La compréhension du comportement des quanta de flux magnétique dans les supraconducteurs est essentielle pour saisir les principes physiques qui gouvernent les phénomènes de supraconductivité. Ce comportement peut être observé sous différentes formes, en particulier à travers l'effet de flux, qui relie la résistance de flux au mouvement des lignes de flux magnétique dans le matériau supraconducteur. Le phénomène de résistance de flux (ou flux-flow) est directement influencé par les forces de "pinning", c'est-à-dire par des centres qui ancrent les lignes de flux à des endroits spécifiques dans le matériau. Ces forces empêchent la libre circulation des lignes de flux sous l'effet de la force de Lorentz, et à un certain courant critique, elles génèrent une résistance qui augmente avec l'intensité du champ magnétique appliqué.

Dans le cas des supraconducteurs de type II, comme le niobium, ce phénomène est particulièrement significatif. Un exemple de ce phénomène peut être observé dans l'évolution de la tension de flux en fonction du courant électrique appliqué. Dans un échantillon de niobium de 18 μm d'épaisseur et de 4 mm de largeur à une température de 4,22 K, la tension de flux apparaît après un courant critique, puis augmente de manière linéaire. Cette courbe linéaire est dictée par la résistance de flux, qui elle-même est influencée par le champ magnétique appliqué.

La variation de la résistance spécifique de flux en fonction du champ magnétique est également un phénomène clé à comprendre. En effet, cette résistance augmente linéairement au début, mais devient plus raide à mesure que le champ magnétique approche de la valeur critique. Ce phénomène montre que l'effet des lignes de flux sur le supraconducteur devient plus marqué à mesure que le champ magnétique s'intensifie, atteignant éventuellement la résistance normale du matériau.

Ce phénomène de destruction de la supraconductivité par le mouvement des lignes de flux, et l'augmentation de la résistance associée, est exemplaire d'un principe général en physique : un petit changement local, comme le mouvement des lignes de flux ou d'autres défauts, peut engendrer des effets macroscopiques majeurs. Ce principe est aussi illustré par d'autres phénomènes physiques, tels que les dislocations dans un cristal, qui peuvent déformer un matériau à des valeurs de tension mécaniques très faibles.

L'étude du mouvement des quanta de flux est cruciale non seulement pour comprendre la supraconductivité, mais aussi pour expliquer des phénomènes dans des systèmes complexes comme les étoiles à neutrons, où des vortex locaux jouent un rôle dans la dynamique de ces astres. Ces étoiles, qui tournent à une fréquence supérieure à 1 cycle par seconde, connaissent une décélération progressive de leur rotation, suivie de sa reprise soudaine à une vitesse plus élevée, ce qui est expliqué par le mouvement de vortex locaux dans leur intérieur.

Une des applications majeures de la supraconductivité est liée à la capacité à "pinner" ces lignes de flux à des endroits précis à l'aide de centres de pinning artificiels. Cette technique permet de maintenir les lignes de flux immobiles jusqu'à ce qu'un courant électrique élevé soit appliqué, ce qui est crucial pour limiter les pertes électriques et optimiser l'efficacité des matériaux supraconducteurs. Ces avancées ont été particulièrement étudiées dans le but de développer des applications techniques de la supraconductivité, notamment dans les domaines de la microélectronique et de la métallurgie des matériaux supraconducteurs.

Parallèlement à ce phénomène de pinning, une autre cause de mouvement des quanta de flux est la diffusion thermique. Ce phénomène, qui se produit en réponse à un gradient de température, est décrit par l'équation de force simplifiée (8.39), où un flux thermique génère un déplacement des quanta de flux du côté chaud vers le côté froid du supraconducteur. Ce mouvement thermiquement induit des effets observables sous forme de courants électriques transversaux perpendiculaires au gradient thermique et au champ magnétique. Ce phénomène est connu sous le nom d'effet Nernst, et il s'apparente à d'autres effets thermomagnétiques comme l'effet Ettingshausen.

L'effet Nernst, observé en présence d'un gradient de température longitudinal et d'un champ magnétique transverse, génère une différence de potentiel perpendiculaire à la direction du flux thermique. Il est important de noter que ces effets thermomagnétiques sont intrinsèquement liés aux phénomènes de transport dans les conducteurs électriques. Ce type de comportement est directement connecté aux relations de réciprocité en thermodynamique irréversible, telles que les relations formulées par Lars Onsager, qui relient différents effets thermomagnétiques entre eux.

Enfin, dans le cadre des applications techniques, les effets de diffusion thermique des quanta de flux et leur interaction avec le mouvement des lignes de flux ont des implications importantes pour des dispositifs comme le SQUID (Superconducting Quantum Interference Device), qui utilise ces phénomènes pour mesurer des champs magnétiques avec une précision extrême. Ce dispositif est d'une grande utilité dans les domaines de la médecine, de la physique fondamentale et des technologies de détection de faible signal.

Le développement de ces technologies et la compréhension des phénomènes sous-jacents à la supraconductivité nécessitent une prise en compte détaillée des interactions entre les quanta de flux, les champs magnétiques, les gradients thermiques et la structure même des matériaux supraconducteurs. Le champ d'application de ces phénomènes est donc en pleine expansion, ouvrant la voie à de nombreuses innovations dans le domaine des technologies quantiques et de la microélectronique.

Les points quantiques : Comprendre les structures à quasi-zéro dimension et leurs applications

Les nanotubes de carbone ont présenté un exemple moléculaire hautement prometteur en tant que la plus petite version possible d'un fil quantique. Cependant, en allant plus loin dans l'étude des structures quantiques, nous nous intéressons maintenant à l'élimination de la dernière dimension spatiale restante de ces fils quantiques unidimensionnels. Nous abordons donc les points quantiques, ces objets dont la dimension spatiale est quasi nulle. La forme et la dimension de leur frontière extérieure sont les éléments déterminants du comportement physique des électrons au sein de ces points quantiques. Les processus de collision et de déflexion des électrons à l’intérieur de ces objets deviennent presque insignifiants. Tout comme dans un atome, la fonction d’onde quantique des électrons est largement déterminée par la taille spatiale du point quantique. Ces points sont alors appelés « atomes artificiels ». L'absence de bandes d'énergie, telles que celles présentes dans un cristal étendu, est un autre phénomène notable. À la place des bandes d'énergie continues, les électrons ne peuvent occuper que des niveaux d'énergie discrets, qui peuvent être calculés en fonction des dimensions géométriques du point quantique via l'équation de Schrödinger.

Il est possible, en un sens, d’imiter le tableau périodique des éléments par l'occupation de ces niveaux d’énergie discrets. Les électrons, comme des particules de Fermi, doivent respecter le principe de Pauli, ce qui signifie qu'un état donné ne peut être occupé que par deux électrons ayant des spins opposés. Cependant, un point essentiel à souligner est la différence fondamentale entre les points quantiques et les atomes individuels. Tandis que les atomes sont des entités isolées, les points quantiques sont des micro-cristaux constitués de milliers, voire de millions d’atomes, et comportent des vibrations du réseau (phonons) ainsi que des défauts cristallins. Ces caractéristiques influencent leur comportement énergétique et sont cruciales dans la détermination de leurs propriétés optiques.

L'énergie des électrons dans les points quantiques peut principalement être déterminée par leurs propriétés optiques, telles que la spectroscopie des transitions d’énergie. Ces propriétés sont particulièrement intéressantes dans les applications techniques, comme dans les lasers à points quantiques. Depuis environ 25 ans, les points quantiques sont l’objet d’études expérimentales approfondies, et plusieurs méthodes de fabrication ont été développées. La technique "top-down", qui consiste à définir et à graver lithographiquement la structure des points quantiques, est la plus traditionnelle, mais elle demeure complexe et difficile à réaliser de manière précise.

Une autre méthode, celle de la chimie colloïdale, a permis la fabrication de nanoparticules semi-conductrices avec une forme quasi-sphérique et une taille de particule variant entre quelques molécules et des dimensions plus étendues. Les nanoparticules avec des diamètres compris entre 1 et 6 nm, particulièrement intéressantes pour les applications en quantification forte, sont obtenues par cette méthode. Les particules de cette taille se trouvent dans un régime où la distance entre les niveaux d'énergie discrets des électrons devient comparable à l'écart de bande énergétique dans un cristal étendu. De plus, grâce à cette méthode, les points quantiques peuvent être fabriqués en quantités comparables à celles des produits chimiques fins classiques.

Les propriétés optiques des points quantiques, telles que la capacité de moduler la longueur d'onde de la lumière émise en fonction de la taille des particules, jouent un rôle clé dans leur utilisation. Plus précisément, la taille réduite des particules entraîne une augmentation de l'écart entre les niveaux d’énergie discrets, ce qui fait que les plus petites particules émettent de la lumière de longueur d’onde plus courte. Ce phénomène rappelle celui observé dans les instruments de musique : plus l’instrument est petit, plus la fréquence du son qu’il produit est élevée.

La troisième méthode de fabrication des points quantiques repose sur leur croissance spontanée et auto-organisée en îlots bien ordonnés au niveau nanométrique lors du dépôt de monolayers atomiques d’un semi-conducteur sur un substrat, dans des conditions spécifiques. Ces points quantiques auto-organisés sont les premières nanostructures qui peuvent être produites de manière reproductible en utilisant les technologies standard de la microélectronique. Par exemple, des points quantiques à base d'arséniure d'indium-gallium (InxGa1−xAs), intégrés dans un environnement d’arséniure de gallium (GaAs), ont été étudiés en profondeur. Il est également possible de fabriquer des réseaux tridimensionnels de points quantiques en superposant plusieurs couches de ces points quantiques les unes sur les autres. Cette capacité à manipuler les points quantiques ouvre la voie à la création de lasers à points quantiques, un domaine de recherche particulièrement prometteur.

Le premier laser à points quantiques a été mis en fonctionnement en 1994 et, depuis, ces lasers ont fait des progrès considérables en termes d’efficacité quantique. Les points quantiques, en raison de leurs propriétés électroniques intermédiaires entre celles des semi-conducteurs de masse et des molécules discrètes, présentent un grand potentiel pour diverses applications dans le domaine de l’optoélectronique. Leur taille et composition peuvent être modifiées pour fonctionner à différentes longueurs d’onde, ce qui leur permet de couvrir un large éventail de besoins. Les lasers à points quantiques, par exemple, offrent des longueurs d'onde auparavant inaccessibles avec la technologie des lasers semi-conducteurs classiques. Parmi les nombreuses applications possibles, citons les transistors, les cellules solaires, les diodes électroluminescentes (LED) et les lasers à diode. Un cas spectaculaire a été l'utilisation des points quantiques dans les téléviseurs à écran plat produits par Sony en 2013, marquant leur première utilisation dans un produit électronique grand public fabriqué en masse.

Les lasers à points quantiques devraient également jouer un rôle croissant dans les systèmes de transmission de données optiques, où ils pourraient offrir des performances nettement supérieures aux technologies actuelles.

Il est important de noter que l'utilisation des points quantiques n’est pas limitée à la seule optoélectronique. Leur potentiel en tant que marqueurs pour la microscopie à fluorescence dans les applications biologiques, par exemple, est déjà bien établi. La taille des particules, qui peut être ajustée pour obtenir des longueurs d'onde spécifiques, permet de marquer et d’observer des structures biologiques avec une précision sans précédent.