Dans les traditions jaïnes, le concept de salut et les voies pour l'atteindre ont toujours suscité des débats complexes, notamment en ce qui concerne la place des femmes dans ce processus. Les deux écoles principales du jaïnisme, les Shvetambaras et les Digambaras, ont des perspectives distinctes sur la question de savoir si une femme peut atteindre le salut ou même devenir un Tirthankara. Ces débats sont d'autant plus fascinants qu'ils sont non seulement théologiques mais aussi profondément enracinés dans les dynamiques sociales, politiques et culturelles de l'Inde ancienne.

Un des exemples les plus frappants de ce débat se trouve dans l'histoire du Brahmana Jayaghosha, relatée dans les Uttaradhyayana Sutra. Ce Brahmana, qui avait renoncé à sa vie mondaine et suivi les vœux jaïns, se rendit un jour à Bénarès où il entra en confrontation avec un autre Brahmana, Vijayaghosha, qui, bien que versé dans les Vedas, refusa de lui donner de l'aumône sous prétexte que le moine ne correspondait pas à l'image du « vrai Brahmana ». Jayaghosha, dans sa réponse, exprima la vision jaïna du vrai Brahmana comme étant celui qui a surmonté tous les attachements mondains, qui a maîtrisé ses sens, qui vit sans haine ni peur, et qui, par ses actions et non par son apparence extérieure ou ses rituels, mérite d'être appelé Brahmana. Cette vision met en lumière une distinction cruciale dans la pensée jaïna : le salut n’est pas lié à l’appartenance sociale, à la naissance, ni même à l'apparence physique, mais plutôt à la pureté intérieure et à l'éthique personnelle.

L'importance de la nudité dans la pratique ascétique jaïna, notamment dans l'école des Digambaras, soulève également des questions sur le rôle des femmes dans l’atteinte du salut. Les Digambaras, qui prônent la nudité absolue pour les membres de leur ordre en raison de l'idée que les vêtements symbolisent les attachements mondains, ont une vision strictement ascendante du salut. Toutefois, cette même exigence de nudité entraîne une perception négative du corps féminin. La question de la nudité chez les femmes mendicantes, souvent appelées aryikas ou sadhvis, devenait ainsi un obstacle à leur accès au salut, car le corps féminin était vu comme une impureté qui entravait l’évolution spirituelle. En revanche, l'école des Shvetambaras adopte une vision plus flexible, affirmant que le port des vêtements n'est pas incompatible avec la pratique ascétique et que les femmes, si elles suivent les règles de l'ordre, peuvent elles aussi atteindre le moksha dans leur vie.

La question de la capacité des femmes à devenir des Tirthankaras — des êtres éclairés et des guides spirituels — est au cœur de ce débat. Selon les traditions Shvetambara, la femme Malli est la 19e Tirthankara, une figure unique dans la tradition jaïna, car elle est née en tant que femme, alors que dans la tradition des Digambaras, la même figure est considérée comme un homme nommé Mallinatha. Le récit de Malli, qui, dans une vie antérieure, avait trompé lors d'un jeûne collectif et qui, par la suite, renaît en tant que femme, interroge sur la question de la réincarnation et des liens karmiques. Les Shvetambaras affirment que les femmes peuvent atteindre le salut et même devenir des Tirthankaras, mais leur statut est toujours vu à travers une lentille karmique où les transgressions passées peuvent expliquer leur naissance féminine.

En revanche, la position des Digambaras est bien plus stricte : ils maintiennent que seules les âmes masculines peuvent devenir des Tirthankaras et que les femmes doivent renaître en tant qu'hommes pour atteindre le salut. Cette vision réaffirme une hiérarchie de genre qui place les femmes dans une position de dépendance et de subordination dans le processus spirituel, malgré leur potentiel pour atteindre une forme d'illumination, mais toujours en tant qu'hommes dans une réincarnation future.

Cette divergence de vues reflète des tensions plus larges au sein de la société jaïna, qui, tout en prônant un idéal de renonciation, subit l’influence des structures patriarcales dominantes. Les femmes, bien qu’elles aient joué un rôle essentiel dans la diffusion des enseignements jaïns, notamment par l’intermédiaire des nuns, se sont toujours heurtées à des obstacles concernant leur égalité dans l'ordre monastique. Les nuns Shvetambaras étaient théoriquement égales aux moines dans leur engagement spirituel, mais en pratique, elles étaient soumises à des règles de respect et d’autorité imposées par les moines, et leurs actions étaient limitées par les structures de pouvoir patriarcales au sein de la communauté monastique.

Cependant, même dans cette structure inégale, les nuns ont prouvé leur résilience et leur dévouement à la voie du salut. L'acceptation de leur potentiel spirituel par certains courants du jaïnisme, notamment les Shvetambaras, montre que des possibilités existaient pour les femmes, bien qu'elles aient été limitées par des conditions sociales et religieuses.

En fin de compte, le débat sur le salut des femmes dans le jaïnisme met en lumière des enjeux plus profonds concernant la relation entre genre, spiritualité et société. Il révèle non seulement les tensions internes au sein des différentes écoles du jaïnisme, mais aussi les dynamiques de pouvoir qui influencent l’accès au salut. Il devient évident que, bien que les femmes aient toujours eu une place dans les enseignements jaïns, leur parcours vers l’illumination a été semé d’embûches, souvent placées par des normes sociales et religieuses qui favorisaient la domination masculine.

La gouvernance de l'Empire Maurya sous Ashoka : Une administration complexe et multilingue

Ashoka, souvent désigné par les épithètes Devanampiya et Piyadasi, se présente comme un roi de Magadha, régnant sur une vaste étendue de territoires. Il mentionne dans ses édits la capitale Pataliputra, soulignant l'immensité de son pouvoir politique. Dans certaines versions de l’édit mineur 1, le terme Jambudvipa est utilisé, désignant la Terre entière ou, plus spécifiquement, un continent dont le sous-continent indien faisait partie. Les inscriptions révèlent une prise de conscience des diverses communautés ethniques présentes au sein de son empire multinationaux, comprenant des Grecs et d'autres peuples étrangers. Ashoka distingue son domaine politique de celui des rois voisins, notamment ceux des royaumes du sud comme les Cholas, Pandyas, Satiyaputras, Keralaputras, et le Sri Lanka.

Les inscriptions montrent que son autorité s'étendait bien au-delà de l’Inde, touchant des royaumes méditerranéens et nord-africains. Par exemple, il revendique avoir atteint le dhamma-vijaya (victoire de la vérité) sur des régions gouvernées par Antiochus II de Syrie, Ptolémée II d'Égypte, et même Alexandre de Corinthe. Ce panorama géopolitique élargi inclut des diplomates provenant de divers royaumes hellénistiques, tels que Deimachus, ambassadeur d'Antiochus, et Megasthène, envoyé de Séleucos Nikator.

La structure administrative de l’Empire Maurya repose sur une organisation hiérarchique de fonctionnaires, reflétée dans les nombreux types de mahamatas mentionnés dans les inscriptions d’Ashoka. Les mahamatas étaient responsables de divers aspects de la gestion impériale, tels que les frontières, le bien-être des femmes, ou encore la propagation du dhamma. Cette dernière fonction fut particulièrement mise en avant par Ashoka, qui créa un nouveau corps de fonctionnaires, les dhamma-mahamatas, chargés de diffuser ses principes moraux à travers l'Empire.

Les inscriptions montrent également une administration provinciale très développée, avec des gouverneurs à la tête de divisions territoriales importantes. On trouve ainsi des références à des gouverneurs dans des régions aussi diverses que Suvarnagiri, Taxila, Ujjayini et Tosali. Ces gouverneurs, souvent des membres de la famille royale, portaient le titre de kumara ou aryaputra, et étaient responsables de la gestion locale, tout en étant étroitement supervisés par le roi et ses conseils.

L’organisation politique de l’empire, qui s’étendait sur un territoire vaste et diversifié, devait aussi faire face à des défis d'ordre logistique et administratif. Des fonctionnaires comme les rajukas étaient responsables de l’administration locale, en particulier en matière de mesure des terres et d’évaluation des revenus. La présence de fonctionnaires grecs, comme Tushaspha, à Saurashtra, suggère l’intégration de divers peuples au sein de l’administration impériale, au-delà des frontières traditionnelles de l'Inde.

Dans cette structure complexe, le rôle du roi reste central. Ashoka s’efforce d’être un souverain accessible, comme le montrent ses édits, où il souligne l’importance de sa proximité avec ses officiers. Les édits révèlent également un système de surveillance publicitaire sophistiqué, avec des fonctionnaires chargés de rapporter l’opinion publique, tel que les pativedakas et les pulisani, ce qui renforce l’image d’un souverain impliqué dans la gestion quotidienne de son empire. De plus, Ashoka, conscient des complots visant sa vie, met en place des mesures de sécurité strictes, et la présence de gardes du corps féminins, mentionnée par Megasthène, est un exemple intéressant de ces précautions.

Outre ces aspects administratifs et géopolitiques, l’un des éléments essentiels à retenir concernant Ashoka est son engagement dans la diffusion du dhamma, une philosophie de gouvernance fondée sur la justice, la compassion et l’égalité. Cette politique morale a transformé non seulement la société indienne, mais a aussi laissé une empreinte durable sur la manière dont les royaumes et empires devraient, selon lui, être dirigés. Les edicts d’Ashoka, gravés dans des pierres, ont ainsi servi à renforcer son image de souverain éclairé et soucieux du bien-être de ses sujets, tout en établissant une forme de gouvernement idéale pour les générations futures.

En examinant l'administration d'Ashoka, il devient évident que le roi n’était pas seulement un monarque militaire ou territorial, mais un gouverneur moralement responsable, soucieux d’une administration bien ordonnée et fondée sur des principes éthiques. Cependant, il est crucial de comprendre que l’effort d’Ashoka pour instaurer un empire basé sur le dhamma ne se limitait pas à des discours idéalisés, mais se traduisait par un ensemble d'actions pratiques et de réformes qui modifiaient profondément les structures politiques et sociales de son empire. Il ne s’agissait pas simplement de conquêtes militaires, mais d’un empire qui cherchait à intégrer, au-delà des différences culturelles et ethniques, une vision commune fondée sur la vérité et la justice.

Comment l'inscription Tamil-Brahmi éclaire l'histoire et la culture du Tamilakam

Les inscriptions en Tamil-Brahmi, un système d'écriture adapté du Brahmi pour la langue tamoule, sont une des premières traces écrites des sociétés du Tamilakam. Ce système d'écriture est un témoin fondamental de l’évolution de l’écriture dans le sud de l’Inde et de son utilisation à des fins religieuses et administratives. L'écriture Tamil-Brahmi comporte vingt-six caractères, dont vingt-deux sont presque identiques à ceux du Brahmi, avec quelques ajouts pour rendre compte des sons propres au tamoul. Parmi les caractéristiques distinctives, on retrouve le pulli, un point placé au-dessus des consonnes pour indiquer qu’elles ne portent pas de voyelle inhérente "a".

Les inscriptions en Tamil-Brahmi ont été principalement retrouvées dans le sud de l'Inde, surtout dans la région autour de Madurai, et remontent à deux périodes principales : la première, appelée "Tamil-Brahmi ancien", couvre les siècles entre le IIe siècle av. J.-C. et le Ier siècle apr. J.-C., et la seconde, le "Tamil-Brahmi tardif", s’étend du IIe au IVe siècle apr. J.-C. Ces inscriptions, parfois gravées dans des grottes naturelles ou des abris rocheux, sont souvent associées aux dons de moines et nonnes jains, mais témoignent aussi d’autres formes de vie communautaire, comme les dons de lits en pierre et l’enregistrement des noms des donateurs.

Les inscriptions ne se limitent pas aux contextes religieux. Elles ont également été retrouvées sur des poteries et d'autres artefacts, comme des pierres de touche utilisées par les orfèvres, notamment à des sites comme Arikamedu, Uraiyur, Kodumanal, et Alangulam. Un exemple particulièrement intéressant est celui de la pierre de touche en orfèvrerie trouvée à Khuan Luk Pat, en Thaïlande du Sud-Ouest, sur laquelle est inscrite la phrase "perum patan kal", signifiant "la pierre de touche de Perumpattan". Cet exemple prouve que l’écriture Tamil-Brahmi était utilisée dans des contextes commerciaux et artisanaux, et pas seulement dans des cercles religieux ou royaux.

Les coins, sceaux et anneaux retrouvés, souvent gravés de symboles comme l’éléphant, la tortue ou le tigre, sont des objets précieux qui témoignent du commerce florissant entre le Tamilakam et d’autres régions. Ces artefacts montrent l’importance des dynasties locales, comme les Cheras, Cholas et Pandyas, dans la diffusion de cette écriture. Ils circulaient principalement à travers le commerce maritime, ce qui est confirmé par la présence de pièces de monnaie tamoules dans des endroits aussi éloignés que les côtes du golfe Persique et la mer Rouge.

À travers les poèmes du Sangam, l'importance des sacrifices brahmaniques et de la royauté védique apparaît également, signalant un changement de prestige royal, où les rois se relient aux pratiques religieuses du nord de l'Inde. Ces textes évoquent la quête de légitimité des rois tamouls à travers la participation à des sacrifices védiques et l’établissement de liens avec des figures légendaires comme Agastya ou Vishnu.

Les inscriptions Tamil-Brahmi nous éclairent également sur la vie quotidienne dans les villages de l’époque. Un exemple marquant est l'inscription de Varichiyur, datant du IIe siècle av. J.-C., qui mentionne un don de riz, ou celle d’Alagarmalai qui fait référence à un marchand de socs de charrue. D’autres inscriptions, comme celle de Mudalaikulam, évoquent la construction de réservoirs d’eau par les assemblées de village, ce qui pourrait être l'une des premières références à l’organisation communautaire dans la région.

La situation politique de cette époque, bien que marquée par des structures tribales et des chefferies, semble avoir évolué avec la formation de monarchies dynastiques. Les rois tamouls étaient en contact direct avec le commerce maritime et les échanges internationaux, et leur autorité, bien que parfois limitée sur les plaines agricoles, se manifestait dans la collecte de tributs et la gestion des échanges. La circulation de pièces de monnaie et la présence d'une littérature sophistiquée et de centres urbains montrent que l’idée d’un royaume structuré, même rudimentaire, était présente.

Il convient de souligner que ces inscriptions en Tamil-Brahmi ne sont pas seulement un témoignage de l'écriture ou de la religion, mais également un reflet de la complexité sociale et politique de l’époque. Loin d’être de simples notations de dons, elles permettent d’entrevoir une société en pleine évolution, où les relations de pouvoir, la religion, le commerce et la culture s’entrelacent de manière subtile. La connaissance de ces inscriptions et de leurs contextes d’apparition permet une meilleure compréhension de l’histoire du Tamilakam, et par extension, de l’histoire de l’Inde du Sud, dont l’impact se fait encore sentir aujourd’hui.

Comment le bouddhisme a-t-il prospéré et influencé l'Asie du Sud à travers les siècles ?

Le bouddhisme, dans sa forme Mahayana, s'est enraciné profondément dans le paysage religieux et culturel de l'Asie du Sud, notamment en Inde du Sud, au Sri Lanka, et en Asie du Sud-Est. Selon les récits des voyageurs et des textes anciens, la diffusion de cette tradition spirituelle fut largement facilitée par les moines bouddhistes qui, par leurs voyages, leurs enseignements et leurs interactions avec les diverses communautés religieuses, ont contribué à la solidification du bouddhisme dans ces régions. Les récits historiques et littéraires, tels que ceux relatant les voyages du moine chinois Faxian, montrent que le bouddhisme s'est souvent mêlé à la vie sociale et politique, devenant un moteur pour l'établissement de monastères et d'institutions religieuses dans ces zones.

Le développement du bouddhisme dans les villes du sud de l'Inde comme Puhar, Vanji et Madurai a été particulièrement marqué par une interaction profonde entre les commerçants, les artisans et les pratiquants bouddhistes. Dans l'épopée de Manimekalai, attribuée au marchand Sattanar, le bouddhisme Mahayana est fortement représenté. Cette œuvre met en scène la vie de Manimekalai, une jeune fille qui choisit de rejoindre l'ordre bouddhiste après avoir été initiée aux enseignements du Bouddha. L'épopée illustre de façon frappante le renoncement aux biens matériels, tout en soulignant la compassion et la charité, éléments essentiels du bouddhisme Mahayana. À travers l’histoire de Manimekalai, le texte présente aussi la philosophie bouddhiste, abordant des concepts tels que la causalité et la logique inférentielle, qui étaient des sujets de grande importance dans les cercles intellectuels bouddhistes de l’époque.

En outre, la critique des autres traditions religieuses, telles que le jaïnisme et l'hindouisme, est un aspect significatif du texte. L'auteur met en lumière les différences entre les pratiques bouddhistes et celles des autres écoles philosophiques, par exemple en opposant la cruauté des moines jaïns et la bienveillance des moines bouddhistes. De même, l'épopée critique les sacrifices d'animaux pratiqués par les brahmanes, une pratique qu'un ancien personnage, dans une vie antérieure, réussit à empêcher en sauvant une vache de la mort.

La richesse philosophique de Manimekalai se distingue aussi par son exploration des doctrines bouddhistes, notamment les enseignements des écoles Yogachara et la philosophie de Vasubandhu et Asanga. Par son approche de l'éthique, de la logique et des miracles, le texte s'apparente parfois au tantrisme bouddhiste, une pratique qui intègre des rituels ésotériques et une certaine forme de dévotion à des figures divines comme les bodhisattvas.

Les monastères bouddhistes étaient des centres non seulement de pratique spirituelle, mais aussi de production intellectuelle. Dans l'Inde ancienne, des sites comme Nalanda, Sarnath, et Ajanta, étaient réputés pour abriter des moines érudits et des centres d'apprentissage. Nalanda, par exemple, devint un haut-lieu de l'enseignement bouddhiste, attirant des intellectuels de toute l'Asie. Bien que certains rois Gupta aient été associés à la promotion des cultes brahmaniques, il est aussi évident qu'ils ont patronné le bouddhisme, comme en témoigne la présence de rois tels que Vikramaditya dans les écrits des érudits bouddhistes.

Le bouddhisme Mahayana ne se contenta pas de se diffuser en Inde du Sud et dans les régions voisines; il s’étendit également au Sri Lanka, où des moines comme Buddhaghosha jouèrent un rôle central dans la traduction des textes et l'enseignement de la doctrine bouddhiste. La relation entre l'Inde et le Sri Lanka s'intensifia pendant cette période, et les monastères du Sri Lanka devinrent des centres prospères de l'enseignement bouddhiste. Le rôle des moines bouddhistes dans ces échanges inter-asiatiques fut primordial, notamment à travers la diffusion des pratiques et des textes sacrés, et en mettant l'accent sur les idées de salut et d’atteinte de l’illumination.

Au-delà des frontières géographiques, le bouddhisme Mahayana s’est imprégné de diverses influences culturelles et spirituelles, comme le montre la description de la vie de Manimekalai, qui met en avant des valeurs profondément enracinées dans la générosité et la rédemption spirituelle. Cette influence s'est étendue bien au-delà de l’Inde, marquant l’Asie du Sud-Est, y compris le royaume de Java, désigné dans les textes anciens sous le nom de Chavakam. Ces régions, tout en étant influencées par les pratiques bouddhistes, ont aussi contribué à la réinterprétation de ces pratiques selon les spécificités culturelles locales.

Les moines bouddhistes, à travers leurs voyages et leurs enseignements, ont contribué à tisser un réseau religieux complexe, reliant les différentes régions d’Asie. Ces réseaux ne se limitaient pas seulement aux échanges théologiques, mais incluaient aussi des donations, des traductions de textes et la construction de monastères. Le soutien matériel apporté par les marchands et les rois a permis à ces institutions de prospérer, malgré les tensions internes et les luttes pour le pouvoir au sein de l'ordre bouddhiste. Ces interactions interculturelles ont non seulement renforcé l’influence du bouddhisme, mais ont aussi permis à cette tradition de s’adapter aux réalités locales tout en conservant son essence doctrinale.

Il est essentiel pour le lecteur de comprendre que cette période fut marquée par une compétition religieuse intense, où le bouddhisme, tout en se frayant un chemin à travers des siècles de métamorphoses, a su s’intégrer et interagir avec d’autres traditions comme le jaïnisme, le brahmanisme et le shivaïsme. L'héritage de cette époque réside non seulement dans les textes et les monuments qui nous sont parvenus, mais aussi dans les pratiques spirituelles et philosophiques qui continuent d'influencer de nombreuses régions du monde jusqu'à aujourd'hui. L'une des clés de cette réussite fut l'adaptabilité du bouddhisme, qui, tout en restant fidèle à ses principes fondamentaux, a su dialoguer avec les croyances et les pratiques locales, et se réinventer au fil du temps pour répondre aux besoins spirituels des sociétés dans lesquelles il s'est implanté.