Le portrait d’un homme corpulent, placide, coiffé d’un collier rigide et d’une chevelure blonde en déclin, ses yeux quelque peu vides, se dresse dans l’ombre d’un salon, comme une présence figée dans le temps. L’homme qui guide Denys dans cet espace étrange, Platt, lui indique qu’il s’agit de Cecil Rhodes, et sous le portrait, une inscription gravée sur la cheminée attire son regard : « Pour détruire la grande œuvre du temps et fondre les royaumes anciens dans un nouveau moule. » C’est une référence à un poème de Marvell, qui parle de Cromwell, une citation qui semble tout à fait à sa place dans ce cadre énigmatique. Platt ajoute qu’il la consulte souvent, « en travaillant ici ». Mais ce qu’il ressent, à cet instant précis, en pénétrant dans ce lieu au-delà du temps, va bien au-delà de la simple contemplation d’un tableau.
Denys, en effet, avait presque hésité à venir. L’invitation, un simple bout de métal avec une bande brune, était restée dans sa poche, pressante, indélébile, le poussant inexorablement à se rendre à l’endroit indiqué par Davenant. Il aurait pu ignorer cette convocation, comme il le fait si souvent avec les petites obligations de la vie. Mais la carte n’avait cessé de le hanter, un rappel continu qu’il ne pouvait laisser passer. Le bâtiment, l’Orient Aid Society, est une vieille bâtisse dans un style gothique français, l’extérieur aussi discret qu’étrange. Trois cabines téléphoniques, un peu à l’écart, dont la première cache un slot presque invisible, un geste mécanique pour introduire la carte, et une sensation vertigineuse d’un sol qui glisse sous les pieds, comme un sol mouvant dans une maison de la foire, conduisent Denys dans un lieu qu’il ne comprend pas encore totalement.
L’intérieur, un hall d’entrée de club vieillissant, avec un tapis oriental usé et un vieil employé accueillant les invités, donne une fausse impression de normalité. Mais c’est bien là que commence une aventure d’un genre que l’esprit humain peine à saisir. En traversant la porte, Denys a pénétré dans un autre monde, dans un espace où le temps lui-même n’a plus de signification habituelle. C’est un paradoxe absolu : un lieu où l’on peut voyager dans le passé et en même temps interagir avec ce passé pour en modifier le cours, non seulement pour affecter l’avenir de ce passé, mais aussi pour remodeler l’avenir de ce présent même.
La nature de ce « Club », ou plutôt de cette « Autre Société », reste floue dans les mots de ceux qui y appartiennent. Ce n’est pas tout à fait une fraternité, dit Davenant, car l’idée même de fraternité semble dénuée de sens ici. C’est une communauté d'individus capables d’interférer avec le temps, de se déplacer entre les couches du passé, pour changer la réalité qui les entoure. Chaque membre de cette société, en ayant accès à des événements passés, peut modifier ce qu'il savait, et par cette modification, influer sur le monde qu'il connaît, celui du présent. Mais cet impact se fait sans qu’ils en aient conscience. Ce sont des marionnettes dans un jeu où les fils du destin sont constamment tirés et détachés.
Ce qui frappe d’emblée dans cette découverte, c’est la froideur presque clinique avec laquelle les protagonistes en parlent. Platt, avec son esprit acéré et détaché, explique que l’expérience elle-même est difficile à saisir : une notion de temps fracturé, où les actions dans le passé affectent immédiatement et indiscutablement le futur. Cette expérience de l’immatériel est un mal difficile à éviter. Mais il faut l’accepter, selon eux. Comme un ascenseur, un lieu clos dans lequel on se trouve enfermé sans savoir précisément ce qui se passera, sauf qu’au bout du chemin, une porte s’ouvre, et on arrive quelque part... mais pas tout à fait ailleurs. C’est un concept impensable dans le cadre des lois ordinaires de la physique et de la logique, et pourtant, c’est là que se situe la réalité de l’Autre Société.
Le temps, au fond, n’est plus une ligne droite mais une série de possibilités infinies. L’une de ces possibilités est la capacité de se déplacer dans le passé, mais avec une restriction : les membres de cette société peuvent seulement aller en arrière jusqu’à la fondation même de l’Autre Société, en 1893, selon les instructions du testament de Cecil Rhodes. En théorie, ils pourraient traverser d’autres périodes, mais seuls les événements situés dans ce créneau temporel sont accessibles. Et même cela est limité par une règle stricte : un individu ne peut revenir à une époque qu’il a déjà visitée, sous peine de rencontrer son propre « moi » dans un autre espace-temps, une rencontre qui pourrait s’avérer fatale pour l’équilibre de cette structure délicate.
Les implications sont profondes, non seulement sur un plan philosophique, mais aussi dans leur application pratique. L’incapacité à comprendre la vraie nature de ce voyage dans le temps amène à une confusion radicale entre la réalité vécue et la réalité modifiée. Le paradoxe n’est pas simplement un exercice intellectuel mais une expérience vécue, où chaque instant semble fragile, soumis aux manipulations subtiles des membres de la société. La réalité elle-même, leur réalité, pourrait être un tissu d'illusions, constamment modifié par des actions qui échappent à leur contrôle direct, et pourtant influent sur leur existence.
Dans cet univers, il est crucial de saisir que tout est une question de perception et de relation avec le temps. Le temps n’est pas un vecteur linéaire mais une série de boucles et de possibilités entrecroisées. Ceux qui appartiennent à cette société ne sont pas maîtres du temps, mais en font partie, vivant dans un monde où les règles du destin et de la causalité sont déformées. Les membres de cette société sont condamnés à vivre dans une compréhension fragmentée de leur existence, où l'avenir et le passé sont constamment remodelés, mais sans qu'ils ne puissent jamais s'en souvenir pleinement.
Comment la logique de l'inéluctabilité façonne les événements dans un monde d'incertitudes
La lumière était claire, pure, froide, semblait chargée d'une puissance tranquille, comme si elle pouvait tout aussi bien aveugler ou brûler qu'éclairer. Cette lumière, d'une beauté presque irréelle, semblait contenir le potentiel de transformer l'existence des individus qui s'en approchaient. Le Président pro tempore de l'Otherhood se souvint d'elle avec une précision désarmante, comme si cette lumière avait une place privilégiée dans le grand jeu auquel il participait. Tout était déjà écrit, et pourtant, dans le flux des événements, une forme de liberté semblait exister, bien que de plus en plus insaisissable.
La montagne appelée Table Mountain, surplombant une ville en pleine construction, devenait le théâtre d’un jeu d'ombres et de lumières, où les protagonistes suivaient des chemins tracés d’avance. La ville, la péninsule, le mont, tout semblait fait pour accueillir une histoire qui se répétait inlassablement. Le groupe qui suivait la mission n’était pas seulement en reconnaissance ; il était là pour jouer son rôle dans un scénario déjà joué, mais dont l’issue demeurait incertaine tant que les pièces n’étaient pas en place. Chaque décision prise, chaque mouvement effectué semblait être une répétition d’un processus déjà connu, une sorte de rituel où l’important n'était pas l'issue, mais la conformité à une tradition.
Le plan, qui semblait une simple formalité, reposait sur un enchevêtrement d’incertitudes et de prémonitions. La rencontre à Groote Schuur, avec ses vastes chambres et ses visiteurs venus d'Afrique, d'Angleterre et d'Europe, n'était qu'un décor pour une scène plus vaste, un lieu où le crime devait se jouer avec l'illusion d'un accident. Cette maison, au sommet des collines, observait les voyageurs et les étrangers comme des spectateurs privilégiés d'une tragédie imminente. Le problème, si tant est qu'il y en ait un, n'était pas d'accéder à ce lieu, mais de saisir le moment précis, celui où l'homme qu'ils cherchaient à faire disparaître serait seul, vulnérable. Tout le reste n’était qu'un théâtre où les acteurs étaient déjà désignés, où la trame de l’histoire était inévitable.
La situation, cependant, n’était pas aussi simple qu’un jeu d’échecs où chaque coup mène inévitablement à une position gagnante. En réalité, les implications de chaque décision étaient infinies. L'échec de l'assassinat dans le bush, qui avait provoqué une guerre punitive contre les peuples Matabele et Mashona, mettait en lumière la fragilité du plan. Il était clair que, dans cet environnement complexe, rien ne se passait comme prévu, que tout se tenait à un fil, et que les conséquences de chaque erreur seraient lourdes. Le plan initial, qui semblait si évident, avait mis des vies entières en péril, entraînant une décennie de souffrances et de pertes.
L’idée de l’assassinat parfait était également teintée de contradictions. L'homme à abattre était un personnage entouré de jeunes hommes, des "anges" qui l’accompagnaient dans ses moments d’intimité et de pouvoir. Ces jeunes hommes, sans grande intelligence mais pleins de ressources et prêts à tout, incarnaient le paradoxe du pouvoir : à la fois dépendants et dangereux. L’assassinat, loin d'être un acte isolé, s’inscrivait dans un réseau complexe de relations, de fidélités et de compromissions. La décision devait être prise en un instant, un moment précis où les autres forces en jeu pourraient être manipulées.
Les actions qui semblaient les plus naturelles étaient en réalité les plus manipulées, et la logique de l'inéluctabilité sous-tendait chacune de ces décisions. Dans ce monde, les individus agissaient non pas dans une liberté totale, mais dans les limites d'un ordre déjà établi, un ordre dont les fils invisibles guidaient leurs pas vers un but déjà connu, tout en leur laissant l'illusion du choix.
Il est essentiel, dans ce contexte, de comprendre que le destin, souvent vu comme une force extérieure, est en réalité façonné par des choix humains apparemment insignifiants mais inévitablement connectés à un tout plus vaste. Les événements ne se produisent pas simplement par hasard, et l'idée même de chance ou de hasard doit être remise en question. Le véritable enjeu réside dans la prise de décision, dans l'acceptation de certaines vérités sans recours à des illusions d'indépendance totale. Le monde est régi par des règles invisibles, mais cela ne signifie pas que les individus sont sans pouvoir. Au contraire, c’est précisément leur conscience de cette complexité qui leur permet de naviguer avec efficacité dans des eaux souvent troubles. Les hommes qui sont capables de voir au-delà de l’apparente liberté d’action comprennent que la véritable puissance réside dans la maîtrise de ces forces subtiles, invisibles mais omniprésentes.
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