Le modèle de Lemaître-Tolman (L–T) propose une géométrie spherique inhomogène permettant d’aborder la dynamique d’un univers non homogène avec des singularités temporelles localisées. Il introduit une structure où différentes régions de l’espace-temps ont des évolutions distinctes, depuis un Big Bang non simultané jusqu’à un Big Crunch, offrant un cadre complexe mais cohérent pour étudier les singularités cosmiques et les horizons apparents.
Le diagramme d’espace-temps caractéristique du modèle L–T montre une configuration où la fonction d’énergie E(r) est cruciale pour définir le destin de chaque région spatiale. Pour r ≥ E2, l’énergie E ≥ 0, ce qui correspond à une expansion perpétuelle depuis un Big Bang passé vers l’infini. À l’inverse, pour certaines valeurs de r dans un intervalle fini, l’univers subit un cycle complet avec un Big Bang suivi d’un Big Crunch, délimitant ainsi des régions avec durée de vie finie. Le point r = 0 joue un rôle clé, puisqu’il forme un col (« neck ») où les horizons apparents passés et futurs se touchent, générant une discontinuité spatiale forte.
Une observation importante concerne la nature des horizons apparents dans ce contexte : contrairement à l’espace de Schwarzschild, où la lumière peut se propager le long de l’horizon apparent, dans le modèle L–T non vide, les horizons sont partout spatiaux, empêchant toute communication lumineuse directe entre les parties opposées de l’espace de part et d’autre du col. Cette propriété implique un cloisonnement très strict des régions cosmiques, accentuant la complexité de la causalité dans ce type d’univers.
Le modèle peut également être étendu à une configuration dite « univers en chapelet » (« string of beads »), où une succession de régions recollapsantes est connectée par des cols, chaque bulle commençant par un Big Bang local et finissant par un Big Crunch. Ces univers n’ont pas de centre de symétrie global et représentent une multiplicité de bulles isolées qui se connectent puis se déconnectent au cours de l’évolution cosmique. La construction rigoureuse de ces modèles requiert une concordance précise des extrema des fonctions caractéristiques (M, E, tB) pour éviter des singularités non physiques telles que des croisements de coquilles.
Du point de vue observationnel, ces modèles soulèvent des difficultés majeures dans l’interprétation des données cosmologiques. La distribution spatiale de la matière, déduite des mesures de redshift, est affectée par la géométrie inhomogène. Les travaux de Partovi et Mashhoon montrent que les corrections inhomogènes aux paramètres cosmologiques standards (comme dans les modèles de Robertson-Walker homogènes) sont formellement présentes mais restent masquées dans les observations usuelles, rendant ces modèles difficilement différentiables expérimentalement.
Plus encore, Kurki-Suonio et Liang ont démontré que l’interprétation directe de la densité de matière en fonction du redshift (ρ̂(z)) est intrinsèquement ambiguë dans le modèle L–T. En effet, la quantité mesurée — le nombre d’objets lumineux dans une plage angulaire et en redshift — est définie dans un espace de redshift supposé plat, sans connaissance préalable de la géométrie sous-jacente. Ainsi, la fonction masse M(r) et l’évolution de la métrique R(t, r) ne peuvent être déduites univoquement de ρ̂(z), car une même distribution apparente peut correspondre à des configurations spatiales très différentes. Cette ambiguïté impose une prudence extrême dans la lecture des observations et souligne la nécessité d’un modèle cosmologique global qui intègre les inhomogénéités avec rigueur.
Il est important de noter que dans ces modèles, les singularités temporelles (Big Bang, Big Crunch) ne sont pas simultanées à l’échelle globale, ce qui modifie profondément la conception d’un « temps cosmique universel ». Les fonctions tB(r) et tC(r) varient en fonction de la position radiale, traduisant une structure temporelle complexe, où chaque région de l’univers a sa propre « horloge » cosmique.
Enfin, la présence des cols et des horizons spatiaux interdisant le passage des rayons lumineux entre certaines régions questionne la nature même de l’observabilité cosmique. Cela invite à reconsidérer les hypothèses classiques sur la connectivité de l’univers et la possibilité d’un observateur unique ayant accès à une totalité d’informations sur l’espace-temps. L’univers en chapelet, par exemple, illustre un cosmos fragmenté, où chaque bulle cosmique pourrait évoluer de manière quasi indépendante, limitant ainsi les conclusions que l’on peut tirer sur la globalité de l’univers à partir d’observations locales.
Ces considérations sont fondamentales pour toute démarche cosmologique sérieuse. Elles montrent que la compréhension des singularités, des horizons et de la structure spatiale-temporale de l’univers exige un modèle capable d’intégrer l’inhomogénéité et la non-simultanéité des événements cosmiques. Cette complexité est incontournable pour interpréter correctement les données astrophysiques et cosmologiques modernes, notamment celles liées au fond diffus cosmologique, à la distribution des galaxies et à la dynamique d’expansion observée.
Comment la distribution de masse dipolaire dans les solutions de Szekeres éclaire-t-elle la structure inhomogène de l’univers ?
Dans la solution β,z ≠ 0 des modèles de Szekeres, la distribution de masse sur chaque sphère de rayon constant t et z ne se réduit pas à une simple monopole, mais se présente sous la forme d’un dipôle superposé à un monopole. Cette caractéristique, initialement remarquée par Szekeres en 1975, a été approfondie et clarifiée par de Souza en 1985. La méthode proposée consiste à décomposer la densité de matière en une partie sphériquement symétrique ϵs, dépendante uniquement des variables t et z, et une contribution non symétrique Δϵ, fonction des coordonnées angulaires sur la sphère (x, y).
L’enjeu fondamental est de trouver une séparation unique et significative entre ces deux composantes. Pour ce faire, on introduit une fonction arbitraire H(t, z) dans l’expression de la densité, ce qui permet de réécrire ϵ comme la somme ϵs(t, z) + Δϵ(t, z, x, y). Afin d’éliminer l’arbitraire et fixer H, on impose que la surface où Δϵ s’annule traverse le centre de la sphère. Cette condition conduit à une équation exprimant H en fonction des dérivées des fonctions caractéristiques 𝒜, 𝒞, M et Φ, toutes dépendantes de t et z.
Cette construction révèle que la contribution Δϵ a la forme d’un dipôle dont l’axe change d’orientation d’une sphère à l’autre, à chaque valeur de t et z. La surface où Δϵ = 0, notée H1, est une hypersurface comobile, indépendante de t, qui coupe chaque sphère de rayon constant selon un cercle parallèle au grand cercle défini par ℰ,z = 0. La vérification mathématique de cette propriété repose sur une analyse fine des dérivées des fonctions P, Q et S et sur l’étude du discriminant d’une inégalité, garantissant que ce cercle d’intersection existe et n’est jamais réduit à un point isolé, sauf dans le cas trivial où la densité est parfaitement sphérique.
Cette structure dipolaire de la densité dans les modèles de Szekeres illustre ainsi de manière précise la nature inhomogène et anisotrope de ces univers, qui s’éloignent du modèle de Friedmann homogène et isotrope par excellence. En particulier, la présence d’un dipôle variable sur les sphères concentriques traduit des fluctuations spatiales de la masse à différentes échelles, ce qui a des implications directes sur la formation des structures cosmiques et l’évolution dynamique locale de la géométrie spatio-temporelle.
Au-delà de cette analyse formelle, il importe de saisir que l’existence d’une telle distribution dipolaire modifie les propriétés géométriques fondamentales, notamment celles liées aux horizons apparents dans un univers en effondrement. La distinction entre l’horizon apparent (AH), défini comme la frontière où les faisceaux de géodésiques nulles convergent, et l’horizon apparent absolu (AAH), locus où les lignes nulles les plus radiales sont renvoyées vers un rayon décroissant, devient essentielle. Cette distinction, absente dans les modèles de Lemaître–Tolman homogènes, prend tout son sens dans le cadre des solutions plus générales de Szekeres, où la géométrie est plus riche et anisotrope.
Enfin, comprendre ces nuances permet d’apprécier l’importance des modèles de Szekeres dans la cosmologie relativiste moderne : ils offrent un cadre précis pour étudier des univers réalistes, en particulier l’évolution des inhomogénéités gravitationnelles sans recourir à des approximations perturbatives. Le lecteur doit garder à l’esprit que l’interprétation physique des termes mathématiques — comme les fonctions 𝒜, ℬ1, ℬ2, 𝒞, et les rôles respectifs de M, Φ, P, Q, S — conditionne la compréhension de la dynamique cosmologique inhomogène, ainsi que des phénomènes locaux tels que la formation des horizons et l’effondrement gravitationnel. Cette complexité reflète la richesse des phénomènes observables dans l’univers réel, où l’homogénéité parfaite est une idealisation.
La question de l'horizon et les modèles inflationnaires en cosmologie
Les modèles inflationnaires ont été conçus pour résoudre certains problèmes fondamentaux en cosmologie, notamment le problème de l'horizon et le problème de la platitude. Toutefois, ces modèles ont engendré de nouvelles interrogations et des défis qui nécessitent une réflexion approfondie sur l’évolution du cosmos.
Le problème de l'horizon trouve sa racine dans l'observation de la température homogène du fond diffus cosmologique (CMB), qui est étonnamment uniforme à toutes les échelles angulaires, même à des distances cosmologiques considérables. La question qui se pose alors est de savoir comment ces régions apparemment non connectées ont pu se rendre thermiquement égales si elles n'avaient pas eu de contact causal direct. Dans le modèle standard ΛCDM, ce phénomène semble paradoxal, car les différentes régions du ciel ne sont pas censées avoir eu le temps d'échanger des informations, et pourtant, la température de la CMB est presque identique partout. Ce paradoxe est souvent reformulé sous le terme de « problème de l'âge uniforme », et bien que l'on observe une petite fluctuation dans la température (ΔT/T ≈ 5×10⁻⁶), cette différence a des implications profondes sur la compréhension de l'âge et de l'état de la matière cosmique à différentes époques.
Pour résoudre ce problème, Alan Guth a proposé dans les années 1980 l'idée d'une inflation exponentielle du cosmos dans ses premières fractions de seconde. L'inflation permettrait d'expliquer comment, à une époque donnée, la région observable de l'univers avait des conditions thermodynamiques similaires, malgré le fait qu'elles étaient largement séparées par des distances causales. Cette rapide expansion aurait permis aux régions lointaines de se synchroniser, en s'échangeant de l'énergie de manière presque instantanée à une échelle cosmologique. La solution proposée dans le cadre du modèle inflationnaire est l’introduction d'une phase d’expansion extrêmement rapide qui a eu lieu dans les premières fractions de seconde de l’univers.
Cependant, cette explication soulève également de nouvelles questions. Par exemple, la « sortie élégante » du régime inflationnaire, c’est-à-dire comment l’inflation peut se terminer de manière cohérente sans hypothèses supplémentaires, reste un défi théorique. De plus, la question de la constante cosmologique, qui joue un rôle central dans la dynamique de l’univers à grande échelle, reste également non résolue. Pourquoi la valeur de cette constante est-elle si proche de zéro à notre époque, alors qu’elle pourrait théoriquement prendre une multitude de valeurs ? Ces questions sont au cœur du débat cosmologique contemporain, et bien que l'inflation ait offert une explication élégante de nombreux phénomènes observés, elle a introduit de nouvelles énigmes.
Un autre aspect clé de la théorie de l’inflation est la question de la matière noire et de l’énergie sombre. L'inflation, en exigeant que la densité de matière dans l’univers soit presque exactement égale à la densité critique (c'est-à-dire, que k soit proche de zéro), a renforcé l'hypothèse de l'existence de la matière noire et de l'énergie sombre. Ces deux concepts sont désormais considérés comme les principaux composants invisibles de l'univers, représentant respectivement environ 30 % et 70 % de la densité totale de l'univers. L’un des principaux défis à surmonter est d'expliquer pourquoi la constante cosmologique reste stable au fil du temps, alors que la densité de la matière baisse à mesure que l'univers se dilate. Si la matière ordinaire ne représente qu'une fraction très faible de la densité critique (environ 20 %), l'existence d’une énergie sombre pourrait en théorie compenser cette déficience, mais son rôle reste énigmatique.
Enfin, bien que le modèle inflationnaire ait permis de résoudre certains des paradoxes apparents du modèle ΛCDM, il ne résout pas toutes les questions. Par exemple, les modèles inflationnaires restent généralement homogènes et ne parviennent pas à expliquer les inhomogénéités observées dans le cosmos. L'univers ne peut être décrit comme étant parfaitement homogène ; il présente une anisotropie qui devient évidente lorsque l’on examine les grandes structures à l’échelle cosmologique. Le problème de la généricité de l’inflation reste donc à résoudre dans le cadre d'une théorie plus générale, qui pourrait combiner les découvertes de la relativité générale et de la mécanique quantique pour fournir une image plus complète de l’univers primordial.
En résumé, l’inflation reste un pilier fondamental de la cosmologie moderne, mais elle introduit autant de questions qu’elle en résout. La compréhension de l’univers à ses débuts, à travers les modèles inflationnaires, soulève des défis théoriques et empiriques complexes, et la recherche continue dans ce domaine est essentielle pour affiner notre connaissance des premiers instants de l’univers.
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