Dans le contexte d'un processus de stratégie de trading, il est essentiel d'étudier la condition selon laquelle la valeur du processus VTV_T à la date finale TT doit être supérieure ou égale à 0, presque sûrement, sous une probabilité PP. La proposition 9.6 montre que, dans ce cadre, VV constitue un supermartingale sous PP. Ce fait implique que V0E[V~T]V_0 \geq \mathbb{E}[\tilde{V}_T], ce qui exclut que VV puisse être le processus de valeur d'une opportunité d'arbitrage.

L'absence d'opportunités d'arbitrage dans le modèle de trading SS est une condition cruciale, que nous pouvons relier à l'absence d'opportunités d'arbitrage dans chaque modèle à une période. Cela signifie qu'il n'existe pas de stratégie ξtSt\xi_t \in S_t telle que ξt(XtXt1)\xi_t \cdot (X_t - X_{t-1}) produise un gain positif non trivial. Ce raisonnement permet d'appliquer les techniques de la section 1.6. Pour clarifier ce point, définissons l'ensemble SS^\infty, constitué de toutes les stratégies ξS\xi \in S qui sont bornées. De la même manière, nous définissons StS^\infty_t comme l'ensemble des stratégies ξt\xi_t à une période donnée.

La première proposition essentielle est la suivante : les opportunités d'arbitrage sont absentes dans SS si et seulement si, pour chaque tt, il n'existe pas de stratégie ξt\xi_t telle que ξt(XtXt1)0\xi_t \cdot (X_t - X_{t-1}) \geq 0 presque sûrement, et avec une probabilité strictement positive pour que ce produit soit strictement positif. Ceci constitue une condition équivalente aux propriétés de SS^\infty, ce qui nous amène à une conséquence importante : pour une mesure de probabilité P~P\tilde{P} \approx P, la valeur de chaque stratégie dans SS^\infty doit être un supermartingale sous P~\tilde{P}.

La structure de ces mesures de probabilité se complexifie davantage lorsque nous analysons les ensembles convexes KSK_S associés à chaque tt, définis comme l'ensemble des produits ξt(XtXt1)\xi_t \cdot (X_t - X_{t-1}), où ξtSt\xi_t \in S_t. La condition d'absence d'arbitrage implique que l'intersection de ces ensembles avec L0+L_0^+, l'ensemble des variables aléatoires non négatives, ne contient que le vecteur nul. Cette condition géométrique est liée à la convexité de l'ensemble SS, ce qui est au cœur de la théorie de l'arbitrage.

Lorsque cette condition est vérifiée, la suite des processus de valeur associée à chaque stratégie peut être manipulée via une construction inductive, en utilisant la méthode de la récursion arrière. Cela nous permet de définir des mesures P~t\tilde{P}_t qui sont équivalentes à la mesure PP et qui possèdent des densités bornées par rapport à PP. Ces densités jouent un rôle central dans le cadre de l'absence d'arbitrage, car elles assurent que les stratégies optimales peuvent être calculées et les opportunités d'arbitrage exclues de manière formelle.

Une fois que nous avons établi l'existence de ces mesures de probabilité équivalentes, nous pouvons poursuivre en prouvant que la condition KSL0+={0}K_S \cap L_0^+ = \{0\} garantit l'absence d'arbitrage dans SS. Cela implique également que pour chaque période tt, il existe une stratégie ZtLZ_t \in L^\infty telle que Zt>0Z_t > 0 presque sûrement et que l'espérance conditionnelle de Zt(XtXt1)Z_t \cdot (X_t - X_{t-1}) soit inférieure ou égale à zéro. Ce résultat est fondamental dans la démonstration de l'absence d'arbitrage dans un modèle de trading sous contraintes.

L'approfondissement de cette approche théorique passe par la reconnaissance que la condition d'absence d'arbitrage n'est pas seulement liée à la structure des prix ou à la dynamique des processus de trading, mais également aux choix de mesures probabilistes et à la manière dont ces mesures modèlent le comportement des actifs financiers. Ces éléments sont essentiels pour comprendre que, même dans des marchés complexes ou sous des contraintes spécifiques, l'absence d'opportunité d'arbitrage est un principe robuste qui garantit l'efficience du marché.

Les mesures P~t\tilde{P}_t permettent d'analyser les évolutions futures du marché de manière probabiliste, en contrôlant à chaque étape les stratégies potentielles qui peuvent émerger sous des conditions de non-arbitrage. Cela fournit non seulement un cadre théorique pour la gestion des risques, mais aussi une méthode pour détecter et prévenir les déviations susceptibles de conduire à des arbitrages.

Comment le Marché Équilibré Fait Face à la Diversité des Préférences des Agents Économiques ?

Dans une économie de marché, l'équilibre est atteint lorsque l'offre et la demande se rencontrent de manière à ce que tous les agents économiques puissent maximiser leur utilité sous les contraintes budgétaires données. Cette notion fondamentale, cependant, devient bien plus complexe lorsque les agents présentent des préférences variées. Les préférences des agents, représentées par des fonctions d’utilité, peuvent être structurées de façon à refléter différents niveaux d'aversion au risque, ce qui, à son tour, modifie la nature de l'équilibre de marché.

Dans ce contexte, imaginons une situation où un agent aa choisit d'investir dans un portefeuille composé d'options d'achat (call options) avec différents prix d'exercice, notés cic_i. Ce portefeuille peut être vu comme une combinaison linéaire d'options d'achat ayant des prix d'exercice successifs, ce qui permet de prendre une position longue sur une option d’achat avec un strike ci1c_{i-1} tout en prenant une position courte sur une option avec un strike cic_i. Ces stratégies sont représentées par des partages de portefeuilles qui, selon les préférences de l'agent, maximisent son utilité en fonction de son aversion au risque.

Prenons un exemple simple. Supposons que tous les agents aient des fonctions d’utilité HARA (Hyperbolic Absolute Risk Aversion), spécifiées comme suit :

Ia+(y)=y1γaavec0γa<1.I^+_a(y) = \frac{y}{1 - \gamma_a} \quad \text{avec} \quad 0 \leq \gamma_a < 1.

Sous cette hypothèse, pour une densité de prix donnée ϕ\phi, la demande optimale de l'agent prendra la forme :

Xa=Ia+(caϕ)=baϕ1γa,X_a = I^+_a(c_a \phi) = b_a \phi^{1 - \gamma_a},

bab_a est une constante positive. Dans le cas où tous les agents ont la même aversion au risque, i.e., γa=γ\gamma_a = \gamma pour tous aAa \in A, la condition de marché équilibré se traduit par la relation suivante :

W=aAXa=(aAba)ϕ1γ.W = \sum_{a \in A} X_a = \left( \sum_{a \in A} b_a \right) \phi^{1 - \gamma}.

Cela implique que la densité de prix d'équilibre ϕ\phi^* doit avoir la forme :

ϕ=ZWγ1,\phi^* = Z W^{\gamma - 1},

ZZ est une constante de normalisation.

Cependant, lorsque l'aversion au risque varie d'un agent à l'autre, la structure de l'équilibre devient plus complexe. Dans ce cas, la demande des agents XaX_a n'est plus simplement linéaire, mais elle dépend de manière non linéaire du portefeuille de marché WW. Cela peut se traduire par des fonctions concaves ou convexes, selon l'agent considéré. Par exemple, dans un scénario où A={1,2}A = \{1, 2\} et où les fonctions d’utilité des agents sont respectivement u1(x)=xu_1(x) = \sqrt{x} et u2(x)=logxu_2(x) = \log x, avec γ1=12\gamma_1 = \frac{1}{2} et γ2=0\gamma_2 = 0, la demande de chaque agent est différente. L'agent 1, avec une fonction d'utilité concave, montre une aversion au risque croissante, tandis que l'agent 2, avec une fonction logarithmique, affiche une aversion au risque beaucoup plus faible.