L’abandon foncier dans les zones urbaines en déclin est un phénomène complexe qui trouve ses racines dans une multitude de facteurs socio-économiques et politiques. En premier lieu, l'abandon est fortement lié à une réaction raciale, exacerbée par les forces d’un marché débridé qui affecte de manière disproportionnée les communautés noires. Dans un cadre idéologique de racisme laissez-faire, la dégradation de certains quartiers est perçue comme le reflet d'une défaillance ou d'une corruption culturelle, ce qui justifie l’absence de compassion ou d’empathie envers leurs habitants. Selon cette logique, les victimes de l’abandon foncier deviennent les coupables. En imposant des politiques de dérégulation des marchés immobiliers, les partisans d’une utopie du marché libre renforcent les inégalités. Cela se manifeste par l'intensification des effets destructeurs du marché sur des territoires déjà fragilisés, transformant les quartiers en véritables « marchés de la loi du plus fort », où des prédateurs et des récupérateurs prennent possession des terres abandonnées.
L’impact de ces politiques est particulièrement visible dans des villes comme Detroit, où la dérégulation totale des marchés fonciers n’a eu aucune conséquence pour les législateurs ruraux blancs républicains, bien plus influents que les autorités locales ou les résidents des quartiers en détresse. Les politiques de dérégulation des marchés fonciers sont ainsi façonnées par des forces extérieures puissantes, qui ignorent les réalités des zones urbaines affectées. À l’échelle locale, les autorités municipales et les groupes communautaires se trouvent souvent dans une lutte constante pour exercer un contrôle sur l’abandon foncier et la prédation immobilière.
L’abandon foncier est alimenté par une série de facteurs, notamment la fuite des blancs vers les banlieues, l’extension des zones suburbaines, l’urbanisation vieillissante et les transformations économiques. Si certains de ces phénomènes échappent au contrôle des politiques publiques, d’autres, comme les permis de construction en périphérie, sont régis par des gouvernements concurrentiels qui ne se préoccupent guère de l’abandon foncier dans les villes voisines. Les villes elles-mêmes disposent d’un pouvoir limité pour intervenir, notamment en raison de la pression exercée par les forces extérieures, telles que les politiques fédérales et les législations des banlieues adjacentes.
Face à ces défis, de nombreuses autorités locales et groupes communautaires ont tenté diverses approches pour atténuer les effets de l'abandon foncier. Parmi les solutions proposées par les urbanistes et les chercheurs, on retrouve l'utilisation de terrains vacants pour des jardins communautaires, des vergers ou même des parcs urbains, afin de stabiliser les quartiers et promouvoir un usage fonctionnel de ces espaces abandonnés. Parallèlement, des propositions visant à limiter l'achat de propriétés en mauvais état ou à renforcer la régulation des propriétaires ont été avancées pour contrer la prédation immobilière.
Une approche préventive est également envisagée, consistant à développer des méthodes prédictives pour identifier les propriétés problématiques avant qu’elles ne deviennent des foyers de négligence, en mettant en place des contrôles plus stricts concernant l'enregistrement des propriétés et les normes de construction. Toutefois, la mise en œuvre de ces solutions se heurte à des obstacles politiques majeurs, notamment en raison de la résistance des forces externes et des gouvernements de banlieue qui préfèrent des réponses orientées vers le marché.
Dans ce contexte, les techniques de gestion foncière peuvent être classées selon quatre grands paradigmes : non-marchand, managérial, entrepreneurial et purement marchands. Chacun de ces paradigmes reflète une philosophie distincte quant à la manière de gérer l’abandon foncier et ses conséquences. Les approches non-marchandes visent à décommodifier les terrains en les retirant de la sphère privée, par exemple en les convertissant en logements sociaux ou en espaces verts publics. Les approches managériales, quant à elles, cherchent à réguler les activités du marché foncier privé par des contrôles comme les inspections de bâtiments ou des sanctions fiscales.
Les approches entrepreneuriales privilégient la collaboration entre l'État et des investisseurs privés pour valoriser des terrains abandonnés, tandis que les approches purement marchandes cherchent à minimiser l’intervention de l'État en supprimant les régulations foncières. Bien que ces stratégies puissent sembler répondre aux défis posés par l’abandon foncier, elles ne sont pas exemptes de critiques, notamment en ce qu'elles laissent souvent de côté les populations les plus vulnérables et favorisent la spéculation immobilière. En effet, les politiques orientées vers le marché ont peu de valeur dans les quartiers en détresse et sont souvent mal accueillies par leurs habitants.
Les techniques non-marchandes, qui incluent l’utilisation de terrains vacants pour des projets communautaires ou écologiques, sont souvent perçues comme des solutions alternatives sensées, surtout dans les villes en déclin où il existe un surplus de terres inutilisées. Ces méthodes pourraient potentiellement améliorer la qualité de vie en créant des espaces verts, des parcs ou même des forêts urbaines. Toutefois, leur mise en œuvre est limitée par des forces extérieures, telles que la pression des politiques de croissance urbaine des banlieues voisines ou des législations favorisant les intérêts des investisseurs privés.
Enfin, bien que ces différents paradigmes offrent des pistes pour une gestion plus équitable de l’abandon foncier, il est crucial de comprendre que les politiques publiques locales sont souvent impuissantes face aux dynamiques économiques et politiques plus larges. L'enjeu principal reste de déterminer si les villes, face à ces forces oppressantes, peuvent réussir à adopter des stratégies de gestion foncière qui privilégient l'intérêt public et la stabilité des communautés urbaines plutôt que de se soumettre aux logiques de marché purement spéculatives.
Comment la gouvernance entrepreneuriale affecte le développement urbain et la gestion des quartiers dégradés
L'évolution des politiques urbaines a conduit à une réorientation notable du financement des villes, se détournant des subventions massives allouées à l'infrastructure et aux services sociaux, au profit d'un modèle dans lequel les villes doivent rivaliser entre elles pour attirer les investissements privés. Dans ce système, le marché prend la tête de l'initiative, tandis que l'État local ne joue qu'un rôle facilitateur, doté de quelques outils nécessaires (zonage, droit de préemption, pouvoir fiscal). Les autorités municipales sont donc responsables d'utiliser ces leviers pour réduire ou compenser les coûts liés aux affaires et à la propriété dans leurs juridictions territoriales. Si ces outils ne sont pas toujours applicables au développement des quartiers dégradés, trois d'entre eux ont été largement promus comme des solutions politiques ou mises en œuvre dans de nombreuses villes : les exonérations fiscales pour les investisseurs, l'assemblage foncier via les pouvoirs de préemption, et l'émission d'obligations municipales pour réduire les coûts liés aux projets de développement.
Le levier fiscal est sans doute l'instrument le plus direct dont disposent les villes pour alléger les coûts. Aux États-Unis, les taxes foncières représentent la principale source de revenus pour les municipalités. Les conservateurs et les partisans du modèle de croissance urbaine ont longtemps plaidé pour des réductions de ces taxes, des plafonds sur les hausses fiscales (financées par des coupes dans les services), ainsi que des exonérations fiscales pour les entreprises prêtes à investir dans la ville. Ces stratégies sont perçues comme des pratiques exemplaires dans le cadre de la gouvernance foncière entrepreneuriale, bien que leur application soit limitée dans les quartiers en difficulté. Depuis longtemps, les conservateurs aux États-Unis, ainsi qu'au Royaume-Uni, défendent une approche ciblée de réduction fiscale dans ces zones spécifiques. Des termes comme "zones d'opportunité", "zones d'autonomisation" ou "zones d'entreprise" ont été utilisés pour désigner ces régions, l'idée étant de créer une zone à faibles taxes afin d'attirer des investissements. Ces mécanismes offrent des allégements fiscaux aux entreprises ou investisseurs désireux d'investir dans ces zones défavorisées. D'autres mesures plus complexes, comme le financement par taxe incrémentielle ou les bons d'anticipation fiscale, permettent aux villes de mobiliser les taxes qui seraient payées pour financer des projets immobiliers.
Parallèlement, des approches plus exotiques comme l'utilisation du droit de préemption pour l'assemblage foncier sont également privilégiées. Le droit de préemption permet à l'État local d'acquérir des propriétés pour des fins publiques telles que des écoles ou des routes. Une stratégie plus controversée consiste à utiliser ce pouvoir pour assembler des terrains, qui sont ensuite offerts ou vendus à des promoteurs privés pour la construction de bureaux, de logements ou d'espaces commerciaux. L'argument juridique derrière ces transactions est que le développement foncier génère davantage de recettes fiscales, contribuant ainsi à l'intérêt public. Cette interprétation a fait l'objet de débats depuis la décision de la Cour Suprême des États-Unis, Kelo v. City of New London, en 2006, mais reste un élément clé de la politique de développement économique dans de nombreuses villes, notamment dans les zones urbaines centrales.
Le recours à l'émission d'obligations municipales pour financer le développement immobilier est également une approche privilégiée dans ce paradigme. Les villes ont la capacité d'émettre des obligations pour financer des infrastructures, et depuis les cinquante dernières années, elles ont commencé à utiliser ces pouvoirs pour des projets spécifiques. Ces obligations sont émises pour financer des districts de développement, dont les fonds seront remboursés par les recettes provenant des frais de développement, des loyers ou des ventes de terrains, si le projet réussit. Les ressources ainsi levées peuvent servir à la réhabilitation de sites contaminés, à la construction ou à l'amélioration d'infrastructures, et même à financer directement des projets de développement privés. Bien que les obligations municipales en général soient considérées comme des investissements relativement sûrs, cette application particulière – utiliser les pouvoirs des obligations pour développer des terrains – est la plus risquée et présente un taux de défaut élevé.
L'engouement pour ces mesures entrepreneuriales s'explique en partie par la lente érosion des pouvoirs de l'État local et l'influence croissante des think tanks et des "machines locales" de croissance. Les stratégies basées sur le marché sont présentées comme une solution universelle au déclin urbain. L'idée sous-jacente est que les villes sont trop taxées et trop réglementées, et qu'en supprimant ces obstacles, le développement pourra se produire. Toutefois, les résultats empiriques de ces mesures restent mitigés, notamment pour les zones résidentielles les plus dégradées.
Les approches fiscales sont problématiques dans les quartiers en déclin, car ces villes se retrouvent souvent en position de faiblesse dans les négociations. Les autoroutes subventionnées par le gouvernement fédéral facilitent l'accès à des zones suburbaines moins polluées, incitant ainsi les entreprises à se déplacer vers des localités périphériques, loin des centres-villes dégradés. Si certaines villes ont réussi, dans une certaine mesure, à attirer des entreprises en centre-ville grâce à ces mesures, les coûts pour le fonds général sont élevés : les services doivent toujours être fournis, mais les recettes fiscales sont réduites en raison des exonérations. Par contraste, ces stratégies sont particulièrement inefficaces dans les quartiers résidentielles fortement dégradés.
Dans ces zones, le véritable obstacle à l'investissement ne réside pas dans les coûts fiscaux, mais dans la dépréciation rapide de la valeur des biens. Le coût des taxes reste marginal par rapport au coût d'opportunité associé à l'achat ou à la construction d'un bien immobilier qui perd immédiatement de la valeur. Ainsi, dans les quartiers les plus défavorisés, les projets de développement sont presque toujours financés directement par des fonds publics résiduels.
De même, les approches reposant sur le droit de préemption et les obligations municipales souffrent de limitations similaires. Si, dans certaines circonstances, l'acquisition de terrains ou la prise en charge des coûts de développement peut stimuler l'activité économique, cela n'est généralement vrai que pour les zones centrales des villes, et même dans ces zones, le succès n'est pas garanti. Dans les quartiers dégradés, l'accessibilité des terrains et leur coût ne sont pas les principaux problèmes : c'est la dynamique de la chute des valeurs immobilières qui reste déterminante. Même si ces mesures étaient appliquées dans ces quartiers, elles ne généreraient pas nécessairement des investissements privés.
Comment les politiques urbaines contemporaines perpétuent la privation organisée et la marginalisation des quartiers en déclin
Les décennies passées ont vu une évolution marquante dans la manière dont les États-Unis abordent la question de la pauvreté urbaine et du déclin des quartiers. Le rapport de la Commission Kerner, publié en 1968, prônait une intervention gouvernementale active pour répondre aux inégalités raciales et aux conditions de vie déplorables des communautés urbaines, en particulier les quartiers noirs pauvres. Cependant, cinquante ans après cette analyse, les politiques urbaines ont pris un tournant décisif, s'éloignant de l'idée d'un soutien renforcé pour ces zones dévastées.
Aujourd'hui, la réponse politique aux quartiers en déclin est marquée par une philosophie néolibérale de privation organisée. Là où le rapport Kerner insistait sur la nécessité d’investir dans les quartiers pauvres, d’offrir des services publics et de lutter contre les prédateurs sociaux, les politiques actuelles se concentrent plutôt sur la réduction des dépenses publiques et la suppression des services sociaux dans les zones les plus défavorisées. Une grande partie de ces politiques se résume à une sorte de « rationalisation » des villes, où l’on tente de réduire les coûts en supprimant des infrastructures existantes et en abandonnant des quartiers entiers au profit d’investissements immobiliers.
Les politiques actuelles, qui privilégient une approche punitive plutôt que préventive, ont pour conséquence la marginalisation de plus en plus prononcée des quartiers les plus pauvres. L'idée que les programmes sociaux sont responsables de l'aggravation des inégalités urbaines a été adoptée par de nombreux conservateurs, notamment par Jason Riley, qui, à l'occasion du 50e anniversaire du rapport Kerner, a critiqué les progressistes pour leur vision réductrice de l'inégalité raciale. Selon lui, ce n’est pas tant le racisme systémique qui explique la pauvreté des quartiers noirs, mais une culture déficiente et un manque de responsabilité personnelle.
Cette vision conservatrice, selon laquelle la solution réside dans l'auto-assistance et la discipline personnelle plutôt que dans une aide étatique, se retrouve aujourd'hui dans les politiques urbaines. Les dépenses gouvernementales sont systématiquement réduites dans les quartiers en déclin, et la seule augmentation des services concerne la police et les prisons, comme si l’une des réponses à la pauvreté était une surveillance accrue plutôt qu’un soutien social. Ce phénomène de « privation organisée » prend des formes multiples, notamment en légitimant l’abandon des quartiers dévastés et en favorisant des politiques qui privilégient les intérêts immobiliers sur le bien-être social.
Parallèlement à cette régression des politiques sociales, un phénomène préoccupant est l’émergence de la « réduction de taille » ou "rightsizing", une démarche où des quartiers entiers sont désinvestis et parfois physiquement démantelés. Ces actions sont souvent présentées sous des termes rassurants, mais elles impliquent une réelle dégradation des conditions de vie pour les habitants de ces zones. Ce processus, en apparence technique, cache en réalité une forme de triage social où certaines populations sont condamnées à l'oubli.
Il est également essentiel de comprendre que cette dynamique ne se déroule pas seulement à un niveau local. Bien que les décisions concernant les politiques urbaines soient souvent perçues comme relevant du gouvernement local, une grande partie des décisions provient de l'État et du gouvernement fédéral, ainsi que d'institutions privées, dont les intérêts ne coïncident pas nécessairement avec ceux des populations locales. Ces politiques sont renforcées par un ensemble d’idées néolibérales qui prônent une réduction de l'État social et une libéralisation accrue des marchés urbains.
Les propositions de « réduction de taille » et de triage urbain ne sont pas nouvelles. Elles ont été formulées à plusieurs reprises depuis les années 1940, mais leur persistance dans les dernières décennies soulève des questions fondamentales. Pourquoi, si de telles propositions sont politiquement toxiques, continuent-elles à être envisagées ? L’explication réside en partie dans la manière dont les politiques urbaines sont façonnées. Les intérêts des investisseurs privés et des entreprises immobilières jouent un rôle crucial dans la définition de ces politiques, et l’intérêt pour la rentabilité à court terme semble l’emporter sur les besoins de la population.
Enfin, il est crucial de comprendre que cette approche néolibérale ne s’adresse pas simplement à la gestion de la pauvreté urbaine, mais qu’elle façonne une véritable vision du monde dans laquelle les individus, et en particulier les populations issues des minorités raciales, sont perçus comme responsables de leur propre marginalisation. Ce n’est plus une question de réparer les injustices systémiques, mais de contrôler et d’isoler les populations considérées comme « déviantes ». Cette approche met en lumière une tendance inquiétante à négliger les besoins humains de base au profit d’une logique économique qui favorise l’exclusion sociale et la concentration des richesses.
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