Dans le monde complexe de la gestion de produit, une compétence primordiale est souvent négligée : savoir collaborer efficacement avec les autres. Si vous avez déjà eu du mal à obtenir l'adhésion de vos collègues, à avancer sur vos projets malgré des obstacles ou à naviguer dans les tensions entre différentes parties prenantes, vous êtes loin d'être seul. La gestion des parties prenantes est une compétence cruciale mais complexe, que l'on apprend souvent sur le tas, bien après avoir pris ses premières responsabilités de leadership.

La gestion des parties prenantes alignées ne consiste pas à s’assurer que tout le monde est d’accord ou obtient ce qu’il veut. Il s’agit de créer un engagement mutuel, une volonté partagée de travailler ensemble pour atteindre un objectif commun : la réussite du produit. Un produit n’est pas le résultat de l’effort solitaire d’un individu, mais plutôt celui d’une équipe diversifiée où chaque membre, chaque acteur du processus doit apporter sa contribution. Cela inclut des personnes aux compétences et aux objectifs différents, ce qui peut compliquer la gestion du projet. Pourtant, c’est précisément dans cette gestion des relations que se trouve le cœur de la réussite en gestion de produit.

Lorsque l’on parle de gestion de produit, on évoque souvent des qualités telles que l’empathie, la réflexion stratégique, ou la capacité à penser différemment pour résoudre des problèmes complexes. Mais combien de fois applique-t-on ces mêmes qualités dans nos interactions avec les parties prenantes internes à l’organisation ? Les chefs de produits doivent savoir gérer l’ensemble de ces relations pour pouvoir naviguer entre les attentes souvent contradictoires, et parvenir à des compromis qui favorisent l’avancement du projet. Il est essentiel de comprendre que la clé réside non seulement dans la capacité à comprendre les besoins des autres, mais aussi dans la manière de gérer les désaccords de manière constructive.

Les relations entre les parties prenantes sont souvent influencées par des facteurs comme le pouvoir, les préférences personnelles et les objectifs conflictuels. Le défi réside dans la capacité à identifier ces dynamiques et à les gérer de manière stratégique. Cela commence par l’identification des acteurs clés, ceux qui possèdent le pouvoir de décision ou qui peuvent influencer l’issue du projet. Une fois ces parties prenantes identifiées, il est crucial d’établir des rapports de confiance avec elles. La confiance, une fois bâtie, devient un catalyseur pour la collaboration, permettant ainsi de réduire les tensions et d’obtenir des compromis productifs.

Une autre compétence fondamentale est la gestion des attentes. Le leadership produit ne se limite pas à la prise de décisions. Il implique également de savoir gérer les attentes des différentes parties prenantes. Savoir poser des attentes réalistes et communiquer de manière transparente est un moyen efficace d'éviter les malentendus et de garantir que chacun sait ce qu’il peut attendre d’un produit à chaque étape du développement. Le manque de clarté dans ce domaine peut mener à des déviations importantes dans la feuille de route, ou pire encore, à des ruptures de confiance.

Tout ceci nécessite une gestion continue et active des relations avec les parties prenantes. Le processus ne s’arrête pas après un premier alignement : il doit être maintenu et ajusté en fonction de l’évolution du projet et des besoins des parties prenantes. Les leaders produits efficaces savent maintenir cet alignement au fil du temps, en s’assurant que chaque partie prenante reste engagée et informée tout au long du cycle de vie du produit.

Parfois, vous devrez également faire face à des parties prenantes difficiles. Leur résistance peut se manifester sous diverses formes : critiques incessantes, refus d'accepter des décisions, ou même sabotage direct. Pour surmonter cela, il est nécessaire d’être préparé, de comprendre les motivations profondes de ces individus et de trouver des moyens de les engager d’une manière constructive. Cela demande souvent de l’écoute active, de la patience, et une capacité à négocier sans perdre de vue les objectifs à long terme du produit.

Au final, la gestion des parties prenantes ne consiste pas seulement à avoir raison ou à imposer sa vision. Il s'agit d’une compétence relationnelle, de savoir naviguer dans un environnement souvent ambigu et de créer un terrain de collaboration fertile où chaque voix peut être entendue, même si toutes les voix ne se rejoignent pas. C'est en cultivant cette capacité à réunir des acteurs divers autour d’un objectif commun que vous pourrez vraiment faire la différence et mener votre produit vers le succès.

Comment identifier les acteurs clés dans une organisation et comment naviguer dans les décisions stratégiques

Dans un environnement complexe et dynamique, la gestion des parties prenantes et la prise de décision efficace sont essentielles pour assurer la réussite d'une organisation. Une fois qu'un leader prend la tête d'une équipe ou d'un projet, il devient crucial de comprendre qui détient le pouvoir réel et comment ce pouvoir peut influencer les décisions.

Lorsqu'Irie rejoint Helthex, une entreprise en pleine évolution, elle se trouve confrontée à un défi majeur : comprendre l'organisation de ses parties prenantes pour mieux orienter ses décisions et ses stratégies. Elle commence par observer la structure de pouvoir et d'alignement au sein de l'entreprise en utilisant un outil stratégique : la matrice "Power/Alignment" (Pouvoir/Alignement). Cela lui permet de mieux appréhender les rôles de chacun et de déterminer les priorités qui influenceront les décisions futures.

Le premier constat d'Irie concerne les « alliés », des personnes qui, bien qu’elles aient un pouvoir significatif, sont alignées sur les objectifs de l’équipe. Ces individus sont des atouts précieux dans la réalisation des objectifs stratégiques. Par exemple, des personnalités comme Yacob, vice-président de l'ingénierie, ou José, directeur du design, sont identifiées comme des alliés potentiels. Ces personnes ne sont pas seulement influentes mais travaillent en harmonie avec les objectifs de l'organisation.

D'autre part, des acteurs comme Sparks ou Ella, bien qu'ayant un pouvoir indéniable, sont considérés comme des « challengers ». Leur influence sur les décisions produit est forte, mais leur alignement sur les priorités du produit est faible. Cela représente un défi pour Irie, car elle doit non seulement comprendre les objectifs de ces acteurs mais aussi gérer leurs attentes, souvent en décalage avec la direction prise par son équipe. L'une des premières décisions d'Irie est donc de catégoriser Sparks dans la zone de « danger » de la matrice, afin de mieux anticiper les risques liés à sa forte influence mais à son manque d'alignement stratégique.

Une fois cette cartographie en place, Irie peut commencer à élaborer une stratégie pour communiquer et collaborer avec ces acteurs clés. Elle doit, en particulier, mieux comprendre les objectifs de Sparks, dont les demandes fréquentes et peu expliquées soulèvent des questions sur la manière de les intégrer aux décisions stratégiques de l’équipe produit. Cependant, une clé de la gestion efficace de ces parties prenantes est d’aborder les discussions en termes de stratégie globale, en demandant à chaque acteur de clarifier ses propres priorités et objectifs.

La gestion des demandes internes représente un autre défi. Comme l'explique Eitan, l'un des responsables d'Irie, la multiplicité des demandes internes, notamment de la part de l’équipe de vente et du support, rend la prise de décision difficile. Il se trouve souvent dans une situation où il doit jongler avec les attentes contradictoires de plusieurs départements, sans pouvoir réellement prioriser les demandes de manière stratégique. Cela entraîne une fragmentation de l'effort et une dilution des résultats. La solution qu'Irie envisage est de s’assurer que ces demandes soient priorisées en fonction des objectifs stratégiques globaux de l'entreprise, et non selon l’intensité de la demande. Cela implique de définir clairement les critères de priorité, basés sur les valeurs et la direction stratégique de l'entreprise.

La prise de décision chez Helthex, comme dans beaucoup d'entreprises, repose souvent sur une multitude de facteurs externes et internes. Il est donc crucial de ne pas se laisser influencer uniquement par les voix les plus fortes ou les demandes immédiates des parties prenantes. Irie et son équipe doivent constamment rappeler que la stratégie produit doit découler de la vision à long terme de l'entreprise et des objectifs stratégiques globaux, et non des préférences de certains individus ou départements.

Un aspect essentiel que les dirigeants doivent garder en tête est la gestion de la tension entre les demandes immédiates et les objectifs à long terme. L'approche d'Irie consiste à ne pas céder à la pression du court terme, mais à orienter les discussions vers une réflexion plus stratégique sur les priorités organisationnelles. Cela demande une gestion subtile des relations avec des acteurs puissants mais peu alignés, comme Sparks, tout en cultivant des alliances solides avec ceux qui soutiennent la direction stratégique de l'entreprise.

En conclusion, la gestion des parties prenantes et la prise de décision dans un environnement complexe nécessitent une compréhension claire de la dynamique de pouvoir, mais aussi de l'alignement stratégique. Il est crucial de savoir où se situent les différents acteurs sur cette matrice et de développer des stratégies de communication et de collaboration adaptées à chaque situation. Cela permet non seulement d'éviter les conflits, mais aussi de créer un environnement propice à la réussite des projets à long terme.

Quel est l'impact de la co-création sur la productivité et les relations au travail ?

Dans leur ouvrage The Human Element (Wiley 2021), Loran Nordgren et David Schonthal relatent une expérience réalisée dans une usine Harwood, dirigée par Alfred Marrow. L’expérience consistait à diviser les travailleurs en trois groupes et à leur demander d’adopter un nouveau processus de travail, mais dans des conditions distinctes : 1) une formation où les travailleurs recevaient simplement des instructions, 2) une formation avec retours où les instructions étaient données, suivies de retours et ajustements avant l’adoption du nouveau processus, et 3) une co-création où les travailleurs étaient invités à résoudre le problème et à participer à l’élaboration du nouveau processus.

L’approche de co-création s’est révélée être la plus fructueuse. Les travailleurs ont non seulement augmenté leur productivité, mais les relations entre travailleurs et managers se sont améliorées. Ce qui peut paraître surprenant, c’est que les deux autres approches — formation et formation avec retours — se sont avérées quasi indiscernables l’une de l’autre. Ces deux méthodes ont entraîné une productivité plus faible qu’avant la mise en place du processus, une résistance manifeste au changement et des relations plus tendues entre les travailleurs et leurs managers.

Cela nous apprend une leçon importante : simplement communiquer vos objectifs, priorités ou feuille de route sans impliquer les parties prenantes dans l’élaboration du plan engendre de la résistance. De même, demander un retour sur un plan sans impliquer les concernés dans sa construction ne suffit pas à réduire cette résistance. Il est crucial d’embarquer vos parties prenantes dans le processus et de les amener à se sentir partiellement responsables du succès de la mission.

Les ateliers de co-création jouent un rôle central dans ce processus. Organiser un atelier implique de réunir les bonnes personnes, de clarifier les objectifs, de définir des règles de conduite et de s’assurer que les activités sont productives. Ces ateliers peuvent avoir des objectifs variés : générer des idées, évaluer des solutions, ou même prendre des décisions décisives pour fixer des priorités. Selon le but de l’atelier, le nombre idéal de participants peut varier, mais il est généralement recommandé de ne pas dépasser une vingtaine de personnes pour des ateliers génératifs ou évaluatifs. Les ateliers décisionnels, en revanche, se révèlent plus efficaces avec des groupes plus petits, de trois à cinq personnes, pour garantir que des décisions fermes puissent être prises.

Un autre aspect à prendre en compte est la sélection des participants. Il est essentiel d’inclure des personnes qui possèdent des informations pertinentes ou qui risquent de s’opposer plus tard si elles ne sont pas consultées. L’inclusion des "Power Players", ceux qui détiennent une certaine influence, est également primordiale. Cependant, un choix judicieux doit aussi viser à limiter la taille du groupe pour maintenir la concentration sur l’objectif.

Avant l’atelier, il est crucial de bien expliquer les objectifs, les résultats attendus et ce qu’on attend des participants. En comprenant ces éléments, ils seront d’autant plus investis. Si certains stakeholders n’ont pas la possibilité d’assister à l’atelier, il est important de prévoir des entretiens individuels, soit avant, soit après, pour recueillir leur point de vue et les inclure dans le processus. De cette manière, même ceux qui sont réticents à participer à un atelier peuvent être engagés de manière significative.

Les règles de conduite dans un atelier sont essentielles pour garantir un bon déroulement. Il est recommandé de commencer l’atelier en précisant ces règles, qui favorisent une participation active et respectueuse de tous. Parmi les règles communes, citons : respecter les opinions des autres, utiliser des déclarations en "je" plutôt qu’en "vous", et surtout éviter les distractions et l’interruption pendant les échanges. Un atelier efficace nécessite la pleine attention de chacun, sans distractions externes, et un environnement de travail mentalement présent pour tous les participants.

Les activités d’un atelier sont également déterminantes pour son succès. Ces activités doivent être structurées et permettre des étapes progressives : définition du problème, génération d’idées, puis processus décisionnel pour sélectionner une solution à tester. Par exemple, une écriture silencieuse où chaque participant prend le temps de réfléchir avant de partager ses idées peut être utilisée pour s’assurer que toutes les opinions sont prises en compte sans l'influence immédiate des autres. Les petits groupes de travail sont également une excellente méthode pour garantir que chaque voix soit entendue et que tout le monde contribue au processus.

Pour aller plus loin, il est essentiel de comprendre que l’inclusion active des participants dans le processus de création permet non seulement d’améliorer la qualité des solutions générées, mais aussi de renforcer l’adhésion au projet. Ce type de collaboration fait naître un sentiment d’appartenance et de responsabilité partagée, ce qui est fondamental pour l’engagement à long terme. En outre, la co-création favorise un climat de confiance et de respect mutuel, ce qui est particulièrement crucial dans des environnements de travail où les relations humaines jouent un rôle clé dans la performance organisationnelle.

Comment maintenir l'alignement stratégique et prévenir la dégradation de l'alignement au sein des équipes ?

L'un des défis majeurs auxquels sont confrontées les entreprises, qu'elles soient petites ou grandes, réside dans la gestion de l'alignement stratégique au sein de l'équipe. Cela devient particulièrement complexe lorsque les équipes sont constituées de parties prenantes issues de différents départements et disciplines, chacun ayant ses propres priorités et objectifs. L'alignement stratégique, lorsqu'il est initialement défini, peut très vite se dégrader si les équipes n'ont pas une communication régulière et constante. Ce phénomène, appelé la « dégradation de l'alignement », peut avoir des conséquences graves, non seulement sur l'efficacité des équipes, mais aussi sur la réussite du produit ou du projet en cours.

La dégradation de l'alignement se produit lorsque les parties prenantes, après s'être mises d'accord sur une stratégie ou un plan d'action, se dispersent pour travailler de manière autonome sans communiquer régulièrement entre elles. Cela peut entraîner des décisions isolées qui ne tiennent pas compte des avis des autres équipes ou qui entrent en contradiction avec les objectifs initiaux. Un des risques majeurs de cette dégradation est de voir des produits ou services développés qui ne répondent plus aux besoins réels des clients ou qui sont mal adaptés aux évolutions du marché. De plus, cela peut nuire à la cohérence du message marketing et à la présentation du produit aux clients.

Pour prévenir cette dégradation de l'alignement, il est essentiel d'instaurer des mécanismes de communication continue et régulière entre toutes les parties prenantes. Rappeler fréquemment les objectifs initiaux, les accords pris et les raisons sous-jacentes de ces décisions est crucial. Il peut être utile d'envoyer des mises à jour régulières, par exemple sous forme d'emails, qui rappellent les objectifs et l'état d'avancement du projet. L'idée est de maintenir une vigilance constante pour que chaque membre de l'équipe reste engagé et conscient du cadre global du projet. Ces communications doivent, bien sûr, être adaptées aux évolutions qui peuvent survenir, comme des changements dans les priorités du marché ou de nouvelles informations stratégiques.

En outre, pour garantir que l'alignement soit maintenu sur le long terme, des réunions régulières de révision de la feuille de route (roadmap) doivent être organisées avec les parties prenantes clés. Ces réunions offrent une occasion formelle de vérifier que tout le monde reste sur la même longueur d'onde, tout en permettant de discuter des succès obtenus, des difficultés rencontrées et des ajustements à apporter au plan stratégique. Lors de ces réunions, l'agenda doit être clair et envoyé à l'avance, afin que chaque participant puisse se préparer et que les discussions soient structurées et productives.

Une autre méthode pour éviter la dégradation de l'alignement consiste à organiser des réunions préalables avec chaque partie prenante pour s'assurer que toutes les préoccupations sont entendues et prises en compte. Cela permet non seulement de mieux préparer la réunion de révision, mais aussi de prévenir des oppositions ou divergences qui pourraient surgir lors des discussions collectives. Ce processus de « diplomatie de navette », où chaque partie est consultée individuellement avant les réunions de groupe, peut réduire le risque de décisions contradictoires ou de non-adhésion à une nouvelle stratégie.

Il est également pertinent de documenter toutes les décisions prises au cours du projet, notamment à travers l'usage d'un « journal des décisions ». Ce document permet de garder une trace écrite des choix stratégiques, des raisons de ces choix, ainsi que des attentes associées. Cette documentation facilite non seulement le suivi du projet, mais elle offre également un moyen de réévaluation à posteriori. Si des ajustements sont nécessaires, un retour sur les décisions prises peut fournir des informations clés sur ce qui a bien fonctionné et ce qui doit être amélioré. Ces journaux de décisions, qu'ils soient détaillés ou plus simples, garantissent que les décisions sont partagées et bien comprises par toutes les parties prenantes.

Un autre outil précieux dans cette démarche est le « log RAID » (Risques, Actions, Problèmes, Décisions). Ce log permet de capturer non seulement les décisions prises, mais aussi les risques identifiés, les actions à entreprendre et les problèmes à résoudre. Il constitue un moyen de suivre l'ensemble des éléments critiques d'un projet complexe, et assure que rien n'est négligé dans la gestion de l'alignement.

La clé de la réussite réside donc dans la constance des communications, dans l’organisation régulière de points de suivi, et dans la documentation systématique des décisions. Si ces principes sont respectés, l'alignement stratégique restera solide et la dégradation de cet alignement pourra être évitée, même dans des environnements de travail complexes et en constante évolution.

Enfin, l'ajustement constant de la stratégie en réponse aux retours des équipes, du marché et des clients est indispensable pour maintenir une direction cohérente et pertinente à long terme. Ce processus nécessite de la flexibilité, de la transparence et une volonté de collaboration continue.