Les résultats numériques présentés ici proviennent de l'étude menée par Gori et al. (2021), où l’accent est mis sur l’analyse de la formation de glace sur un profil aérodynamique NACA0012 dans une soufflerie cryogénique. Ce cas de test particulier fait appel à l’utilisation du solveur SU2 pour reconstruire le champ aérodynamique autour du profil. Les équations RANS sont discrétisées par la méthode des volumes finis avec une structure standard basée sur les arêtes, et un maillage à double grille est utilisé pour la construction des volumes de contrôle. Une méthode de reconstruction médiane-duale est appliquée pour assurer la précision de la discretisation.

Les flux convectifs sont discrétisés en utilisant un schéma MUSCL limité de second ordre, tandis que les flux visqueux sont traités avec une approche classique basée sur la moyenne des gradients. Les termes sources sont approximés à chaque nœud par une reconstruction constante par morceaux au sein de chaque volume de contrôle. Afin de résoudre les équations RANS dans le temps, une approche de marche temporelle est adoptée, utilisant un schéma d’Euler implicite, et une méthode à multigrilles est utilisée pour accélérer la convergence des itérations du solveur CFD vers une solution stable. La convergence est surveillée par l’intermédiaire de la racine carrée de la moyenne des résidus de l’équation de densité, et les calculs sont interrompus dès que ce résidu est inférieur à huit ordres de grandeur par rapport à la première itération.

Les calculs sont effectués sur des maillages hybrides de type O contenant environ 80 000 éléments. La résolution de maillage est déterminée pour chaque cas de test après une étude d’indépendance de la grille, utilisant la distribution du coefficient de pression sur le profil propre pour évaluer cette indépendance. Le maillage près du profil est constitué d’éléments quadrilatéraux pour capter les gradients forts développés dans la couche limite, tandis que des éléments triangulaires sont utilisés pour discrétiser la région extérieure du domaine. La hauteur de la première cellule à partir du mur est définie de manière à ce que la dimension y soit d’environ 1, ce qui évite l’utilisation de fonctions de paroi.

Dans ce contexte, le modèle de turbulence employé repose sur l'hypothèse de Boussinesq et utilise la fermeture de transport de contraintes de Menter (k-ω-SST). Les paramètres incertains dans cette analyse incluent le nombre de Mach en libre écoulement (M), la pression en libre écoulement (P), la température en libre écoulement (T), l’angle d’attaque (AoA) du profil, le diamètre médian volumique des gouttelettes (MVD), la teneur en eau liquide (LWC), et la conductivité thermique de la glace (ξ). Gori et al. (2021) fournissent une description détaillée du processus de caractérisation de ces incertitudes, notamment en ce qui concerne la conductivité thermique de la glace, dont la variabilité est modélisée par une distribution normale standard.

Un aspect important de cette simulation est l’analyse de l’incertitude. L’incertitude est caractérisée par une distribution de probabilité uniforme pour les paramètres mentionnés ci-dessus, et une analyse de l’incertitude est réalisée en utilisant un modèle de chaos polynomial de troisième ordre. Les coefficients du modèle de substitution sont calculés à l’aide des moindres carrés ordinaires, en exploitant 360 points de données générés par une technique de Latin Hypercube Sampling. La précision des surrogats est ensuite validée à l’aide d’un jeu de données supplémentaire composé de 50 points. En général, les surrogats présentent une bonne précision, avec une erreur quadratique moyenne (RMSE) maximale de moins de 6×10⁻⁵ pour les prédictions proches des limites d’accrétion de la glace.

L’analyse de sensibilité des résultats a été réalisée par la technique de décomposition de variance de Sobol, et cette analyse a révélé que, globalement, l'incertitude de la prédiction est attribuable aux incertitudes affectant la LWC, l’AoA, et le MVD des particules. En particulier, l'incertitude de l’AoA et du MVD a un impact maximal près des limites d’accrétion de glace, tandis que l’incertitude relative à la LWC est cruciale pour la détermination de l’épaisseur de la glace au point de stagnation.

L’étude des différents cas expérimentaux et numériques de l’accrétion de glace sur les profils aérodynamiques met en évidence une bonne concordance entre les simulations et les expérimentations, bien que certaines divergences se manifestent près des limites supérieures et inférieures d’accrétion. Les résultats expérimentaux montrent une forme plus indentée de la distribution de l’épaisseur de glace comparée à la variation plus douce obtenue par la simulation, ce qui révèle l’importance des détails fins dans la modélisation numérique des phénomènes physiques sous conditions extrêmes.

Les tests supplémentaires réalisés sur un profil aérodynamique NACA23012 dans une soufflerie cryogénique (test 9) montrent une continuité dans les méthodes utilisées pour résoudre les équations RANS et le maillage, bien que des ajustements spécifiques soient nécessaires en fonction des nouvelles conditions expérimentales.

Dans le cadre de cette simulation, il est essentiel de comprendre que l'incertitude dans les conditions d’entrée, notamment la température, la pression, la vitesse du vent et la concentration d'eau liquide, joue un rôle crucial dans la précision des prédictions de la formation de glace. Une analyse approfondie de ces incertitudes, associée à une méthode robuste de simulation numérique, peut aider à améliorer la compréhension et la gestion du phénomène d'accumulation de glace dans des conditions de vol réelles.

Comment la simulation numérique de l'accumulation de glace en vol peut-elle être modélisée à l'aide de la méthode morphogénétique ?

La modélisation numérique de l'accumulation de glace en vol, en particulier sur des ailes d'avion, repose sur une série d'approches complexes qui simulent le comportement des gouttes d'eau et leur interaction avec les surfaces aéronautiques dans des conditions d'impact et de congélation. L'une de ces approches est la méthode morphogénétique, qui permet de recréer l'accumulation de glace de manière réaliste en se basant sur des principes physiques concrets et en imitant l'évolution du processus à travers des étapes successives.

Le processus commence par un calcul détaillé du champ de flux d'air autour de l'objet soumis à l'accumulation de glace. Le module de dynamique des fluides (CFD) permet de déterminer la distribution du transfert thermique sur la surface de l'objet. Ce module fournit ensuite les entrées nécessaires pour le calcul des trajectoires des gouttes d'eau, qui sont supposées sphériques et n'ayant pas d'influence sur l'écoulement d'air. Le modèle de trajectoire de gouttes est classique dans la littérature, et son objectif principal est de déterminer l'efficacité de collision locale, un paramètre essentiel pour l'estimation de l'accumulation de glace.

Une fois les trajectoires des gouttes déterminées, ces informations sont transférées vers le module morphogénétique. Ce module traite les impacts des gouttes sur la surface de l'objet ou sur la glace déjà formée, en fonction de l'efficacité de collision et de l'angle d'impact calculés par le modèle de trajectoire. Dans cette approche, les gouttes sont représentées par des particules plus grosses, pour des raisons de performance informatique, qui vont se "poser" sur la surface selon une distribution probabilistique. Cette simulation emploie une grille cubique tridimensionnelle pour décrire le domaine d'accumulation de la glace.

Le comportement de chaque particule sur la surface est régi par les principes de conservation de l'énergie et de la masse, tout en tenant compte de la direction du flux d'air. Ces particules se déplacent suivant des pas successifs sur la surface de l'objet, imitant le mouvement réel des gouttes qui gèlent à chaque impact. Le modèle ne s'arrête pas à l'accumulation simple, mais considère aussi les échanges thermiques à l'interface entre les gouttes et la glace formée. Les flux thermiques sont divisés en plusieurs catégories : flux convectif, flux de chaleur latente de congélation, flux d'évaporation, flux aérothermiques, et flux sensible des gouttes.

Chaque flux a son propre rôle dans l'évolution de la forme de la glace. Le flux convectif dépend de la différence de température entre l'air ambiant et la surface, et peut évoluer en fonction de la géométrie de l'objet. De même, le flux de chaleur latente de congélation et les propriétés thermiques de l'air influencent directement la vitesse de formation de la glace. Un autre aspect fondamental de ce modèle est l'analyse de la masse d'eau qui gèle sur la surface de l'objet, et la répartition de cette masse en fonction de l'efficacité de collision, ce qui permet de déterminer la probabilité locale de congélation.

Dans ce cadre, l’équilibre de masse est essentiel pour simuler correctement l’évolution de l’épaisseur de glace. La somme des flux de masse sortants de chaque zone de la surface doit être égale à la somme des flux entrants, augmentée de la masse de glace gélée. Le modèle permet ainsi de calculer l’accumulation de glace en fonction de paramètres tels que la température de l'air, la vitesse du flux d'air, et la concentration d'eau dans le flux d’air.

La particularité de ce modèle réside dans la manière dont il calcule la probabilité de congélation de chaque particule. À chaque pas du mouvement de la particule, un nombre aléatoire est généré et comparé à la probabilité locale de congélation. Selon le résultat de cette comparaison, la particule soit continue à se déplacer, soit se gèle et reste fixée à la surface. Cela permet de simuler de manière dynamique l'accumulation de glace, prenant en compte la variabilité des conditions de vol et la distribution des impacts des gouttes d'eau.

Cependant, il est essentiel de comprendre que ce modèle se limite à certaines hypothèses, notamment l’approximation selon laquelle les gouttes sont sphériques et leur effet sur l'écoulement d'air négligeable. De plus, bien que le modèle permette une simulation détaillée de l’accumulation de glace à partir d’un certain moment (en général sans recalculer en continu les conditions de vol), l'approche itérative utilisée pour simuler des cas complexes comme la glace en croûte nécessite des ajustements supplémentaires.

L'ajustement de ce modèle pour d'autres types de surfaces ou d'environnements spécifiques, comme les ailes de forme plus complexe ou des conditions atmosphériques extrêmes, représente un domaine de recherche et de développement continu. En outre, la précision des résultats dépend fortement des données d'entrée, telles que la vitesse du vent, la température de l'air, et la taille des gouttes d'eau. Les valeurs de ces paramètres doivent être choisies avec soin pour garantir la validité des simulations dans des conditions réelles.

L'ajout d'un tel modèle dans le cadre de la conception d'aéronefs ou de la gestion de la sécurité aérienne permet d'anticiper et de mieux comprendre l'impact de l'accumulation de glace sur les performances des avions, ce qui pourrait potentiellement réduire les risques liés à ces phénomènes. En effet, la modélisation précise de l'accumulation de glace contribue non seulement à optimiser la conception des avions mais aussi à améliorer les systèmes de déglaciation et de gestion des conditions climatiques dans l'aviation.