L'approche de Donald Trump et de ses partisans semble s'opposer de manière flagrante aux critiques plus larges des méta-récits et des interprétations présentées comme une vérité objective, telles qu'elles apparaissent dans certains courants de la pensée philosophique contemporaine. Un aspect potentiel de cette opposition réside dans l'idée selon laquelle la critique des interprétations morales en tant que vérités objectives pourrait offrir un soutien, par exemple, à l'argumentation de Trump, qui met en avant des équivalences morales entre différentes interprétations. Un cas célèbre serait la déclaration de Trump sur les événements de Charlottesville, où il affirmait que les deux camps, les suprémacistes blancs et les contre-manifestants, étaient responsables de la violence qui a éclaté. Cela pourrait être perçu comme moralement justifiable, tout comme toute autre interprétation des faits. Bien que ce raisonnement puisse paraître séduisant à première vue, il convient d’examiner de plus près la manière dont les théoriciens postmodernistes abordent les questions de vérité.

Les penseurs postmodernistes, tout en reconnaissant l'existence d'une vérité objective, soulignent que les institutions et pratiques se réclamant de la vérité scientifique sont souvent plus intéressées par le pouvoir que par la vérité elle-même. Le philosophe Michel Foucault, par exemple, explique que la vérité peut être instrumentalisée pour renforcer des mécanismes de pouvoir. Selon Garry Gutting, professeur de philosophie à Notre-Dame, Trump incarne une forme extrême de ce que le postmodernisme s'efforce de déconstruire. En effet, son discours politique semble éloigné de l'engagement rationnel avec la vérité, cherchant davantage à manipuler la perception du public et à étendre des récits hégémoniques que de participer à un véritable échange sur la moralité.

Il est possible d'avancer que Trump, en relativisant la moralité des différents groupes, cherche à maintenir des arrangements politiques injustes, sans se soucier véritablement du discours moral. Ce type de discours s'éloigne des principes du postmodernisme, qui cherche à déconstruire les récits dominants tout en restant engagé dans la réalité empirique du présent. À la différence de Trump, qui utilise la vérité comme un simple instrument de pouvoir, les postmodernistes, tout comme Foucault, insistent sur l’importance de maintenir un engagement avec la réalité et de réfléchir à des formes alternatives d'interprétation pour envisager un futur plus juste.

Foucault lui-même, dans son analyse du concept de "parrhesia", l'éloquence de la vérité, met en garde contre les dangers de ceux qui, tout en se réclamant de la vérité, ne cherchent en réalité qu'à préserver leur pouvoir. Cela rappelle l’approche de Trump, qui utilise des "faits alternatifs" pour réécrire l'histoire et imposer une vision du passé à des fins politiques. Contrairement à l’objectif de Foucault, qui envisage la fiction comme un moyen de réinterpréter le présent et d’imaginer de nouvelles possibilités pour l’avenir, Trump et ses partisans font l’inverse en créant des fictions sur le présent pour restaurer un passé idéalisé, marqué par des codes raciaux et nationalistes.

Simpson, en s'appuyant sur Foucault, distingue bien les fonctions de la vérité et de la fiction. La vérité, selon lui, a des effets sur le présent, tandis que la fiction peut influencer l’avenir. Mais cette fiction n’est pas simplement une invention du présent ; elle est une réinterprétation qui reste fidèle à la réalité actuelle tout en projetant des effets futurs. Cette vision est diamétralement opposée à la politique de Trump, qui crée une fiction du présent afin de se tourner vers un passé imaginaire plutôt que de chercher à imaginer un avenir plus équitable.

Dans cette analyse, il est important de souligner la distinction fondamentale entre les paradigmes postmodernistes et la politique du "post-vérité" telle que pratiquée par Trump. Si le postmodernisme propose une déconstruction des récits dominants et ouvre la voie à des imaginaires politiques nouveaux, Trump, en revanche, crée des récits qui étouffent cette potentialité de transformation, en exploitant la vérité pour maintenir des structures de pouvoir oppressives.

Les chercheurs et les observateurs politiques doivent bien comprendre cette distinction afin de ne pas confondre les intentions et les effets des deux courants. La critique de Trump en tant qu'incarnation de la post-vérité ne doit pas être assimilée à une critique du postmodernisme en tant que tel. L’un cherche à manipuler la vérité pour servir des intérêts politiques immédiats, tandis que l'autre cherche à ouvrir de nouveaux espaces de réflexion pour imaginer un futur plus juste, tout en restant ancré dans les réalités du présent. Il est donc crucial de ne pas perdre de vue l'objectif fondamental de la pensée postmoderne, qui consiste à transformer les rapports de pouvoir par une réinterprétation créative de ce que nous considérons comme vrai.

Comment Twitter modifie notre compréhension de la vérité et du discours public ?

La télévision, en tant que média de communication, véhicule une métaphore qui oriente la perception du monde des spectateurs. Elle les détourne de l'argumentation textuelle et les attire dans un univers où l'image prime sur le contenu. Cette transformation du discours trouve un exemple frappant dans le débat présidentiel de 1960 entre Richard Nixon et John F. Kennedy. Nixon, malgré ses idées politiques solides, a subi une défaite significative non pas en raison de ses propositions, mais à cause de son apparence à la télévision, où sa sueur visible a été perçue négativement. En revanche, Kennedy, en grande partie grâce à son apparence soignée et à son charisme, a marqué des points décisifs. Cet exemple montre comment l'image peut prendre le pas sur le fond du discours, et comment, même aujourd'hui, lors des débats politiques télévisés, l'impact visuel reste un élément crucial du succès.

Une des leçons majeures de la télévision, selon Postman, est que la transmission de l'information est une expérience passive et réceptive, où l’audience se trouve dans l'incapacité de remettre en question, de dialoguer ou d’offrir des perspectives alternatives. Le spectateur est simplement informé de ce qu'il doit croire. Ce format ne permet pas d’approfondir la réflexion sur les contextes complexes qui sous-tendent les événements. La télévision, par son manque de temps et de profondeur, offre une vision fragmentée, souvent coupée par les interruptions des publicités, ce qui empêche toute véritable analyse.

Paradoxalement, la télévision est également un média « désincarné ». L'animateur ou le présentateur de l’émission, bien qu’il soit physiquement présent à l'écran, reste séparé du spectateur, non seulement spatialement mais aussi temporellement. Ce manque de présence réelle accentue la déconnexion entre le message et le récepteur. Enfin, l'un des effets les plus insidieux de la télévision est de banaliser des sujets sérieux, en les transformant en simple divertissement, en les comparant aux feuilletons ou aux événements sportifs. Cette confusion entre ce qui relève du savoir, de la vérité et du divertissement crée un brouillard épistémologique qui rend difficile la distinction entre ce qui est fondé et ce qui relève de la fiction.

En transférant cette analyse à Twitter, Postman nous invite à réfléchir à la manière dont ce réseau social transforme encore davantage notre perception de la vérité et du discours public. Contrairement à la télévision, Twitter repose sur le texte plutôt que sur l'image, mais il adopte une structure qui présente des dangers similaires. Avec une limite de 280 caractères par tweet, Twitter oblige les discours politiques et publics à se réduire à des morceaux de phrases fragmentés, souvent impulsifs et peu nuancés. Dans ce contexte, il devient presque impossible de développer une réflexion en profondeur ou de s'engager dans un véritable dialogue. L’espace restreint conduit à des tirades, souvent chargées d’émotions, où les attaques ad hominem prennent le pas sur l’analyse rationnelle.

L’argumentation sur Twitter est donc monologique, plutôt que dialogique. Il n’y a ni véritable échange ni réflexion collective. Le tweet, en tant que format, ne permet pas la réflexion continue, car il est figé dans le temps et l’espace, ne laissant place à aucune évolution de la pensée. Postman souligne que le texte, contrairement à l’image, permet une discussion qui peut se poursuivre, mais sur Twitter, la nature du texte limité empêche toute forme d’analyse soutenue. Ce manque de profondeur et de réflexion conduit à une forme de brouillard épistémologique, qui rend difficile la compréhension des enjeux politiques ou sociaux.

Les préoccupations épistémologiques liées à Twitter sont également exacerbées par la déconnexion entre l'émetteur du message et le récepteur. Sur Twitter, l’absence de face-à-face facilite les attaques personnelles, les insultes, et l'agression verbale, qui ne sont pas de l'ordre du « discours » au sens où on l'entend traditionnellement. Lorsque les individus ne sont pas physiquement présents pour leurs interlocuteurs, la distance permet de relâcher les inhibitions et d'abandonner toute forme de respect mutuel. Même lorsqu’une réponse est apportée à un tweet, celle-ci est elle aussi limitée par les mêmes contraintes de caractère, rendant le dialogue superficiel et réactif, plutôt que réfléchi et constructif.

Cela nous amène à un autre aspect crucial de Twitter : sa vocation à transformer la vérité en un produit consumable. Dans cet espace où l’immédiateté est reine, la recherche de la vérité cède souvent la place à des postures de divertissement, où les enjeux politiques et sociaux sont réduits à de simples spectacles. Les politiques publiques, si elles sont influencées par de telles dynamiques, risquent de perdre leur caractère fondé sur l'analyse et la rationalité. La tendance à réduire les débats politiques à des séries de tweets émotionnels et incendiaires rend la création de politiques publiques réfléchies et fondées sur la vérité quasiment impossible.

En outre, il convient de prendre en compte l'impact des algorithmes dans cette dynamique. Ces derniers ont la capacité de favoriser la propagation de messages polarisants, en amplifiant les contenus qui suscitent des réactions fortes. Ainsi, Twitter ne se contente pas de faciliter la diffusion de discours dénués de profondeur, mais crée également un environnement où ces discours se multiplient et se renforcent. Les algorithmes, en favorisant certains types de contenus, contribuent à accentuer la confusion entre divertissement et information, rendant la distinction entre vérité et manipulation encore plus floue.

Il est donc crucial de réfléchir à ce que nous attendons du discours public et à la manière dont les outils numériques modifient la perception de la vérité. Si les réseaux sociaux comme Twitter semblent offrir un espace de liberté d’expression, ils posent également des défis majeurs pour la compréhension du monde. Le temps est venu de questionner ces formats et de comprendre que la quête de la vérité nécessite un retour à une forme de discours plus réfléchi et plus dialogique, loin des limitations imposées par les technologies actuelles.

Quel rôle joue l'anxiété économique dans la montée du populisme de droite ?

L'idée selon laquelle l'anxiété économique des électeurs a contribué à l'élection de Donald Trump est une notion qui mérite d'être examinée de près. À première vue, elle semble plausible : un système économique profondément inégalitaire, accompagné de l'érosion des classes ouvrières et des pertes d'emplois, pourrait justifier un mécontentement qui se transforme en vote pour des forces populistes. Pourtant, un examen plus approfondi révèle que cette explication est insuffisante et parfois même erronée pour comprendre les dynamiques politiques récentes.

Les libéraux, qui ont longtemps soutenu un discours post-racial, tentent de résoudre cette contradiction en insistant sur l'idée qu'il existe une lutte contre les inégalités économiques, mais celle-ci se heurte souvent à une incapacité à aborder les questions raciales et historiques de manière systématique. Le concept d'« antiracisme sans race », comme l’a souligné Ta-Nehisi Coates (2017), est une caractéristique marquante des politiques de gauche actuelles, y compris celles de Bernie Sanders. Coates note que peu de politiciens libéraux ont pris en compte la nature spécifique et systémique de la relation entre les Afro-Américains et leur pays, qui exige des solutions politiques particulières.

Les tentatives des libéraux de concilier une critique du capitalisme avec un désir de ne pas aborder frontalement les questions raciales et nationalistes apparaissent de plus en plus fragiles. Lorsque l’on observe l’émergence de discours ouvertement racistes, xénophobes et fascistes, particulièrement chez les partisans de Trump, il devient de plus en plus difficile de tout attribuer à des facteurs économiques seuls. Pourtant, ceux qui défendent Trump et sa politique nient fréquemment tout lien avec le racisme, ce qui montre un déni profond et contradictoire de la réalité.

Le premier événement qui remet en question la thèse de l’anxiété économique est la marche de Charlottesville en 2017, où des fascistes et suprémacistes blancs ont défilé en portant des torches, chantant des slogans comme « sang et sol » et « nous ne serons pas remplacés ». Ces slogans racistes et nationalistes n’ont rien à voir avec une protestation contre des conditions économiques ; ils visent directement à défendre une vision réactionnaire et raciste de l’Amérique. Pourtant, la réaction de Trump fut de créer une fausse équivalence, refusant de condamner explicitement les groupes fascistes responsables de la violence. Cette démonstration de racisme pur, couplée à la défense de valeurs fascistes, contredit l’idée selon laquelle l’anxiété économique serait la principale cause du soutien à Trump.

Un autre événement important qui défie cette thèse est la campagne de Roy Moore en 2017. Malgré les accusations de violences sexuelles portées contre lui et son passé de juge ultraconservateur, Moore a bénéficié du soutien inébranlable de l’électorat républicain. L’idéologie de son discours, fortement teintée de théocratisme et de valeurs conservatrices, ne mentionnait que très peu de questions économiques. Ce cas montre que l’attachement à des valeurs réactionnaires et conservatrices joue un rôle fondamental dans le soutien aux figures populistes de droite, bien au-delà des simples préoccupations économiques.

La question de l’anxiété économique comme explication du soutien à Trump et au populisme de droite ne tient pas face à une analyse plus poussée des facteurs sociétaux et culturels qui alimentent la montée de ces mouvements. Il est impératif de comprendre que cette forme de populisme autoritaire n’est pas simplement une réaction contre l’inégalité économique ; elle est aussi le reflet d’un projet de restauration d’un passé idéalisé, hostile aux femmes, aux minorités et à une large part des travailleurs blancs eux-mêmes.

Il devient crucial de rejeter l’idée selon laquelle le populisme de droite pourrait être compris uniquement à travers le prisme de l’anxiété économique. Les récents développements, tels que l’augmentation du soutien à Trump malgré les contradictions apparentes, suggèrent que les facteurs culturels et raciaux jouent un rôle fondamental. En outre, l’argument selon lequel seules certaines formes de travail « authentiques » comptent, comme le travail manuel ou l’industrie minière, exclut une grande partie de la classe ouvrière contemporaine, notamment dans les secteurs publics ou de services.

Dans cette optique, les tentatives de certains membres de la gauche pour établir une forme de dialogue ou d’alliance avec les mouvements d’extrême droite, souvent sous prétexte de partager des préoccupations économiques communes, sont non seulement problématiques mais vouées à l’échec. La solution à cette crise politique ne réside pas dans une convergence des idéologies mais dans une opposition claire et ouverte à la montée du fascisme, tout en soutenant ceux qui sont directement affectés par les politiques de droite, en particulier les travailleurs et les minorités. Il est également essentiel de déconstruire les mythes autour du travail « authentique » et de la classe ouvrière, qui sont souvent manipulés par la droite pour servir leur projet de division et d’exclusion.

La montée du populisme autoritaire de droite est avant tout un projet de restauration d’un ordre social figé, qui nie les progrès accomplis en matière de droits civiques et de justice sociale. Ce projet repose sur une vision profondément réactionnaire qui se nourrit de la peur de l'autre et de la nostalgie d'un passé qui n'a jamais été aussi idéalisé qu’aujourd'hui.

Pourquoi la tendance à la baisse du taux de profit est-elle inévitable dans le capitalisme?

Le capitalisme, en tant que système économique dominant, entraîne une dynamique où l'innovation technologique, loin de répondre à des impératifs humanitaires, devient avant tout un moyen d'augmenter la compétitivité entre capitalistes. Cette logique de profit maximal pousse à une accélération constante des processus de production. La rationalisation par l'innovation technologique, visant à remplacer la force de travail humaine par des machines, entraîne inévitablement une baisse du taux de profit. Autrement dit, malgré l’augmentation de la productivité grâce à la technologie, le rapport entre le profit généré et l’investissement nécessaire pour y parvenir se détériore. Ce phénomène, bien que caractéristique du capitalisme depuis les premières révolutions industrielles, prend une ampleur sans précédent avec la quatrième révolution industrielle.

Le développement des technologies, tel qu’il se manifeste dans l’ère actuelle (l’Industrie 4.0), repose sur la substitution progressive de la main-d'œuvre par des machines. Ces machines, ou « travail mort », produites par l’exploitation de la force de travail passée, prennent une place de plus en plus centrale dans le processus de production. Paradoxalement, ce processus conduit à une réduction du profit. Comme le souligne Samir Hinks, l'augmentation des investissements dans de nouvelles machines engendre une diminution du temps de travail nécessaire pour produire une marchandise, ce qui fait chuter le taux de profit global. Ce phénomène explique pourquoi les cycles économiques se réduisent : les périodes de prospérité deviennent de plus en plus courtes, tandis que les récessions s’intensifient et se prolongent.

L’accélération technologique engendrée par le capitalisme dans sa phase avancée est, en réalité, un cercle vicieux. Alors que les premières entreprises à adopter des technologies avancées réalisent des profits substantiels en abaissant les prix de leurs produits, cette situation finit par être copiée par les concurrents. Or, lorsque la production se fait avec de moins en moins de travailleurs, la valeur ajoutée par la force de travail diminue, et donc la rentabilité générale s’effondre plus rapidement qu’auparavant. Cette dynamique, déjà observée lors des révolutions industrielles précédentes, prend ici un rythme inédit.

Un des résultats de ce processus est une surproduction systématique. Le capitalisme, en cherchant toujours à produire plus à moindre coût, crée des biens qui ne trouvent plus preneurs. Les machines qui produisent ces biens ne consomment pas les produits qu’elles génèrent, et les travailleurs qui sont remplacés par ces machines n’ont plus les moyens d'acheter ces produits. Cette contradiction interne du système conduit à une chute des prix et à un effondrement des marges bénéficiaires. Craven, dans son analyse, met en lumière cette réalité en citant l’exemple d’un robot cuisinier qui, bien qu’efficace, ne pourra jamais consommer un Big Mac, ni un autre produit qu’il aurait lui-même fabriqué.

Ainsi, cette dynamique engendre non seulement une précarisation accrue des travailleurs, mais aussi une mise en danger des fondements mêmes du marché. Les déséquilibres économiques que le capitalisme génère, notamment en poussant les classes populaires dans une situation de paupérisation, ont des répercussions profondes sur l’ensemble de la société.

Au-delà de l’analyse économique du capitalisme, il existe une urgence politique et écologique face à cette évolution. Friedrich Engels, déjà, pointait l'absurdité d'un système qui produit des richesses pour une petite classe tout en maintenant une majorité dans une pauvreté extrême. Une telle situation est devenue encore plus absurde dans le contexte actuel, où les inégalités ne cessent de se creuser. Pourtant, comme l’affirme Craven, les solutions proposées par les capitalistes, même au XXIe siècle, se limitent à des appels à l'unité des classes pour résoudre un problème qu’ils ont eux-mêmes créé. Ce projet d'unité n’est en réalité qu’une tentative de sauver un système qui profite aux uns au détriment des autres.

La véritable solution, pour Marx et Engels, reste l'abolition du capitalisme et l'instauration d’une société socialiste où les richesses seraient collectivisées et utilisées dans l’intérêt de la société dans son ensemble. Si cette idée est restée pertinente tout au long des révolutions industrielles, la question du capitalisme du XXIe siècle, particulièrement dans le cadre de l'Industrie 4.0, reste d’actualité.

Cependant, il ne suffit pas de penser uniquement à une transformation sociale qui abolirait le capitalisme. Dans le monde actuel, cette transformation doit impérativement inclure une réflexion écologique. L’idée d’un « écosocialisme », comme alternative au capitalisme vertueux sur le papier mais destructeur dans ses effets, doit devenir un point central du discours socialiste. La crise écologique, exacerbée par l’exploitation capitaliste des ressources naturelles et la pollution générée par l’industrie, impose une remise en question radicale des modes de production et de consommation. L’ère industrielle 4.0, avec ses nouvelles technologies, doit impérativement se conjuguer avec des solutions écologiques afin d'éviter l'effondrement de notre planète.

Pour que l’avenir puisse échapper à cette logique de profit absurde, l'écosocialisme doit se concentrer sur plusieurs axes : la redistribution des richesses de manière équitable, la démocratisation de l’économie afin qu’elle soit contrôlée par les travailleurs et les communautés, et la production de biens non plus pour le profit mais pour répondre aux besoins sociaux réels. En outre, un écosocialisme moderne doit garantir des droits égaux pour tous, quel que soit leur sexe, origine ethnique ou orientation sexuelle, et mettre fin à toute forme de discrimination. La défense de l’environnement, à travers l’abandon des pratiques destructrices comme le fracking et l'extraction des ressources, doit être une priorité. Les solutions proposées par les peuples autochtones pour préserver la nature et protéger les ressources vitales (l'eau, l'air, la terre) doivent devenir des principes directeurs d’une nouvelle société.

Ainsi, il ne s'agit pas seulement de lutter contre un système économique inégalitaire, mais aussi de redéfinir la relation de l'humanité avec la nature, pour une société véritablement juste et durable.