Les rétractations d'articles scientifiques peuvent sembler comme des incidents mineurs dans le domaine de la recherche, mais elles revêtent une gravité particulière lorsqu'elles concernent des données falsifiées, des manipulations des résultats, des méthodes non éthiques ou des conflits d'intérêts. Ces rétractations ne sont pas seulement le signe d'un échec scientifique, mais elles ont des répercussions profondes et durables sur la pratique médicale, parfois au détriment de la vie humaine.
Dans les domaines médicaux et biomédicaux, les articles rétractés qui contiennent des données erronées, voire fabriquées, doivent être examinés avec la plus grande rigueur, car leurs conséquences peuvent être désastreuses, affectant des milliers de patients et influençant les pratiques cliniques pendant des années. Un article de G. Steen (2011) illustre bien l'ampleur de cette problématique : en examinant plus de 180 articles rétractés et 851 secondaires citant ces travaux, il a révélé que les articles rétractés pour fraude traitaient généralement plus de patients que ceux rétractés pour erreurs simples. Plus alarmant encore, ces articles rétractés avaient été cités plus de 5 000 fois, affectant ainsi les travaux ultérieurs et les choix thérapeutiques.
Un des exemples les plus célèbres de rétraction dans la littérature médicale est l'article de 1998 de Dr. Andrew Wakefield, publié dans The Lancet, qui suggérait un lien entre le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR) et l'autisme. Cet article, rétracté en 2010 suite à des erreurs méthodologiques et des conflits d'intérêts financiers, a pourtant continué d’alimenter des croyances erronées sur les dangers des vaccins. Les groupes anti-vaccination, toujours influencés par cette publication, ont contribué à l’augmentation des cas de maladies évitables, comme la rougeole, montrant que l'impact d’un article rétracté peut perdurer bien après sa suppression officielle.
Les exemples de fraude en recherche biomédicale ne se limitent pas à Wakefield. Le Dr. Drasee, chercheur en cardiologie à l’Université de Harvard, est un autre cas tristement célèbre : il a fabriqué une grande partie de ses résultats de recherche sur les maladies cardiaques, avec plus de 100 publications rétractées. De même, le Dr. Straus, chercheur en cancérologie, a été accusé de falsification des résultats de recherche, de mauvaise gestion des dosages médicamenteux et de non-respect des règles de consentement.
Il est important de noter que les rétractations dans les domaines médicaux et biomédicaux ne sont pas rares, bien que la plupart ne mettent pas directement en danger la vie des patients. Cependant, même après leur rétraction officielle, les articles continuent parfois à être cités dans la littérature scientifique et à influencer de nouvelles recherches. Cela peut poser un danger pour la santé publique à long terme, car des méthodes et traitements incorrects sont encore utilisés.
L'impact de ces rétractations va bien au-delà de la communauté scientifique. L'influence des réseaux sociaux dans le partage et la discussion des recherches a récemment amplifié cet effet. Aujourd'hui, les scientifiques utilisent activement des plateformes comme Twitter et Instagram pour promouvoir leurs travaux, mais cela inclut aussi les articles rétractés. Une étude sur la "Retraction Watch Database" (2019) a mis en lumière la façon dont les articles rétractés continuent de circuler sur ces plateformes, souvent sans que leurs lecteurs soient conscients de leur rétraction. En effet, bien que les articles rétractés soient parfois marqués comme tels, il n'est pas rare qu'ils soient encore partagés et lus en raison de leur accessibilité en libre accès ou via des prépublications, qui ne mentionnent pas leur rétractation.
Dans cette ère numérique, la capacité à suivre l'impact de ces articles devient encore plus cruciale. Les citations scientifiques, qui devraient en principe se limiter aux publications validées, continuent d’apparaître bien après la rétraction. Parfois, ces citations sont négatives, servant à illustrer de mauvaises pratiques scientifiques, mais dans d’autres cas, elles sont citées positivement, sans tenir compte de leur statut de rétractation, ce qui alimente la diffusion de mauvais conseils et de traitements inefficaces. En outre, les données sur les mentions sociales et l'attention publique, collectées via les réseaux sociaux et autres plateformes de partage, révèlent que l'impact public de ces publications continue de croître, même après leur rétractation officielle.
Dans ce contexte, il est essentiel que la communauté scientifique prenne conscience non seulement des dangers immédiats de la rétraction d'articles, mais aussi de l'importance d'une communication claire et efficace sur le statut des publications après leur retrait. Une rétractation ne doit pas seulement être signalée dans les journaux scientifiques, mais aussi dans les espaces publics, afin d'éviter la propagation de fausses informations et de garantir que les erreurs passées ne compromettent pas la sécurité et la santé des patients dans le futur.
Comment les besoins individuels en matière de structure influencent-ils les attributions du "fake news" ?
Les attributions concernant la diffusion du "fake news" (fausses informations) peuvent être interprétées de diverses manières, selon la perception de l'ordre et du contrôle personnel des individus face à leur réalité sociale. Lorsqu'une personne attribue les phénomènes de "fake news" à des erreurs involontaires et à des fautes d'incompétence, elle place la cause dans un monde perçu comme étant aléatoire et chaotique, où des erreurs imprévisibles et incontrôlables se produisent fréquemment. Cependant, l'attribution de ces phénomènes à une tromperie intentionnelle, de la part de journalistes ou d'autres acteurs, révèle une vision plus ordonnée, où les actions sont considérées comme délibérées et compréhensibles. Cette vision implique un monde où des agents connus agissent de manière coordonnée, avec des objectifs partagés, pour nuire à des cibles répétées.
Le recours à l'attribution du "fake news" comme produit d'une tromperie intentionnelle permet à ceux qui cherchent à discréditer une source d'information qu'ils jugent opposée à leurs opinions de maintenir une conception du monde ordonnée. Ce phénomène s'inscrit dans un modèle psychologique plus large où des menaces à la perception de contrôle personnel poussent les individus à privilégier des explications structurées du monde, même si ces explications impliquent l'existence de forces malveillantes qui conspirent contre leurs intérêts. Ce processus est apparent dans diverses études, où des menaces à ce contrôle personnel, telles que l'exposition à des risques environnementaux (comme le changement climatique), ont conduit à une attribution accrue de comportements malveillants de la part de grandes entreprises, ou encore, une vision des opposants politiques comme engagés dans des comportements non éthiques délibérés (comme la suppression de votes).
Les individus, confrontés à une perte de contrôle personnel, semblent en effet rechercher une vision du monde plus prévisible, même si cette vision implique des forces extérieures opposées à leurs désirs. Ce mécanisme s'explique en partie par le besoin psychologique de structure, un besoin profondément ancré dans certains individus, qui influence leur manière d'interpréter le monde. En ce sens, des événements négatifs, comme des informations politiques déplaisantes, sont souvent perçus non pas comme des aléas imprévisibles, mais comme des actions délibérées de forces malveillantes.
Le "fake news" est donc souvent perçu comme le fruit d'une tromperie intentionnelle, une idée largement répandue dans des enquêtes récentes. Aux États-Unis, une majorité de personnes, que ce soit des Démocrates, des Indépendants ou des Républicains, croit que les médias traditionnels rapportent des informations qu'ils savent être fausses ou délibérément trompeuses. Cette perception fait écho à un modèle psychologique où les individus, cherchant à comprendre des informations qui les dérangent, attribuent ces informations à des intentions malveillantes plutôt qu'à des erreurs humaines ou des imprévus.
Une dimension importante de ce phénomène réside dans la relation entre les besoins individuels de structure (PNS - Personal Need for Structure) et les attributions faites au "fake news". Les recherches sur le PNS ont révélé que les individus avec un fort besoin de structure tendent à voir le monde comme plus ordonné et prévisible, et donc, lorsqu'ils sont confrontés à des événements incertains ou contradictoires, ils ressentent le besoin de restaurer cette structure en attribuant des causes intentionnelles aux événements. Ce besoin ne se limite pas à un style cognitif ou une préférence personnelle, mais s'avère être un phénomène motivé, où la recherche de structure devient une manière de donner un sens au monde. Ainsi, les personnes ayant un besoin élevé de structure réagissent de manière plus marquée aux menaces qui perturbent cet ordre et cherchent à résoudre cette menace en attribuant les événements à des actions délibérées plutôt qu'à des facteurs aléatoires.
Les recherches sur le PNS suggèrent également que les individus à forte demande de structure sont plus enclins à attribuer le "fake news" à des stratégies de manipulation intentionnelles de la part des médias, plutôt qu'à des erreurs honnêtes. Par exemple, lorsqu'une personne avec un haut PNS rencontre un événement menaçant l'ordre, comme la complexité ou l'incohérence d'une information, elle tend à renforcer sa perception de l'existence de forces malveillantes agissant en toute connaissance de cause. Ainsi, le besoin de structure devient un levier psychologique puissant, conduisant les individus à interpréter certains événements négatifs comme étant le résultat de conspirations, plutôt que de simples erreurs.
Le PNS est donc un facteur clé pour comprendre pourquoi certaines personnes sont plus susceptibles de croire que des informations erronées sont diffusées intentionnellement. Les individus qui ressentent un besoin fort de structure dans leur perception du monde sont plus enclins à attribuer des intentions malveillantes à des événements complexes et contradictoires, et à rechercher des explications claires et délibérées plutôt que de tolérer l'incertitude ou l'aléatoire.
Comment les biais cognitifs influencent la perception des informations et des événements politiques
Les biais cognitifs jouent un rôle déterminant dans la manière dont les individus perçoivent les informations, en particulier lorsqu'il s'agit de traiter des événements politiques ou de phénomènes de désinformation. Ces biais sont des erreurs systématiques de jugement qui affectent notre perception de la réalité, de la vérité et des faits. L’un des biais les plus pertinents dans ce contexte est celui de la confirmation, où les individus ont tendance à rechercher, interpréter et se souvenir des informations d'une manière qui confirme leurs croyances préexistantes. Ce phénomène est particulièrement observable dans le cadre de l’adhésion à des théories du complot, où les individus interprètent souvent les événements à travers le prisme de leurs convictions, souvent sans tenir compte des contre-arguments ou des preuves objectives.
La manière dont les biais cognitifs façonnent les perceptions politiques est encore plus complexe dans le cadre des médias sociaux, où des algorithmes de personnalisation alimentent ces effets. Ces algorithmes, conçus pour maximiser l’engagement des utilisateurs, favorisent la diffusion d’informations qui confirment les croyances des individus, renforçant ainsi leurs biais de confirmation. Les recherches ont montré que l’exposition répétée à des informations similaires, même fausses ou déformées, peut mener à une « vérité perçue » dans l’esprit des individus, une perception qui finit par dominer même face à des faits contradictoires.
Un autre phénomène lié à cette dynamique est le besoin personnel de structure. Il a été démontré que les individus qui ont un besoin plus élevé de structure cognitive sont plus susceptibles de se sentir menacés par l’incertitude et, par conséquent, plus enclins à adhérer à des idées simplistes ou des théories du complot. Cela se traduit par une tendance à attribuer les événements à des forces extérieures, comme des ennemis politiques ou des groupes conspirateurs, afin de restaurer un sentiment de contrôle. Paradoxalement, ces attributions d'ennemis extérieurs permettent aux individus de se protéger contre l'anxiété existentielle en créant des récits qui donnent un sens à un monde perçu comme chaotique.
Il est aussi important de souligner le rôle des émotions dans la manière dont les informations sont perçues et traitées. Les recherches en psychologie sociale ont montré que les émotions, notamment la peur et la colère, jouent un rôle central dans la manière dont nous réagissons face à des informations menaçantes. L'activation émotionnelle crée une forme de rigidité cognitive, où les individus deviennent plus résistants aux nouvelles informations, en particulier celles qui vont à l’encontre de leurs croyances. Cela peut être observé dans le contexte des élections politiques, où des discours émotionnellement chargés sont souvent utilisés pour polariser les électeurs et renforcer des divisions idéologiques.
De plus, la façon dont les informations sont présentées — et surtout la manière dont elles sont médiatisées — a une influence considérable sur la perception publique. Par exemple, la couverture médiatique biaisée, qu’elle soit volontaire ou non, peut amplifier des sentiments d'hostilité envers certains groupes, en particulier lorsqu'il s'agit de traiter des sujets polarisants comme les élections ou des questions de société. Ce phénomène, connu sous le nom de « phénomène des médias hostiles », se produit lorsque les individus perçoivent les médias comme biaisés en fonction de leurs croyances politiques, renforçant ainsi la division et la méfiance entre différents segments de la société.
La reconnaissance de ces biais et de leurs impacts est essentielle pour comprendre la propagation de la désinformation et la manipulation des opinions publiques. Les individus doivent être conscients de leur propre vulnérabilité aux biais cognitifs, en particulier dans le contexte des élections ou des débats publics où l’information est souvent fragmentée, incomplète ou manipulée.
En outre, il est crucial de ne pas sous-estimer la capacité des émotions à altérer la rationalité des décisions politiques. Lorsque la peur ou l'incertitude est exploitée par des acteurs politiques ou des groupes d’intérêt, la capacité des individus à juger objectivement les faits est considérablement affaiblie. Cela renforce l'idée que l'éducation à la pensée critique et à la détection des biais cognitifs est fondamentale dans la société moderne, où l'accès à l'information est devenu à la fois un avantage et une source potentielle de manipulation.
En définitive, la compréhension des biais cognitifs et des dynamiques émotionnelles qui influencent la perception des informations devrait être au cœur des stratégies éducatives et des campagnes de sensibilisation à la désinformation. Se préparer à une consommation d'informations plus réfléchie et consciente, et à une analyse plus critique des sources d'information, est un impératif pour préserver une démocratie informée et fonctionnelle.

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