Les matériaux semi-conducteurs bidimensionnels (2D SCMs) se distinguent par leurs propriétés physico-chimiques uniques, notamment une surface spécifique élevée, une réactivité de surface exceptionnelle et des caractéristiques électroniques remarquables. Ces attributs confèrent à ces nanomatériaux un avantage incontestable dans le développement de capteurs ultra-sensibles et sélectifs. Leur dimension nanoscopique facilite en outre des temps de réponse rapides et une stabilité remarquable, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives pour l’amélioration des performances et la conception de dispositifs de détection innovants.

Dans le domaine des capteurs électrochimiques, les matériaux 2D SCMs jouent un rôle fondamental. Ces capteurs, dont l’histoire remonte au XIXe siècle avec les travaux de Faraday sur l’électrochimie, ont connu une évolution considérable grâce à la convergence des avancées en électronique et en science des matériaux. Leur principe repose sur la conversion d’informations chimiques, issues des réactions entre l’analyte et la surface sensible, en signaux électriques quantifiables. On distingue principalement les capteurs de potentiel, de courant et de conductivité, ce dernier étant toutefois limité par sa faible sélectivité.

Les capteurs à ions sélectifs, notamment, exploitent des membranes spécifiques permettant l’échange d’ions avec la solution environnante, générant ainsi des potentiels de jonction liquides essentiels à leur fonctionnement. Les MXènes, une classe émergente de matériaux 2D, présentent une structure atomique stratifiée et un rapport surface/volume élevé, ce qui augmente considérablement la capacité de double couche et facilite le transfert ion-électron. Par exemple, des électrodes à base de Ti3C2Tx ont démontré des réponses de type Nernst pour la détection du calcium avec une sensibilité remarquable et des temps de réponse inférieurs à dix secondes.

Par ailleurs, les capteurs de courant, qui utilisent un système à trois électrodes, mesurent directement le courant lié à la concentration de substances redox. Ces capteurs offrent une grande précision et sécurité dans la quantification de divers analytes, dont les ions et petites biomolécules. Parmi eux, le capteur de pH à base de matériaux 2D comme MoS2 tire parti des phénomènes de protonation et déprotonation des groupes hydroxyles à la surface du diélectrique, ce qui modifie la charge de surface en fonction de l’acidité du milieu. Ces interactions permettent une détection du pH avec une sensibilité et une précision élevées. Les capteurs à base de Ti3C2Tx se sont également illustrés dans des applications portables, assurant une surveillance non invasive du pH de la sueur, crucial pour le suivi physiologique.

L’attention des chercheurs s’est également portée sur la détection d’anions et d’ions métalliques lourds, en particulier pour le suivi des polluants et la sécurité environnementale. L’analyse précise du nitrite, substance toxique aux multiples effets sur la santé, illustre l’importance de ces développements dans des contextes variés, allant de l’industrie à la santé publique.

La compréhension des interactions chimiques à l’échelle nanométrique et l’ingénierie des surfaces des matériaux 2D sont déterminantes pour optimiser la sélectivité, la sensibilité et la durabilité des capteurs. Il est également essentiel de maîtriser les mécanismes électrochimiques sous-jacents pour adapter ces technologies à des applications spécifiques, qu’il s’agisse de diagnostic médical, de surveillance environnementale ou de contrôle industriel. La compatibilité avec des dispositifs portables, la faible consommation énergétique et le faible coût de fabrication renforcent par ailleurs l’attractivité de ces capteurs pour une utilisation large et diversifiée.

Au-delà des avancées techniques présentées, la fiabilité à long terme, la reproductibilité des résultats et l’intégration dans des systèmes complexes restent des défis majeurs. La compréhension approfondie des phénomènes de surface, des interactions ioniques et des propriétés électroniques à l’échelle atomique permettra d’ouvrir la voie à des capteurs 2D de nouvelle génération, capables de répondre aux exigences croissantes en matière de performance et de miniaturisation.

Quels sont les enjeux et les avancées des matériaux semi-conducteurs 2D dans les dispositifs électroniques ?

Les matériaux semi-conducteurs bidimensionnels (2D SCM) représentent une révolution dans le domaine de l’électronique moderne, offrant des propriétés uniques qui ouvrent la voie à des dispositifs aux performances jusqu’ici inaccessibles avec les matériaux traditionnels. Parmi ces matériaux, le tungstène diséléniure (WSe₂), le tungstène disulfure (WS₂), le molybdène ditellurure (MoTe₂), le molybdène diséléniure (MoSe₂) et le diséléniure de rhénium (ReSe₂) sont fréquemment utilisés grâce à leurs propriétés ambipolaires remarquables, c’est-à-dire leur capacité à conduire des charges de types positif et négatif. La caractéristique fondamentale de ces semi-conducteurs 2D est la présence de bandes interdites, tant indirectes que directes, qui varient en fonction de l’épaisseur et de la structure cristalline. Cette variabilité est essentielle pour ajuster la réponse électronique et optique des dispositifs, comme le montre le tableau récapitulatif des bandgaps (1L, 2L, etc.) comparés aux matériaux en masse (3D).

La substitution du graphène pour les contacts métalliques ou les couches interconnectrices s’appuie sur son absence de bandgap et sa grande durée de relaxation du moment, permettant une conduction quasi-idéale. En parallèle, le nitrure de bore hexagonal (h-BN), en tant que matériau isolant doté d’une large bande interdite supérieure à 5 eV, d’une faible constante diélectrique et d’une conductivité thermique élevée, se positionne comme un excellent diélectrique dans les couches de passivation et dans les interfaces des dispositifs 2D. Son rôle est crucial pour optimiser les performances électroniques tout en limitant les pertes thermiques.

Les progrès dans la fabrication de circuits intégrés à base de semi-conducteurs 2D se manifestent par la réalisation de transistors NMOS et PMOS, de jonctions métal–semi-conducteur ou semi-conducteur–semi-conducteur (notamment dans les hétérostructures Van der Waals), ainsi que d’inverseurs logiques. Néanmoins, la conception de microprocesseurs complets reste un défi, avec peu d’exemples à ce jour. Par exemple, un microprocesseur composé de 115 transistors à base de MoS₂ monocouche a été développé, démontrant la viabilité de circuits logiques complexes fabriqués par dépôt chimique en phase vapeur (CVD) sur des wafers de silicium. L’intégration de réseaux NMOS en mode enhancement avec des interconnexions Ti/Au et des oxydes de porte en Al₂O₃ témoigne de la maîtrise croissante des procédés de fabrication.

Les caractéristiques des transistors à effet de champ (FET) réalisés avec ces matériaux montrent des mobilités variables, des courants de saturation élevés, et des rapports de commutation (on/off) pouvant atteindre plusieurs ordres de grandeur, parfois supérieurs à 10⁶. Ces performances sont obtenues grâce à des innovations telles que l’utilisation de nanotubes de carbone pour électrodes de grille, des interfaces tampons comme Y₂O₃ pour réduire les défauts à l’interface, ou encore l’encapsulation par AlOx pour stabiliser les contacts. La diversité des architectures, allant du transistor latéral classique aux structures verticales avec empilement de couches ultra-minces, illustre la richesse des approches technologiques.

La compatibilité de ces matériaux avec des technologies CMOS classiques est explorée notamment par la croissance directe simultanée de semi-conducteurs p- et n-types sur un même substrat, autorisant la fabrication d’inverseurs complémentaires à haute performance, avec des gains en tension pouvant dépasser 100. De plus, l’incorporation de dispositifs non volatiles, tels que des mémristors ionotronics à base de WS₂, ouvre des perspectives pour des mémoires programmables à haute densité et faible consommation, fonctionnant avec des cycles de rétention et d’endurance prometteurs.

Il est essentiel de comprendre que les performances des dispositifs 2D ne dépendent pas uniquement des propriétés intrinsèques des matériaux, mais aussi de la maîtrise des interfaces, de la qualité des contacts métalliques, et de la gestion des défauts. La fabrication à l’échelle industrielle pose des défis liés à la reproductibilité, à la pureté des couches, et à la gestion thermique, aspects encore en cours d’optimisation. Par ailleurs, les propriétés quantiques et les effets de confinement dans ces structures atomiquement fines exigent une approche multidisciplinaire combinant physique des semi-conducteurs, chimie des surfaces et ingénierie des matériaux.

L’utilisation stratégique des diélectriques comme le h-BN est fondamentale pour la stabilité et la fiabilité des dispositifs, ainsi que pour limiter les interférences électriques parasites. En parallèle, la variabilité des bandgaps selon le nombre de couches et le type de matériau permet d’adapter la conception des dispositifs aux applications spécifiques, que ce soit en électronique numérique, en optoélectronique ou en capteurs.

Le futur des semi-conducteurs 2D réside dans l’intégration de multiples fonctions sur une même plateforme, la miniaturisation poussée des composants, ainsi que l’exploration de nouveaux phénomènes physiques induits par la dimension atomique, qui pourraient révolutionner les architectures électroniques et leur efficience énergétique.