La relation complexe et paradoxale entre les chrétiens évangéliques blancs et Donald Trump demeure une énigme pour beaucoup d'observateurs. Trump, le président chrétien, incarne, par de nombreux aspects, l'exact opposé du modèle chrétien traditionnel et vertueux. Non seulement Trump n'est-il pas un chrétien pratiquant ni un fidèle de l'Église, mais il se distingue par des comportements et des convictions qui vont à l'encontre des valeurs chrétiennes que prônent les évangéliques. Divorcé, accusé de harcèlement sexuel et de violences envers les femmes, il se vante même de ses exploits dans ce domaine, ce qui semble le rendre encore plus impopulaire parmi les chrétiens traditionnels. Cependant, malgré ces contradictions flagrantes, les évangéliques blancs continuent de lui accorder leur soutien, non seulement sur le plan électoral, mais aussi au travers de leur approbation de ses politiques, tant intérieures qu'internationales.

Cette relation semble pourtant s'expliquer par la capacité de Trump à séduire une certaine partie de l'électorat évangélique en mettant en avant des politiques qui répondent à leurs attentes et priorités. Son choix de Mike Pence comme vice-président a sans doute joué un rôle décisif dans cette dynamique, en affichant une loyauté claire à la communauté évangélique. De plus, la présence de pasteurs évangéliques blancs à sa cérémonie d'investiture, avec quatre des six pasteurs présents, témoigne de l'importance accordée à cette communauté par l’administration Trump. En retour, de nombreux leaders évangéliques soutiennent sans réserve ses politiques, y compris la construction du mur à la frontière avec le Mexique, qu'ils comparent parfois à la fortification mentionnée dans la Bible. Certains ont même défendu les comportements sexistes de Trump en invoquant une interprétation de la nature humaine selon laquelle « nous sommes tous pécheurs ».

Le soutien des évangéliques blancs à Trump n’est pas seulement symbolique. Il repose sur des engagements politiques concrets. Par exemple, une majorité d'entre eux soutient sans ambages la politique américaine en Israël, notamment le transfert de l'ambassade des États-Unis à Jérusalem et la reconnaissance de la souveraineté israélienne sur les hauteurs du Golan. Ce soutien inébranlable à Israël semble être l'une des pierres angulaires de l’alliance entre Trump et les évangéliques, dont l'adhésion à ses idées a été renforcée par la manière dont il a abordé les questions du Moyen-Orient.

Cette alliance ne se limite pas aux frontières des États-Unis. Le soutien de Trump à Israël, tout comme son soutien à Netanyahu, semble aussi avoir des implications électorales internationales. Lors des élections israéliennes de 2019, la reconnaissance par Trump de la souveraineté israélienne sur les hauteurs du Golan a été perçue comme un geste stratégique visant à soutenir le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu dans un moment de crise, marqué par des accusations de corruption. Cette décision a non seulement bénéficié à Netanyahu sur la scène politique israélienne, mais elle a aussi contribué à marquer un tournant dans les relations américano-israéliennes, soulignant la convergence d’intérêts entre les dirigeants des deux nations.

Le soutien indéfectible de Trump à Israël contraste profondément avec les relations tendues entre le Premier ministre israélien et les présidents démocrates précédents, Bill Clinton et Barack Obama. La position de Trump a été perçue comme un soutien sans condition à la droite israélienne et à Netanyahu, au point où il a même affirmé qu'il gagnerait à coup sûr 98 % des voix s'il était candidat aux élections israéliennes. Ce soutien s'inscrit dans une dynamique politique plus large, où les républicains tentent de rallier les électeurs juifs américains en exacerbant les tensions avec les démocrates, en particulier à travers des attaques contre des figures comme Ilhan Omar, qu'ils accusent d'antisémitisme en raison de ses critiques envers Israël. Ce genre de discours a pour objectif de créer ce qu’on appelle la "Jexodus", ou l'exode des électeurs juifs du camp démocrate vers le camp républicain.

L'impact de cette stratégie sur la politique intérieure américaine est notable. Alors que les républicains continuent de défendre la souveraineté israélienne, notamment en ce qui concerne les hauteurs du Golan, la majorité des démocrates, bien qu'ils restent attachés à Israël, commencent à s'opposer de plus en plus aux actions de Netanyahu et à la politique israélienne en général. Les positions divergentes entre républicains et démocrates sur cette question ont été de plus en plus marquées au cours des deux dernières décennies, illustrant une polarisation croissante sur le sujet.

Le soutien des républicains à Israël, en particulier dans le contexte de la décision de Trump sur le Golan, marque un tournant historique dans la politique étrangère des États-Unis au Moyen-Orient. Contrairement à ses prédécesseurs républicains, Trump a clairement affirmé que les hauteurs du Golan étaient désormais sous souveraineté israélienne, une position qui ne s'était pas manifestée au sein du gouvernement américain depuis la période de Ronald Reagan. En effet, la politique américaine vis-à-vis du Golan a été marquée par une lente évolution, culminant avec cette décision sans précédent de Trump.

Les implications de ce soutien à Israël, et particulièrement à Netanyahu, vont bien au-delà de la simple politique étrangère. Elles révèlent une dynamique plus profonde entre la droite américaine et les intérêts israéliens, où la politique intérieure, les alliances électorales et les discours religieux se croisent de manière complexe, créant ainsi un environnement où des choix géopolitiques et électoraux sont façonnés par des enjeux de pouvoir et de soutien idéologique.

L'impact de la reconnaissance de la souveraineté israélienne sur les hauteurs du Golan : Conséquences et répercussions géopolitiques

La décision de Donald Trump de reconnaître la souveraineté israélienne sur les hauteurs du Golan, une région syrienne occupée par Israël depuis plus de trois décennies, a provoqué une onde de choc sur la scène internationale. Cette déclaration n’est pas seulement une démarche politique, mais aussi une manœuvre géopolitique qui redéfinit les équilibres au Moyen-Orient et réévalue la notion même de souveraineté dans les relations internationales. En soutenant cette décision, Trump et ses alliés républicains soulignent que la reconnaissance de cette souveraineté vise à renforcer la sécurité d’Israël, en particulier contre les menaces potentielles venues d'Iran et de ses alliés, comme le Hezbollah. Les hauteurs du Golan sont désormais perçues comme un mur défensif contre les roquettes du Hezbollah, les drones armés iraniens et des tunnels frontaliers récemment découverts.

Cependant, cette décision suscite une vive controverse, particulièrement parmi les démocrates, qui la considèrent davantage comme une manœuvre politique interne qu'une avancée stratégique réelle pour la paix au Moyen-Orient. De nombreux démocrates, tout en reconnaissant la nécessité de sécuriser la région pour Israël, estiment que le timing de cette reconnaissance était motivé par des considérations électorales plutôt que par des préoccupations de sécurité nationales. Les critiques se concentrent sur l’aspect unilatéral de cette décision, et certains groupes libéraux, comme le Jewish Democratic Council of America (JDCA), rejettent la légitimité de cette démarche, affirmant qu'elle favorise les intérêts politiques internes de Trump au détriment des principes de droit international.

Les répercussions de cette reconnaissance sur la politique intérieure américaine sont également significatives. L’un des objectifs implicites de Trump et de ses alliés républicains semble être de convaincre les électeurs juifs américains que le camp démocrate est à la fois "anti-israélien" et "antisémite". Ce discours, qui se développe au sein de l’administration Trump, s’inscrit dans un contexte de tensions croissantes entre les républicains et les démocrates sur la question israélo-palestinienne. Alors que certains démocrates comme Steny Hoyer continuent de soutenir Israël sur le principe de sa souveraineté sur le Golan, d’autres, à l’instar de Tulsi Gabbard, accusent Trump de privilégier des intérêts politiques personnels au détriment de la sécurité à long terme des États-Unis et de leurs alliés.

Sur la scène internationale, la décision de Trump a été largement rejetée. L'Union européenne, à travers des pays comme la France et l'Allemagne, a réaffirmé son attachement à la légalité internationale, en particulier les résolutions 497 et 242 du Conseil de sécurité de l'ONU, qui interdisent la reconnaissance de toute souveraineté israélienne sur des territoires occupés. L’argumentation selon laquelle la souveraineté se confond avec le pouvoir soulève des inquiétudes majeures sur les principes de l'autodétermination des peuples et la protection des droits des citoyens. Cette logique pourrait potentiellement ouvrir la voie à la reconnaissance de l'annexion d'autres territoires, comme l'annexion de la Crimée par la Russie, sans tenir compte du consentement des populations locales.

Un autre aspect essentiel de la décision de Trump est la question de la population syrienne indigène vivant sur les hauteurs du Golan. Ces habitants, qui sont en grande majorité des Syriens, n'ont jamais été consultés sur la question de leur gouvernance. La politique israélienne à leur égard reste discriminatoire, et une minorité d'entre eux seulement détient la citoyenneté israélienne. En dépit de l’absence de consultation, Israël continue de renforcer son contrôle sur la région par des moyens militaires et des implantations de colonies, ce qui légitime, selon Trump, une souveraineté israélienne sur ces territoires.

Il est crucial de comprendre que cette reconnaissance de la souveraineté israélienne par Trump n'est pas un simple acte diplomatique ; elle représente une redéfinition de la géopolitique du Moyen-Orient, une démarche qui met en lumière la fragilité des principes internationaux face à la realpolitik. La décision pose la question de la validité du droit international lorsque la puissance militaire et les intérêts politiques priment sur les droits des peuples à disposer d'eux-mêmes. En outre, cette manœuvre renforce une tendance inquiétante où les décisions unilatérales d'une grande puissance, comme les États-Unis, pourraient miner les fondements du système international basé sur la souveraineté et l'autodétermination.

La communauté internationale, et en particulier l'Union européenne, se trouve à un carrefour. Les divergences d'approche sur la question des hauteurs du Golan pourraient exacerber les tensions au sein des alliances traditionnelles, notamment entre les États-Unis et leurs partenaires européens. Si l'UE persiste à défendre le droit international et la légalité des résolutions de l'ONU, les relations avec les États-Unis pourraient se tendre davantage, mettant à l'épreuve les liens transatlantiques qui ont jusque-là été le pilier de la politique étrangère mondiale.