Le tri parallèle sur GPU repose sur des algorithmes spécifiques adaptés à l’architecture massive parallèle des processeurs graphiques. L’un des algorithmes les plus illustratifs dans ce domaine est le tri bitonique, qui se distingue par sa structure rigoureusement déterministe et ses étapes de comparaison simples. Ce tri s’organise en une double boucle imbriquée, où les paramètres j et k définissent successivement les sous-séquences à trier et leur taille. La répétition des appels au noyau GPU (kernel) assure l’avancement progressif vers un tableau complètement trié. L’intérêt majeur de ce tri bitonique est sa nature prévisible, permettant une parallélisation efficace sur le GPU. En pratique, lorsqu’il est implémenté via PyCUDA, le tri bitonique sur des tableaux de taille puissance de deux démontre une accélération significative par rapport au tri séquentiel CPU, particulièrement pour des données de taille moyenne à grande.

Cependant, ce tri comparatif n’est pas toujours le plus performant, notamment pour des tableaux d’entiers volumineux. Le tri par base (radix sort) exploite une approche radicalement différente, fondée sur le traitement binaire des données. Au lieu de comparer des éléments, il classe les entiers en fonction des groupes de bits, itérant sur chaque groupe pour redistribuer les éléments. Sur GPU, cette méthode est extraordinairement efficace, car elle découle en passes parallèles déterministes, où chaque étape se concentre sur un critère simple et uniforme, maximisant ainsi l’utilisation des milliers de threads disponibles. CuPy, une bibliothèque Python dédiée au calcul GPU, implémente ce tri radix de façon transparente, optimisant considérablement la vitesse sur des tableaux très volumineux. Les comparaisons de performances montrent clairement que pour les grands ensembles de données entières, le tri radix devance largement le tri bitonique.

Par ailleurs, l’exploitation du parallélisme sur GPU ne se limite pas au tri mais s’étend à d’autres opérations fondamentales telles que la recherche linéaire. La recherche linéaire parallèle consiste à confier à chaque thread la vérification d’un élément distinct du tableau, avec l’avantage que la détection d’une correspondance peut interrompre l’ensemble des threads. Ce modèle s’avère particulièrement pertinent pour des jeux de données massifs où la position de l’élément recherché est inconnue. Contrairement à la recherche binaire, adaptée aux tableaux triés, cette méthode sur GPU excelle dans les contextes d’ensembles non triés ou pour le traitement simultané de multiples requêtes.

Pour garantir l’exactitude des résultats dans ces environnements parallèles, des mécanismes comme les opérations atomiques assurent la cohérence lors de l’écriture concurrente des indices détectés, évitant ainsi les conflits entre threads. Cette rigueur algorithmique est essentielle pour que les résultats des calculs GPU soient fiables et comparables à ceux obtenus par des méthodes classiques CPU.

Il est important de noter que le choix de l’algorithme de tri ou de recherche sur GPU doit être guidé par la nature des données et les contraintes spécifiques de la tâche. Par exemple, le tri bitonique est particulièrement adapté aux données flottantes et à des structures régulières, tandis que le tri radix est plus indiqué pour des entiers volumineux. La structure même des données, la taille, et le contexte d’utilisation (ex. pipeline de calcul GPU) conditionnent la meilleure stratégie.

En complément de la maîtrise technique des algorithmes, une compréhension approfondie de l’architecture GPU — notamment le nombre de threads, la taille des blocs, la gestion de la mémoire partagée et globale — est cruciale. Le dimensionnement optimal des grilles de threads impacte directement la performance. De plus, la synchronisation des threads, le contrôle des conditions de concurrence, et la minimisation des accès mémoire coûteux sont des aspects à intégrer pour maximiser l’efficacité.

Enfin, pour tirer pleinement parti du GPU, il convient de considérer l’intégration de ces opérations dans des flux plus larges de traitement, où le transfert de données entre CPU et GPU est minimisé. L’exécution continue de traitements sur GPU, sans retour fréquent au CPU, permet d’exploiter au mieux la bande passante mémoire et la puissance de calcul parallèle.

Pourquoi les GPU surpassent-ils les CPU pour le calcul parallèle massif ?

Les processeurs centraux (CPU) et les unités de traitement graphique (GPU) incarnent deux approches fondamentalement différentes dans le traitement des instructions. Les CPU, optimisés pour un traitement séquentiel, excellent dans les routines à thread unique ou les boucles où chaque opération dépend de la précédente. Leur architecture repose sur quelques cœurs puissants, chacun doté d’unités de contrôle sophistiquées et de larges caches à faible latence. Cela confère une grande efficacité dans l’exécution d’instructions complexes et variées, mais limite la scalabilité lors du traitement de masses considérables de données indépendantes.

À l’inverse, les GPU adoptent une stratégie radicalement différente : ils intègrent des milliers de cœurs légers et simples, conçus pour fonctionner en parallèle sur des blocs de données volumineux en appliquant une même instruction simultanément, concept connu sous le nom de SIMD (Single Instruction, Multiple Data). Cette architecture permet un traitement simultané massif, ce qui est idéal pour les opérations répétitives sur des ensembles de données immenses, comme la manipulation d’images ou la multiplication de matrices géantes.

L’augmentation du nombre de cœurs CPU se heurte à plusieurs obstacles. D’une part, la complexité et la consommation énergétique croissante, dues aux unités de contrôle sophistiquées et aux caches nécessaires, rendent l’ajout de cœurs coûteux et inefficace au-delà d’un certain seuil. D’autre part, la loi d’Amdahl impose une limite fondamentale : la vitesse d’un programme parallèle est contrainte par sa portion la plus séquentielle, ce qui freine la progression linéaire des performances malgré le parallélisme accru. Par exemple, en Python, les limitations imposées par le Global Interpreter Lock (GIL) et les verrous globaux réduisent drastiquement les gains de multithreading, engendrant une surcharge liée à la synchronisation et au transfert des données entre threads.

Dans des situations impliquant des milliards d’opérations indépendantes, telles que la transformation de chaque pixel d’une image 4000×4000, le CPU est rapidement dépassé. Même avec plusieurs dizaines de cœurs, le partage du travail entre threads génère des coûts en gestion et synchronisation, ralentissant considérablement le traitement. Le GPU, quant à lui, assigne un thread par pixel, permettant un traitement véritablement parallèle et simultané qui réduit drastiquement les temps de calcul.

Cette architecture n’est pas limitée au rendu graphique. Elle s’avère précieuse pour toute application manipulant de vastes volumes de données suivant un paradigme « même opération sur beaucoup de données ». Cela inclut la simulation scientifique, l’inférence des réseaux neuronaux, les simulations statistiques, ou l’analyse de données à grande échelle

Comment optimiser l’utilisation des threads et des blocs CUDA pour exploiter pleinement l’architecture des GPU

Lorsque l’on développe des programmes CUDA, il devient rapidement évident que certaines configurations d’exécution s’avèrent nettement plus performantes que d’autres, selon la façon dont elles s’adaptent à l’architecture des Streaming Multiprocessors (SM) de notre GPU. Il est possible, par exemple, d’interroger le matériel via Python avec des bibliothèques comme CuPy ou PyCUDA pour obtenir des attributs du device tels que le nombre de SMs ou le nombre maximal de threads par SM. Cela permet d’ajuster la configuration de lancement des kernels afin de coller au « sweet spot » matériel, c’est-à-dire la configuration optimale où le GPU est le mieux utilisé.

Le principal enjeu consiste à trouver le juste équilibre : si le nombre de threads par bloc est trop faible, le GPU ne sera pas pleinement exploité ; à l’inverse, si ce nombre est trop élevé, les ressources internes comme les registres ou la mémoire partagée peuvent être saturées, ce qui entraîne une diminution de l’occupation effective des SMs et donc une dégradation des performances. En affinant ces réglages au travers de microbenchmarks, plusieurs principes fondamentaux apparaissent clairement. D’une part, il faut maximiser le nombre de threads par SM sans dépasser les ressources disponibles. D’autre part, il est crucial de lancer suffisamment de blocs pour que chaque SM soit constamment occupé, ce qui devient particulièrement important sur les GPU plus grands disposant de nombreux SMs. Enfin, l’organisation des accès mémoire a un rôle primordial : la coalescence mémoire, c’est-à-dire faire en sorte que les threads d’un warp accèdent à des adresses mémoire contiguës, améliore fortement le débit des transferts.

Ces règles appliquées même à des kernels élémentaires tels que l’addition vectorielle ou le calcul d’histogrammes peuvent produire des accélérations de plusieurs ordres de grandeur par rapport à une implémentation naïve. Comprendre les notions de SM, warp, occupation et ordonnancement permet d’aborder l’écriture de kernels CUDA non plus comme de simples programmes mais comme des orchestrations minutieuses réglées sur le fonctionnement interne du hardware. Chaque kernel devient alors une occasion d’observer en temps réel les conséquences de ses choix d’optimisation.

Dans CUDA, le travail parallèle est organisé selon une hiérarchie à deux niveaux : les grids (grilles) et les blocks (blocs). À chaque lancement de kernel, il faut spécifier combien de blocks sont exécutés, ainsi que le nombre de threads par block. Chaque thread exécute le même code mais traite une partie différente des données. Cette organisation peut être comparée à une feuille de calcul immense, divisée en régions traitées par des équipes (blocks), elles-mêmes composées de travailleurs (threads) affectés à chaque cellule. Grâce à cette hiérarchie, CUDA peut gérer des datasets volumineux en 1D, 2D, voire 3D, en attribuant à chaque élément de données un thread unique.

Le calcul de l’index global d’un thread dans un kernel 1D s’effectue classiquement par la formule blockIdx.x * blockDim.x + threadIdx.x, permettant d’identifier de manière unique chaque thread dans la grille. Il est indispensable d’ajouter des contrôles de bornes dans le kernel pour éviter que des threads en surnombre ne traitent des indices hors des limites des tableaux. Cette méthode peut être étendue pour traiter des données en 2D, où chaque thread calcule ses indices ligne et colonne selon les dimensions des blocks et grids, et de même pour des données 3D comme des images volumétriques ou des grilles de simulation. La clé est toujours de mapper la position logique des données sur les indices des threads CUDA, de vérifier les limites et de s’assurer que chaque thread travaille dans la zone valide.

Ce schéma d’organisation s’accompagne d’une interaction précise entre l’hôte (CPU) et le device (GPU). Les étapes cruciales incluent l’allocation mémoire sur le GPU, la copie des données entre la mémoire hôte et la mémoire device, le lancement du kernel, puis la récupération des résultats. La maîtrise de ces interactions, notamment avec CuPy, est indispensable pour développer des programmes performants. Cette compréhension du cycle complet — préparation des données, calcul parallèle, synchronisation, transfert — permet de concevoir des applications CUDA robustes et efficaces.

Par ailleurs, il est important de noter que la performance ne dépend pas uniquement de la configuration des threads et des blocs, mais aussi de la manière dont la mémoire est gérée. La hiérarchie des mémoires GPU — registre, mémoire partagée, mémoire globale — impose des contraintes et offre des opportunités d’optimisation. Par exemple, minimiser les accès à la mémoire globale et privilégier la mémoire partagée locale au bloc permet de réduire la latence. De même, la gestion fine des conflits de banque dans la mémoire partagée est un autre levier d’amélioration souvent sous-estimé.

Au-delà des aspects purement techniques liés aux configurations de lancement, il est essentiel pour le lecteur de comprendre que chaque kernel est une unité d’optimisation, un microcosme où s’entrelacent contraintes matérielles et logiques applicatives. Expérimenter avec les paramètres de lancement, observer les performances, et ajuster en fonction des retours, constitue une démarche itérative qui forge l’expertise du développeur GPU. Ce processus rapproche la programmation CUDA d’un art subtil où le code devient un dialogue avec la machine, un accord entre l’algorithme et la structure physique du GPU.