Les préoccupations des individus et des groupes au sein d’une société ne sont jamais uniformes. Selon leur appartenance idéologique ou politique, les priorités varient, souvent de manière marquée. Cette observation est particulièrement frappante lorsqu’on analyse les réponses aux questions concernant des problématiques sociales, économiques et sécuritaires. Des groupes tels que les libéraux, les modérés, les conservateurs non-trumpistes, et ceux qui vénèrent Trump ont des listes d’enjeux qui reflètent non seulement leurs priorités, mais aussi leurs perceptions de la justice sociale, de la sécurité et de l’équilibre économique.
Les libéraux, par exemple, placent au sommet de leurs préoccupations des sujets comme la justice raciale, les droits des femmes, l'égalité des revenus et l’accès aux soins de santé. Ces questions, qui touchent principalement les groupes historiquement marginalisés ou opprimés, témoignent d’un désir de protéger et d'améliorer les conditions de vie de ceux qui sont considérés comme vulnérables dans la société. Les modérés, bien que partageant une partie de ces préoccupations, mettent également en avant des enjeux économiques. Cependant, les conservateurs non-trumpistes, tout en mentionnant la santé et la question économique, se concentrent davantage sur des sujets comme la défense nationale, la sécurité et l’immigration.
Ce qui distingue clairement les vénérateurs de Trump des autres groupes, c’est leur approche des questions de sécurité et d’immigration. Là où les libéraux se concentrent sur la protection des minorités raciales et des femmes, les vénérateurs de Trump orientent leurs préoccupations vers la préservation des frontières nationales, la sécurité intérieure, la régulation des armes à feu et le maintien de l’ordre. Ces priorités mettent en lumière une vision du monde où l’on considère que les menaces viennent principalement de l’extérieur — qu’il s’agisse de l’immigration ou de la remise en cause de la culture dominante — et où l’insistance sur l’ordre et la sécurité devient un impératif.
L’idéologie de Trump semble accentuer cette fracture en plaçant ces questions sécuritaires au centre du débat. En comparaison avec les conservateurs non-trumpistes, les vénérateurs de Trump adoptent une position beaucoup plus ferme sur des questions comme la réduction de l'immigration, la protection du droit de posséder des armes, et un renforcement des dépenses militaires. D’autres enjeux, comme les soins de santé et les droits des femmes, sont relégués à une position secondaire, voire ignorés dans certains cas. Ce phénomène montre à quel point les priorités politiques ne se limitent pas à une simple différenciation sur les politiques publiques, mais qu’elles relèvent également d’une vision profondément ancrée des rapports de pouvoir, des menaces et des identités culturelles.
Il est important de noter que ces divergences ne se limitent pas à une opposition entre les partisans de Trump et les libéraux. Les conservateurs non-trumpistes, bien qu'ils partagent certaines préoccupations sécuritaires avec les vénérateurs de Trump, se distinguent par une approche plus nuancée de la question économique. Ces derniers semblent plus enclins à soutenir des politiques économiques de libre marché, telles que la réduction des impôts ou la limitation de la régulation des entreprises, contrairement aux vénérateurs de Trump qui affichent une préférence marquée pour une politique économique conservatrice plus rigide.
Les positions des différents groupes sur les questions de politique sociale, comme le mariage homosexuel ou l'avortement, révèlent également des divergences significatives. Cependant, dans ce domaine, les différences entre les vénérateurs de Trump et les conservateurs non-trumpistes sont moins marquées. Il en ressort que, bien que les vénérateurs de Trump aient tendance à être plus conservateurs sur ces questions, ils n’adhèrent pas nécessairement à une vision conservatrice traditionnelle sur tous les aspects sociaux. Ils semblent surtout préoccupés par des enjeux plus immédiats et perçus comme directement liés à la sécurité et à la préservation d’un ordre social qu'ils jugent en péril.
Les différences sur les politiques économiques sont particulièrement marquées. Les vénérateurs de Trump expriment une hostilité plus marquée envers l'intervention de l'État dans l’économie, comme en témoigne leur opposition aux soins de santé universels et leur soutien aux politiques de réduction de l’impôt pour tous, y compris les plus riches. De leur côté, les libéraux et les modérés privilégient des solutions plus interventionnistes visant à réduire les inégalités économiques, comme l’imposition d’impôts plus élevés pour les plus riches et le financement de l'éducation gratuite.
Enfin, le positionnement des groupes sur des questions de sécurité et de défense, telles que l'augmentation des dépenses militaires ou la peine de mort, révèle également des divergences importantes. Les vénérateurs de Trump, tout comme les conservateurs non-trumpistes, sont plus enclins à soutenir des politiques sécuritaires robustes, privilégiant la défense nationale contre les menaces extérieures, l’intensification de la surveillance et le renforcement de la répression face aux déviances perçues dans la société.
Il est essentiel de souligner que ces priorités ne sont pas simplement des positions politiques, mais qu'elles incarnent des visions opposées de la société. Pour les libéraux, la lutte contre les inégalités et la protection des groupes marginalisés est primordiale, tandis que pour les conservateurs et les vénérateurs de Trump, la préservation de l’ordre et de la sécurité, tant intérieure qu’extérieure, passe avant tout. Cette opposition de valeurs, souvent réduite à des termes simplistes comme "progressisme" contre "conservatisme", est en réalité beaucoup plus complexe et prend racine dans des perceptions différentes des menaces sociales, économiques et culturelles auxquelles chaque groupe fait face.
Quelle est l'importance de la sécurité dans les choix politiques des Américains selon les groupes raciaux et politiques ?
Le concept de la sécurité, tant sur le plan intérieur qu'extérieur, joue un rôle crucial dans la perception des menaces politiques aux États-Unis, et ce, au-delà des seules menaces militaires ou terroristes. Le débat sur la sécurité s'étend aux questions de politique intérieure, notamment la concentration du pouvoir et les tensions raciales, et il se reflète dans les opinions des différents groupes raciaux, en particulier parmi les démocrates noirs et blancs.
Chez les démocrates noirs, la sécurité est souvent perçue comme plus prioritaire que la démocratie. En effet, trois fois plus de démocrates noirs que de démocrates blancs considèrent la sécurité comme plus importante que les valeurs démocratiques, avec 42 % des noirs en faveur de la sécurité contre seulement 14 % des blancs. De même, une proportion plus élevée des démocrates noirs que des démocrates blancs pense qu’il est préférable de supposer que les étrangers ont de mauvaises intentions à l’égard des États-Unis, avec 26 % contre 12 %. Cela montre une différence significative dans l’approche de la menace extérieure, mais aussi de la stabilité interne du pays.
Pourtant, un autre aspect important de ce débat réside dans l’idée que la plus grande menace n’est pas nécessairement celle qui vient de l’extérieur, mais plutôt celle qui découle de l’intérieur, sous forme de concentration excessive du pouvoir dans les mains de quelques-uns. En effet, tandis que 83 % des démocrates blancs considèrent que la plus grande menace vient de cette concentration de pouvoir, seulement 48 % des démocrates noirs partagent cette opinion. Cela indique que les démocrates noirs, qui ont historiquement été plus susceptibles de se sentir marginalisés, sont également plus enclins à soutenir une approche plus sécuritaire, axée sur la protection du pays contre les menaces internes comme les abus de pouvoir.
Le sujet de la sécurité se reflète également dans les préférences politiques sur des questions sociales et économiques. En comparant les positions des démocrates noirs et blancs, on constate que les noirs sont souvent plus conservateurs que les blancs sur des questions telles que le mariage homosexuel et l’avortement. Alors que 83 % des démocrates blancs soutiennent le droit à l’avortement, seuls 64 % des démocrates noirs s’y opposent. Une différence similaire existe concernant les mariages gays, avec seulement 42 % des noirs les soutenant contre 83 % des blancs. En revanche, un plus grand nombre de démocrates noirs que de démocrates blancs soutiennent des politiques plus conservatrices sur des questions telles que la prière à l’école et les taxes. Ainsi, les démocrates noirs, tout en restant largement fidèles au parti démocrate, ne suivent pas toujours les positions libérales traditionnelles du parti, en particulier sur les questions de sécurité et de politique sociale.
L’attitude des démocrates noirs face à la politique sécuritaire s’étend également à d'autres questions telles que le droit à l'armement et la sécurité nationale. Comparés aux démocrates blancs, les démocrates noirs sont plus susceptibles de soutenir des politiques plus rigides en matière de défense, notamment un budget militaire plus important et un contrôle plus strict de l’immigration. Cette divergence se manifeste également dans leur opposition à certaines protestations publiques contre l'injustice raciale, comme celles menées par des athlètes noirs. Ces choix révèlent une tension sous-jacente entre les aspirations à la sécurité et les valeurs sociales ou raciales qui, historiquement, étaient perçues comme incompatibles avec les objectifs sécuritaires.
La situation des démocrates latinos, quant à elle, se situe souvent entre celle des noirs et des blancs. Bien que leurs opinions varient, les latinos manifestent une préférence pour des politiques qui, en matière de sécurité, tendent à suivre une trajectoire similaire à celle des noirs. Cela suggère que la perception de la sécurité parmi les groupes minoritaires, tout en étant complexe et nuancée, se rapproche davantage de celle des communautés marginalisées, qui mettent souvent l’accent sur la stabilité interne et la protection contre les abus de pouvoir.
Enfin, le soutien de la communauté noire aux candidats démocrates ne doit pas être interprété comme un rejet de l’approche sécuritaire, mais plutôt comme le reflet de leur statut d'outsiders dans la société. Au fur et à mesure que les noirs percevront de moins en moins leur place comme marginale et plus comme centrale dans la société, leurs préférences en matière de sécurité, et en particulier leurs choix politiques, pourraient se réorienter. Ce phénomène pourrait également se reproduire pour d'autres groupes marginalisés, tels que la communauté LGBTQ, qui pourrait progressivement adopter des positions plus sécuritaires au fur et à mesure que la société évolue et que l'acceptation grandit.
En ce qui concerne l’avenir politique des États-Unis, la montée de l’individualisme sécuritaire pourrait aboutir à une fracture au sein du Parti républicain. Avec l’évolution de la politique sous l’influence de figures moins sécuritaires, on pourrait assister à une redéfinition des lignes de fracture politiques. Cependant, bien que la sécurité demeure un enjeu majeur, la manière dont les partis politiques s’adapteront à ces nouvelles dynamiques pourrait déterminer leur réussite ou leur échec. Les divisions au sein du Parti républicain sur des questions de sécurité et de politique sociale pourraient influencer de manière décisive les élections à venir.
Comment la démocratie peut-elle survivre après Trump ?
La démocratie, fragile par nature, a toujours été confrontée à des menaces, qu’elles proviennent de l’intérieur ou de l’extérieur. Si l’histoire des États-Unis témoigne de périodes où des segments importants de la société ont été privés de leurs droits fondamentaux – comme les femmes, les afro-américains ou d’autres groupes marginalisés –, ces périodes de répression n’ont pas été des exceptions mais des rappels douloureux de la vulnérabilité des principes démocratiques. Cela ne signifie pas que l’on puisse se contenter de dire que "nous avons survécu à des attaques précédentes contre les valeurs démocratiques, donc nous surmonterons celle-ci aussi". Non, le véritable message est que la démocratie est toujours en danger, et qu’elle nécessite un entretien constant et une grande dose de courage pour être protégée.
Cette réalité se fait sentir plus que jamais à l'ère post-Trump, où l’ex-président a incarné une série de menaces à la démocratie. L'égo de Trump l'a empêché d'accepter la possibilité d'une défaite légitime, et le pays a vécu avec la crainte d’une crise constitutionnelle réelle. Même sans que ce scénario catastrophe se réalise, les fondements d’une démocratie fonctionnelle risquent d’être profondément ébranlés après Trump. Les chercheurs Steven Levitsky et Daniel Ziblatt ont identifié quatre menaces majeures pour la démocratie : un engagement faible envers les règles démocratiques, le déni de la légitimité des opposants politiques, la tolérance ou l’encouragement de la violence, et la volonté de réduire les libertés civiles des opposants et des médias.
Ces tendances ne sont ni étrangères aux admirateurs de Trump ni à Trump lui-même. Ses partisans ont été convaincus que le trumpisme était indispensable pour garantir la sécurité des "insiders" – les privilégiés et les élites nationales – contre l’incertitude et la menace d’"outsiders". Ils ont même accepté que des actions non démocratiques puissent être nécessaires pour préserver cette sécurité. Par exemple, 59 % de ses partisans estiment qu’en cas de conflit entre démocratie et sécurité, la sécurité doit primer. Ce sentiment trouve un écho dans des moments de l’histoire récente, comme dans les années 1980, où des personnalités comme Ronald Reagan et Oliver North ont contourné des lois démocratiques pour préserver leurs objectifs de politique étrangère. Mais ce qui unit ces partisans, c’est leur fidélité à la préservation de leur propre sécurité, avant tout, et leur volonté de sacrifier la démocratie pour y parvenir.
Il est possible que les valeurs démocratiques retrouvent leur forme antérieure après l’ère Trump, mais il est tout aussi probable que des dommages durables aient été infligés. La démocratie n’est pas un état naturel pour les êtres humains, et elle manque toujours de "garde-fous" solides. L’essentiel de la démocratie – "la tolérance mutuelle" et "la retenue institutionnelle" – est souvent insuffisant. Cette fragilité est apparue de manière frappante lors de l’administration Trump, où de nombreuses pratiques démocratiques, comme les discours de concession ou le respect des règles, ont été systématiquement remises en question.
Les disputes politiques actuelles ne reflètent plus uniquement des divergences d’idées politiques, mais plutôt des visions opposées du monde. Cette rupture se fait autour de la question de savoir comment traiter les "outsiders". Les positions politiques se sont polarisées à un point tel que, à l’instar de périodes passées comme la Guerre de Sécession ou les années 1960, la politique est devenue âpre et violente. La réconciliation semble désormais un objectif presque inaccessible. Les disputes entre "sécuritaires" et "unitaires" – ceux qui privilégient la sécurité des insiders contre ceux qui défendent une approche plus inclusive et solidaire – sont un reflet de cette division fondamentale.
L’un des défis majeurs réside dans la compréhension que, pour beaucoup de "sécuritaires", leur conception du monde est si radicalement différente de celle des unitaires que la démocratie, telle qu’elle est habituellement comprise, devient presque un obstacle à la protection de ce qu’ils perçoivent comme étant essentiel : leur sécurité personnelle et la préservation de leur mode de vie face à une menace perçue d'éléments extérieurs. Il n'est pas rare de voir des partisans de Trump croire que tout vaudra pour garantir cette sécurité, y compris le recours à des actions antidémocratiques.
Ainsi, il est essentiel de comprendre que la politique actuelle aux États-Unis, comme dans d’autres démocraties fragiles, repose sur des conceptions opposées de la sécurité et de la société. Les "sécuritaires" croient que sans une protection absolue des insiders, le monde s’effondrerait, tandis que les "unitaires" mettent l’accent sur la coopération internationale et la solidarité, sans pour autant nier l’importance de la sécurité. Cette divergence d’approches est au cœur des tensions politiques actuelles, et elle exige une prise de conscience collective pour que la démocratie puisse fonctionner.
Si les démocrates souhaitent redresser la barre après cette crise, il est crucial qu'ils comprennent que les divisions actuelles ne sont pas simplement politiques, mais existent au niveau des valeurs fondamentales. Les "sécuritaires" doivent accepter qu'ils ne pourront jamais obtenir toute la sécurité qu'ils désirent. Les "unitaires", de leur côté, devront accepter que l'éradication totale des distinctions entre insiders et outsiders n’est pas une solution réalisable du jour au lendemain. C’est sur ce terrain de compromis que la démocratie pourra peut-être trouver un terrain d’entente, à condition que les individus acceptent de négocier et d'admettre la légitimité de l'autre, même lorsqu’ils s’opposent sur des questions de fond.
En fin de compte, le changement nécessaire est plus psychologique que politique. Ce n’est pas tant une question de politique publique que de changer la manière dont les citoyens se perçoivent et perçoivent l’autre. Si la situation ne s'améliore pas, si les mentalités restent figées dans des oppositions irréductibles, la démocratie risque de se déliter davantage, même après Trump.
Quelle est la portée des sondages et leur biais : une analyse des méthodologies en politique ?
Certains chercheurs ont entrepris de mener leurs propres enquêtes pour analyser les tendances politiques et sociales, indépendamment des sondages traditionnels. Fortunato, Hibbing et Mondak (2018), Rapoport, Abramowitz et Stone (2016), ainsi que plusieurs autres chercheurs, ont mené des études qui se distinguent des sondages sortant des urnes. Ces enquêtes sont particulièrement précieuses dans la mesure où elles permettent de recueillir des données directement auprès des électeurs validés, donnant ainsi un aperçu plus précis des comportements politiques.
Cependant, un des problèmes majeurs réside dans la méthodologie des sondages sortant des urnes, qui tend à être biaisée en faveur des électeurs ayant une éducation universitaire. Cette catégorie de votants est souvent plus disposée à répondre aux sondages, ce qui peut fausser les résultats. Comme l'indique Edsall (2018), ce biais provient du fait que les électeurs plus instruits sont plus enclins à coopérer avec les sondeurs. Il est donc nécessaire de compléter ces sondages par des études utilisant des techniques plus fiables, comme celles menées par Parker et ses collègues (2018), qui utilisent des électeurs validés pour corriger cette tendance.
Les travaux de chercheurs comme Reich (2018) et Sarlin (2016) permettent également de nuancer les interprétations des résultats des sondages. Une compréhension approfondie de ces biais est essentielle pour mieux appréhender les données collectées et les conclusions qui en découlent. En effet, bien que les sondages sortant des urnes soient un outil précieux, ils ne reflètent pas toujours la diversité réelle des électorats, en particulier ceux qui n'ont pas la possibilité de participer aux enquêtes.
Un autre aspect essentiel à considérer est l'impact de l'économie sur les choix politiques. Si certains analystes affirment que les préoccupations économiques sont la principale motivation derrière les votes pour des partis populistes, il est important de comprendre que ce facteur est souvent secondaire par rapport aux préoccupations culturelles et sécuritaires. Les recherches de Sides, Tesler et Vavreck (2018) soulignent que les électeurs dans des régions économiquement fragiles sont souvent plus influencés par des questions telles que la sécurité, l'immigration, et la préservation de leur culture, plutôt que par des considérations purement économiques. Les questions de culture et d'identité peuvent jouer un rôle plus déterminant que les seules questions économiques dans les décisions de vote, même si ces dernières ne sont pas sans importance.
L'analyse des données sur le comportement des électeurs, qu'elle soit fondée sur des sondages sortant des urnes ou sur des enquêtes spécifiques, nécessite également une attention particulière à la manière dont les données sont interprétées. Par exemple, l'analyse des écarts géographiques et des clivages culturels, comme l'indiquent Maxwell (2019) et Manza et Crowley (2017), montre que les divisions géographiques sont souvent le reflet de fractures plus profondes au sein de la société, qui ne peuvent être réduites à une simple analyse économique. Les votants ne sont pas simplement des acteurs économiques, mais des individus aux préoccupations variées, influencées par leurs valeurs, leur culture et leurs expériences.
Les différences de genre et de race jouent également un rôle important dans la manière dont les individus se positionnent politiquement. Les recherches de Smith et Hanley (2018) révèlent que ces facteurs varient considérablement d'un groupe à l'autre, et que les comportements électoraux sont souvent marqués par des dynamiques complexes de pouvoir et de représentation. Ces différences ne doivent pas être sous-estimées, car elles influencent profondément les résultats électoraux.
Il est également crucial de prendre en compte les traits de personnalité des électeurs. Des études sur la personnalité et les valeurs, comme celles de Jost et al. (2003) et Graham, Haidt, et Nosek (2009), montrent que des traits comme l'autoritarisme ou le conservatisme moral peuvent influencer les choix politiques des individus. Ceux qui ont des personnalités plus autoritaires, par exemple, tendent à privilégier l'ordre et la sécurité sociale, ce qui peut les amener à soutenir des partis politiques plus radicaux ou populistes.
Une dimension souvent négligée, mais tout aussi importante, est l'impact des émotions sur les décisions politiques. Les travaux de Zito et Todd (2018) et de Wuthnow (2018) soulignent que la colère, la frustration et la peur sont des moteurs puissants des choix politiques. L'électeur ressentant une insécurité face au changement ou aux menaces perçues peut devenir plus enclin à soutenir des candidats qui promettent de restaurer un ordre perçu comme perdu. Cette dimension émotionnelle des choix politiques est particulièrement marquée dans le contexte des révoltes contre les élites perçues, notamment dans les classes populaires, qui se sentent marginalisées par les transformations sociales et économiques.
Il est enfin primordial de comprendre que les méthodes de collecte des données influencent non seulement les résultats, mais aussi l'interprétation de ces derniers. Les biais inhérents aux sondages, qu'ils soient liés à l'éducation des répondants ou aux problèmes méthodologiques comme l'effet de non-réponse, peuvent fausser l'image de la réalité politique. Ainsi, bien que les sondages soient des outils puissants pour comprendre les tendances électorales, leur interprétation doit être faite avec prudence et dans un contexte plus large, prenant en compte les multiples facettes des comportements électoraux.
Qu’est-ce qui sous-tend l’autoritarisme et la hiérarchie sociale ?
L’autoritarisme, souvent étudié à travers des mesures comme le RWA (Right-Wing Authoritarianism) et le SDO (Social Dominance Orientation), repose sur des composantes psychologiques et sociales complexes. Le RWA combine des tendances à l’agression, au conformisme et à la soumission à l’autorité, qui peuvent être considérées comme des dimensions interdépendantes mais distinctes. Cette triade favorise la défense des normes sociales traditionnelles et le rejet de l’altérité. Le SDO, quant à lui, exprime la croyance en une hiérarchie naturelle des groupes sociaux et justifie les inégalités comme inévitables ou même souhaitables, s’opposant ainsi à l’égalité entre groupes et à l’intervention publique pour corriger les disparités.
L’étude de ces attitudes révèle que l’agression mesurée dans ces échelles ne se rapporte pas tant à une agressivité générale, mais plutôt à une hostilité ciblée contre les non-conformistes ou les « outsiders ». Par exemple, des questions qui semblent mesurer l’agressivité, telles que « les personnes sans religion devraient être éliminées », traduisent en réalité un rejet idéologique spécifique, et non une propension générale à la violence. Cette nuance est essentielle pour comprendre que le dogmatisme et l’intolérance naissent souvent d’une anxiété face à des menaces perçues à l’ordre social.
Les recherches sur les origines de ces attitudes insistent sur des facteurs développementaux et contextuels, tels que les modes d’éducation et les expériences formatrices. Par exemple, certains travaux soulignent que les styles parentaux autoritaires ne sont pas forcément la cause directe des attitudes politiques, mais plutôt des indicateurs de tendances sous-jacentes plus larges. Par ailleurs, l’accent mis par les individus sur la hiérarchie sociale semble lié à des préférences pour des structures stables et ordonnées, même au prix d’inégalités.
Sur le plan neurologique et psychologique, les sécuritariens — souvent associés à des attitudes conservatrices — sont plus sensibles aux menaces perçues et valorisent la force et la discipline, notamment à travers une admiration pour les institutions militaires. Leur orientation cognitive se caractérise par une vigilance accrue aux dangers, souvent ressentis comme une nécessité de préserver l’identité et la cohésion du groupe intérieur face à des menaces extérieures. Cela ne signifie pas forcément une peur ostensible ; au contraire, une posture de force et d’assurance est une stratégie fréquente pour masquer cette vulnérabilité.
Les émotions négatives, telles que l’anxiété, jouent un rôle paradoxal dans ce mécanisme. Bien que souvent perçue comme un état déplaisant, l’anxiété suscite une vigilance accrue qui peut renforcer le sentiment d’accomplissement individuel lorsqu’elle est canalisée vers des actions concrètes, comme la défense des valeurs ou des responsabilités perçues. Ainsi, les attitudes autoritaires et hiérarchiques ne sont pas simplement des expressions de peur ou d’hostilité, mais aussi des moyens d’affirmation de soi et d’engagement social.
Il est aussi important de noter que les différences idéologiques entre individus peuvent être partiellement expliquées par des variations dans les capacités cognitives, la sensibilité aux menaces, et les expériences sociales. L’interaction de ces facteurs engendre une diversité d’attitudes vis-à-vis de la société, de l’autorité, et de la justice sociale.
En complément, il est essentiel que le lecteur comprenne que ces dynamiques ne sont pas figées ni déterministes. Elles s’inscrivent dans des contextes culturels et historiques changeants, où les représentations du « groupe intérieur » et du « groupe extérieur » évoluent. De plus, les attitudes autoritaires peuvent s’exprimer différemment selon les enjeux politiques, économiques, et sociaux du moment. Enfin, l’attention portée aux émotions et à la psychologie permet d’éviter une lecture simpliste qui réduirait ces phénomènes à de simples choix rationnels ou idéologiques. L’étude approfondie de ces mécanismes offre une clé pour comprendre les tensions sociales actuelles et les résistances aux changements vers plus d’égalité et de diversité.
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