L'administration Trump a fait face à un dilemme sans précédent dans l’histoire moderne, celui de devoir équilibrer la vie humaine avec les impératifs économiques dans un contexte de pandémie mondiale. Cette situation, qui a vu l’État minimiser l’importance des décès pour maintenir la priorité donnée à la santé économique, a fait émerger une forme particulière de manipulation de la réalité sociale. En manipulant les données sur la mortalité et en séparant les vies humaines des objectifs économiques, l'administration a mené une stratégie de communication complexe qui a tenté de réécrire la valeur de la vie humaine en la traitant comme une variable négociable dans un calcul politique.

Tout d’abord, la manière dont l’administration a pris position sur la question des rassemblements sociaux sans protection a révélé un cynisme institutionnalisé. En dépit des évidences scientifiques et des avertissements des experts en santé publique, les rassemblements ont continué à être permis, que ce soit pour les affaires, les loisirs ou la religion, sans lien direct avec la propagation du virus. Cette séparation artificielle entre les morts et les vivants, opérée par une stratégie de communication fondée sur la minimisation des décès, a permis de maintenir une illusion de contrôle sur l'économie tout en occultant la réalité de l'ampleur de la crise sanitaire.

La manipulation des chiffres de la mortalité, tout en restant très en deçà des prévisions apocalyptiques de 2,2 millions de morts, a permis à Trump de se présenter comme celui ayant "sauvé" des vies, en enjoignant à la nation d’oublier la réalité du nombre de victimes. Dès le printemps 2020, il se vantait d’avoir évité des millions de morts en imposant des mesures qui se sont finalement révélées insuffisantes, mais qui ont surtout contribué à protéger les intérêts économiques et, en particulier, les marchés boursiers. Dans une démarche très calculée, il a continuellement joué avec les chiffres de la mortalité pour défendre une image de succès économique, comme si les pertes humaines ne constituaient qu'un dommage collatéral nécessaire à la survie du système capitaliste.

Au fur et à mesure que la situation se détériorait, la prise en compte de la science, des données sanitaires et des recommandations des experts a été écartée au profit d’une vision plus "libertaire" de la gestion de la pandémie, incarnée par le conseiller Scott Atlas. Celui-ci a suggéré de laisser circuler le virus pour atteindre une "immunité de groupe", une stratégie qui, bien que dangereuse et inefficace à long terme, a été embrassée comme une manière de maintenir la normalité économique. Ce virage vers la non-mitigation des risques, malgré l'augmentation rapide du nombre de décès, a permis à l’administration de maintenir la priorité à l’économie tout en évitant la responsabilité d’une gestion sanitaire désastreuse.

Le vrai cœur de la stratégie résidait dans cette séparation qu’elle a opérée entre les deux grands domaines de la vie publique : la vie humaine et la santé économique. La mort est devenue une simple donnée dans un calcul plus large qui cherchait à masquer l’échec de la gestion de la pandémie par la réussite d’un modèle économique centré sur les intérêts financiers. Cela va au-delà d'une simple manipulation des chiffres ; c’est une réécriture de la valeur de la vie humaine, où les pertes individuelles sont reléguées au second plan face à la protection d’un statu quo économique. Le double discours qui a accompagné cette gestion de la crise, mettant en scène une relation causale entre la protection de l’économie et la limitation des décès, constitue une forme de corruption profonde, un détournement de l’essence même de ce que signifie être humain dans une société.

La politique de "traid-off" – l’idée que les vies humaines peuvent être sacrifiées au nom du bien économique – est un exemple de ce qu’on pourrait appeler une "corruption contre l’humanité". Ce n’est pas simplement une question de malversation financière ou de manœuvres illégales ; il s’agit d’un détournement de la signification même de la vie humaine dans le cadre de la gestion publique. Ce calcul cynique, qui a utilisé les souffrances humaines comme une monnaie d’échange pour des avantages économiques immédiats, soulève des questions profondes sur la nature de la responsabilité gouvernementale et sur les priorités sociétales à un moment de crise.

Ce phénomène ne se limite pas à la sphère politique ; il traverse aussi le domaine économique, où les enjeux de profits sont souvent mis en avant au détriment de la vie sociale et des valeurs humaines. L’administration a non seulement redéfini la valeur de la vie dans ses discours publics, mais elle a également légitimé une vision de l’économie où les vies humaines deviennent des variables secondaires. La construction de cette séparation entre la vie et l’économie, entre la mortalité et la prospérité, est le pivot autour duquel la politique de l’administration a été construite, notamment dans la défense d’un modèle économique qui se veut "immune" aux crises sanitaires.

Il est essentiel de comprendre que cette vision déshumanisée de la gestion de la pandémie repose sur une conception utilitariste de la vie humaine, où les individus sont perçus comme des éléments interchangeables au sein d’un système économique plus vaste. En réalité, la vie sociale, loin d’être une série de transactions économiques, doit être vue comme un ensemble de relations interpersonnelles et communautaires, intrinsèquement liées à la solidarité et au bien-être collectif. La pandémie a mis en lumière la fragilité de cette solidarité et a révélé à quel point les politiques publiques peuvent influencer la perception de ce qui est véritablement précieux dans une société.

Pourquoi Donald Trump est-il populaire parmi les Igbos du sud-est du Nigéria?

La popularité de Donald Trump parmi certains segments de la population nigériane, en particulier dans le sud-est du Nigéria, offre un exemple fascinant des dynamiques politiques et historiques complexes qui façonnent les perceptions de l'autorité et de la marginalisation. Bien que ses déclarations racistes, notamment celles sur le Nigéria qu'il a qualifié de "pays de merde", puissent sembler choquantes et offensantes pour beaucoup, elles trouvent un écho particulier auprès de la communauté Igbo. L'attrait de Trump ne réside pas uniquement dans sa politique xénophobe, mais aussi dans sa capacité à articuler un sentiment de victimisation et de revanche qui résonne avec les Igbos, une communauté marquée par des décennies d'injustices et de marginalisation.

L'une des raisons pour lesquelles les Igbos, malgré le racisme flagrant dont ils sont également victimes dans le discours de Trump, trouvent une certaine résonance dans ses propos est la structure "nous contre eux" de sa politique. En effet, Trump a utilisé une rhétorique qui divise clairement le monde en deux catégories: les "bons" (les Américains blancs, les travailleurs, les chrétiens) et les "mauvais" (les immigrés, les musulmans, les non-blancs). Pour les Igbos, ce même schéma de division leur semble familier et est perçu comme un miroir de leur propre lutte contre une élite dominante perçue, en particulier dans le contexte de la politique fédérale nigériane.

Le groupe ethnique Igbo, bien qu’il représente l'une des principales composantes démographiques du Nigéria, a toujours été confronté à une certaine marginalisation politique et sociale. Les Igbos ont une longue histoire de domination dans les affaires, le commerce et la fonction publique, notamment pendant l'ère coloniale, où ils ont occupé une position privilégiée en raison de leur précoce adoption du christianisme et de l'éducation occidentale. Cependant, cette position dominante a créé des tensions avec d'autres groupes ethniques, notamment les Hausas et les Yorubas, qui ont vu dans l'influence grandissante des Igbos une menace pour leurs propres intérêts.

Après l'indépendance du Nigéria en 1960, ces tensions ont éclaté en violence, culminant avec la guerre civile nigériane (1967-1970), lorsque les Igbos ont tenté de faire sécession sous le nom de Biafra. La défaite de Biafra a laissé des cicatrices profondes et un ressentiment durable parmi les Igbos. La promesse de réconciliation après la guerre a été trahie, et depuis lors, les Igbos estiment avoir été exclus des sphères de pouvoir politique et économique du Nigéria. Ils pointent du doigt l'absence d'un président ou d'un ministre Igbo dans les gouvernements successifs et le manque d'investissements fédéraux dans leur région, qui reste l'une des plus négligées en termes d'infrastructures et de services sociaux.

Dans ce contexte, le discours de Trump trouve un écho particulier auprès des Igbos, qui se sentent également exclus du pouvoir et laissés pour compte par le gouvernement nigérian. Bien que Trump ait fait des déclarations racistes et offensantes envers les Nigérians et d'autres groupes non blancs, son discours contre les musulmans, en particulier, résonne avec beaucoup d'Igbos, qui ont longtemps perçu les musulmans du nord du Nigéria comme responsables de leur marginalisation. Le discours de Trump, qui divise le monde en "nous" et "eux", trouve donc un terrain fertile dans un contexte nigérian où la division ethnique et religieuse reste un sujet sensible.

Pour beaucoup d'Igbos, l'adhésion à Trump n'est pas seulement une question de partage de valeurs racistes, mais aussi une forme de résistance contre un système qu'ils perçoivent comme oppressif. Trump incarne, aux yeux de certains Igbos, une sorte de revanche contre ceux qui les ont marginalisés, tant au Nigéria qu'au niveau international. Sa capacité à parler ouvertement de la "vérité", aussi brutale soit-elle, et à critiquer un système mondial qu'il considère corrompu et injuste, attire ceux qui se sentent ignorés ou maltraités par les autorités en place.

Enfin, au-delà des propos de Trump sur les nations africaines ou les communautés musulmanes, il est essentiel de comprendre que l'attrait pour sa politique ne découle pas seulement de ses discours provocateurs, mais aussi de son positionnement contre un ordre mondial perçu comme hostile. Pour les Igbos, comme pour une grande partie de l'électorat de Trump aux États-Unis, l'appel à une sorte de redressement national, au détriment des autres, résonne comme une promesse d'une nouvelle dynamique, où leurs intérêts et leurs préoccupations pourraient enfin être pris en compte.

Comment la lutte contre la corruption a façonné la mobilisation populiste au Brésil : Le cas de Lava Jato et Bolsonaro

Le mouvement Lava Jato, qui a pris une ampleur médiatique considérable au Brésil, a été marqué par une présentation idéologique d'une lutte « non partisane » contre la corruption. Les procureurs publics et le juge fédéral Sérgio Moro, figures emblématiques de cette opération, ont concentré leurs enquêtes principalement sur les années où le Parti des travailleurs (PT) était au pouvoir, en particulier sous la présidence de Lula da Silva entre 2003 et 2010. À partir de là, le phénomène Lava Jato a été façonné par une dynamique où la corruption était présentée comme la cause ultime de tous les maux du pays, entraînant une forte polarisation politique, notamment avec l'ascension du discours anti-PT.

L'hostilité croissante envers le PT, notamment sous le mandat de la présidente Dilma Rousseff, a mené à des manifestations de plus en plus intenses demandant son impeachment après sa réélection en 2014. Ce climat de mécontentement a abouti à l'impeachment de Rousseff en 2016, sur des accusations de mauvaise gestion administrative. Peu après, Lula a été emprisonné pour corruption, un acte qui a marqué un tournant dans le paysage politique brésilien et ouvert la voie à la candidature de Jair Bolsonaro. Ce dernier, tout en s’appuyant sur la vague anti-PT, a intégré à son propre discours les symboles et les narratifs de la lutte contre la corruption, notamment celui de l’impeachment.

La campagne présidentielle de Bolsonaro en 2018 a habilement surfé sur cette vague de rejet du PT et de la corruption. L'un des symboles les plus marquants de cette mobilisation a été la récupération du maillot jaune de l’équipe nationale de football brésilienne. Ce maillot, qui a été vu lors de manifestations pro-impeachment antérieures, est devenu un emblème de la lutte contre le système politique perçu comme corrompu. Une telle appropriation a permis de renforcer l’image de Bolsonaro en tant que figure messianique, porteur d'une « libération » du Brésil des forces parasitaires, notamment la gauche, responsables de la décadence du pays.

Il est pertinent de noter que cette mobilisation s'est intensifiée à travers les nouvelles dynamiques numériques. Après l'agression à coups de couteau subie par Bolsonaro lors d'une manifestation en septembre 2018, un phénomène inédit a eu lieu : la création d’un « corps numérique du roi », un concept emprunté à l’historien Ernst Kantorowicz. Les partisans de Bolsonaro ont pris d’assaut les plateformes numériques, devenant les « agents marketing de Jair », et ont inondé l’espace public numérique de memes, vidéos, et autres contenus viraux. Cette explosion numérique a rendu difficile la distinction entre le mouvement populaire et la campagne officielle de Bolsonaro, brouillant ainsi les frontières entre les deux.

L’agression de Bolsonaro a également permis de mettre en lumière le pouvoir symbolique du discours anticorruption. La violence physique subie par le candidat a été interprétée comme une agression non seulement contre la personne de Bolsonaro, mais aussi contre le Brésil tout entier, le pays étant perçu comme « poignardé » par la corruption incarnée par le PT. Cette convergence de la biographie individuelle de Bolsonaro, de l’histoire collective du pays et de l’agression physique s’est transformée en un acte politique extraordinaire. En effet, selon des chercheurs comme Coronil et Skurski, la violence a pour effet de repousser les limites de ce qui est permis et de rapprocher la biographie individuelle et l’histoire collective dans un moment d’éclat historique.

Dans ce contexte, la lutte contre la corruption a évolué pour devenir une guerre morale et existentielle. Le discours sur la corruption a été déplacé d’un registre « légal-comportemental » vers un registre « religieux-ontologique », où la corruption était perçue comme une souillure qui menaçait l'intégrité spirituelle du pays. Ce phénomène a donné lieu à des pratiques de mobilisation qui alliaient des éléments de messianisme, avec la promesse d'une rédemption nationale, et de guerre sainte, où l’ennemi, souvent symbolisé par la gauche et le communisme, était perçu comme un fléau à éradiquer. Le stéréotype du « communisme » a ainsi servi de catalyseur pour intensifier l'atmosphère de guerre totale, où chaque acte, chaque décision était une question de survie pour l'avenir du Brésil.

La campagne de Bolsonaro a ainsi su exploiter la polarisation engendrée par Lava Jato en s’emparant de la figure du martyr, avec des références constantes à un Brésil en danger. Des théories du complot se sont intensifiées sur les réseaux sociaux, notamment via WhatsApp et YouTube, où la perspective d’un Brésil sombrant dans un chaos économique et autoritaire similaire à celui du Venezuela a été constamment alimentée. Ce type de rhétorique a galvanisé de larges segments de la population, qui ont perçu l'élection comme une lutte décisive pour l’avenir du pays.

Dans ce jeu de polarisation extrême, la corruption devient une figure vide mais puissamment négative, une construction symbolique capable de mobiliser une opposition forte contre l'establishment, tout en faisant appel à une notion partagée de pureté morale et nationale. La manière dont cette notion a été instrumentalisée au sein du discours bolsonariste permet de mieux comprendre l’efficacité de sa mobilisation populiste, qui a mêlé des éléments d’antagonisme politique, de culture numérique et de récit national en une dynamique de mobilisation extrêmement efficace.

Comment le "dark participation" devient une forme de résistance politique sur 4chan à l'ère Trump

Le fil de discussion /ptg/ sur 4chan se distingue par un phénomène de "dark participation" (participation sombre), où les utilisateurs s'engagent activement dans des formes de discours politique controversées et perturbatrices. En structurant et en régulant les informations diffusées dans cet espace, les participants s’efforcent non seulement de maintenir une cohérence idéologique entre les messages, mais aussi de manifester leur mépris pour les idéologies opposées. L’affichage de cette tension idéologique est, en soi, une déclaration sur ce qui constitue la "compétence" politique dans cet espace. Une "boulangerie", terme utilisé pour décrire un rôle clé dans la gestion des fils de discussion, s'assure que le message reste cohérent, renforçant la culture de rejet des critiques et des opinions divergentes, tout en cultivant une dynamique de frustration active à l’égard des positions libérales.

Les participants à ces forums ont adopté une approche cynique et systématique pour perturber le discours dominant, qu’il soit politique ou social. Le concept de "meme-drenched politics", ou "politique imbibée de memes", va au-delà de l'humour : il devient une arme utilisée pour diffuser des idéologies nationalistes blanches et racistes sous le masque du divertissement. En partageant des mèmes ou des images virales, notamment des captures d'écran de tweets ou des infographies, les utilisateurs justifient les politiques de Trump ou tournent en dérision les opposants à sa vision du monde. Ces images, qu’elles fassent la promotion des idées conservatrices ou qu’elles ridiculisent les migrants, les libéraux ou tout groupe perçu comme une menace à l'ordre établi, servent de déclencheur pour des discussions enflammées et, parfois, violentes.

Le 25 juillet 2019, par exemple, un utilisateur de /ptg/ a partagé un tweet du Bureau International des Migrations (IOM), relatant un naufrage présumé de migrants dans la Méditerranée. Cette tragédie, qui aurait pu appeler à une réaction empathique, est accueillie avec une série de réponses sarcastiques, des moqueries déguisées sous forme de mèmes et de "greentexts" typiques de 4chan. L'attitude affichée n'est pas seulement de l'ironie, mais un moyen délibéré de minimiser une crise humanitaire et de souligner le dédain envers ceux qui s'indignent de telles situations. Ce comportement démontre l’adhésion à des attitudes racistes et nationalistes, souvent reproduites et renforcées par le discours de Trump et de ses partisans.

Ainsi, /ptg/ et d'autres forums similaires deviennent des espaces où des formes de participation politique violentes et destructrices se développent. Le "dark participation" ne se limite pas à la simple diffusion de discours haineux ou à des attaques ad hominem ; il constitue une forme de protestation alternative où la provocation devient l’essence même de l'engagement. Ce phénomène est la réponse directe à une perception d'une perte de pouvoir ou de droits, sentiment partagé par de nombreux utilisateurs de ces espaces. Par cette stratégie, ils se positionnent comme des défenseurs d'une vision politique menacée par l'establishment libéral et progressiste.

Dans ces espaces, l’humour et la dérision sont utilisés comme des outils de légitimation de points de vue extrêmes. En présentant des discours racistes et sexistes comme des "blagues" ou des "comédies", ces utilisateurs dissimulent sous le masque du divertissement des opinions qui, autrement, pourraient être perçues comme inacceptables ou condamnables. C’est une manière de normaliser des idéologies dangereuses, de les diffuser sous une forme acceptable et de les rendre plus accessibles à un public plus large. Le rôle de la "boulangerie", en particulier, est de maintenir la stabilité de cette dynamique en vérifiant que les "ingrédients" de chaque fil de discussion sont correctement dosés pour produire l’effet souhaité : une interaction qui ne laisse aucune place à la remise en question.

L’engagement numérique sur /ptg/ incarne également un contraste avec des formes de participation plus pacifiques, comme le "signal boosting", où les utilisateurs amplifient des messages qu’ils soutiennent sans chercher à inciter à la violence. Ce que l’on observe sur /ptg/ n’est pas un acte de soutien à une cause, mais un défi direct à ceux qui tentent de maintenir un débat civilisé et constructif. L’objectif ici est de perturber, d’attaquer et de s'assurer que les adversaires idéologiques sont contraints de répondre non pas avec des arguments rationnels, mais avec des attaques émotionnelles ou des actes de désespoir. Ce processus de radicalisation et de consolidation de l'identité collective de droite est facilité par l'absence d'anonymat et la non-modération propre à des plateformes comme 4chan, qui permettent de construire des communautés idéologiques fermées et résistantes aux attaques externes.

Le "Trollgeist", comme certains chercheurs l’ont appelé, décrit cette montée en puissance des trolls politiques qui envahissent les espaces en ligne. Ce phénomène est à la fois un mode de défense contre les critiques de Trump et une manifestation de la politique d'influence numérique qui se développe autour de l'anonymat, de l'impunité et de la violence virtuelle. Les "bakers" (boulanger·ère·s) jouent un rôle fondamental dans la préservation de cet environnement, en protégeant leur "contre-public" contre les perturbateurs et en renforçant l’idéologie de la résistance à la norme libérale.

Il est essentiel de comprendre que, contrairement aux formes de participation plus traditionnelles ou progressistes, ce type de participation ne cherche pas à reformer ou à améliorer la société par la voie légale ou démocratique. Il s’agit d’un combat pour des valeurs qui rejettent la pluralité et cherchent à imposer une vision unilatérale, fondée sur des principes d'exclusion et de domination. Les utilisateurs de /ptg/ n’ont pas pour objectif de convaincre, mais de radicaliser, de démoraliser et de détruire les arguments de leurs adversaires en les accablant sous un flot de haine numérique.