original et ne pas avoir été envoyé ailleurs simultanément.

L'un des aspects les plus frappants de ce phénomène est la fréquence des rétractations dues à des problèmes liés aux données. Des expressions telles que "fabrication de données", "erreurs dans les données", "données non fiables", "problèmes de données", "duplication des données", apparaissent régulièrement dans les analyses de rétractations. Ce phénomène est particulièrement alarmant dans le domaine biomédical, où des erreurs de données peuvent avoir des conséquences dramatiques sur les traitements médicaux, les protocoles cliniques et même la santé publique. Falsifier des données médicales, c’est risquer de nuire à des patients et à la société dans son ensemble.

En analysant les revues scientifiques, il est également frappant de constater que certaines d'entre elles sont responsables d'une proportion significative des rétractations. Par exemple, dans notre étude, seulement 2% des revues ont contribué à 20% des rétractations. Certaines revues, comme PLoS One et The Journal of Biological Chemistry, figurent parmi celles qui ont rétracté le plus grand nombre d'articles. Mais il y a aussi des cas comme celui de Tumor Biology, qui, en 2017, a dû rétracter plus de 100 articles en raison de revues par des pairs falsifiées, ce qui a entraîné la suppression de cette revue de la base de données Web of Science. Ce type de négligence systématique met en lumière l'absence de contrôle rigoureux au sein de certaines revues scientifiques et la grave menace que cela représente pour la validité de la recherche.

Les éditeurs jouent également un rôle crucial dans ce processus. Dans notre jeu de données, 13 éditeurs étaient responsables de plus de 69% des rétractations. Des éditeurs majeurs comme Elsevier, Springer, Wiley et Taylor & Francis, bien qu’ils soient des acteurs dominants dans la publication scientifique, se retrouvent parfois impliqués dans des controverses liées à la publication d'articles de mauvaise qualité. En dépit de la taille impressionnante de leurs catalogues de journaux scientifiques, ils sont parfois responsables de rétractations massives, ce qui soulève la question de la rigueur avec laquelle ces éditeurs supervisent le contenu qu'ils publient.

L'un des facteurs qui alimentent cette dynamique est la pression exercée sur les chercheurs pour publier des articles dans des revues à fort impact. Le nombre de publications et de citations devient un critère déterminant pour les carrières académiques, et il est parfois plus tentant de privilégier la quantité plutôt que la qualité. Le phénomène du "publish or perish" (publier ou périr), qui souligne cette pression constante sur les chercheurs, a donné lieu à des pratiques telles que le plagiat ou la manipulation des résultats. Les citations, qui sont vues comme un indicateur de la valeur scientifique d'un article, continuent d'augmenter même après la rétraction d'un article, en raison de l'obligation de citer des travaux rétractés lorsque ceux-ci sont mentionnés dans d'autres recherches.

Les rétractations ne se limitent pas aux seuls problèmes de données ou d'éthique dans la recherche. Elles soulignent également une vulnérabilité plus large du système de publication scientifique, qui reste parfois tributaire de logiques de rentabilité et de pression institutionnelle. Bien que certaines pratiques trompeuses, comme la soumission simultanée d’un même article à plusieurs revues, soient bien connues, elles persistent dans la recherche académique. Ces comportements illustrent un manquement systématique aux règles de conduite qui sous-tendent le système de publication scientifique.

Au-delà des rétractations elles-mêmes, il est essentiel de comprendre qu'elles mettent en lumière un besoin urgent de réformes dans le processus de publication scientifique. Les institutions, les éditeurs et les chercheurs doivent adopter des pratiques plus transparentes et rigoureuses. La responsabilité éthique, tant des auteurs que des éditeurs, doit être renforcée pour éviter que de telles situations ne se répètent. En outre, une vigilance accrue quant à l’intégrité des données et aux méthodes de révision par les pairs s’avère indispensable pour garantir la fiabilité des publications scientifiques.

Comment les images influencent-elles notre perception de la vérité ?

La littérature abondante démontre que la sensation de facilité cognitive est une expérience intrinsèquement positive (Reber, Schwarz, & Winkielman, 2004; Winkielman, Schwarz, Fazendeiro, & Reber, 2003). En effet, la facilité de traitement augmente généralement les jugements positifs, sans influencer les jugements négatifs. Par exemple, une expérience de fluidité cognitive conduit à des évaluations plus élevées de la beauté et de l'appréciation, mais n'influence pas le rejet ou l'absence d'appréciation (Reber, Winkielman, & Schwarz, 1998; Seamon, McKenna, & Binder, 1998). Ce phénomène s’étend même à l’expression faciale : les stimuli traités de manière fluide entraînent l’activation du muscle zygomatique, marqueur psychophysiologique de l’affect positif (Topolinski, Likowski, Weyers, & Strack, 2009; Winkielman & Cacioppo, 2001).

Ces découvertes expliquent en partie pourquoi, dans le cadre de jugements évaluatifs négatifs, la présence d’une photo non probative a peu d’effet sur l’évaluation de la vérité, et peut même biaiser les individus à dire « faux » face à des affirmations négatives. Bien sûr, les résultats de l’étude sur les célébrités mortes ou vivantes semblent contredire cette interprétation. On pourrait s’attendre à ce que le jugement sur le statut de vie ou de mort d'une célébrité soit également marqué par une valence négative. Cependant, dans l’étude sur les célébrités, les participants évaluaient une série de noms célèbres, ce qui suggère que le statut de vie ou de mort pourrait être évalué en fonction de la notoriété, plutôt que de la négativité liée à la mort et à la perte (voir aussi Cardwell et al., 2017 pour une discussion sur la manière dont ces affirmations pourraient être interprétées comme des faits sur le monde, plutôt que comme des affirmations valorisées). Une meilleure compréhension des limites de cet effet de valence représente un sujet digne de recherches futures.

Une question particulièrement pertinente, surtout dans le contexte des fausses informations, est de savoir si les affirmations cohérentes ou incohérentes avec l’identité des individus peuvent avoir un impact similaire à celui des affirmations négatives ou positives. Imaginons un exemple : si je suis un partisan de Hillary ou des démocrates, l’ajout d’une photo pourrait influencer moins mes croyances que si je suis un républicain. Autrement dit, l’effet de « vérité apparente » pourrait varier en fonction du degré d’alignement des affirmations avec mes propres croyances et idéologies politiques. Cette question, encore peu explorée, pourrait être un axe de recherche à venir.

En ce qui concerne la susceptibilité à l’effet de « vérité apparente », la littérature sur la persuasion et le changement d’attitude montre que certaines personnes sont plus enclines à se baser sur des indices heuristiques lors de l’évaluation d’un message. Cette différence individuelle est souvent mesurée à l’aide de l’échelle du besoin de cognition (NFC ; Cacioppo & Petty, 1982), qui évalue la propension des individus à apprécier et à s’engager dans une pensée approfondie. Les individus ayant un score élevé sur la NFC sont plus enclins à considérer la qualité de l'argument ou du message ainsi que la cohérence des preuves présentées. En revanche, ceux qui obtiennent un score bas sur la NFC prêtent moins attention au contenu des arguments et se fient davantage à des indices heuristiques (tels que le statut de l’orateur) et à des informations non diagnostiques (pour des revues, voir Petty & Cacioppo, 1986 ; Priester & Petty, 1995 ; voir aussi Reinhard & Sporer, 2008). Cette différence pourrait suggérer que ceux qui ont un besoin élevé de cognition seraient moins susceptibles de tomber dans le piège de la « vérité apparente », car ils se basent moins sur des indices tangents et seraient plus aptes à remarquer que les photos sont non probatives. Pourtant, aucune preuve fiable n'a été trouvée pour étayer cette hypothèse (voir Newman, Jalbert, Schwarz, & Ly, 2020).

Il est également possible que des mesures capturant la tendance des individus à adopter un raisonnement plus analytique réduisent l’effet de la « vérité apparente ». Par exemple, le test de réflexion cognitive (CRT) mesure la capacité d’un individu à surpasser une réponse intuitive initiale au profit d’une réponse plus analytique (voir Pennycook, Fugelsang, & Koehler, 2015). Ceux qui réussissent bien au CRT pourraient donc être moins influencés par la facilité avec laquelle une affirmation est traitée et plus susceptibles de remarquer que les photos sont non probatives.

L’effet de l’âge sur la susceptibilité à l’illusion de la vérité est également un facteur pertinent. Il est bien documenté que, avec l’âge, la capacité de recollection des détails épisodiques diminue, tandis que les sensations de familiarité restent relativement intactes (voir Jacoby & Rhodes, 2006). Dans le cadre de la mémoire, cela signifie que les adultes plus âgés sont souvent plus sensibles aux illusions de mémoire, car ils s’appuient davantage sur la familiarité que sur la recollection (Jacoby & Rhodes, 2006 ; voir aussi illusions de vérité Skurnik, Yoon, Park, & Schwarz, 2005). Toutefois, des recherches récentes suggèrent que l’âge ne nuit pas nécessairement à la performance en matière de connaissances générales, mais offre plutôt une protection contre les biais dans l’évaluation de la vérité. Des études sur l’effet de vérité basé sur la répétition ont montré que, bien que les adultes plus âgés et les jeunes adultes soient de manière similaire sensibles à l’effet de vérité dans le jugement d’affirmations ambiguës, les adultes plus âgés présentent un effet de vérité plus faible pour les affirmations mieux connues (Brashier, Umanath, Cabeza, & Marsh, 2017). Une explication possible est que les adultes plus âgés disposent de réseaux de connaissances plus développés, ce qui augmente la probabilité qu’ils puissent appliquer ces connaissances au moment présent (voir Umanath & Marsh, 2014).

L’âge pourrait également protéger contre l’effet de la « vérité apparente » et d’autres effets liés à la fluidité cognitive dans les connaissances générales. Les recherches initiales sur l'effet de l’âge sur la susceptibilité à la « vérité apparente » montrent qu'il n’y a pas de différences notables dans l’effet de la photo entre les groupes d'âge (Derksen, Giroux, Newman, & Bernstein, 2019). Toutefois, cette recherche préliminaire suggère que l’âge pourrait limiter l’influence des photos non probatives sur des affirmations facilement compréhensibles ou mieux connues.

Enfin, dans un monde où des géants des médias sociaux comme Facebook et Google s'efforcent de développer des algorithmes pour détecter les photos trompeuses et les histoires de nouvelles douteuses, il existe des interventions à l’échelle individuelle qui peuvent aider les gens à se protéger contre les effets biaisants des photos. Les études sur l'effet de vérité suggèrent que des avertissements sur le statut de vérité des affirmations peuvent réduire (bien que pas éliminer) la susceptibilité à l’effet de répétition de vérité (Jalbert, Newman, & Schwarz, 2020). Le mécanisme de cette réduction pourrait être que les individus examinent les affirmations avec un regard plus sceptique, en neutralisant les sentiments de familiarité qui favorisent la perception d'une « vérité apparente ».

Les Théories du Complot : Un Mécanisme de Défense Sociale et Psychologique

Les théories du complot se sont affirmées comme un phénomène social fascinant, souvent rejeté comme irrationnel ou excentrique, mais qui mérite une analyse approfondie en raison de son lien intime avec des besoins psychologiques fondamentaux tels que la recherche de sens, la défense du soi et l'intégration sociale. Les individus qui croient en ces théories ne se contentent pas de répondre à une curiosité intellectuelle. Ils cherchent à affirmer leur unicité et à se défendre contre les menaces perçues dans un monde complexe et incertain. Les théories du complot offrent ainsi une interprétation simple des événements apparemment inexplicables, tout en permettant à leurs partisans de se sentir membres d'un groupe sélect d'élus possédant une connaissance privilégiée (Lantian et al., 2017).

Il existe une relation notable entre narcissisme et croyances complotistes. Ceux qui manifestent des traits narcissiques tendent à percevoir la réalité d'une manière qui renforce leur sentiment de supériorité intellectuelle, et cette attitude peut les conduire à adopter des théories du complot. L’idée que des forces cachées manipulent la réalité en dehors de la portée de la majorité semble renforcée par cette perception de soi comme étant particulièrement éclairée et capable de discerner des vérités invisibles aux yeux des autres. Cette dynamique s’exprime par un besoin constant d’affirmer son individualité, souvent en s’opposant aux idées dominantes et en s'éloignant des opinions conformistes.

Les théories du complot ne sont pas seulement une question de croyances individuelles, mais elles se nourrissent aussi de dynamiques sociales puissantes. Elles jouent un rôle crucial dans l’intégration sociale des individus, en particulier dans des contextes d’isolement ou d’exclusion sociale. L’adhésion à ces théories peut offrir un sentiment de cohésion et d'appartenance à un groupe, renforçant ainsi un besoin psychologique fondamental d'être accepté et reconnu par ses pairs. Graeupner et Coman (2017) ont exploré ce lien et ont trouvé que l'isolement social renforce l'adhésion à ces croyances. Plus une personne se sent exclue, plus elle est susceptible de rechercher des explications simples et rassurantes qui peuvent être fournies par une vision du monde basée sur des complots. Ce phénomène est particulièrement visible dans les sociétés modernes où les individus sont de plus en plus influencés par les réseaux sociaux, qui, tout en créant de nouvelles formes d'interconnexion, peuvent aussi accentuer les sentiments de solitude et d'anxiété face à un monde perçu comme chaotique et menaçant.

Les recherches montrent que ces théories du complot trouvent souvent leur terrain fertile dans des sociétés marquées par des tensions politiques et une crise de confiance dans les institutions traditionnelles. L'isolement, mais aussi l'adhésion à des groupes de réflexion exclusifs, renforce cette propension à croire en des théories de manipulation et de dissimulation. Ce phénomène s’explique par le besoin de simplification face à des événements difficiles à comprendre ou à accepter. Lorsqu’une personne se sent exclue, elle peut percevoir la réalité à travers le prisme de ces théories, cherchant des explications cachées qui confirment ses angoisses.

Ce phénomène ne se limite pas aux individus isolés ou marginalisés. Il touche également ceux qui, tout en étant intégrés dans des réseaux sociaux, peuvent développer une méfiance accrue vis-à-vis des groupes extérieurs. L'adhésion à des théories du complot peut ainsi également résulter d'un désir de protéger son groupe d'appartenance contre des menaces extérieures perçues, renforçant ainsi les dynamiques d'exclusion et d'hostilité envers les autres. En conséquence, la croyance en des complots peut à la fois renforcer l’unité interne d'un groupe tout en accentuant sa défiance vis-à-vis du reste de la société.

Les théories du complot, par leur capacité à combiner des éléments vérifiables et invérifiables, présentent un paradoxe fascinant. Elles parviennent à suggérer des vérités cachées tout en restant suffisamment floues pour éviter toute réfutation. Ce mélange de plausibilité et de mystère leur confère une longévité remarquable et les rend particulièrement difficiles à corriger. Les individus adhérant à ces théories éprouvent un sentiment de maîtrise sur un monde qu’ils considèrent comme hors de contrôle, leur offrant ainsi un moyen de gérer l'incertitude et l'anxiété de l’inconnu. Dans ce contexte, il est essentiel de comprendre que ces croyances ne se contentent pas d’être une simple illusion intellectuelle, mais sont profondément ancrées dans les besoins humains fondamentaux. Elles satisfont un besoin de certitude, tout en permettant une forme de défense psychologique et d'intégration sociale.

L’étude des théories du complot doit être élargie, notamment en ce qui concerne l’influence des technologies numériques, comme les réseaux sociaux, qui jouent un rôle crucial dans leur diffusion. Les environnements numériques peuvent amplifier la portée de ces croyances, en facilitant la rencontre entre individus partageant des visions similaires et en renforçant l’effet de chambre d'écho, où des idées radicales sont constamment réaffirmées. Cette dynamique d’auto-renforcement peut rendre particulièrement difficile la remise en question de ces croyances, ce qui explique en grande partie leur persistance dans la société contemporaine.