L'innovation dans la capture des cellules tumorales circulantes (CTCs) repose sur des stratégies bioinspirées qui exploitent le potentiel de fusion entre les liposomes synthétiques et les membranes cellulaires natives. Cette approche permet de concevoir des vésicules hybrides, qui combinent la robustesse programmée des vecteurs synthétiques avec l'affinité biologique sélective inhérente aux membranes dérivées des cellules (Sun et al., 2024; Ji et al., 2020; Manjunath et al., 2020). Ces vésicules chimériques peuvent être facilement fonctionnalisées avec des nanoparticules magnétiques ou fluorescentes, permettant ainsi une intégration fluide avec des modalités analytiques en aval, telles que l'enrichissement magnétique et la détection optique.

Un avancement notable dans ce domaine a été présenté par Jia et al. (2025), qui ont utilisé le système de sécrétion endogène des vésicules des cellules pour fabriquer des vésicules magnétiques orientées vers l'extérieur (MVMNPs), permettant la détection ultra-sensible des CTCs. Leur méthode consistait à co-incuber des nanoparticules magnétiques (MNPs) avec des cellules donneuses, induisant ainsi la biogenèse de vésicules membraneuses magnétiquement dotées. Ces vésicules ont été ensuite ingénierées en utilisant un échafaudage d'acides nucléiques sophistiqués : l'aptamère SYL3C, spécifique à EpCAM, a été spatialement organisé via des tétrahédrons d'ADN (TDNs) pour former le complexe TDNE. L'hybridation avec une brin complémentaire (c-EpCAM) a permis de greffer le TDNE-c sur les MVMNPs, renforçant ainsi la spécificité de ciblage à la fois par reconnaissance moléculaire et contrôle topologique. Ces vésicules héritent des préférences de ciblage homotypiques de leurs origines MCF-7, permettant ainsi une meilleure efficacité de liaison avec les CTCs exprimant EpCAM.

Un des principaux avantages de l'utilisation des membranes cellulaires extraites pour la capture des CTCs réside dans leur capacité de bioreconnaissance améliorée (Vargas et al., 2022). Contrairement aux ligands synthétiques ou aux anticorps, les membranes cellulaires naturelles présentent une gamme complexe et dynamique de récepteurs, de molécules d'adhésion et de glycoprotéines qui facilitent les interactions sélectives avec les CTCs (Zhang et Wang, 2024). Cette approche minimise les faux positifs et améliore la spécificité de la détection (Carneiro et al., 2024). Un autre avantage important réside dans la sélectivité améliorée offerte par ces plateformes à base de membranes. En incorporant des membranes dérivées de cellules immunitaires, des chercheurs ont démontré une réduction de la contamination par les leucocytes et une amélioration de la pureté des CTCs (Zhang et Wang, 2024; Lopes et al., 2022).

De plus, les membranes tumorales peuvent être ingénierées pour exprimer des marqueurs spécifiques comme EpCAM ou HER2, fréquemment surexprimés dans les CTCs métastatiques, permettant ainsi une capture ciblée sans avoir besoin de marquages externes (Lin et al., 2021). L'intégration des membranes biomimétiques avec des dispositifs microfluidiques et basés sur la nanotechnologie a fait progresser le développement de systèmes à haut débit pour la séparation des CTCs (Wu et al., 2020). Ces plateformes peuvent surveiller en temps réel, traiter rapidement des échantillons sanguins et extraire efficacement des CTCs viables pour une analyse génomique et transcriptomique (Jia et al., 2023; Zhang et al., 2021). La fluidité des membranes, l'hétérogénéité des récepteurs et leur biocompatibilité font de ces systèmes ingénierés un outil puissant dans le domaine de la biopsie liquide (Zhang et Wang, 2024; Jiang et al., 2024b).

L'ingénierie des membranes cellulaires offre ainsi une approche transformative pour la capture des CTCs en exploitant les mécanismes de reconnaissance naturelle et les interactions bio-physiques. Ces stratégies biomimétiques offrent une sélectivité, une efficacité et une adaptabilité améliorées par rapport aux méthodes traditionnelles, permettant des applications plus efficaces dans le cadre de la biopsie liquide. Les recherches futures devraient se concentrer sur l'optimisation de ces plateformes pour leur translation clinique, en garantissant des performances robustes à travers différentes populations de patients. L'intégration des technologies basées sur les membranes avec l'analyse multi-omique et l'interprétation des données guidée par l'intelligence artificielle représente un potentiel considérable pour révolutionner l'oncologie de précision et améliorer les résultats pour les patients.

Une autre avancée significative concerne la neutralisation des CTCs, qui va au-delà de leur utilisation diagnostique dans la biopsie liquide. En neutralisant les CTCs dans la circulation sanguine avant qu'elles ne colonisent des organes distants, il devient possible d'interrompre la cascade métastatique et d'améliorer considérablement les résultats cliniques. Ces stratégies incluent des systèmes mimant les plaquettes (PLTs) et les neutrophiles, des plateformes semblables aux exosomes et la modulation des points de contrôle immunitaires pour améliorer l'efficacité thérapeutique contre les cellules initiatrices de métastases.

Les plaquettes (PLTs) jouent un rôle crucial dans la survie des CTCs en formant des manteaux protecteurs qui les protègent contre les attaques immunitaires et facilitent leur extravasation. Pour contrer ce mécanisme, des chercheurs ont développé des véhicules biomimétiques dérivés des plaquettes qui se lient sélectivement aux CTCs et délivrent des agents cytotoxiques (Li et al., 2016b; Ortiz-Otero et al., 2021). Les plaquettes ont été modifiées pour exprimer le ligand apoptotique TRAIL, un cytokine qui induit sélectivement l'apoptose des cellules cancéreuses. Ces plaquettes exprimant TRAIL interagissent avec les CTCs, induisant leur mort tout en préservant la fonction normale des plaquettes.

La combinaison de ces stratégies offre de nouvelles avenues pour la thérapie anti-métastatique en ciblant et éliminant les CTCs avant qu'elles ne puissent initier des métastases. Ces approches, qui sont en développement rapide, se dirigent vers une intégration fluide des plateformes biomimétiques dans des systèmes de délivrance ciblée pour une meilleure efficacité thérapeutique contre les cancers avancés.

Comment la sélection et le revêtement des nanoparticules influencent l'efficacité des systèmes de livraison de médicaments en cancérologie

L'isolement des membranes cellulaires est une étape cruciale dans le développement de nanoparticules (NP) pour la délivrance ciblée de médicaments dans le traitement du cancer. Ce processus exige une grande quantité de cellules, qui subissent un traitement hypotonique et une disruption mécanique. La séparation des composants se fait ensuite par centrifugation différentielle ou ultracentrifugation sur gradient de sucrose. La centrifugation différentielle permet de retirer les composants plus lourds, tandis que les gradients de sucrose séparent les membranes en fonction de leur densité, assurant ainsi une contamination minimale. Il est essentiel de maintenir des températures basses et d'utiliser des tampons hypotonique enrichis en ions divalents pour préserver les protéines transmembranaires et le cholestérol, garantissant ainsi l'intégrité et la fonctionnalité de la membrane cellulaire (Chugh et al., 2021).

Le choix d'un noyau de nanoparticules adéquat est primordial pour la fabrication de ces systèmes de nanomédecine. Ce noyau détermine le type de charge utile, qu'il s'agisse de molécules de médicaments ou de biomolécules, qui peuvent être encapsulées dans la nanoparticule. Les propriétés physico-chimiques des nanoparticules, telles que la taille, la charge et la composition, influencent de manière significative l'efficacité du revêtement des membranes cellulaires ainsi que la biocompatibilité globale du système. Une fois la membrane isolée, les nanoparticules sont recouvertes par des interactions électrostatiques, formant ainsi des structures en coque de type cœur-coque. L'extrusion physique améliore ce processus en forçant les nanoparticules à travers des membranes de polycarbonate présentant des pores de taille spécifique. Cette disruption mécanique permet l'intégration des nanoparticules dans la bicouche lipidique de la membrane. La taille du composite est régulée par le diamètre des pores, garantissant une distribution uniforme. Cependant, cette méthode est gourmande en temps et dépend fortement du rapport membrane-polymère ainsi que de la charge de surface des nanoparticules pour une efficacité de revêtement optimale.

L'ultrasonication, qui utilise de l'énergie sonore pour disperser les membranes cellulaires, permet une réassemblée de ces dernières autour des nanoparticules via des interactions non covalentes. Cette approche minimise la perte de matériel, préserve la fonctionnalité des protéines et assure une dispersion efficace. Toutefois, elle peut entraîner une variation de la taille des particules, un revêtement inconsistant ou des dommages à la membrane. Il est donc crucial d'optimiser avec soin la puissance, la durée et la fréquence pour maintenir un équilibre entre efficacité de revêtement et préservation des protéines, ce qui en fait une alternative plus rapide à l'extrusion. La microfluidique par électroporation génère des ouvertures hydrophiles temporaires dans les membranes cellulaires à l'aide de pulses haute tension, permettant aux nanoparticules de s'intégrer efficacement. Cette méthode produit des composites avec une couverture complète, une dispersion uniforme et un dommage minimal aux protéines tout en réduisant les pertes de matériel. Malgré son coût technique plus élevé, elle offre une excellente répétabilité et efficacité. L'optimisation de la conception du microchip, du voltage et du débit est essentielle pour adapter le processus aux propriétés spécifiques du matériel (Desai et al., 2024a).

Les nanoparticules améliorent la délivrance des médicaments en traversant efficacement les barrières biologiques et en ciblant les tumeurs grâce à l'effet de perméabilité et de rétention améliorée. Leurs propriétés uniques, telles que les capacités catalytiques, la résistance mécanique, la réactivité magnétique, les propriétés thermiques et optiques, soutiennent divers rôles dans le traitement du cancer (Rana et al., 2021; Desai et al., 2024b). Les propriétés biologiques des nanoparticules, telles que la durée de circulation prolongée, l'évasion immunitaire et les capacités de ciblage, peuvent être renforcées en recouvrant les nanoparticules de membranes cellulaires. Pour vérifier la réussite de l'encapsulation des nanoparticules dans une membrane cellulaire, plusieurs techniques analytiques sont utilisées. L'analyse microscopique et la détection de glycoprotéines et d'acides sialiques permettent d'évaluer l'intégrité du revêtement membranaire (Liu et al., 2022). Des méthodes comme l'électrophorèse sur gel, le western blot, l'immunohistochimie, le marquage fluorescent, l'essai immuno-enzymatique et la spectroscopie d'absorbance peuvent confirmer la présence de marqueurs biologiques à la surface des nanoparticules.

Le suivi en temps réel des propriétés, telles que la dispersion dynamique de la lumière, permet de mesurer le diamètre hydrodynamique, ce qui met en évidence les différences de taille avant et après le revêtement pour confirmer la formation de la membrane. De plus, les mesures du potentiel Zeta à l'aide d'un appareil de mesure de Zeta permettent d'évaluer la charge de surface, offrant des informations sur la stabilité des particules et leurs interactions avec les systèmes biologiques (Wang et al., 2022). Le suivi de ces propriétés au fil du temps fournit également des informations sur la stabilité colloïdale des nanoparticules revêtues, garantissant leur durabilité et leur adéquation à un stockage et une utilisation thérapeutique (Liu et al., 2021). Par exemple, des nanoparticules de silice mésoporeuse recouvertes de membrane cellulaire (CM-SiO2 NPs) ont été développées, et diverses techniques de caractérisation ont confirmé le succès du revêtement. La microscopie électronique à transmission a révélé une bicouche lipidique distincte autour du noyau des nanoparticules, indiquant une fusion membranaire. La dispersion dynamique de la lumière a montré une augmentation du diamètre hydrodynamique de 118,6 à 139,8 nm et un léger déplacement du potentiel Zeta de -41,2 à -36,0 mV. La microscopie confocale a démontré la colocalisation des nanoparticules étiquetées fluorescentement et des membranes. L'analyse SDS-PAGE a confirmé la rétention des protéines membranaires (Liu et al., 2021).

Il est essentiel de souligner que la stabilité des nanoparticules et leur capacité à maintenir une couverture uniforme de la membrane sont des facteurs clés dans le succès de la thérapie ciblée. Une évaluation approfondie et continue de ces paramètres est indispensable non seulement pour optimiser la fabrication des nanoparticules, mais aussi pour garantir leur efficacité thérapeutique dans des contextes biologiques complexes.

Les Nanoparticules Biomimétiques Revêtues de Membranes Cellulaires : Une Nouvelle Ère pour la Ciblage des Maladies et les Thérapies Médicales

La conception de nanoparticules revêtues de membranes cellulaires représente un progrès majeur dans le domaine de la nanomédecine, en particulier pour les traitements ciblés des maladies infectieuses, inflammatoires et tumorales. Ce type de nanoparticules, en imitant les caractéristiques des cellules du corps humain, permet une interaction plus spécifique avec les cibles biologiques, offrant ainsi un potentiel thérapeutique immense.

Les nanoparticules camouflées par des membranes cellulaires, qu'il s'agisse de membranes de macrophages, de globules rouges, de plaquettes ou d'autres cellules, sont capables de masquer leurs propriétés exogènes et de se présenter comme des entités biologiques naturelles. Cela leur permet de contourner les mécanismes de défense de l'organisme, tels que le système immunitaire, en se faisant "accepter" comme des éléments du corps lui-même. L’utilisation de ces nanoparticules est extrêmement prometteuse pour de nombreuses applications, y compris la délivrance ciblée de médicaments, la réduction de la toxicité systémique, et l’amélioration de l’efficacité des traitements.

Les macrophages, en particulier, jouent un rôle clé dans l'inflammation et la réponse immunitaire. Par conséquent, leur membrane est un excellent candidat pour revêtir les nanoparticules destinées au traitement de maladies inflammatoires comme l'athérosclérose, ou même pour cibler spécifiquement les cellules immunitaires impliquées dans certaines pathologies. Les chercheurs ont démontré que les nanoparticules camouflées par des membranes de macrophages peuvent non seulement augmenter la biodisponibilité des médicaments, mais aussi leur permettre d'agir directement là où elles sont le plus nécessaires, comme les tissus enflammés.

D'autres types de cellules, telles que les plaquettes, sont également utilisées pour la conception de nanoparticules biomimétiques. Les nanoparticules recouvertes de membranes de plaquettes sont capables de jouer un rôle clé dans la gestion des troubles hématologiques, comme la thrombocytopénie immunitaire, en servant de "leurre" pour les anticorps. Par ailleurs, leur capacité à se lier aux sites de lésions vasculaires les rend particulièrement adaptées au traitement de maladies cardiovasculaires.

Les globules rouges, connus pour leur capacité à transporter l'oxygène dans le sang, sont également utilisés pour la fabrication de nanoparticules. Les nanoparticules recouvertes de membranes de globules rouges peuvent améliorer la distribution de médicaments dans le système circulatoire, en particulier dans les zones où l'irrigation sanguine est altérée, ce qui est le cas dans certaines tumeurs solides. Ce mécanisme favorise la pénétration des médicaments dans les cellules tumorales, tout en réduisant la dégradation prématurée des médicaments par les enzymes du sang.

L'innovation la plus récente dans ce domaine est l'utilisation des membranes de cellules endothéliales cérébrales pour la délivrance ciblée de médicaments dans le traitement du paludisme cérébral. Cela montre que la biomimétique ne se limite pas uniquement aux traitements traditionnels, mais offre des solutions novatrices pour des maladies complexes et difficiles à traiter.

L'efficacité de ces systèmes de délivrance ciblée repose sur la spécificité des récepteurs présents sur les membranes des cellules. Par exemple, les membranes de neutrophiles, qui sont des cellules clés dans la réponse immunitaire et l'inflammation, peuvent être utilisées pour cibler des nanoparticules de manière à délivrer des agents anti-inflammatoires précisément aux sites d'inflammation, tels que dans les maladies inflammatoires de l'intestin ou dans la gestion de la pancréatite aiguë.

Les nanoparticules revêtues de membranes cellulaires offrent également un moyen de contourner les obstacles biologiques, tels que les barrières biologiques (barrières hémato-encéphalique, par exemple), permettant une pénétration plus efficace des médicaments dans des tissus spécifiques. Par conséquent, ces systèmes de délivrance de médicaments biomimétiques jouent un rôle de plus en plus crucial dans le développement de thérapies ciblées plus efficaces et moins invasives.

Au-delà des applications thérapeutiques classiques, les nanoparticules recouvertes de membranes cellulaires ont des implications potentielles dans le domaine de la vaccination, de la thérapie génique et de l'immunothérapie contre le cancer. En "disguiseant" les nanoparticules avec des membranes spécifiques, il devient possible de modifier la réponse immunitaire de manière plus précise et de maximiser l'efficacité des traitements.

Un aspect fondamental dans l'utilisation des nanoparticules camouflées par des membranes cellulaires est la question de leur sécurité. Bien qu’elles offrent des avantages significatifs en termes de ciblage et de biodistribution, les risques d'accumulation dans certains organes, notamment dans les reins et le foie, doivent être soigneusement évalués. De plus, l'impact de l'activation du système immunitaire, bien qu'indirecte, doit être pris en compte, car il peut potentiellement conduire à des réactions inflammatoires indésirables.

Le développement de ces systèmes de délivrance biomimétiques continue de progresser rapidement, mais des études supplémentaires sont nécessaires pour mieux comprendre leur interaction avec le système immunitaire et leur comportement dans des environnements biologiques complexes. L’avenir de cette technologie dépendra de notre capacité à moduler ces nanoparticules pour répondre de manière optimale aux besoins cliniques spécifiques, tout en minimisant les risques potentiels.

Quels sont les vecteurs viraux et non viraux utilisés dans la thérapie génique et l'ingénierie cellulaire ?

Les rétrovirus, les adénovirus et les lentivirus sont des vecteurs viraux largement utilisés dans la thérapie génique et l’ingénierie cellulaire. Ces virus jouent un rôle clé dans la modification génétique des cellules, avec des applications spécifiques dans le traitement de diverses pathologies, la production de vaccins et la recherche fondamentale. Ces vecteurs ont des caractéristiques distinctes qui les rendent adaptés à des contextes thérapeutiques et expérimentaux variés, mais ils comportent également des défis techniques et des risques qui doivent être soigneusement gérés.

Les rétrovirus sont caractérisés par des enzymes comme la transcriptase inverse et l'intégrase, qui sont essentielles au cycle de vie des rétrovirus. Utilisés dans la thérapie génique, ces vecteurs dérivés de rétrovirus naturels permettent une modification génétique permanente des cellules. Par exemple, le virus de la leucémie murine de Moloney est couramment utilisé dans la livraison de gènes en raison de son efficacité élevée pour le transfert génétique et l’intégration dans le génome hôte. Toutefois, les rétrovirus présentent des limitations importantes, telles que leur incapacité à infecter les cellules non-divisantes et les risques d'insertional mutagenesis, notamment des effets secondaires imprévus dus à l’intégration du gène thérapeutique à des sites non ciblés dans le génome.

Les adénovirus, quant à eux, sont des virus non enveloppés à ADN bicaténaire, capables d'infecter aussi bien les cellules en division que celles en repos. Ces vecteurs sont particulièrement appréciés pour leur capacité à induire une forte expression génétique à court terme, ce qui est utile dans des applications comme la thérapie du cancer ou la formulation de vaccins. Les adénovirus ont une faible pathogénicité, une capacité élevée de production en grande quantité, et peuvent transporter de grandes quantités de matériel génétique. Cependant, ils sont également associés à des réponses immunitaires indésirables et à des effets secondaires tels qu'une tempête de cytokines, particulièrement lorsqu'ils sont administrés à des doses élevées ou à des patients immunodéprimés. Des modifications génétiques, comme la suppression des gènes de réplication, ont permis de transformer les adénovirus en vecteurs non réplicatifs, augmentant ainsi leur sécurité pour l'utilisation clinique.

Les lentivirus, une sous-famille des rétrovirus, se distinguent par leur capacité à transfecter non seulement les cellules en division, mais aussi les cellules quiescentes ou à faible taux de division, comme les cellules nerveuses ou certaines cellules immunitaires. Cette caractéristique les rend particulièrement adaptés à des thérapies géniques pour des maladies génétiques ou des troubles immunitaires, où une intégration stable du transgène dans le génome de l’hôte est cruciale. Leurs avantages incluent une faible immunogénicité et une intégration stable du gène, mais leur utilisation doit également être soigneusement contrôlée pour éviter les risques d’infection virale non souhaitée.

Cependant, bien que les vecteurs viraux offrent des avantages indéniables, ils présentent également des inconvénients qui ont conduit au développement et à l’étude de vecteurs non viraux. Ceux-ci, comme les liposomes et les nanoparticules polymériques, sont préférés dans de nombreuses situations en raison de leur sécurité accrue. Contrairement aux vecteurs viraux, qui peuvent entraîner une réaction immunitaire ou des risques d'insertion génétique indésirable, les vecteurs non viraux ne nécessitent pas d’intégration dans le génome de la cellule hôte. Ces vecteurs fonctionnent généralement en formant des complexes avec l'ADN ou l'ARN, permettant une prise en charge efficace par les cellules via endocytose.

Les liposomes, en particulier, ont émergé comme des outils de choix pour la livraison de gènes, en raison de leur capacité à encapsuler une variété de matériel génétique, comme l'ADN plasmidique, les siRNA ou les oligonucléotides antisens, tout en améliorant la stabilité et l'efficacité de la livraison. Ces structures sphériques permettent de protéger le matériel génétique contre la dégradation et favorisent son entrée dans les cellules. Cependant, la transfection efficace et la libération contrôlée du gène à l’intérieur de la cellule restent des défis importants dans l’utilisation clinique des liposomes. Des avancées récentes dans la formulation des liposomes, incluant des modifications pour améliorer la biodisponibilité intracellulaire et réduire les risques de dégradation prématurée, ouvrent des perspectives pour une utilisation plus large de ces vecteurs.

Les vecteurs non viraux, bien qu'ils présentent des avantages considérables en termes de sécurité et de flexibilité, souffrent encore de limitations notables en termes d'efficacité de la transfection et de stabilité dans des applications cliniques complexes. Les stratégies pour améliorer leur efficacité incluent des systèmes de nanocomplexes supramoléculaires qui peuvent traverser plus efficacement les membranes cellulaires et endosomales, réduisant ainsi la dégradation du matériel génétique et augmentant la probabilité de livraison réussie.

Il est important de noter que chaque type de vecteur – qu’il soit viral ou non viral – possède des caractéristiques qui influencent son efficacité et son adéquation à des applications thérapeutiques spécifiques. Par exemple, les vecteurs viraux, malgré leurs risques, sont souvent préférés pour des applications nécessitant une transfection stable et durable des cellules, comme dans le cadre de thérapies géniques pour des troubles métaboliques ou des cancers. En revanche, les vecteurs non viraux peuvent être utilisés pour des thérapies moins invasives ou des traitements à court terme, où la sécurité et la minimisation des effets secondaires sont des priorités absolues. Le choix du vecteur dépend ainsi de nombreux facteurs, dont la nature de la maladie à traiter, la durée d'expression du gène thérapeutique, et les risques d'effets secondaires.

Quelles sont les stratégies émergentes d’ingénierie des membranes cellulaires pour la thérapie du cancer et la livraison de médicaments ?

L'immunothérapie synergique, qui consiste à co-cultiver des cellules dendritiques (DC) avec des cellules tumorales irradiées, est l'une des stratégies émergentes les plus prometteuses pour renforcer la réponse immunitaire contre le cancer. Ce processus génère des membranes hybrides capables d'internaliser et de présenter des antigènes tumoraux spécifiques (Hao et al., 2021 ; Rosenthal et al., 2019). Parmi les méthodes de préparation de ces membranes, deux principales approches sont utilisées : la fusion des membranes de cellules dendritiques et de cellules tumorales irradiées via sonication, ou la coalescence directe des cellules dendritiques dérivées de la moelle osseuse avec les cellules tumorales dans un milieu spécialisé, suivie de la lyse hypotonique et de la sonication. Ces membranes, obtenues à partir des cellules dendritiques, conservent leur capacité à présenter des antigènes indépendamment des caractéristiques des cellules d’origine, ce qui permet de concentrer les médicaments au site tumoral via des nanoparticules (NPs). Afin d'améliorer le ciblage et la biocompatibilité, ces nanoparticules sont recouvertes de membranes avancées dérivées de cellules dendritiques, obtenues par lyse hypotonique et sonication, et peuvent être appliquées à des nanoparticules en poly(lactide-co-glycolide) (PLGA) ou reconstituées en microcapsules, ce qui minimise la perte de protéines pendant le processus (Kim et al., 2023 ; Ma et al., 2023 ; Sun et al., 2021).

Une autre méthode d'induction de la fusion des membranes repose sur l'utilisation de composés chimiques tels que le polyéthylène glycol (PEG), qui, en raison de son faible coût, de son efficacité et de sa simplicité d’utilisation, est largement préféré aux méthodes physiques. En parallèle, une approche émergente basée sur la stratégie chimérique s’impose comme une alternative prometteuse pour préparer des nanovésicules biomimétiques hybrides avec une grande efficacité et en toute sécurité. Récemment, des macrophages–cellules tumorales chimériques ont été préparées avec cette technologie de pointe (Sun et al., 2023).

L'ingénierie métabolique du glycome (MGE), qui consiste à introduire des analogues de monosaccharides dans les voies métaboliques des cellules pour les incorporer dans le glycocalyx de la membrane cellulaire, joue également un rôle clé dans la modification des propriétés de surface des cellules, et permet ainsi de manipuler leur fonction via des groupes fonctionnels naturels ou synthétiques (Nagasundaram et al., 2020). Cette méthode repose sur l'incorporation d'un dérivé chimique, un analogue de monosaccharide, qui est pris en charge par la cellule, subit une désacétylation et est incorporé dans les glycoconjugués présents sur la surface de la membrane. L'ajout d’un groupe chimique reporter permet ensuite de détecter cette modification à travers une réaction de couplage bioorthogonale (Sletten et Bertozzi, 2009 ; Hassenrück et Wittmann, 2019). Parmi les dérivés, les analogues de mannosamine sont particulièrement remarquables en raison de leur conversion en acides sialiques et de leur présentation en structures terminales sur la membrane cellulaire (Hassenrück et Wittmann, 2019).

L'ingénierie glyco-métabolique permet d'ajouter à la membrane cellulaire des groupes actifs non naturels, tels que des cétones, des azides, des thiols ou des alcynes-modifiés, ce qui permet de développer des mécanismes d'assemblage de nanoparticules pour la délivrance ciblée de médicaments. L'une des applications les plus prometteuses de cette approche repose sur la chimie « click », qui comprend une série de réactions caractérisées par des rendements élevés, des taux de réaction rapides, des produits non toxiques et la possibilité de se dérouler dans des milieux aqueux (Stöckmann et al., 2011). Grâce à cette chimie, il est désormais possible de conjuguer des cellules modifiées avec des agents thérapeutiques ou des biomolécules, et de suivre les processus biologiques in vivo. Par exemple, l’utilisation de groupes azides sur des chondrocytes permet de lier ces cellules avec un colorant fluorescent proche de l’infrarouge (Yoon et al., 2016), permettant ainsi un suivi efficace des cellules transplantées dans l’organisme sans interférer avec leur développement. Cette technique a de vastes applications dans les thérapies basées sur les cellules et dans le suivi des traitements.

En dépit des avantages de l'ingénierie glyco-métabolique, la chimie bioorthogonale, qui permet des réactions de conjugaison rapide et sélective sans perturber les groupes fonctionnels endogènes, est particulièrement utile pour l'amélioration de la délivrance de médicaments. En effet, elle facilite la conjugaison de nanoparticules ou d'autres agents thérapeutiques aux surfaces cellulaires de manière ciblée, réduisant ainsi les effets hors cible (Yi et al., 2022). Plusieurs réactions bioorthogonales, telles que la cycloaddition azide-alkyne catalysée par le cuivre (CuAAC) et la réaction Diels–Alder, sont utilisées pour conjuguer des nanoparticules sur les surfaces cellulaires. Cependant, certaines de ces réactions présentent des limitations, comme la toxicité des catalyseurs métalliques dans le cas de CuAAC (Mathew et al., 2015). Néanmoins, ces techniques ouvrent de nouvelles voies pour la recherche sur la glycosylation et la sialylation, ainsi que pour l'optimisation de la livraison des médicaments.

Il est essentiel pour le lecteur de comprendre que l'ingénierie des membranes cellulaires et l’ingénierie métabolique du glycome ne sont pas seulement des outils pour la modification des cellules en laboratoire, mais qu’elles ouvrent la voie à de nouvelles stratégies thérapeutiques pour des traitements plus ciblés et moins invasifs, en particulier dans les domaines de la cancérologie et des thérapies géniques. Ces approches permettent de rendre les cellules plus efficaces dans la présentation d’antigènes, dans la délivrance de médicaments, et dans la surveillance en temps réel des traitements administrés, une évolution essentielle pour la médecine personnalisée et de précision.